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14 MAI 2002
Les travaux de la commission en matière de lutte contre la pédopornographie font suite à une pétition adressée aux sénateurs par le comité blanc « La Main sur le coeur » établi à Couvin.
Ce comité s'oppose à la diffusion sur internet d'images d'enfants abusés ou torturés. Il revendique à raison que les membres les plus vulnérables de la communauté humaine, les enfants, soient protégés contre cette criminalité des plus dommageables. Il est en effet particulièrement révoltant de constater qu'internet, ce canal d'expression et de diffusion mondiale sans précédent, soit utilisé pour inciter à la prolifération de ce phénomène particulièrement abject.
Le comité blanc « La Main sur le coeur » demande aux autorités fédérales de renforcer la lutte contre la pédopornographie sur internet, et que la Belgique promulgue, à l'exemple de nombreux pays, des lois protégeant les personnes traquant sur internet, en vue de les dénoncer aux autorités, des actes de pornographie infantile.
Des actions telles que celle menée par ce comité expriment la réprobation d'une grande majorité de nos concitoyens et constituent un appel en faveur d'une lutte adaptée à cette criminalité. Cet appel s'adresse en premier lieu aux représentants politiques, à l'entourage social direct et à l'ensemble de la société. La sauvegarde et le développement de ces valeurs sont confiés en premier lieu aux représentants politiques. Ceux-ci doivent souscrire avec enthousiasme à la revendication fondamentale de tout citoyen d'assumer sa responsabilité dans le fonctionnement de l'État de droit.
Il convient toutefois de rappeler les droits et devoirs de chacun dans l'État de droit. Les enquêtes policières et les poursuites pénales des actes de pédophilie doivent demeurer des missions exclusives des autorités, mais face aux difficultés de neutraliser d'emblée l'ensemble des techniques utilisées par les pédocriminels sur internet, il est nécessaire de confier aux citoyens eux-mêmes la responsabilité de promouvoir une désapprobation agissante du comportement pédophile, d'opérer un profond changement de mentalité et d'imposer le respect moral de l'enfant.
La législation belge est satisfaisante pour lutter efficacement contre la pédopornographie sur internet, mais le succès de son application dépend de la mise en oeuvre de moyens complexes.
Les recommandations de la commission ont pour ambition de généraliser le refus social de la pédo-criminalité et de promouvoir sur le plan international la contribution que la Belgique pourrait apporter à la lutte contre la pédopornographie sur internet.
Le 5 février 2002, la commission a organisé une audition à laquelle ont participé les personnes suivantes :
Mme Van Bastelaer des Facultés universitaires « Notre-Dame de la Paix » de Namur;
Mme De Keyser, adjointe de Mme Van Bastelaer;
M. Ewbank, adjoint de Mme Van Bastelaer;
M. Goethals, coordinateur pour la « pornographie enfantine » de la cellule « Traite des êtres humains » de la police fédérale;
M. Van Schuylenbergh de Child Focus;
M. Beirens, commissaire, chef de service de la « Federal Computer Crime Unit » de la police fédérale;
M. Verbeeren de la « Federal Computer Crime Unit » de la police fédérale;
Mme Chambon, commissaire principale à la direction nationale de la police judiciaire française;
MM. Beghuin et Kohl, délégués du comité blanc « La Main sur le coeur » de Couvin;
M. Pas, délégué du « Werkgroep Morkhoven ».
Le 23 mars 2002 une nouvelle audition a été organisée à laquelle ont participé M. Beirens (FCCU) ainsi que MM. Beghuin et Kohl des comités blancs.
1.1. Audition de M. Yves Goethals, coordinateur pour la pédopornografie de la cellule « Traite des êtres humains » auprès de la police fédérale; M. Luc Beirens, commissaire, chef de service de la « Federal Computer Crime Unit » auprès de la police fédérale, et M. Serge Van Schuylenbergh de Child Focus
M. Goethals déclare parler au nom du service central de la traite des êtres humains de la police fédérale. Il exposera comment la police aborde la matière « pédopornographie » par l'internet, et le problème en général.
Il commencera par une esquisse succincte du phénomène, pour passer ensuite aux profils des internautes concernés, aux possibilités de la police et à celles du citoyen afin d'y faire face, aux services de police et au suivi des plaintes, aux données relatives au point de contact judiciaire en 2001 et, pour terminer, aux problèmes qui se posent lors des recherches. Tout à fait à la fin, il évoquera encore quelques problèmes pratiques que les services de police belges rencontrent dans la lutte contre la pédopornographie et à l'occasion des contacts avec les services non policiers, qui s'occupent eux aussi de la chasse à la pédopornographie.
La pédopornographie par l'internet passe par plusieurs chemins. Il y a d'abord le courrier électronique, le service postal moderne qui permet aux amateurs de pédopornographie de s'envoyer mutuellement des photos et des messages. Le contrôle en est fort difficile, beaucoup plus que dans le cas de la poste classique. Il y a, en outre, les groupes de nouvelles (« newsgroups »), réunissant des personnes ayant des penchants particuliers et où tous les participants peuvent poster des photos, pour employer leur terminologie. Les photos ne sont accessibles qu'aux membres du newsgroup. On a, en outre, les différents types de sites web. Il y a d'abord les sites d'organisations pédophiles, créés par ceux qui veulent faire une publicité en faveur de leurs activités. Il y a ensuite les sites pédopornographiques typiques, où des enfants sont présentés dans toutes les positions imaginables. Dans les chatbox, des personnes ayant des penchants similaires, en l'occurrence les pédophiles, peuvent parler librement de leurs idées et de leurs sensibilités. On a également la technique plus moderne des vidéoconférences, qui sont utilisées pour échanger des images par l'internet et pour les apporter en quelque sorte directement chez les gens. Enfin, il y a les diverses applications peer to peer, où deux personnes se contentent de bavarder ensemble. M. Beirens illustrera cela par quelques exemples.
M. Beirens, commissaire, chef de service de la « Federal Computer Crime Unit » de la police fédérale, présentera quelques exemples pour donner une idée plus précise de la manière dont son service est confronté à la pédopornographie sur internet. Il présente la reproduction d'un e-mail qu'il a reçu dans sa boîte sans en avoir fait la demande. Son service en reçoit beaucoup chaque jour. Actuellement, un tiers des messages qu'il reçoit ont été envoyés sans demande.
Les mots « incest porno » qui figurent dans ce mail portent à croire que l'on a affaire à de la pédopornographie. Quand on active ce lien, on arrive sur un site web appelé Lolita proposant des films et des photos. Ce site permet également de communiquer avec des jeunes filles et éventuellement de prendre rendez-vous. Ce site précise d'emblée que ces pratiques sont peut-être illégales dans notre pays. Il s'agit du site web d'une organisation pédophile, la « Danish Pedophile Association » qui est présente depuis plusieurs années sur le net mais ne présente pas de photos, ce qui explique que le site n'ait pas été enlevé du web.
Il présente des écrans d'Outlook Express qui permettent d'effectuer des recherches dans les « newsgroups ». Il s'agit de tableaux sur lesquels on peut placer des messages ou des photos. Chacun peut alors rechercher les nouveautés qui se trouvent sur ces tableaux et éventuellement communiquer une réponse. Les sites dont l'adresse contient la mention « .be » sont des canaux ou des groupes concernant la Belgique. En utilisant la mention « alt.sex.p », on arrive sur les sites commençant par « alt.sex.pictures » qui présentent des images sur le sexe, la prostitution, etc.
En utilisant l'option « subscribe », on peut s'abonner à un newsgroup et télécharger des données. On reçoit alors tous les messages ou toutes les entêtes des messages sur son ordinateur. L'extension « .jpeg » indique que des photos sont attachées au message. On peut les télécharger sur son PC. La procédure est tellement simple qu'elle peut être automatisée. En quelques heures, on peut ainsi se constituer une petite collection et en une journée, une grande collection. Cela va assez vite.
En Belgique, on a tenté de limiter le nombre de groupes qui ont une dénomination évidente, à savoir « alt.sex.pedophilia ». On a demandé au providers de ne pas les publier. Si les internautes belges ne se satisfont pas des « newsgroups » que leur offre leur provider, ils peuvent entrer en contact sur internet avec des groupes ou serveurs payants qui précisent explicitement qu'ils ne sont pas censurés et ne gardent pas de trace des auteurs des messages qui y sont diffusés ou des auteurs des recherches qui y sont effectuées. Une personne qui abuse de ce système pour échanger des données pédopornographiques ne peut donc être identifiée.
Beaucoup de personnes s'adressent à nos services et déposent plainte en affirmant avoir été confrontées par hasard à des sites pédopornographiques. Comme il l'a déjà signalé, on peut très bien recevoir des messages sans l'avoir demandé, sur la base du code d'accès dont on dispose chez son fournisseur d'accès. Ce phénomène est appelé « spamming ». Si vous êtes abonné à un newsgroup qui concerne la cuisine, on peut très bien recevoir des images pédopornographiques sans savoir ce qui s'est passé. Quand vous surfez sur internet, vous utilisez des moteurs de recherche, vous encodez un mot clé correspondant à l'information que vous recherchez et vous pouvez éventuellement recevoir dans la liste des réponses, l'adresse de sites web pédopornographiques. Comment cela est-il possible ? Ces sites web sont reliés à des milliers de mots clés, si bien qu'ils répondent à pratiquement toutes les demandes effectuées avec un moteur de recherche. Vous pouvez donc être confronté à des pages (pédo)pornographiques. Une fois que vous êtes entré en contact avec un tel site, il est impossible de le quitter en fermant la fenêtre. En effet, chaque fois que vous essayez de fermer la fenêtre, vous actionnez un script, un petit programme, qui fait défiler toutes les pages pornographiques et vous met en contact avec tous les sites pornographiques présents sur internet. Il faut souvent se déconnecter d'internet pour pouvoir quitter ces sites.
M. Goethals aborde maintenant les profils des internautes concernés. En premier lieu, il y a les personnes qui rencontrent accidentellement de la pédopornographie sur l'internet. Cela peut se produire de diverses manières, notamment par des sites souvent visités par des enfants, entre autres pour y copier de la musique MP3. Au lieu de la musique, ils obtiennent des photos ou d'autres images plutôt hard. Il y a, ensuite, l'internaute curieux, qui entre à l'occasion dans son moteur de recherche les mots pédopornographie, teen ou lolita pour voir quels résultats il obtiendra ainsi. Et il est certain que ces résultats seront nombreux. On a aussi le collectionneur plus actif, qui se met vraiment à la recherche d'un matériel pornographique afin de le stocker pour son usage personnel ou pour l'utiliser dans un cercle restreint. Par ailleurs, le distributeur est une personne qui, en échange d'un autre matériel ou par simple appât du gain distribue un matériel pornographique. Enfin, il y a le producteur de pédopornographie, qui veille à approvisionner l'internet en matériel toujours nouveau.
En tant que service de police, ils tentent de ne jamais perdre de vue que, derrière chaque photo sur l'internet, se cache un enfant qui a été abusé.
Toutes ces personnes travaillent par l'internet, en raison de son caractère anonyme, en raison de ses possibilités de recherche très commodes et très vastes et parce qu'il leur est très facile d'y faire circuler des images mouvantes. Certains en font usage comme d'un moyen pour communiquer très facilement avec d'autres pédophiles, voire avec les victimes, sans devoir faire connaître leur identité. En effet, ils ne se voient pas les uns les autres. L'internet offre également la possibilité de cacher des données dans des sites cachés ou dans des boîtes aux lettres électroniques protégées. Par le truchement de messages électroniques et de groupes de nouvelles, il est également facile d'échanger des photos. Il n'est pas sans intérêt pour les usagers qu'il n'existe pour ainsi dire aucun contrôle policier, en raison de l'étendue considérable du terrain.
Comment réagir à la pédopornographie ? Il est évident qu'une victime peut déposer plainte auprès des services de police ou devant la magistrature. Un témoin peut en faire de même, lui aussi peut se faire connaître auprès de l'un des points de contact. Il existe des points de contact policiers et non policiers. Le plus connu de ces derniers est Child Focus, dont M. Van Schuylenbergh, avec lequel son service collabore de manière intense dans cette matière, va maintenant exposer le fonctionnement.
M. Van Schuylenbergh expose qu'il est le responsable d'un nouveau projet développé à Child Focus. Il s'agit d'un projet de website non policier destiné à recevoir le signalement de personnes qui ont reçu ou rencontré des images ou des mails qu'elles ne souhaitaient pas recevoir. Une des missions de Child Focus est d'être un support actif dans les enquêtes de disparition, d'enlèvement ou d'exploitation sexuelle des enfants. C'est également la prévention et la lutte contre ces phénomènes.
En 2002, Child Focus a confié à la « Katholieke Universiteit Leuven » un travail de recherche ayant pour objet de présenter une radioscopie complète, au plan national, des organisations privées et instances officielles, tant dans le chef de la police que de la justice, dans le but de mieux connaître leur approche face à la problématique de l'exploitation sexuelle des enfants. Un des résultats de cette recherche a été de fournir un aperçu des points de réflexion en matière de répression de la pornographie enfantine. Child Focus a aussitôt mis un groupe de travail sur pied, composé de représentants du BCR, de la « Federal Computer Crime Unit », du Mouvement antipédophilie sur internet (MAPI) de l'Université de Namur, de l'« Internet Service Providers Association » et du cabinet du ministre de la Justice. L'objectif était d'intensifier la collaboration et les échanges d'informations en vue de définir les lignes de force à porter à l'attention des pouvoirs publics.
Le groupe de travail a constaté qu'il était nécessaire de créer en Belgique un point de signalement central non policier où les sites illégaux de pornographie enfantine peuvent être signalés et qui servira de lien entre le grand public, les services de police spécialisés et les universités.
En mars 2000, une campagne de prévention nommée « surf safe » a été lancée. Le but de celle-ci est d'inciter les enfants de 10 à 13 ans à la vigilance face aux dangers de l'internet. À cet effet, une affiche a été créée reprenant sept règles de sécurité. Une large diffusion a été assurée, notamment dans les écoles : une note à l'attention des parents, des enseignants et autres responsables explique l'objet de la campagne. Dans le cadre de la campagne « surf safe », une adresse électronique ([email protected]) a été créée afin de collecter des témoignages relatifs à des abus de nature pédosexuelle sur l'internet et aux plaintes qui s'y rapportent. Child Focus transmet les adresses des sites illégaux de pornographie enfantine vers la cellule Traite des êtres humains. En 2001, nous avons reçu 414 signalements.
En juin 2001, nous avons introduit un projet de hotline « Point central de dénonciation national et non policier » auprès de la Commission européenne dans le cadre de « l'Internet Action Plan » qui a pour objectif la création d'un réseau européen de hotlines, la lutte contre l'utilisation illégale d'internet et qui vise également à donner la possibilité aux citoyens de signaler des dérives.
En quoi consiste ce « point de signalement »? Il s'agit d'un website composé essentiellement de deux volets. Un premier volet regroupe de l'information relative au fonctionnement de la hotline, à la législation, à des articles de presse, à des rapports de conférences nationales et internationales, ainsi que les liens vers les différents sites intéressants et vers le site de la cellule Traite des êtres humains. Dans un second volet, l'internaute pourra anonymement compléter un formulaire de signalement d'un site. Il pourra également transmettre cette information par fax et téléphone ou prendre contact avec la hotline. Il pourra également prendre connaissance d'informations complémentaires sur l'anonymat, le secret professionnel, les suites réservées à sa dénonciation.
Tel qu'inscrit dans notre protocole réglant la collaboration de Child Focus et des autorités judiciaires, en cas de révélation par un tiers d'informations relatives à de la pédopornographie sur internet, Child Focus transmet immédiatement l'information au service Traite des êtres humains de la police fédérale. Ce service accusera réception de l'information dans les 24 heures. Si le service Traite des êtres humains de la police fédérale prend l'information en considération, il en avisera Child Focus par le même procédé en précisant à quelle autorité judiciaire elle a été transmise pour être traitée.
Child Focus mettra sur pied des campagnes de sensibilisation du grand public de manière à faire connaître son site et à inviter les internautes à contribuer activement à la lutte contre la pornographie enfantine sur internet. Le coordinateur du projet participera à différents groupes de travail, tant au niveau national qu'international, de manière à développer l'expertise du centre. Les résultats du traitement des dénonciations et l'expertise développée entre autres dans les groupes de travail permettront la rédaction et l'évaluation d'un guide de meilleures pratiques ainsi que des rapports d'activités qui seront accessibles sur le site.
M. Goethals estime que l'intérêt des points de contact non policiers est que l'on peut y faire un témoignage entièrement anonyme. Cela revêt surtout de l'importance pour les personnes qui hésitent à contacter la police.
Une manière de lutter contre la pédopornographie consiste pour les fournisseurs d'accès à faire preuve d'autorégulation en enlevant ou en bloquant les sites pédopornographiques. En tant que services de police, nous n'apercevons toutefois pas précisément ce qui se passe sur ce point, et nous devons compter en fait sur la bonne volonté des propriétaires ou des exploitants.
Plusieurs services de police s'occupent de la lutte contre la pornographie enfantine sur l'internet. Au niveau national, il y a d'abord la Cellule centrale Traite des êtres humains, qui est chargée en vertu de COL 12/99 de recueillir et de tracer des données concernant la pédopornographie. Il est assisté sur ce point par la Federal Computer Crime Unit, FCCU. À un moment déterminé, une certaine confusion a régné quant à la répartition des tâches entre ces deux services, puisqu'un protocole chargeait également la FCCU de tracer la pédopornographie sur l'internet. Les services ont cependant pu mettre fin, de commun accord, à cette confusion. Au niveau des arrondissements, il y a les équipes régionales Traite des êtres humains de l'ancienne BSR, présentement les SJA et les Computer Crime Units régionales, qui prêtent un soutien technique à ce niveau, tout comme le fait la FCUU au niveau fédéral. Enfin, il y a les corps de police zonaux qui prennent également pour leur compte une partie du travail policier de première ligne en cette matière.
Comment traite-t-on les plaintes ? En recevant une plainte, l'on vérifie en premier lieu sur l'internet si le site concerné répond effectivement à la définition. Si tel n'est pas le cas, la plainte est classée et n'est conservée qu'à titre d'information. Dans le cas contraire, nous tentons de localiser le site à l'aide de la FCCU. Si le site est localisé dans le pays, un procès-verbal est dressé, le cas échéant avec réquisition du magistrat national, et la Cellule Traite des êtres humains en est informée. S'il s'agit d'un site étranger, ce qui est généralement le cas, le pays concerné en est informé par le truchement d'Interpol. L'enquête est poursuivie par les équipes Traite des êtres humains des SJA, en collaboration avec la CCU régionale.
M. Beirens ajoute que, pour qu'il soit bien clair comment se déroule le circuit des informations, il convient en premier lieu de distinguer une victime « abusée » et une « victime témoin oculaire ». La seconde n'a pas subi un préjudice au sens strict du terme; elle est néanmoins victime, par exemple pour avoir reçu régulièrement dans sa boîte aux lettres électronique un matériel pornographique indésiré.
Les services qui s'occupent de la lutte contre la pédopornographie et l'abus des enfants sont, au nouveau national, la Cellule centrale Traite des êtres humains et, au niveau régional, l'équipe régionale Traite des êtres humains et les services locaux de police, qui reçoivent les premières plaintes. Sur le plan technique, ces services bénéficient de l'appui de la FCCU et de la RCCU. Il existe également, bien entendu, une collaboration avec les magistrats à savoir en premier lieu, au niveau fédéral, le magistrat national. Pour chaque dossier concret, se situant en Belgique et localisé dans un arrondissement judiciaire déterminé, il est fait appel également au magistrat de parquet et, le cas échéant, un juge d'instruction est lui aussi requis. Un rôle important dans cet ensemble est évidemment dévolu aux points de contact de Child Focus et aux services de police étrangers, qui apportent, eux aussi, beaucoup d'informations.
Comment une victime peut-elle déposer plainte ? Une victime abusée prend rarement contact par la voie de l'internet; elle se présente en général chez la police locale ou chez les équipes compétentes d'un arrondissement judiciaire. Une victime témoin oculaire peut déposer plainte auprès de plusieurs services, tant auprès de la police locale qu'auprès des équipes régionales et des RCCU ou FCCU. Elle peut s'adresser également aux points de contact non policiers, notamment Child Focus. Dans ce cas, il s'agit de passer rapidement l'information à la Cellule centrale Traite des êtres humains, qui sollicite, le cas échéant, l'assistance technique des FCCU. Ainsi qu'il a déjà été dit, il entre également des plaintes par le truchement des services de police étrangers.
Les informations concernant les sites web, les newsgroups ou d'autres services de l'internet sont passées à la FCCU. Celle-ci vérifie s'il s'agit d'une véritable violation de la loi. Si tel est le cas, l'on tente de localiser la source. Pour une adresse internet en Belgique, ils demandent au magistrat national d'obtenir une réquisition et de pouvoir procéder à l'identification de l'usager concerné. S'ils peuvent identifier l'arrondissement judiciaire où le site est localisé, procès-verbal est dressé sur-le-champ et il est remis au magistrat du parquet ou au magistrat national. Si la source se situe à l'étranger, l'information est passée à Interpol. Si le dossier est terminé, ou dans le cas d'une affaire importante, s'il est toujours en cours, un rapport intérimaire est établi au sein de la FCCU et remis à la Cellule centrale Traite des êtres humains, qui porte la responsabilité finale pour cette matière. La cellule leur prête donc essentiellement un support technique.
Si la Cellule centrale Traite des êtres humains aboutit à des données tout à fait concrètes et si elle peut localiser une source de pornographie, elle transmet le dossier aux services de l'arrondissement ou pays concerné. Des réunions de coordination fréquentes sont organisées avec le magistrat national, afin de vérifier comment l'on peut avancer dans certains dossiers. Le soutien technique de la FCCU y est souvent demandé afin de projeter des actions futures. La police locale qui reçoit généralement les premières informations, remet son dossier au magistrat du parquet; souvent elle contacte aussi l'équipe régionale Traite des êtres humains, qui prête ensuite son assistance pour terminer les dossiers concernés. Ils bénéficient à cet effet de l'appui des RCCU. Si une telle cellule a besoin d'une expertise ou technologie spécifique, elle peut s'adresser à la FCCU. La RCCU dresse toujours un procès-verbal de toutes les opérations.
En ce qui concerne le fonctionnement du point de contact sur internet, qui est intégré dans la « Federal Computer Crime Unit », il présente quelques chiffres pour l'année 2001. Ils ont reçu un peu moins de 12 000 messages. Tous ne contiennent pas des informations vérifiables sur internet. 8 500 messages ont pu être vérifiés. Parmi ceux-ci, ils ont constaté près de 580 infractions, dont 72 en Belgique. 22 de ces 72 infractions commises en Belgique concernaient de la pédopornographie ou de la pédophilie.
Pourquoi sont-ils confrontés à autant de fausses dénonciations ? Dès qu'elles lisent certains termes, comme babe, lolita, sur des sites web, certaines personnes croient avoir affaire à de la pédopornographie. Ces seuls termes les incitent à dénoncer le site, elles ne prennent pas la peine de vérifier ce qu'il en est sur le site web par crainte d'être confrontées à des données ou images pédopornographiques. Ceci explique qu'ils reçoivent autant de dénonciations de sites ne relevant pas de la pornographie enfantine. Certaines personnes dénoncent des sites web concernant la pornographie « normale ». Certains problèmes sont liés à l'âge des personnes présentées sur les sites web ou au caractère pornographique de ces sites. Certaines personnes dénoncent aussi des sites de naturisme, de nudisme ou de photographie d'art, même si la qualification « photographie d'art » nous laisse parfois perplexes.
Pour ce qui concerne la distribution des dénonciations ou des faits de pédopornographies sur les différents pays, c'est surtout aux États-Unis que ces faits se situent. Ils ont reçu 22 dénonciations pour la Belgique.
Sur la base de ses propres constatations et d'informations communiquées par des partenaires étrangers, M. Goethals conclut qu'une quantité énorme de matériel imagé comportant de la pornographie enfantine circule sur l'internet. Le nombre ne peut tout simplement pas en être évalué.
Les collectionneurs et les distributeurs d'un tel matériel sont souvent impliqués également dans l'abus des enfants concernés. L'on a déjà pu constater cela en Belgique aussi. La part de la pornographie enfantine « home made » représente une part importante des sites et des groupes de nouvelles. Tant chez nous qu'à l'étranger, l'on constate que les suspects se présentent comme des membres d'organisations pour la protection de l'enfant. Il suffit de se rappeler l'organisation CRIES des années septante; là aussi, quelques messieurs ayant de toutes autres idées s'étaient infiltrés. Il est significatif que les services qui s'occupent du monitoring de l'internet signalent que chaque semaine paraissent deux visages nouveaux d'enfants abusés. Toutefois, il y a fort peu d'identifications, le nom de l'enfant n'étant évidemment jamais mentionné et, surtout, parce que les producteurs ont recours à des techniques de manipulation de l'image afin de camoufler l'identité.
Quels sont jusqu'à présent les résultats des interventions ? La police constate que sur la partie belge de l'internet l'on ne retrouve guère de sites pédopornographiques. Mais c'est là une assurance relative, puisqu'un habitant de la Belgique peut tout aussi rapidement surfer vers un site espagnol ou russe. Il est fait usage quelquefois de « serveurs infiltrés » pour le stockage et le serveur, dans le but de rendre l'identification plus malaisée. Le nombre de groupes de nouvelles comportant de la pornographie enfantine est quelque peu en diminution ces dernières années, sans doute parce que les services de police y consacrent un peu plus d'attention et que les participants commencent à se sentir en danger. Régulièrement des pédophiles sont arrêtés. Il constate que le cercle des pédophiles est plutôt petit et fermé et qu'il existe de nombreuses connections avec l'étranger.
Le world wide web comporte encore un très grand nombre de sites offrant de la pédopornographie, surtout aux États-Unis et en Europe de l'Est. En ce qui concerne les USA, ce n'est pas tout à fait certain : ce n'est pas parce que le nom « USA » figure dans la dénomination du site web que ce dernier est également domicilié dans ce pays. Il suffit de penser aux serveurs infiltrés. Dans les pays du tiers monde, il existe des groupes de nouvelles non censurés, ce en raison de l'absence totale de services de police. Il est fait grand usage des applications « chat » qui garantissent une plus grande discrétion, et les nouvelles applications sont vite adaptées à la pornographie enfantine.
La pornographie enfantine sur l'internet est un phénomène international. C'est pourquoi la coopération internationale avec des collègues du monde entier revêt la plus haute importance. Les services de police belges pratiquent cette collaboration par Europol et par Interpol. Ils ont des groupes de travail sur la pédopornographie, les ICT-crimes et les computer forensics. Récemment encore, Europol a donné une formation dans les recherches sur ordinateurs à Gand, dans le cadre de la présidence belge. Tant officiellement qu'à titre officieux, il existe un réseau de contact auquel les services de police belge sont affiliés. Enfin, il y a le point de contact permanent FCCU et une combinaison est projetée de magistrats spécialisés et de services de police.
L'on distingue des actions proactives et des actions préventives. Par travail proactif, il faut entendre l'approche sous forme de projet, sous la surveillance d'un magistrat. À cette occasion, des contrôles sont effectués chez les services internet, sous la forme d'une recherche orientée sur des services déterminés pendant une période déterminée, et en ce qui concerne spécifiquement la population belge. L'objectif consiste à identifier des auteurs belges, de manière à permettre à nos propres services judiciaires et policiers de poursuivre le travail. En ce qui concerne les actions préventives, de plus amples informations seront sans doute fournies tout à l'heure par le MAPI. Il s'agit avant tout d'éduquer les usagers de l'internet et entre autres d'apprendre aux parents et aux enfants comment se comporter en face de l'internet. La FCCU de son côté adresse à l'ISPA des listes de newsgroups indésirables, avec la demande de les retirer de l'internet. Enfin, nous tentons de répandre les systèmes filtrants qui, sous forme de logiciels, bloquent certains sites web, les « verrous pour enfants ». En ce qui concerne les identifications mêmes, il passe la parole à M. Beirens.
M. Beirens expose que l'objectif du FCCU consiste à apprendre qui se cache derrière certains délits. Afin de pouvoir identifier les personnes et les ordinateurs opérant sur l'internet, ils ne peuvent s'orienter que d'après les traces qui sont conservées par les opérateurs de télécommunications ou les fournisseurs d'accès. Ces données ne sont pas disponibles dans certains pays, faute d'une obligation de les conserver, ou alors, elles ne sont conservées que pendant une courte période. En général, il s'agit d'en faire usage très rapidement. Il est vrai qu'une directive européenne est en voie d'élaboration, il se peut même qu'elle déjà ait été édictée, pour contraindre les opérateurs télécom et les fournisseurs d'accès à effacer ou rendre anonymes ces données dès qu'elles ne sont plus requises à des fins de facturation ou de marketing. C'est cela qui aura la plus grande répercussion sur les opérateurs offrant des abonnements avec un « flat rate », par exemple télénet ou ADSL. Toutes ces données sont alors rendues anonymes ou effacées. Une exception est permise pour chaque pays, qui obtient ainsi l'occasion de régler lui-même cette matière. Il s'ensuit qu'au lieu d'une harmonisation, il y aura dans chaque pays un autre régime quant à la nature des données à conserver et aux délais. Dès lors, l'industrie ne parviendra pratiquement plus à suivre. Certains sites distribuent également des programmes qui ont pour but d'effacer les traces : lorsqu'un internaute ferme sa dernière fenêtre, il reçoit un « privacy alert », un message lui signalant qu'il a été détecté et que, désormais, il serait préférable d'utiliser un « tool » afin d'effacer ses traces. S'il le fait et s'il utilise le « tool », il sera désormais d'autant plus difficile aux services de police de récupérer sur son poste de travail des traces de la transaction suspecte.
Les services de police constatent également que les distributeurs de pédopornographie deviennent de plus en plus organisés, qu'ils commencent à élaborer certaines méthodes pour rester impunis au cas où ils seraient pris. C'est ainsi qu'ils rendent le matériel sur les disquettes temporairement et totalement inaccessible. S'il y a une descente sur les lieux, le suspect raconte qu'il a reçu les disquettes d'une autre personne mais a immédiatement effacé le contenu, dès qu'il s'est rendu compte que le matériel qu'elles contenaient ne lui plaisait pas. Entre-temps, une telle personne conserve souvent des centaines de disquettes ordinaires et ZIP, dont il peut être inféré avec certitude qu'elle s'occupe de pornographie enfantine.
À cette occasion l'orateur veut également aborder quelques problèmes pratiques dans ses propres services. À l'heure actuelle, douze seulement des vingt-huit emplois de la FCCU sont occupés. Toutefois, dans un très proche avenir il s'attend à une extension des effectifs. Plus de personnes ils peuvent occuper au point de contact et dans la section de recherche internet, plus il sera possible de procéder à des enquêtes proactives dans leur propre domaine de recherche, la partie belge de l'internet. Ils doivent parvenir, en matière de lutte contre la pornographie enfantine, à pouvoir faire tout ce qui tombe dans la souveraineté de la FCCU et dans les compétences de la police et de la justice. Ce n'est qu'à ce moment là qu'il leur sera possible de faire leur devoir. Si chaque pays de l'Europe procède de la sorte, ils seront déjà bien plus avancés pour entraîner d'autres pays également.
Il a constaté que le budget de la RCCU (Regional CCU) ne dispose pas, pour l'heure, de moyen suffisants pour acheter le matériel de recherche, devant permettre de travailler d'une manière intègre lors de l'analyse des ordinateurs de pédophiles. La loi sur la criminalité informatique interdit, par exemple, à la police de modifier des données. Avec les moyens dont ils disposent à l'heure actuelle, ils ne peuvent pas toujours garantir qu'il en aille ainsi. Ils seraient déjà bien plus avancés s'ils disposaient de logiciels pour le traitement automatique des messages sur le réseau. Les logiciels ad hoc existent, il suffit de les acheter.
Ils doivent éviter à tout prix que plusieurs pays ne se lancent dans les mêmes recherches sur les mêmes sites web. Cela peut être évité par l'installation d'une équipe de dispatching, qui ne passerait les sites web suspects aux services techniques d'un pays qu'après avoir déterminé avec la plus grande précision où ce site est localisé. Il en résulterait une économie considérable et cela leur permettrait de mieux investir dans la recherche proactive et de faire une recherche plus dirigée sur les auteurs en Belgique.
M. Goethals tient à consacrer quelques mots aux problèmes des services non policiers. D'abord, il existe une imprécision considérable quant aux objectifs de ces organisations. Il y en a qui fonctionnent fort bien et travaillent en étroite collaboration avec les services de police. Toutefois, il en existe aussi à propos desquels l'on ne peut que deviner de quoi ils s'occupent vraiment. La question est souvent aussi de savoir qui travaille dans ces organisations. Les services de police constatent parfois que l'organisation ne fait rien de plus que tenir à jour une banque de données d'images pédopornographiques, dont il n'est rien fait d'autre. Ces organisations demandent aux utilisateurs de l'internet qui trouvent du matériel pornographique sur le net, de le leur transmettre, bien souvent elles font même une publicité trompeuse en étalant une prétendue collaboration avec les autorités. De cette manière, elles assemblent de grandes quantités de matériel pornographique.
Un autre problème est constitué par les infractions pénales commises par un service non policier, par exemple, la possession, l'importation et l'exportation de pédopornographie. Selon la loi belge, il s'agit là chaque fois de faits punissables. Même les services policiers ou les agents individuels qui se lancent dans une enquête de leur propre chef doivent très bien s'en rendre compte. Il est déjà arrivé que tout leur matériel ait été saisi et confisqué.
En Belgique, la provocation est interdite à tous, ce certainement quand il s'agit de services policiers. Si un citoyen se met à naviguer sur l'internet et tente d'y provoquer l'envoi d'une image vers son adresse, cela ne leur est d'aucune utilité et ils ne peuvent jamais s'en servir à titre de preuve.
De même, le stockage de données concernant des suspects par les services non policiers est interdit, puisque cela est contraire à la loi sur la protection de la vie privée.
Une dernière question concerne les services non policiers : qui en contrôle les membres et les résultats ? Qui se fait membre ? Ces gens sont-ils bien de bonne foi ? Qu'est-ce qu'ils font des résultats ? Contribuent-ils à la solution générale du problème ? Les organisations sont-elles prêtes à collaborer avec la police ? Bien souvent, elles prétendent collaborer avec les autorités, mais cela appelle un grand point d'interrogation.
1.2. Exposé de Mme Chambon, commissaire principale à la direction nationale de la police judiciaire française
Mme Chambon expose qu'elle est l'équivalente de M. Beirens puisqu'elle est chef de l'Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication à Paris. Elle a une compétence nationale. Le dispositif qu'elle présente est extrêmement parcellaire puisqu'il est beaucoup plus fermé que celui que vient de nous présenter M. Beirens.
La démarche française a été la suivante depuis deux ans : sentir que le surf sur internet donnait lieu à des mécontentements de la part des citoyens, mécontentements relayés partiellement par des associations, dont la plus connue en France est l'association « Le Bouclier ». Les pouvoirs publics, notamment le secrétariat d'État à la Protection de l'enfance, le ministère de l'Intérieur et le ministère de la Justice, ont pris peu à peu en compte ces problèmes. À l'issue de cette réflexion, il a été décidé de concrétiser le point de contact national de dénonciation des sites pédophiles sur internet. Ce point de contact joue un peu le rôle de Child Focus et celui de la FCCU, si ce n'est qu'ils font tout en même temps. Il n'existe pas de hotline civile. Les gens sont libres de dénoncer les faits sur le site d'associations mais il n'existe pas de lien institutionnel entre ces associations et les services de police.
La France a abouti à la création d'une adresse internet au niveau du gouvernement. Elle est accessible à tout internaute qui utilise un moteur de recherche et recourt à quelques mots clés. Ce site offre, outre des explications de droit et des conseils adressés aux parents et/ou enfants, la possibilité de téléphoner directement à des associations pouvant relayer une détresse ponctuelle et de faire un signalement en ligne sur un formulaire où l'identité peut être renseignée mais qui peut aussi rester anonyme. Ces signalements arrivent directement dans son service. C'est un phénomène assez nouveau puisque ce site a été mis en place le 9 novembre 2001.
Néanmoins, les quelques chiffres qu'elle soumet sont révélateurs de l'attente que pouvait éprouver le public, désireux de pouvoir dénoncer ces pratiques. Du 9 novembre au 9 décembre, ils ont reçu 230 signalements. Du 9 décembre au 9 janvier, 440 et, du 9 janvier au 31 janvier, 670. Sur ces signalements, le pourcentage de signalement de sites véritablement pédophiles ils sont malheureusement obligés de restreindre cette notion, ne serait-ce que pour des questions de qualification pénale n'est que de 10 %, ce qui est déjà énorme.
Les sites signalés sont vérifiés quant à la crédibilité et véracité du signalement et au caractère pédophile du site. Ils sont ensuite versés dans une base de données c'est peut-être là que se situe l'originalité qui permet de vérifier en temps réel toutes les redondances de signalements et, pour chacun d'entre eux, de vérifier le suivi judiciaire, de sorte que celui-ci soit accessible aux autres administrateurs de la base de données. Ceci est en cours de développement.
La police française affronte sans doute la même problématique que la police belge : l'immense majorité des sites se trouvent dans des pays étrangers. Il serait satisfaisant de pouvoir agir chez soi et de pouvoir sécuriser l'internet chez soi. Malheureusement, la plupart de ces dénonciations se traduisent par l'envoi de télégrammes à Interpol pour qu'elles soient répercutées dans les pays où sont situés les hébergeurs. Sur l'ensemble des signalements faits, ils n'ont reçu aucune réponse des autorités étrangères. Celles-ci ne sont en général pas frontalières de l'Hexagone. Ce sont des destinations Outre-Atlantique ou plein Est.
Elle pense que cela pose un véritable problème en termes de prise en compte au niveau international. Cela l'amène à se demander sur quel niveau ils vont travailler. En effet, la cellule de signalement ne fait qu'enregistrer et vérifier des redondances et adresser aux autorités compétentes les informations à exploiter. Ils ont deux possibilités qu'ils exploitent au mieux des moyens qui leur sont alloués elle parle pour les autres services de police et non plus pour le sien : la traque des internautes pervers, qui ont tendance à collectionner des images que la morale et la dignité réprouvent, et l'action en amont qui est beaucoup plus difficile à organiser car elle nécessite une véritable coopération internationale qui, si elle est en préparation, n'est pas encore totalement avérée, visant à identifier avec certitude les victimes et les auteurs qui figurent en clair sur les images circulant librement sur internet. Cette double possibilité d'action donne un intérêt assez majeur au processus qu'a développé la FCCU, notamment avec Child Focus et la base de signalement internet qu'on peut trouver en France. En effet, il s'agira, à un moment donné, de regrouper, ainsi qu'il a été proposé, ces informations nécessairement redondantes au niveau international, dans des bases de données qui seront en mesure de vérifier les photos, d'identifier les lieux et les personnes, qu'il s'agisse des auteurs ou des victimes.
Pour ce qui est des enquêtes diligentées en France, ils ont deux sortes d'hypothèses. Il y a, d'une part, les dénonciations venant de pays étrangers. Son service participe à l'enquête puisqu'il s'agit de chercher la trace sur ordinateur de connexions, de collections ou même d'effacements qui sont généralement révélateurs de certains comportements chez les internautes. En aucun cas, ils ne traitent de la pédopornographie en titre. Ils ne sont là que pour l'assistance technique. L'autre aspect consiste, à partir d'un signalement venant d'une autorité étrangère, à cerner au maximum l'araignée française des internautes et à communiquer ces renseignements aux services opérationnels en charge de la lutte contre la pédopornographie. C'est une rationalisation qu'ils s'efforcent de mettre en place. Elle le rappelle, le dispositif est très neuf. Il est appelé à être rapidement débordé par la quantité des signalements. Quand bien même ils disposent d'un effectif assez important et, contrairement à son collègue dont elle comprend les doléances, des matériels à la pointe du progrès grâce au budget important dont ils ont été dotés, il ne faut malheureusement pas s'abstraire de la collaboration. À cet égard, elle remercie la commission d'avoir proposé à la police française d'exposer un dispositif particulier qui n'est que le calque légèrement différencié du dispositif belge. En effet, elle pense qu'à un moment donné, la lutte ne pourra être efficace que grâce à une collaboration entre les pays européens d'abord, puis à une collaboration avec les pays hébergeurs, dont les principaux sont toujours les mêmes : les États Unis, la Russie et quelques pays de l'Est qui, de manière générale, restent en défaut de répondre aux dénonciations.
La cellule de signalement qui est installée à l'Office n'a donc pas compétence à agir opérationnellement. L'action opérationnelle est confiée à deux autres structures françaises. L'une d'elles est la Division nationale de répression des atteintes aux personnes et aux biens. Contrairement à la Belgique, cette instance ne traite pas de la lutte contre la traite des êtres humains. C'est un service à part qui se charge surtout de la lutte contre la prostitution non enfantine. Ces instances seront dotées à terme d'une base de données et disposent déjà d'un logiciel de reconnaissance de caractères et d'images qui leur permet de vérifier les différentes photos circulant sur internet. La quantité des sites est telle qu'on ne peut imaginer que ces dossiers et images ne soient traités qu'au niveau national. Elle croit qu'Interpol développe un projet qui devrait s'étendre très rapidement visant à regrouper ces signalements et à faire un travail d'appréciation d'images et de recoupement d'images. Le système français, si on suit les impulsions précédentes données par le nombre croissant de signalements, se dotera, à l'échéance 2002-2003, d'une base de données qui permettra, en corollaire des signalements, de prêter des images concernant des dénonciations faites en France.
1.3. Discussion
La présidente signale que le volet international avait déjà été abordé en Russie quand la commission a rencontré des membres de la police de la ville de Moscou. La commission y a été reçue et a constaté que ce service de police a réussi à devenir le spécialiste de cette matière et à en assumer la responsabilité. En tant que membre de l'International Centre for Missing and Exploited Children (le comité américain) elle s'y rendra la semaine prochaine avec le patron de Child Focus. Elle croit qu'il est possible de faire apparaître dans le rapport les personnes et services qui essaient de combattre le phénomène au niveau international. Ils ne sont pas si nombreux. Il faudrait donc insérer dans le rapport un volet international, en s'inspirant essentiellement des données russes. Les Russes sont demandeurs d'un échange de lettres permettant de travailler très rapidement, dans l'heure, dès qu'un site est identifié.
Mme Chambon répond que deux types de problèmes se posent à cet égard. Il y a effectivement la capacité qu'ont les services à être proactifs entre eux et à agir sur sollicitation réciproque. Mais, en toute hypothèse, la validité juridique des informations est totalement subordonnée à un circuit judiciaire beaucoup plus long et qui, selon les pays, est assujetti à l'organisation même du bureau d'Interpol. On a parfaitement conscience que dans certains pays, comme la Russie, voire les États-Unis d'Amérique, le circuit d'Interpol est extrêmement difficile à maîtriser. Il y a une lenteur à laquelle s'ajoute, en général, toute la technique d'acquisition de la preuve prévue par la procédure des pays sollicités. Les obligations de certains pays comme la Belgique ou la France vis-à-vis des fournisseurs d'accès commencent à être extrêmement bien réglementées. Ce n'est pas nécessairement le cas dans d'autres pays qui ont une politique d'effacement officielle telle qu'on ne peut se satisfaire d'un circuit lent ou normal ou judiciairement admis.
M. Verreycken tient d'abord à féliciter le personnel du Point de contact. Il y a deux mois, sa fille découvrit à l'occasion d'une tâche scolaire un site pédopornographique sous le lien « Viking ». La chose ayant été signalée, ce site avait déjà disparu une heure plus tard.
Il a quelques questions concrètes. La police contrôle-t-elle les chatbox ? En chat 2B, par exemple, il y a beaucoup de jeunes de 10 à 12 et de 12 à 14. Bien des pédophiles visitent ces sites sous des noms d'emprunt.
Les groupes de nouvelles sont accessibles à tous. L'on peut aussi, après coup, en faire disparaître les traces sur son ordinateur. La police conseille aux fournisseurs d'accès de ne pas présenter certains groupes de nouvelles. C'est ainsi que, depuis un an et demi, les sites « pedofilia » ont disparu. La police conseillet-elle effectivement les fournisseurs d'accès, ou ceux-ci pratiquent-ils l'autorégulation ?
Que fait la police contre le « spamming » par courrier électronique ? Si l'on recherche, par exemple, des informations sur la pornographie enfantine, l'on reçoit immédiatement un tas de messages électroniques présentant des enfants. Il y a deux ans, il a vécu la même chose après un débat au Sénat. Il est très difficile de se servir du « opt out » de la plupart de ces diffuseurs. Si l'on obtient l'information et l'on a recours à l'option « opt out », l'on se retrouve avec une boîte aux lettres électroniques qui déborde. Cela a été fait tout à fait consciemment. La police s'est-elle déjà concertée avec les fournisseurs d'accès afin d'agrandir de telles boîtes aux lettres électroniques aux frais du diffuseur ?
Y a-t-il déjà eu un échange d'idées avec la section européenne de Microsoft ? Microsoft investit des montants inconcevables dans toutes sortes de programmes destinés à promouvoir l'accessibilité de l'internet. Il dispose également d'un simple programme hobbyiste, trace route, permettant de contrôler l'origine d'un message. Il doit dès lors être possible pour Microsoft de concevoir un programme, permettant par exemple de contrôler la porte FTP. Chaque site a été offert à un moment déterminé. Cette porte FTP doit, certes, être publique par le truchement d'un programme, ce qui permet de découvrir qui en est le diffuseur.
Mme Thijs demande aux policiers s'ils ont des contacts avec des organisations qui s'occupent de rechercher la pédopornographie. Ou attendent-ils d'être contactés par elles ? Les services de police contrôlent-ils ce qu'elles font ?
Il y a quelque temps, un après-midi internet fut organisée au Sénat, à laquelle assistait ISP. Il fut déclaré à l'époque que les informations sont conservées pendant douze mois. Il interviendrait un nouvel arrêté royal qui déterminerait pendant combien de temps les données doivent être conservées. Si l'on déclare dès maintenant que tout a disparu après un mois déjà, comment cela se conjugue-t-il avec le fait que l'on conserve tout pendant douze mois ? Il existe donc une contradiction entre ce que disent les gens d'ISP et ce que dit la police.
Mme Lizin demande aux policiers si le matin quand ils vont travailler, ils se mettent à la recherche de sites. Y a-t-il des personnes qui surfent des heures durant sur internet pour trouver des indications ?
Le général Ivanov a pris en charge la police de Moscou. Il est formellement demandeur d'une collaboration étroite. Ceci se trouve dans une note que la commission a élaborée à l'issue de son voyage. M. Franssen a été mis au courant. Les experts en ont-ils été informés ? Comment expliquent-ils que l'on n'avance pas dans la collaboration avec la police de Moscou ?
M. Malmendier constate des différences entre la police belge et la police française. Au départ, en France, une action a été menée par des associations et des particuliers qui ont relayé la problématique vers les autorités. Cette pratique se poursuit. Elle permet d'alimenter un pool d'informations servant de base aux recherches.
Mme Chambon répond qu'effectivement, au départ, il y a eu une initiatieve de la société civile; elle a été reprise par les pouvoirs publics parce que certains signalements devaient vraisemblablement Child Focus était également de cet avis arriver sur des sites d'associations qui n'avaient pas le lien institutionnel nécessaire pour mener une action; elles pouvaient développer un certain nombre de stratégies, mais l'action policière n'appartient qu'à la police et à la justice. Ce mouvement de dénonciation a été repris par les internautes et a glissé vers le site de signalement de la police, totalement transparent car particulièrement anonyme, parfois. Elle ignore si les associations ont des signalements marginaux par exemple par rapport à celles de France, mais elle sait que l'association Le Bouclier a mis l'adresse de la police en lien direct sur son site, de sorte qu'il suffit de cliquer à cet endroit pour revenir sur leur site. C'est un lien pratique hypertexte assez efficace : tout arrive sur la boîte aux lettres. Elle a voulu vérifier ce qu'il en était des signalements : elle s'inquiétait des doublons possibles au niveau de différentes forces de police. Depuis le 9 novembre, date de la mise en place de cette base, celle-ci a reçu 23 signalements de la gendarmerie locale. Le reste a directement glissé sur le site. Il y a un réel effet de centralisation; le système a l'air de fonctionner; chacun joue son rôle.
M. Malmendier aimerait que l'on définisse l'impact du secteur privé sur la lutte contre la pédophilie. Il ne parle pas tant d'une association telle que Child Focus, semi-institutionnelle, que d'associations privées telles que des comités blancs qui souhaitent offrir certains services. Cette solution est-elle efficace ? On se rend compte en effet que les moyens techniques à mettre en oeuvre sont de plus en plus sophistiqués, les pédophiles utilisant des technologies de plus en plus sophistiquées. Il arrivera un moment où le simple quidam qui possède un petit ordinateur, n'aura pas de logiciels assez performants.
Mme Chambon indique que c'est tout un pan de la réflexion. Elle peut parler que de ce qui concerne le signalement. Il y aurait certainement beaucoup à dire sur le traitement, le rapport entre associations et services de police en charge de la lutte contre la pédopornographie. Elle ne pense pas que l'on puisse exclure totalement ni le pouvoir public ni le secteur privé. Elle ne peut qu'exprimer un sentiment à cet égard, donc, rien de très professionnel : elle pense que les services belges qui ont un vécu à peu près identique au leur pourraient exprimer cette part du secteur privé ...
Mme De Schamphelaere croit avoir compris que la police se concentre également sur la recherche des auteurs, des producteurs, des diffuseurs. Recherche-t-on également les victimes et y a-t-il déjà eu des succès de ce côté ? Les enfants abusés ont-ils été contactés ? Les parents demandent de plus en plus des systèmes de filtrage pour leur ordinateur familial. Ne pourrait-on pas envisager un système de filtrage à l'échelle mondiale, empêchant les diffuseurs de présenter encore quoi que ce soit ?
Mme Lizin a une autre question en ce sens : s'agit-il d'enfants en chair et en os ou d'images de synthèse ? Y a-t-il deux types d'images ?
Mme Van Riet demande comment l'on peut intervenir contre les producteurs. En effet, ceux-ci sont principalement établis aux USA.
M. Beirens répond que ses services ne contrôlent pas, pour l'heure, les chatbox. Un projet a été développé en collaboration avec la cellule Traite des êtres humains de la « Federal Computer Crime Unit ». Dès que le cadre du personnel de la « Computer Crime Unit » aura été adapté, l'on lancera un projet sous le contrôle du magistrat national. En effet, ils ne peuvent procéder sans plus à un scanning permanent des chatbox. Ils travailleront avec une mission spécifique pour une période déterminée, dans le but d'identifier un nombre d'objectifs en Belgique. Ensuite, le travail sera poursuivi par arrondissement. Par le passé, ils ont déjà suivi quelques dossiers, mais ce fut chaque fois sur plainte. Ils n'ont jamais procédé eux-mêmes à un monitoring.
Il est très difficile de déterminer quels groupes de nouvelles doivent être bannis. Ils transmettent régulièrement de nouvelles listes à l'ISPA, qui les communique ensuite à ses membres. Toutefois, tous les fournisseurs d'accès ne sont pas affiliés à l'ISPA. La plupart des fournisseurs d'accès réagissent, d'autres présentent encore les groupes, mais sans admettre des images. Ils constatent dès lors une réduction des endroits évidents où l'on peut chercher de la pornographie enfantine.
L'on ne peut pas faire grand-chose contre le spamming par courrier électronique. Il est exact que la méthode opt out n'est pas efficace. Elle peut même produire l'effet inverse, dès lors que l'on communique son adresse électronique. Les diffuseurs examinent la structure du message électronique. Par le truchement de cette structure, l'on peut envoyer partout des messages électroniques sans connaître effectivement l'adresse électronique. En cas d'utilisation de l'opt-out, un message électronique est envoyé aux diffuseurs, mentionnant effectivement l'adresse électronique. De ce fait, l'on aboutit dans leur banque de données. Aucun contrôle n'existe à ce sujet. Pour autant que l'on puisse identifier les boîtes aux lettres électroniques, celles-ci s'avèrent généralement être situées à l'étranger. En Belgique, de telles personnes n'ont encore pu ni être démasquées, ni interpellées.
Ils n'ont pas beaucoup de contacts avec la section européenne de Microsoft. Bien des programmes à l'intention des services de police sont en voie d'élaboration. Au Danemark, par exemple, il est fait usage d'un système permettant un suivi intégré complet de tout ce qui entre au point de contact. L'utilisateur de l'internet peut compléter un formulaire comportant les données relatives au site web. Ce formulaire arrive au serveur du service de police et celui-ci va charger automatiquement le site web et en faire lui-même une évaluation. De ce fait, le travail du rechercheur se trouve allégé, ce qui permet de mieux utiliser les effectifs du personnel. Quant à eux, ils utilisent des programmes tels que trace-route pour identifier les gens. Le logiciel existe. Il faut évidemment disposer de personnes capables de l'utiliser et qui connaissent bien également l'architecture et le protocoles de l'internet, surtout parce que l'on travaille généralement en étapes.
De temps en temps, ils reçoivent des notifications d'autres groupes, tels que MAPI et Child Focus. Parfois ils découvrent aussi des groupes sans contact aucun avec les services policiers. Récemment, ils ont découvert un tel groupe qui utilisait le logo de la police et faisait état d'une collaboration de la province d'Anvers. La seule chose que faisait ce groupe était de recueillir des ragots pour les publier sur l'internet. Ils y ont immédiatement réagi. Quel est l'objectif de ces personnes ? Elles demandent de transmettre toutes sortes de plaintes, mais n'ont aucun contact avec les services de police. Pour ces derniers, la collaboration est difficile s'ils ignorent l'existence de ces groupes. Ils sont disposés à collaborer avec des points de contact déterminés qui sollicitent une coopération, pour autant que la possibilité de la communication anonyme subsiste. Tel est le véritable sens de ces points de contact civils. Sinon, que feraient ces points de contact des informations ? Ils sont sans impact sur le restant de la situation, ce qui cause des problèmes pour la police.
Mme Thijs demande avec combien de groupes ils ont des contacts.
M. Beirens précise qu'il s'agit de trois groupes.
Mme Leduc estime qu'il doit absolument y avoir une possibilité d'« épurer » ces groupes. Elle craint que bon nombre de ces groupes ne recueillent des informations par des procédés malhonnêtes. L'intention doit être d'avoir des points de contacts anonymes mais des personnes ne peuvent s'abriter derrière ces organisations.
Mme Lizin demande à la police s'ils ont des contacts avec des comités blancs.
M. Beirens répond qu'il a déjà été en contact avec un comité blanc, mais qu'il ne s'agissait pas d'un contact profitable. Il a fallu ouvrir un dossier contre une personne de ce comité, qui s'occupait jour et nuit de recueillir et de répandre de la pédopornographie.
Il s'agissait de quelqu'un qui travaillait comme membre de la direction du comité blanc concerné. Il ne faut certes pas mettre tout le monde dans le même sac mais il faut prévenir une telle situation. Dans l'exposé introductif, il a fait mention d'organisations pour la protection de l'enfance. Mais il existe encore d'autres organisations, comme Foster Parents Plan et l'Unicef. Dans toutes ces organisations, il y a des personnes qui s'occupaient de cela. Il est très difficile d'exercer un contrôle effectif sur de telles activités. Il a peur de l'impunité.
Mme Lizin demande si, à l'heure actuelle, la police travaille en toute confiance avec eux sur cette question.
Mme Thijs est d'avis que les comités invités feraient mieux de sortir du moment que de telles questions sont évoquées.
M. Beirens souligne que la loi sur la criminalité informatique impose aux fournisseurs d'accès et aux opérateurs télécom l'obligation de conserver les données pendant douze mois. Un arrêté royal doit être promulgué, au sujet duquel la Commission de la protection de la vie privée a émis un avis, et qui déterminera quelles données doivent être conservées et pendant quel délai. Selon la loi, ce délai est donc d'au moins douze mois. Certains ISP signalent que l'arrêté d'exécution n'existe pas encore et que la loi ne peut dès lors être appliquée. Telenet Vlaanderen en constitue le principal exemple. Elle ne conserve pas de données. Après deux semaines, l'on n'y a plus de données du tout.
Mme Thijs signale que les fournisseurs d'accès disent que la conservation de toutes ces données est trop coûteuse. Ils demandent des subventions des pouvoirs publics à cet effet.
M. Beirens croit volontiers que cela est coûteux. Pourtant, il faut relativiser les choses. En Grande-Bretagne, il a été calculé qu'il faut conserver 30 CD-roms par jour en données. Certaines personnes exagèrent afin de se soustraire à l'obligation. En effet, cette activité n'est pas lucrative. Par analogie avec l'arrêté royal d'exécution de la loi sur les écoutes téléphoniques, l'arrêté royal à édicter accorderait des indemnités déterminées pour certaines demandes de données ou services adressées aux opérateurs télécom ou aux fournisseurs d'accès. À l'étranger, sauf en France, il n'existe aucune règle fixe quant à la période pendant laquelle les données doivent être conservées. C'est ainsi qu'aux États-Unis, il n'existe aucune garantie. Il y existe des fournisseurs d'accès qui prétendent ne plus disposer des données après trois jours. Même de la part des pouvoirs publics la police fédérale reçoit rarement des réactions aux messages qu'elle envoie. À la question d'un membre concernant leur travail proactif, il répond qu'eux-mêmes, ils ne recherchent pas de sites web suspects. À l'heure actuelle, ils reçoivent tellement de notifications qu'ils n'ont pas le temps de s'en occuper avec leurs effectifs réduits.
M. Goethals signale qu'en ce qui concerne la coopération avec la Russie, son supérieur s'est rendu dans ce pays en septembre. Il y a eu des contacts avec les services de police. Il en est apparu que les Russes veulent bien coopérer mais uniquement pour des dossiers individuels. Si la police belge a un dossier avec des suspects présentant des liens avec la Russie, elle peut le transmettre et les Russes sont disposés à collaborer. Ils sont disposés également à écouter nos informations en matière de dossiers individuels. Mais ils ne veulent pas diffuser sans plus des informations, surtout en raison de la pénurie de personnel disposant d'une formation technique suffisante.
La Cellule Traite des êtres humains de la police fédérale est un service très ouvert à la collaboration avec d'autres groupements, même non policiers. Il collabore très utilement avec Child Focus et avec MAPI. Ils peuvent se faire mutuellement confiance et savent ce qu'ils font respectivement. Ils se communiquent mutuellement des données. Ils sont également disposés à collaborer avec d'autres personnes, à condition que celles-ci se présentent avec un programme ouvert. Ils n'ont que faire de groupements qui ne sont pas clairs à leur propre sujet. Si tout le monde va prendre des initiatives de son propre chef, il en résultera une énorme diversité dans les techniques. Il se demande si l'objectif final s'en trouve servi.
La recherche de victimes constitue le souci principal. Il signale toutefois un seul incident regrettable. Il y a trois ans s'est déroulée la grande opération « Cathedral » des Anglais, dont il est résulté des visites domiciliaires dans le monde entier. Parmi les cent mille victimes découvertes, 27 seulement ont pu être identifiées. Cette identification reste fort difficile, puisque l'on a affaire à des visages d'enfant. Les photos ne sont pas toujours de bonne qualité. Ces enfants peuvent se trouver partout dans le monde. Les « studios » utilisés sont généralement tout à fait impersonnels. La police tente d'utiliser tous les éléments des photos, par exemple une revue, un billet de loterie ou la marque d'une montre, ne serait-ce que pour déterminer le pays où la victime se trouve. Elle fait appel également à des scientifiques et utilise aussi la composition du visage afin de déterminer la race. Mais l'information selon laquelle « l'enfant provient vraisemblablement d'Inde ou du Pakistan » ne nous fait pas avancer d'un pas dans l'identification de l'enfant.
Pour les banques de données de photos, ils travaillent avec un système suisse qui est géré par Interpol, dénommé Excalibur. Par comparaison de photos, il est capable d'extraire des visages similaires de certaines collections. Si, par exemple, l'on a identifié ici en Belgique une victime photographiée dans une chambre déterminée, cette photo se trouve dans la banque de données d'Interpol. Tout autre État membre d'Interpol peut envoyer à Interpol une photo du même enfant, dont la genèse n'est pas connue. Il peut dès lors être procédé à une comparaison. Cela permet un échange de données. Pour la Cellule Traite des êtres humains une demande a été introduite afin d'instaurer un système similaire. En effet, ni Interpol ni Europol ne peut tenir à jour un nombre de données aussi énorme. Le service belge ferait dès lors office de filtre et consulterait d'abord ses propres fichiers avant de transmettre les données aux organisations internationales.
Il ne se pose pour eux aucun problème en matière de photos d'art, grâce à des directives claires et nettes par le truchement de COL 12. Il y est clairement spécifié ce que sont la pédopornographie et la pornographie en général. En cas de doute leur interprétation se fait toujours au détriment de l'auteur.
En ce qui concerne la localisation des auteurs, beaucoup de sites sont établis aux USA, ce qui n'implique pas que tous les diffuseurs, ou bon nombre d'entre eux, se trouvent dans ce pays. Les techniques modernes permettent à l'auteur de se trouver par exemple à Amsterdam et de pratiquer la diffusion dans le monde entier par le truchement d'un serveur aux USA. Cela ne facilite pas la recherche de l'endroit où se trouve le diffuseur.
Mme Van Riet demande si la police peut intervenir à ce propos.
M. Goethals explique que, lorsqu'ils sont en mesure d'identifier quelqu'un, ils transmettent cette information aux services de police étrangers par le truchement d'Interpol. Ils décident souverainement ce qu'ils font de l'information.
Mme Lizin demande s'ils le font directement.
M. Goethals répond qu'ils sont tenus de travailler par Interpol.
Mme Lizin demande combien de temps il faut.
M. Goethals répond qu'ils transmettent les informations par courrier électronique par le truchement des services DSO. Dans l'hypothèse la moins favorable, il faut 24 heures.
Mme Lizin demande si l'on ne se paralyse pas par une telle procédure.
M. Beirens affirme que tel n'est pas le cas. Il s'agit d'une information policière, qui est transmise sur-le-champ au pays concerné. Ils ne peuvent déterminer ce que ces pays en font. Ils ne reçoivent aucun feedback. Avec l'Allemagne, la France, les Pays-Bas et la Grande-Bretagne, la collaboration se déroule dans des conditions assez favorables. Pour d'autres pays, l'on reste dans le noir. Les USA ont un nombre élevé de notifications positives. Ils se demandent comment expliquer cela, puisque les Américains eux aussi s'en occupent. Les producteurs ne se trouvent donc pas toujours à l'étranger. Ils ont également des dossiers belges, dans lesquels une caméra web est placée dans une chambre, tandis que celui qui se trouve en communication parlante ou en vidéoconférence demande de faire une chose déterminée; les enfants sont maltraités sur indication d'autres personnes qui regardent simplement devant leur ordinateur ce qui se passe dans la chambre.
Ils ne peuvent pas s'attaquer à ce problème uniquement en Belgique. Il faut pour cela fermer des sites, mais il arrive que l'on ne veuille pas intervenir à l'endroit même. C'est ainsi que beaucoup d'îlots aux environs de l'Australie sont utilisés impunément comme base. Un ordinateur y est établi et tout est diffusé par une liaison par satellite. Dans beaucoup de pays, les autorités n'ont ni le temps, ni le personnel compétent pour intervenir à cet égard. Ainsi, il y a des sites web russes où il est dit en première page : nous nous trouvons en Russie à cause de l'absence quasi totale de personnel techniquement instruit, et s'il existe on ne lui donne pas les moyens, et cela n'intéresse pas les politiciens de s'en occuper. Il leur est difficile, en tant que police belge, d'intervenir à ce sujet. Parfois ils ont de la chance et ils parviennent à enlever un site. Si un site est constaté en Belgique, ils ont de bons contacts avec les ISP. Dans ce cas, ils peuvent quelquefois enlever le site en moins d'une heure. Mais ce sont là des exceptions.
La présidente se demande dans quelle direction l'on pourrait orienter des recommandations : travailler davantage avec une réglementation correcte ? Elle pense aussi au fait qu'il y a trop peu d'équipement dans les services. À titre de comparaison, elle demande à Mme Chambon combien de personnes s'occupent de cette matière en France.
Mme Chambon répond que, pour l'instant, il y a une personne pour la partie Signalements. Dans quelques jours, il y en aura quatre; ils ne feront que cela. La partie Signalements représente une infime partie du travail : plus on converge vers un même point, plus il y a de signalements.
À la question de Mme Lizin s'il s'agissait souvent d'images de synthèse, elle expose qu'il faut faire la distinction entre les images de pédopornographie qui sont vraies à 99,9 %, et les images trafiquées pour les scènes de mise à mort. Dans le dernier cas, la synthèse est de mise; on ne peut renouveler sans cesse le marché des gens qui meurent enfants ou adultes.
M. Beirens dit que dès qu'on tombe sur des cibles en Belgique, on est sûr de trouver des collections de dix mille photos. Il peut y avoir des cas de morphing ou d'acting, mais très peu.
Mme Van Riet revient à l'affirmation selon laquelle la police a des contacts fructueux avec les fournisseurs d'accès en Belgique. Ne travaille-t-on pas également sur une base internationale ? Ne peut-on agir par le truchement des fournisseurs d'accès si les pays n'interviennent pas eux-mêmes ?
M. Beirens confirme qu'il est exact qu'un grand nombre de fournisseurs d'accès sont étroitement associés à leur travail et tentent de limiter dans la mesure du possible ce qui tombe sous leur contrôle et de ne pas présenter les groupes de nouvelles concernés. En effet, ils ont tout intérêt à travailler de la manière la plus décente possible.
Toutefois, d'autres firmes remplissent ce vide dans le marché, puisqu'il y a là une possibilité de se faire de l'argent. Il donne l'exemple des serveurs de news-groups : l'on peut y poster n'importe quoi sans qu'il y ait un contrôle sur celui qui envoie et celui qui y trouve les informations. Les intéressés exigent un abonnement pour travailler sur ces serveurs et ils ne tombent pas dans le domaine de la police.
Ce problème subsiste au niveau international. L'on peut, certes, donner des instructions déterminées à ces grandes firmes et elles en tiendront compte, mais de petites firmes se situeront spécifiquement dans des pays où la législation n'est pas stricte ou là où il n'existe pas de services de police pour faire appliquer la législation. L'on se retrouve ainsi dans un domaine imprécis où le criminel se promène en toute liberté.
Un autre aspect qui n'a peut-être pas été suffisamment accentué est le média internet. Personne ne songerait à dire publiquement qu'il est pédophile et d'aborder quelqu'un en demandant des photos. Sur l'internet, le comportement des gens se transforme. Il existe des canaux de communication où la dénomination est évidente : « pre-teens trade pics », où l'on trouve des photos d'enfants de moins de dix ans. Il suffit de cliquer et l'on entre dans le chat-box. Mais on bavarde fort peu et l'on ne fait pour ainsi dire qu'échanger des photos pédopornographiques. Si l'on se lance dans les conversations, un réseau se développe en un minimum de temps.
Chaque fois que l'on découvre pareille personne en Belgique, il s'agit pour ainsi dire invariablement d'un réseau de contacts à l'étranger. Ces personnes se retrouvent d'une manière qui était impossible par le passé. Elles se mettent dans une situation incroyablement vulnérable au point de vue du chantage, par exemple si elles sont identifiées.
1.4. Exposé de Mme Van Bastelaer des Facultés universitaires « Notre-Dame de la Paix » de Namur
Mme Van Bastelaer s'est sentie interpellée par ce que l'on disait sur les associations. Elle tient dès lors à rassurer les membres de la commission sur ce que fait le MAPI (Mouvement antipédophilie sur internet).
En vue de la présente séance, le MAPI a élaboré un rapport dressant l'état de la situation par rapport à ce qui a été à la base de MAPI, à savoir son premier rapport sur la pornographie infantile sur internet, rédigé en 1997. Le MAPI est intégré dans les Facultés de Namur, mais au départ, il s'agissait d'une action de bénévoles qui, par leurs compétences techniques, juridiques et autres, ont eu envie de vulgariser ce sujet. Ensuite, de manière tout à fait informelle, et sans le vouloir, ils sont devenus un point de contact, une hotline, simplement parce qu'ils ont fait un site web présentant le rapport, en indiquant une adresse de contact où les gens ont écrit. Ils ont été directement en contact avec le NCCU, actuellement le FCCU. Cependant, MAPI est bien plus qu'un point de contact : en se basant sur des compétences universitaires, il assure un suivi de l'aspect technique des développements qui ont lieu au niveau européen et international dans ce domaine; il mène une réflexion sur l'autorégulation ou la corégulation d'internet, notamment sur le rôle des fournisseurs d'accès. Plus récemment, il y a également eu un projet européen. Un autre aspect important est l'utilisation d'internet par les enfants et la conception du danger que cette technique représente, projet de recherche sur lequel ils travaillent pour l'instant.
MM. Goethals et Beirens ont déjà dit un certain nombre de choses qui figurent dans le rapport. On y présente une définition de la pédopornographie. Différentes définitions de la pornographie enfantine ont été proposées, tant par l'association ECPAT End Child Prostitution, Child Pornography And Trafficking dont on n'a pas encore parlé, qu'au Congrès mondial organisé en 1996 à Stockholm contre l'exploitation sexuelle des enfants. Ils pensent qu'il est important d'adopter une définition large on a vu les différentes formes que pouvait prendre cette pornographie enfantine sur Internet. On a également abordé un élément qu'il paraît important de souligner, à savoir la distinction établie par le Conseil de l'Europe entre le contenu, qualifié d'« illégal », et ce qui est considéré comme « préjudiciable », qui n'est pas réellement illégal mais peut choquer un enfant, par exemple des photos-montages ou des photos d'art qui peuvent être perturbantes pour des internautes.
Quelques caractéristiques d'internet n'ont peut-être pas suffisamment été évoquées : la relative facilité non seulement à utiliser cette technique mais aussi à devenir soi-même producteur d'informations, créateur de sites web. Tout un chacun est donc un producteur potentiel pour ceux que cela intéresse de pédopornographie sur internet. Il y a également un aspect volatile.
Un site web peut s'ouvrir et se fermer du jour au lendemain, passer d'une adresse à l'autre, d'un pays à l'autre, ce qui complique le travail des autorités judiciaires et policières.
Un autre aspect est le faible coût : la possibilité de diffuser à une multitude de personnes, à un coût quasi nul, la même information, élément très important si l'on considère les autres supports utilisés antérieurement.
Sur les formes et contenus de la pédopornographie sur internet, des exemples concrets ont été donnés. Depuis quelques années, on assiste à une évolution en la matière. Certains sites jouent sur la distinction entre « illégal » et « préjudiciable ». Elle pense à des photos où figurent des enfants de plus de dix-huit ans ou de seize ans : on joue sur une ambiguïté, mettant en avant, par exemple, le caractère artistique des photos. Cela se fait de plus en plus. Ces faits sont dénoncés dans des messages, mais comme ils ne sont pas vraiment illégaux, cela augmente le travail des autorités judiciaires : les internautes pensent en toute confiance être confrontés à quelque chose d'illégal, mais ils ne sont pas suffisamment compétents pour en juger. Certains sites tendancieux jouent sur cette nuance. Parfois, il y a obligation de donner un mot de passe, ou il faut payer pour des photos certains internautes pensent alors qu'il y a un problème et décident éventuellement de ne pas aller plus loin. Il n'y a pas vraiment de code de conduite qui aiguillonne les surfeurs vers le type de site qu'ils souhaitent consulter. Elle reviendra sur la question des filtres, évoquée tout à l'heure, car cela peut constituer une solution, même si elle n'est pas parfaite à 100 %.
À propos du courrier électronique, on a parlé du spamming, réception de messages non désirés. Parmi les gens qui écrivent à MAPI, certains ont reçu des messages qu'ils n'avaient pas souhaités et qui les ont choqués. Lorsqu'ils sont confrontés à des institutions, telles que MAPI ou Child Focus, les gens osent dire : « Oui, je recherchais de la pornographie, mais pas avec des enfants : cela me choque et je veux faire quelque chose ». S'ils devaient se mettre en rapport avec les autorités judiciaires, les gens se sentiraient peut-être moins à l'aise. D'où l'intérêt de points de contact civils dans la mesure où la collaboration avec les autorités judiciaires est totale.
Le « Chat » est certainement un des éléments potentiellement les plus dangereux actuellement, notamment parce qu'il est possible d'aller dans ce que l'on appelle des « Chat rooms » privés : les gens s'invitent dans un « Chat room » et l'on ne voit plus ce qui s'y passe, sauf si l'on y est. Dans notre recherche sur l'utilisation d'internet par les enfants, nous constatons que souvent, dans les « Chats », on ment : on prend un pseudonyme et l'on met ce que les enfants appellent un masque. Les utilisateurs considèrent normal de mentir, de dire que l'on a vingt ans alors qu'on en a douze, par exemple. Ils ne se rendent pas compte que ce petit jeu, auquel ils jouent tous, est potentiellement dangereux. Il y a tout un travail d'éducation à faire sur ce point. Il faut dire aux enfants qu'à un certain moment, ils doivent poser des questions à leur interlocuteur, pour voir jusqu'à quel point il ment et s'il est potentiellement dangereux.
On a également parlé de Trace Route. Un autre objectif du projet européen qui est le nôtre est de créer un site pour les enfants, FKBKO For Kids By Kids Only qui explique aux enfants comment faire pour retrouver l'expéditeur d'un message électronique : par exemple, remonter l'adresse mail de quelqu'un qui dit habiter en France. L'idée est d'apprendre aux enfants que parfois, les gens mentent et qu'il est possible de s'en rendre compte en utilisant certaines techniques.
Un quatrième élément important, présenté par le CCU, est le « peer to peer », c'est-à-dire la communication « point à point », la possibilité, pour un internaute, d'aller sur la machine d'un autre internaute qui lui a donné un accès, pour aller chercher des fichiers. Au départ, il s'agissait de fichiers musicaux, maintenant, cela devient autre chose. Forcément, les autorités judiciaires n'ont pas cet accès et ne peuvent voir ce qui se passe entre ces internautes. Cette évolution à laquelle nous assistons, est assez dangereuse.
Dans le rapport, MAPI présente un exemple concret, concernant les notices proposées sur les sites, expliquant qu'il faut avoir plus de dix-huit ans, ou l'autorisation des parents, pour accéder à ce site, ou déclarant qu'ils ne proposent que des modèles de plus de dix-huit ans mais à la page précédente, on indique que les modèles ont entre dix et dix-sept ans : il y a des contradictions flagrantes dans un même site, par exemple, en matière d'âges.
Mme Van Bastelaer brosse un tableau de ce qui s'est déjà fait à l'échelle internationale au niveau de la lutte contre ces phénomènes.
En 1996, à Stockholm, des engagements avaient déjà été formulés. La Belgique ne les a pas remplis. Il lui paraît intéressant de revenir sur les décisions qui avaient été prises, mais qui ne sont pas encore mises en oeuvre.
Au niveau européen, Child Focus a parlé d'un plan d'action pour un internet plus sûr. Il est important de comprendre que les initiatives prises sur le plan européen portent sur la problématique du marché internet. L'objectif est de rendre internet plus sûr pour que les consommateurs aillent sur internet, mais pas de protéger les enfants, même s'il peut y avoir des conséquences positives dans ce domaine. Il est important de suivre ce qui se passe pour ramener au centre du débat la question primordiale qui n'est pas qu'une pure question de marché, où les fournisseurs d'accès s'arrangent pour que l'État intervienne le moins possible dans leurs affaires et qu'ils puissent continuer à développer le marché de l'internet. Plusieurs organisations belges sont impliquées dans ce plan d'action européen : MAPI, Child Focus. Il y a également des initiatives visant à développer l'aspect de l'éducation de l'enfant, l'approche critique aux risques liés à internet, toutes des initiatives financées par la Commission européenne.
Quelles sont les différentes pistes d'action et les limites de celles-ci ?
On a distingué la prévention-proaction et la réaction. Elle ne parlera pas de ce que la police a déjà signalé. La prévention comporte certainement des actions de sensibilisation, d'éducation non seulement des enfants, mais aussi des parents et des enseignants qui sont souvent complètement perdus lorsqu'il est question d'internet, moins au courant que leurs élèves ou leurs enfants. Les choses peuvent être faciles : diffuser des brochures d'information dans un langage clair et compréhensible sur le problème proprement dit comme ils ont fait avec le soutien de l'Unesco il y a quelques années , sur les règles de sécurité. Child Focus a établi des règles de sécurité mais au MAPI ils se sont rendus compte, pour les avoir présentées dans les écoles, que théoriquement, les enfants les comprennent mais que dans la pratique, ils ne les appliquent pas. Il faut un temps d'appropriation de ces règles.
Par ailleurs, il est possible d'utiliser des filtres sur les ordinateurs. Cependant, il faut que les parents programment les filtres en fonction de leur niveau d'acceptation de la violence, de la nudité, etc., ce que, dans la plupart des cas, ils ne sont pas capables de faire. Une éducation est nécessaire à ces différents niveaux. Des points de contact existent, ainsi que des campagnes d'affichage, des sites web éducatifs.
Elle a parlé du contexte européen. Le discours ambiant met en évidence un concept appelé le « user empowerment ». L'idée est que c'est l'utilisateur final qui doit devenir responsable de ce que l'on voit sur internet : il doit placer des filtres, éduquer ses enfants, etc. Les autres acteurs se déresponsabilisent ainsi. C'est une thèse excessivement libérale qui repose sur la liberté quasi totale du consommateur et donc, sur le recours aux seules forces du marché. C'est une tendance actuelle sur laquelle on peut ne pas être d'accord.
Elle voudrait évoquer aussi l'installation du filtre, pour montrer que cette technique n'est pas parfaite, loin de là. Les filtres permettent, sur la base de mots clé ou de ce que l'on appelle des labels, d'empêcher des utilisateurs, des enfants, d'accéder à un certain type de contenus. Mettre un label, c'est apposer une étiquette sur un site. C'est le créateur du site ou des organismes tiers qui le font et disent : ce site a tel niveau de violence; idem pour le niveau de nudité, etc. Les utilisateurs, lorsqu'ils se servent d'un filtre, précisent qu'ils veulent accéder à des sites ayant tel niveau de violence, de nudité, etc. Le problème est que cette auto-labellisation est quasi nulle actuellement. Il y eu récemment un rapport du Comité économique et social au niveau européen sur la protection de l'enfant sur internet. Le MAPI a également réalisé une étude sur un certain nombre de sites visités par les enfants : sur 180, 6 sont labellisés. Cela montre que cette solution, actuellement préconisée au niveau européen, n'est quasiment pas mise en pratique. Le Comité économique et social recommandait même que les sites pour enfants soient d'office obligatoirement labellisés. Lorsqu'il y a un label, les parents peuvent dire qu'ils souhaitent accéder soit à ces sites labellisés, soit à l'ensemble des sites non labellisés : s'ils n'accédaient qu'aux sites labellisés, ils n'iraient plus que sur une dizaine de sites alors que des millions de sites sont disponibles dans le monde. La solution des filtres et des labels que l'on favorise à différents égards, est encore imparfaite. Il faut y être sensible. Un des moyens pour y arriver est de réagir via un point de contact.
Elle voudrait revenir à la demande initiale du Comité blanc et faire part de son point de vue à ce sujet. Le Comité blanc demande « de prendre des mesures afin d'enrayer le mauvais usage d'internet ». Tout le monde est d'accord sur ce point. La question est de savoir quel type de mesures. Par ailleurs, aucune des mesures qui existent n'est parfaite à 100 %. Elles doivent être utilisées ensemble éducation, filtres, coopération policière. Élaborer des lois pour protéger ceux qui traquent sur internet ? Le MAPI n'est pas favorable à ce type de solution. Depuis 1996, naissance du mouvement, ils se sentent dans une position difficile : ils se sont souvent dit que l'université n'avait pas pour rôle d'être un point de contact. Parallèlement, les gens leur envoyaient des messages et ils les faisaient suivre à la PJ. Ils étaient dans une position délicate. L'idée était que le jour où Child Focus serait financé par la Commission, comme point de contact civil, le MAPI devait progressivement se retirer au bénéfice de Child Focus et faire suivre tous les messages à ce dernier. Un des objectifs ayant ainsi été réalisé, le MAPI continuerait à être vigilant sur d'autres sujets.
Elle a discuté avec un collègue spécialisé en sécurité informatique qui lui a parlé d'une loi concernant l'habilitation de sécurité. Dans certains cas, effectivement, des organismes collaborent avec la police mais il y a, au préalable, une enquête de sécurité et une formation de ces organismes afin que ceux-ci soient habilités à collaborer. Cela pourrait être une solution pour d'éventuels partenariats avec d'autres associations. La pétition demandait que « la nouvelle loi sur la criminalité informatique soit appliquée ». Ils ont examiné cette loi qui concerne le code d'instruction criminelle. Il est évident qu'il faut utiliser les lois. Le problème porte davantage sur leur applicabilité réelle... « que les services de police européens se coordonnent mieux ». Elle pense que nous sommes tous d'accord sur la question. Quant à la demande finale, à savoir que « le principe de précaution soit appliqué aux enquêtes impliquant des enfants et que l'on accorde une plus grande attention à la défense de leurs droits », le MAPI s'est intéressé à la pédopornographie sur internet parce qu'il était sensible à l'exploitation des enfants. Donc, cela doit rester la priorité finale.
Pour terminer, elle souligne que la législation belge est assez complète sur cette question. Cependant, les solutions qui existent actuellement sont relativement individuelles elles reposent sur l'internaute. Il faudrait peut-être penser à des solutions plus globales par rapport au problème. Il y a beaucoup d'acteurs belges qui collaborent relativement bien dans ce domaine. Pour l'instant, sur ce point, la Belgique est bien avancée.
1.5. Exposé de MM. Kohl et Beghuin, délégués des comités blancs
M. Kohl dit que, sans être spécialiste, il est informé de la problématique. Il souligne que certaines personnes se font passer pour des représentants de comités blancs, mais que ces derniers ne sont pas au courant de ce que font ces personnes.
Il observe également que, depuis quelques années déjà, ils veulent faire connaître leurs actions et leur composition par le truchement de la presse, mais que cette dernière n'est pas coopérative. En outre, ils ont peu de possibilités financières et ils ne sont pas encore vraiment présents sur l'internet, puisque leur matériel a été volé à deux reprises. À l'heure actuelle, ils mettent en chantier un nouveau site internet.
Il attire également l'attention de la commission qu'ils excluent des personnes déterminées si celles-ci lancent des actions non conformes à leurs principes. Les seules personnes habilitées à parler au nom du réseau des comités blancs doivent être membres de la coordination. C'est pourquoi il juge intéressant de pouvoir préciser ici leur fonctionnement et leurs problèmes, ainsi que leurs constatations et propositions.
Pour les comités blancs, la chose est claire. Ce qui se passe sur l'internet est une résultante du problème. Ils sont d'avis qu'il faut s'attaquer au problème en tant que tel. Il a été démontré à quel point il est difficile de s'en prendre à des organisations pédophiles, non seulement sur l'internet mais également en justice. Les comités constatent que ces gens-là sont souvent mieux informés de ce qui se passe, tant sur l'internet qu'en justice.
La pédocriminalité reste toujours un tabou. Quand les comités tentent d'évoquer cette problématique, ils reçoivent peu de réactions de la part de la population. Dans ces conditions, il est difficile d'attaquer réellement la pédocriminalité. Il ne faut pas oublier non plus que celle-ci se déroule en général au sein de la famille. Les pédocriminels n'informent évidemment pas leurs enfants de la manière dont ils peuvent se défendre.
Travaillant sur le terrain, les comités blancs ont constaté que la population n'est pas bien informée des moyens qui existent pour se défendre. Les ministres Van Parys et Verwilghen ont publié une brochure relative aux droits de la victime, mais peu de personnes connaissent l'existence de cette brochure ou l'étendue de leurs droits. En outre, il ne faut pas oublier que la pédocriminalité se produit souvent dans des milieux d'un niveau social peu élevé.
Qu'est-ce que les comités blancs essaient de faire ? Il y a belle lurette qu'ils ont des contacts avec les pédopsychiatres, puisqu'ils tiennent à connaître le profil d'un pédophile et les problèmes des victimes. Ils sont également en contact régulier avec des victimes. En d'autres termes, ils collaborent avec des personnes qui ont de l'expérience sur le terrain, donc avec des spécialistes expérimentés. Il ne faut pas oublier non plus que pas mal de comités blancs ont été créés par des victimes. Ils connaissent les problèmes d'une victime et savent comment les aborder. C'est là l'un des avantages. Ils tentent également d'informer le public au sujet de toute l'information qu'ils reçoivent. Toutefois, cela constitue une problème majeur, dès lors qu'ils ne disposent pas des moyens pour mieux faire connaître leur action.
L'orateur est tout à fait d'accord avec ce qu'a dit la représentante de MAPI. Comment faut-il éduquer les enfants et leur donner des informations ? Ils ont des contacts avec les associations de parents d'écoles, surtout du côté flamand. Du côté wallon, il ignore ce qui se passe. En Flandre, des pédopsychiatres donnent des informations aux parents, notamment sur la manière de rendre les enfants plus résistants dans notre société. Les problèmes de la pédocriminalité sont également abordés à cette occasion.
Par le passé, un ministre a pris des initiatives pour expliquer aux enseignants comment reconnaître un enfant abusé. Cette information fut diffusée dans les écoles, mais n'a jamais vraiment été mise à profit. Les comités blancs essaient de le faire au sein de leur organisation. Ils expliquent aux parents comment ils peuvent reconnaître si leur enfant a été abusé par un pédophile.
Il juge qu'il est particulièrement intéressant de pouvoir enfin parler avec des personnes qui ont de l'expérience et qui prêtent leur collaboration sur la base de leur expérience sur le terrain. C'est pourquoi la création d'une plate-forme est intéressante. Ils ont déjà des contacts avec des représentants du Conseil supérieur de la justice et ils essaient d'associer à leurs réunions avec des victimes des personnes susceptibles de donner des avis juridiques. Toutefois, le problème ne consiste pas dans l'absence de législation, mais dans l'application de celle-ci.
Il tient à ajouter uniquement qu'il faut créer une plate-forme. Il faut savoir qui contacter, et où, de manière à pouvoir collaborer tous ensemble.
M. Beghuin expose que les objectifs sur lesquels les comités blancs se mobilisent actuellement sont de trois ordres.
Il faut d'abord soutenir toutes les victimes qui osent parler et qui demandent à être soutenues et les aider à aller jusqu'au bout pour obtenir la répression du crime subi.
L'impensable, c'est en effet que cinq ans après la Marche blanche, il soit encore si difficile de parler de et de lutter contre la pédocriminalité. 90 % des cas portés en justice aboutissent à des « non-lieux ». Ce chiffre est donné par un pédo-psychiatre universitaire, le professeur Adriaenssens de la KUL.
Qu'en est-il dès lors advenu de « La parole de l'enfant » ? Un retour de balancier rend de plus en plus difficile ce type de dénonciations, dans lesquelles les magistrats croient de moins en moins !
Ces images constituent non seulement des infractions en elles-mêmes mais sont la preuve de l'importance et de l'accroissement des maltraitances sexuelles d'enfants. Dès lors se pose la question pourquoi ces agissements ne sont plus combattus par les autorités.
Aussi les comités blancs demandent-ils que les moyens soient mis en oeuvre afin que la nouvelle loi sur la criminalité informatique soit appliquée dans toute sa rigueur.
Pour rappel, le 21 octobre 2000, une lettre ouverte a été adressée aux autorités belges et européennes par tous les participants au colloque, intitulé « L'impensable : L'organisation pédo-criminelle » organisé par la coordination du réseau des comités blancs.
Cette lettre résume les principales revendications de ceux qui veulent par tous les moyens de communication possibles continuer la Marche blanche. Il s'agit principalement de l'imprescriptibilité des crimes contre les enfants, considérés dès lors comme crimes contre l'humanité et la possibilité pour des associations privées de lutte contre la pédophilie d'être comme dans d'autres pays, considérées comme auxiliaires de la justice et non pas comme des parias.
Le 11 juin 2001, le comité blanc « La Main sur le coeur » a remis au Sénat une pétition signée par 3 500 personnes. À ce jour, 26 715 personnes sont venues y ajouter leur signature.
Il semblait important de remettre cette pétition qui voulait et veut toujours dénoncer l'exploitation, la commercialisation et les échanges d'images d'enfants qui sont faits chaque jour sur internet. Ces images montrent des enfants et des bébés violés, torturés et des corps d'enfants morts.
Périodiquement l'on apprend que des réseaux se mettent en place pour satisfaire une clientèle qui s'adonne à la pédophilie. Cette activité monstrueuse, d'autant plus dégoûtante qu'elle s'en prend à de petits enfants, incapables de se défendre et provoquant des traumatismes profonds, doit absolument être combattue avec des moyens performants.
Malheureusement, les sites internet donnent à ce vil commerce une ampleur internationale avec un accès des plus aisés.
Il est donc essentiel que la lutte contre ce fléau soit centralisée au niveau fédéral pour avoir une chance de succès.
Il veut cependant aller plus loin encore et demander que se crée au niveau européen une banque de données centrale où toutes les photos saisies par tout service de police dans n'importe quel arrondissement judiciaire, puissent être envoyées et exploitées sur le plan de l'identification des victimes et des abuseurs.
Dans cette perspective et en attendant que les autorités publiques se montrent moins laxistes dans la répression de la criminalité sur internet, les comités blancs soutiennent tous les efforts de l'ASBL Morkhoven.
La coordination nationale des comités blancs vient de transmettre sur le site hollandais de l'association « Zoeklicht », des visages d'enfants dont la photo se trouve sur les cd-rom trouvés par l'ASBL Morkhoven, pour permettre leur identification et dénoncer les abus et les crimes contre ces enfants. Les quelque 80 000 photos transmises à la justice sont des preuves accablantes.
En ce qui concerne le suivi des dossiers en cours, il y a celui des droits et du statut des victimes. Le comité blanc « La Main sur le coeur » de Couvin en a fait son cheval de bataille en organisant des « Journées des victimes ».
Comme suite à de nombreuses réunions et après analyse de chaque cas exposé, une lettre a été adressée au ministre de la Justice et au ministre des Finances ainsi qu'à différents représentants de nos institutions, dont le Parlement.
Cette lettre développait les revendications fondamentales des victimes destinées à leur accorder les moyens de faire respecter leurs droits. Lorsque des personnes sont plongées dans le malheur par la mort ou la disparition de leur enfant, elles se retrouvent en effet dans une situation de douleur et de frustration qui leur est imposée par le système judiciaire, comme l'obligation de devoir quémander la moindre information, voire même la moindre reconnaissance de leur état de victime.
Aucune réponse satisfaisante n'a été obtenue à ce jour.
Encore actuellement, et malgré les quelques progrès apportés par la loi dite « Franchimont », les victimes sont confinées dans un état d'impuissance et de culpabilité devant des autorités qui semblent ne réagir que devant les droits de la défense des inculpés.
C'est pourquoi il faut continuer à se battre pour que les victimes puissent se faire entendre afin d'obtenir la reconnaissance d'un véritable droit « de la défense » des parties civiles.
Mais les revendications vont plus loin encore dans les cas où les victimes, non seulement se perdent dans les arcanes d'un labyrinthe judiciaire, mais aussi devant des blocages systématiques de leurs dossiers.
Les démarches légitimes des parents pour obtenir principalement la vérité, secondairement la réparation, se heurtent souvent au seul bon vouloir, voire à l'arbitraire des magistrats d'instruction et du parquet.
Le nombre d'affaires dramatiques non résolues en Belgique ne cesse d'augmenter.
Plus que jamais les comités blancs voudraient redire toute leur sympathie et leur soutien aux parents d'enfants martyrs, d'enfants disparus et assassinés et aux enfants victimes dont l'innocence a été violée.
La dignité de leur comportement ne fera pas oublier leur immense souffrance qui est incommensurable.
1.6. Exposé de M. Pas, responsable de l'ASBL « Werkgroep Morkhoven »
M. Pas tient à souligner en premier lieu qu'il est d'accord avec la Federal Computer Crime Unit pour dire que les citoyens n'ont pas à s'occuper de rechercher la pédopornographie sur l'internet. Dans une société idéale, il faut s'occuper de vivre dans le bonheur.
L'un des grands problèmes est que la pornographie enfantine sur l'internet est toujours sous-estimée dans l'opinion publique. En allant naviguer sur l'internet, l'on ne rencontre normalement jamais de la pornographie enfantine. L'une des observations les plus fréquentes est dès lors que l'on n'a pas encore rencontré de pédopornographie, mais dans ce cas l'on n'a vraisemblablement jamais été à sa recherche. En effet, en cherchant pendant deux minutes, l'on trouve de la pédopornographie.
Il existe donc de l'ignorance et de la méconnaissance. Il est urgent de provoquer une conscience, pour que les services de police puissent disposer de plus de législation, de divers moyens et de plus de moyens financiers, de manière à pouvoir jouer un rôle dans la coordination de toutes les parties concernées.
Il veut démontrer également que le problème est à la fois international et local. Les fournisseurs d'accès belges peuvent faire beaucoup de choses, mais hélas, ils n'y sont pas vraiment disposés. La Federal Computer Crime Unit peut, certes, faire des recommandations, mais en réalité elle ne dispose d'aucun appui solide.
Quand il a appris que la présente réunion aurait lieu, il a encore procédé à quelques recherches. Chez un fournisseur d'accès belge, choisi au hasard, il trouve : « preteen », « erotica preteen ». Il se doit d'ajouter que ces groupes de nouvelles ne montrent pour ainsi dire plus aucune image. Toutefois, l'on continue à les offrir. Il conviendrait d'y mettre fin.
D'autres news groups qui sont toujours offerts par les fournisseurs d'accès belges, notamment ceux concernant les garçons, donnent lieu à des chiffres ahurissants. Dans un seul groupe de nouvelles un seul fournisseur d'accès belge nous trouvons 6277 messages pendant ces six derniers jours et 3, 4 gigaoctets en pédopornographie, portant sur des garçons entre quatre et quatorze ans. Et pourtant, il ne faut qu'une minute de travail aux fournisseurs d'accès belges pour clore ce news group. Il regrette que rien de tel ne se fasse.
De quelle manière communique-t-on par l'internet ? La réponse à cette question revêt une nature plutôt technique. D'abord, en passant par le world wide web (réseau à l'échelle mondiale), par un site internet. Il ne pense pas que les sites internet constituent vraiment un grand problème dans notre pays. Les fournisseurs d'accès peuvent tout contrôler. Il ne croit pas qu'en Belgique, beaucoup de personnes prendraient le risque de faire des sites web avec de la pédopornographie. Ensuite, il y a le FTP (file transfer protocol). C'est là vraisemblablement le moyen de communication le plus important pour l'échange de pédopornographie, puisque l'on peut ouvrir son ordinateur peer to peer et échanger des dossiers directement et sans détour. En troisième, il y a le courrier électronique. Ce moyen de communication permet l'échange d'images, mais ne constitue pas le moyen de diffusion le plus important de pornographie enfantine sur l'internet. En quatrième il y a les groupes de nouvelles (news groups). Ils constituent le média le plus important pour le chasseur ou diffuseur débutant de pédopornographie. En cinquième l'on a l'IRC (internet related chat). L'on parle toujours de « chatter », mais il s'agit manifestement de quelque chose de plus, car l'on a développé des logiciels spéciaux afin d'échanger des dossiers, comme le font les enfants : tu reçois cette image si tu me donnes celle-là. Enfin, il y a le BBS (bulletin board system). Ce système quelque peu vieilli, qui est plutôt un précédesseur de l'internet, reste actuel dans la diffusion de la pédopornographie. Pour les services de police, l'intervention contre ce système est probablement la plus difficile.
Il pourrait s'étendre également sur les pages, notamment ICQ, netmeeting et autres, qui sont utilisées, elles aussi, pour la diffusion, mais surtout pour établir des contacts entre les diffuseurs de pédopornographie.
Comment s'attaquer à tout cela ? Il ne faut pas s'attendre, sur ce point, à des miracles. L'on ne parviendra sans doute jamais à éviter totalement la pédopornographie sur l'internet, mais l'on peut certainement enregistrer des résultats moyennant certaines interventions.
Tout d'abord, il y a un grand nombre de parties impliquées dans la lutte contre la pornographie enfantine. Les plus importantes sont les fournisseurs d'accès. Ceux-ci seront contraints de tenir à jour leurs fichiers de consignation, bien qu'il faille évidemment tenir compte à cet égard du caractère privé de ces fichiers de consignation. Quelles données doivent être conservées, lesquelles peuvent être demandées et quand peuvent-elles l'être ?
À l'heure actuelle, les fournisseurs d'accès se considèrent en grande partie comme une entreprise postale qui reçoit et transmet exclusivement des messages sans rien faire de plus. Pourtant, la chose est possible. La meilleure preuve en est, en effet, que l'on est parvenu dans notre pays, ce à très court terme, à entreprendre quelque chose contre les MP3 illégaux, et à cette occasion l'on peut compter sur l'entière collaboration des fournisseurs d'accès à l'internet, dès lors que, dans le cas contraire, les sociétés vendant de la musique menaçaient d'amendes considérables et d'actions en dommages et intérêts non négligeables. Sur le plan de la lutte contre la pédopornographie, l'on devrait, d'une manière ou d'une autre, pouvoir faire la même chose.
Il est convaincu qu'une solution ne sera pas possible sans la collaboration des fournisseurs d'accès. Si cette partie n'est pas associée à la concertation, l'on n'aboutira à rien du tout.
Une deuxième partie est la police. Le problème est que, pour lutter contre la pédopornographie, certainement sur l'internet, il faudra posséder pas mal de connaissances techniques. Il ne lui paraît pas simple d'attirer les spécialistes techniques, d'une part parce que la rémunération d'un spécialiste de l'internet à la police ne soutient pas la comparaison avec le secteur privé, d'autre part parce que l'on sous-estime le poids émotionnel de la recherche de la pédopornographie sur l'internet, puisque ces images sont extrêmement choquantes.
Une troisième partie est la justice, qui doit punir. Le problème est que, là non plus, l'on ne dispose pas directement des connaissances techniques requises : que s'est-il précisément passé, y a-t-il des preuves, ces preuves ont-elles une valeur quelconque ? Ils ne peuvent pas se reporter à des documents. L'adresse IP et la demande de données chez un fournisseur d'accès constituent-elles une preuve unique ? Peut-on contester celle-ci ? L'on a peu de points de repère à ce sujet. Il existe, certes, une législation, mais la loi n'englobe pas la technique. C'est autour de cela que tournera finalement la discussion au tribunal.
Une autre partie encore est constituée par les auteurs. Il appert de photos récentes d'enfants abusés qu'il est fait usage du matériel informatique le plus récent. Les auteurs sont experts sur le plan de la technique et des logiciels. Ils ont également les moyens de cacher leurs traces et ils travaillent sur le plan international, ce qui rend extrêmement difficile une intervention à leur égard. Les victimes aussi constituent une partie intéressée. Chaque image correspond à une victime. Nous ne devons jamais oublier cela. Contrairement à ce qui a été affirmé par le passé, la pédopornographie reste actuelle. Il ne circule pas uniquement des images anciennes. Chaque semaine, il y en a de nouvelles.
En ce qui concerne les solutions possibles, il faut avant tout, en ce qui concerne les groupes de nouvelles, développer rapidement un tool ou, le cas échéant, une législation. La Federal Computer Crime Unit pourrait publier mensuellement une liste de tous les news groups offrant exclusivement de la pédopornographie. Tous ces groupes de nouvelles devraient, dès lors, être immédiatement enlevés par les fournisseurs d'accès belges. Cela ne demande pas un travail considérable : environ dix minutes par mois. Au point de vue technique, il n'y a là aucun problème.
Il y aura toujours, bien entendu, des groupes de nouvelles présentant des informations douteuses. Il existe dès lors plusieurs possibilités. L'on peut charger quelqu'un du contrôle est-ce de la pornographie enfantine, y a-t-il un caractère sporadique, le groupe offre-t-il de la pédopornographie ? ou l'on peut avoir recours à un logiciel. Il y reviendra cependant par la suite.
Il existe un point de contact de la police judiciaire. Le grand problème est qu'il existe, en outre, un assez grand nombre de points de contact, parmi lesquels les points de contact officiels des fournisseurs d'accès. Pour ainsi dire chaque fournisseur d'accès dispose d'un point de contact, mais ils les prennent plutôt à la légère. Comme ils le disent eux-mêmes, ce point de contact sert plutôt à l'autorégulation. En général, ils envoient d'abord un message électronique à la personne concernée, avec la demande de cesser, et cette information n'est pas passée directement à la justice, car ils ne tiennent évidemment pas à perdre leurs clients.
La situation idéale serait l'existence d'un point de contact international qui serait relié à des logiciels et banques de données spécifiques que l'on développe.
En ce qui concerne la banque de données, il se réfère aux Pays-Bas où l'on travaille sérieusement, depuis déjà deux ans, à la lutte contre la pédopornographie et où l'on réalise, à son avis, des avances considérables sur le plan de lutte à l'aide de logiciels. Il a été développé un système KIDS, comportant la liaison entre une banque de données et un système national de police, dans le but de faire l'inventaire de toutes les images pédopornographiques. En effet, une comparaison doit être possible entre les terrains sur lesquels une recherche a déjà eu lieu et il faut savoir qui a fait quoi, quelles traces ont été trouvées, etc.
Le développement de logiciels présuppose des spécialistes et des investissements considérables. Il ne peut pas s'imaginer que la Federal Computer Crime Unit, comportant douze collaborateurs, en affectera trois au développement de logiciels.
Il pense, dès lors, qu'il faut avoir recours, en première instance, aux banques de données existantes. Il croit, par exemple, qu'il faut se raccorder au système de banques de données néerlandais et qu'il ne faut pas tenter de refaire ce travail.
Un autre problème est constitué par les groupes « chat », ICQ et autres, les lieux de contact favoris entre pédophiles. Sur l'internet, il existe des niveaux déterminés. Il y a, tout d'abord, l'internaute qui est à la recherche de la pédophilie. Ensuite, il y a la personne qui se met à échanger de la pédopornographie et, en dernier lieu, il y a les producteurs, les personnes qui prennent les photos et les mettent pour la première fois dans le réseau. L'on ne retrouve pas ce dernier niveau dans les groupes de nouvelles et les groupes « chat ». L'on peut y rencontrer sporadiquement l'un ou l'autre diffuseur idiot de pédopornographie, mais en première instance cela se fait dans des réseaux et systèmes particuliers.
Pour identifier ces derniers, il n'y a qu'une possibilité : s'infiltrer de manière anonyme dans ce groupe sur l'internet. Ainsi qu'il vient d'être dit : cela n'est pas permis et ne peut se faire. C'est cependant la seule possibilité de rester informé de leurs techniques.
Il tient à mettre l'accent sur quelques recommandations concrètes.
Avant tout, il faut mettre à disposition le personnel et les moyens pour la lutte contre la pédopornographie. Si l'on n'a rien de tel, les autres recommandations sont dénuées de sens.
Il faut se raccorder à la banque de données commune de matériel imagé des Pays-Bas, où un peu plus d'un million d'images a déjà été catalogué.
Il convient également de constituer une équipe de coordination ou de recherche, qui devra comprendre en tout état de cause la police, la justice et les fournisseurs d'accès. Quoiqu'il parle au nom du Werkgroep Morkhoven, il ne pense pas que des groupements tel que le sien doivent en faire partie.
Une autre mesure consiste à bloquer certains groupes de nouvelles. Il s'agira de prendre cette mesure mensuellement. Il doit être possible d'inscrire dans la législation que certaines informations doivent disparaître immédiatement du réseau.
M. Beirens dit que la police envoie des listes à l'ISPA. Il faut aussi remarquer que quand on fait bloquer certains groupes, un mouvement s'opère vers d'autres groupes, moins visibles. Davantage de gens risquent alors d'être confrontés « par hasard » à ce genre de situations, même dans des groupes du style « cuisine belge ». Il ne connaît pas d'exemples mais il en a déjà entendu parler : des cercles de pédophiles décident d'envoyer des messages pendant un jour ou deux à un groupe déterminé et toutes les personnes du groupe reçoivent des messages qu'elles n'ont pas vraiment envie d'avoir. Il est possible de le faire.
M. Pas souligne que pour lui, il s'agit surtout du fait que certains groupes de nouvelles sont connus depuis des années, mais continuent néanmoins à être offerts par les fournisseurs d'accès belges, ce qui, selon lui, ne devrait pas être possible.
En outre, il doit y avoir une expertise à laquelle notamment les tribunaux peuvent recourir. Les juges, juristes et avocats doivent bien trouver leurs informations quelque part. Il serait donc intéressant de pouvoir s'en remettre à certaines personnes qui seraient, le cas échéant, des indépendants ou des membres de la police ou de la justice.
La dénonciation de la pédopornographie par des citoyens constitue un problème particulier. L'on parle toujours du caractère anonyme, mais celui qui dénonce de la pornographie enfantine sur l'internet a celle-ci dans son ordinateur et est parfaitement identifiable, sauf s'il recourt à des logiciels spéciaux. En d'autres termes, les points de contact n'offrent aucune protection réelle. Il conviendrait de se livrer à une réflexion à ce sujet. Il doit être avancé de manière claire et nette que la protection existe et que toutes les dénonciations se font de manière anonyme et ne peuvent être identifiées.
Une autre recommandation est relative à la collaboration internationale. Il pense en première instance aux Pays-Bas, un Etat qui prend la chose très au sérieux et qui, par comparaison avec notre pays, a fait appel à cet effet à énormément de moyens et de personnes. De quelle manière pouvons-nous intégrer ces systèmes et poursuivre la collaboration ?
Il a gardé pour la fin la recommandation la plus contestée, à savoir, les techniques d'infiltration pour rester informé de ce qui se passe, de manière à pouvoir s'attaquer simultanément à bon nombre de délits.
2.1. Exposé de M. Kohl (comités blancs)
M. Kohl rappelle que les comités blancs ne sont pas spécialisés dans la détection de la pédocriminalité sur l'internet. Ils suivent toutefois cette problématique de près grâce aux informations qu'ils reçoivent des médias ou directement d'organisations ou de parents à la recherche de leurs enfants disparus.
Il ne suffit pas de faire disparaître cette criminalité de l'internet. Il faut surtout réaliser un travail d'enquête sur la base du matériel que les services de police reçoivent pour retrouver la piste des enfants et des criminels. L'origine du matériel photographique peut également être recherchée grâce à une technique qu'utilisent déjà les services de police suédois.
Au niveau belge, puis européen, il faut créer d'urgence une banque centrale de données concernant ce matériel.
D'après l'intervenant, il convient également de légiférer pour empêcher que ce matériel demeure inemployé par les instances judiciaires ou même qu'il soit détruit. Il se demande à cet égard ce que sont devenus les 18 CD « Zandvoort » qui avaient été remis à la justice belge en février 2001 et qui se trouvent aujourd'hui au parquet de Turnhout.
Un autre problème est dû au fait que les services judiciaires ne permettent pas aux parents des enfants disparus d'avoir accès à ce matériel pédocriminel (ne serait-ce que le visage des enfants), parce que l'on peut voir que les enfants ont été torturés. Le sort réservé entre-temps à ces enfants et l'enfer quotidien des parents semblent secondaires aux autorités judiciaires.
En vertu de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée, les organisations ou les parents qui cherchent des enfants en scrutant du matériel pédocriminel doivent d'abord obtenir l'autorisation du magistrat compétent ou de l'intéressé, c'est-à-dire l'enfant disparu ou ses parents. Dans la pratique, cela signifie qu'il faut obtenir d'abord l'autorisation soit de tous les enfants figurant sur des milliers de photos ou de tous leurs parents, soit, le cas échéant, des magistrats qui sont à la recherche de ces enfants. C'est inacceptable.
Le rapport de « FCCU » évoque explicitement les problèmes que pose la chasse à la pédopornographie par des services autres que policiers. On y constate que dans différents pays européens, des services non policiers sont autorisés à accomplir un travail très utile. Cette pratique ne pose aucun problème et donne même lieu à une collaboration très utile avec les services judiciaires. Des infractions pénales peuvent aussi être commises au sein des services de police et là aussi, un contrôle s'impose donc.
On peut également constater que lorsque de telles organisations transmettent du matériel aux parquets, elles sont très attentives à son utilisation et qu'elles feront éventuellement pression pour que le matériel soit examiné rapidement. Il y a donc un contrôle démocratique. Quel contrôle démocratique y a-t-il, par contre, sur le matériel transmis par « FCCU » ?
Enfin, il tient encore à attirer l'attention sur le rapport des comités blancs, duquel il ressort qu'il faut mieux protéger tous ceux qui dénoncent la pédocriminalité. Les pédocriminels disposent souvent de moyens financiers exceptionnels et peuvent se payer les meilleurs spécialistes et avocats. Les commissaires trouveront également dans le rapport qui leur a été remis des exemples du travail que leur réseau réalise sur le terrain.
2.2. Exposé de M. Beghuin (comités blancs)
M. Beghuin rappelle quant à lui que lors de la réunion du 5 février 2002, il avait signalé que les comités blancs ne sont pas spécialisés dans la traque pédocriminelle sur internet et ce, en partie, parce que la loi ne les y autorise pas.
C'est d'ailleurs un ajustement de la loi qu'ont demandé les 36 000 signataires de la pétition lancée par le comité blanc de Couvin « La main sur le coeur » dans le but de protéger ceux qui traquent la pornographie infantile sur internet. D'autres pays l'ont prévu. Ainsi, aux Pays-Bas, des associations de recherche privées peuvent collaborer avec les autorités judiciaires pour autant qu'elles en aient l'autorisation. En Italie, l'association « Telefono Arcoballeno », présidée par Don Fortunato di Notto, a reçu le statut d'auxiliaire de la justice. Cette association a, depuis 1996, démantelé 24 000 sites pédo-pornographiques dans le monde (Italie, Belgique, France, Espagne, Brésil, Japon, USA, Pologne, Croatie ...).
C'est grâce aux recherches effectuées par des associations de citoyens luttant contre la pédocriminalité que de tels réseaux ont été démnantelés. C'est eux aussi qui ont remis à la Justice des milliers de photos existant sur internet où l'on peut constater des faits d'agression sexuelle sur enfants, souvent avec torture, parfois même avec mise à mort.
Une meilleure protection pour ceux qui dénoncent la pédocriminalité ne devrait d'ailleurs pas se limiter à internet. En France, suite à des plaintes « pour violation du secret professionnel » ou « dénonciation calomnieuse », certains médicins, pédopyschiatres ou gynécologues ont connu des problèmes avec la Justice et l'Ordre des médecins pour avoir conformément au Code pénal français, signalé à la Justice les noms d'auteurs présumés de maltraitance sexuelle sur des enfants. Ces plaintes viennent bien sûr des présumés auteurs. Si l'action pénale aboutit à un non-lieu en faveur des présumés auteurs, ces médecins risquent des poursuites pour « dénonciation calomnieuse ».
Selon le professeur Hutsebaut, professeur de droit pénal à la KUL, ce risque existerait en Belgique pour 90 % des plaintes. Les raisons seraient surtout techniques et une étude à ce sujet paraîtra dans quelques mois sous forme de livre.
Le constat que dans certains arrondissements judiciaires, les magistrats ont tendance à ne pas croire les allégations faites par des enfants et vont jusqu'à prétendre que les spécialistes qui ont mené les interrogations ne connaissent pas leur métier, est inquiétant. Ce genre de déclarations, souvent fortement médiatisées, réconforte évidemment les pédocriminels dans leur sentiment d'impunité tandis que les victimes en sont fragilisées. Il semblerait qu'à l'heure actuelle, même des professeurs d'école hésiteraient à dénoncer des cas de maltraitance d'enfants.
Cette attitude de certains magistrats ne fera que renforcer l'hésitation du corps enseignant au point de rendre caduques les efforts faits par le ministre Maréchal et le « Preventieproject onderwijs vertrouwenscentra ». L'intervenant déclare ne pas comprendre une telle attitude.
Il y a environ quatre ans, les comités blancs ont démarré une série de « Cahiers de doléances ».
Ceux-ci ont un double but : d'une part, mieux faire connaître les problèmes causés par la pédocriminalité car il était apparu, grâce au témoignage de toute une série de victimes souvent actives dans leur réseau, que les victimes d'inceste étaient aussi souvent victimes du fonctionnement des institutions du fait que celles-ci ne connaissent pas la pédocriminalité. D'autre part, le projet visait à analyser le problème car grâce au témoignage de nombreuses victimes (4 918 cas pour les six centres de confiance de Flandre en 2000). Les comités blancs souhaitaient pouvoir faire une étude approfondie, non seulement sur les causes de la pédocriminalité et de la maltraitance en Belgique, mais également sur les éventuelles carences des institutions. Des points communs auraient ainsi pu faire apparaître l'existence de réseaux ou d'affiliations de pédocriminels.
Ce travail aurait également permis de donner des informations précieuses aux institutions judiciaires mais pour faire connaître le projet à un large public, il leur fallait le concours des médias. Or, ceux-ci n'ont rien fait malgré que le projet leur ait été proposé lors d'une conférence de presse.
C'est pour cette raison que les comités se sont limités à développer la première partie du projet et qu'ils font un travail pédagogique, en collaboration avec des spécialistes, par le biais de leur mensuel « White Spirit » dans le but de mieux faire connaître la pédocriminalité et le fonctionnement de la justice.
Ce travail a d'ailleurs permis de donner de précieuses indications au ministre de la Justice sur les carences dans l'application de certaines lois ainsi que pour l'élaboration de nouvelles lois. La particularité de leur action est qu'ils travaillent à partir de victimes qui observent les institutions d'un regard que celles-ci ne pourront jamais porter sur leur propre fonctionnement.
2.3. Exposé de M. Beirens (Federal Computer Crime Unit)
M. Beirens déclare qu'en ce qui concerne la coopération avec les comités blancs, la FCCU a très peu de contacts avec ces organisations. On a par contre des contacts réguliers avec Child Focus, qui transmet immédiatement à la police les informations qu'elle recueille. La FCCU traite ces informations comme n'importe quelle autre information qu'elle découvre sur internet. Si le fait criminel se situe en Belgique ou s'il y a un lien technique avec la Belgique, la FCCU s'efforce immédiatement d'intervenir, en collaboration avec les magistrats et les fournisseurs d'accès. Si les faits se déroulent à l'étranger, la FCCU transmet l'information via Interpol.
À la demande de Mme Lizin, M. Beirens précise que la même forme de coopération existe avec la Russie. Si les faits se déroulent en Russie, l'information est transmise au bureau Interpol russe. L'intervenant ignore naturellement ce qu'il en advient par la suite. Un des grands problèmes posés par le fonctionnement d'Interpol est que dans certains pays, plusieurs services de police s'occupent de cette matière, mais que l'information d'Interpol n'est pas toujours acheminée vers ces différents services.
Mme Lizin fait remarquer que la police de Moscou souhaiterait que la FCCU travaille directement avec notre officier de liaison à Moscou, M. Hauppe.
M. Beirens souligne qu'il faudrait examiner une procédure alternative avec la Cellule « traite des êtres humains » qui est compétente pour la pornographie enfantine. Il serait effectivement possible de travailler avec un officier de liaison si cela donne de meilleurs résultats.
Il déclare enfin que collaborer avec les comités blancs n'est pas un problème pour lui; ils disposent souvent d'informations pertinentes et utilisables. Ces informations peuvent cependant aussi être communiquées directement à la FCCU, aux services judiciaires de l'arrondissement concerné ou au bureau de notification judiciaire dont le lien est mentionné sur le site de la police fédérale. Cette information sera examinée et traitée tout aussi sérieusement.
La FCCU s'occupe en particulier de la localisation technique des faits et de l'expertise des ordinateurs saisis. Cette dernière tâche est effectuée dans le cadre de perquisitions chez les auteurs en vue de détecter éventuellement les réseaux informels et formels.
Lorsque le travail réalisé par la FCCU démontre que les faits peuvent être localisés en Belgique, le dossier est transmis au parquet compétent, où la Cellule locale « traite des êtres humains » est assistée par la FCCU régionale.
2.4. Échange de vues
M. Wille attire l'attention sur le fait que dans le problème actuel, il y a une grande différence entre la réalité fonctionnelle et la réalité administrative.
Ainsi est-il évidemment logique que la FCCU collabore avec Interpol; personne ne saurait y avoir d'objection. Toutefois, le monde de l'informatique évolue de manière particulièrement rapide, ce qui fait que dans ce monde, il est très important de connaître la peine qu'on encourt. La police de Moscou a montré que les criminels qui veulent commettre des actes de nature pédopornographique opteront plus facilement pour un pays tel que la Russie parce qu'ils savent que pour ce genre de faits, la sanction qu'ils y encourrent est faible.
En second lieu, l'intervenant attire l'attention sur la relation entre la pédophilie et la traite des êtres humains. Bien qu'il existe un lien entre les deux, tout cas de pédophilie n'est pas nécessairement un cas de traite des êtres humains. Dès lors, il n'est pas logique d'associer systématiquement la Cellule « traite des êtres humains » à l'examen des affaires de pédophilie. Il estime dès lors que la démarche actuelle n'est pas vraiment intelligente.
Se fondant sur l'autorité certaine dont dispose la commission, comme l'ont encore montré les contacts que les membres ont eus à Moscou, il propose d'insister sur la nécessité d'un échange d'informations. On peut peut-être recommander aussi que soient développés des programmes européens tels qu'Odysseus, qui permettent d'établir des contacts utiles entre les services de divers pays. Le savoir-faire des auteurs de ce commerce morbide évolue nettement plus que celui des services de police, parce que les moyens financiers et matériels dont disposent les services de police concernés diffèrent selon les pays.
M. Malmendier estime qu'on est pris dans une spirale où l'on ne cesse de jouer au gendarme et au voleur. Il serait, parallèlement à cette technique, d'avis qu'il faut également opérer sur le terrain, c'est-à-dire opérer dans nos villes et nos villages pour marquer la désapprobation sociale face à ce phénomène. Les comités blancs ou associations du même type peuvent à cet égard faire une oeuvre très utile.
Il voudrait toutefois savoir ce qu'entendent exactement les représentants des comités par les notions d'auxiliaire de police et traqueurs d'internet au niveau pratique.
M. Kohl s'en réfère à l'exemple de l'association Morkhoven qui a été une pionnière en la matière. L'idée serait qu'il puisse y avoir un échange d'informations très important de sorte ce que les institutions judiciaires, qui manquent cruellement de moyens, soient aidées. Il est évident qu'il coûte extrêmement cher d'avoir des techniciens valables. Les pédocriminels, par contre, disposent souvent de tels moyens qu'ils peuvent se permettre les meilleurs techniciens. De plus, ils travaillent dans l'ombre si bien qu'ils ont une avance certaine sur les services judiciaires. Des groupements comme Morkhoven travaillent à la façon des détectives et vont parfois jusqu'à s'infiltrer dans le milieu.
Les comités blancs ne sont pas spécialisés dans ce travail de traque. Ils pourraient, par contre, très bien faire un travail de synthèse de ce qu'ils constatent sur le terrain puisqu'ils sont en contact direct avec les victimes qui hésitent souvent à contacter la police. S'ils gagnent la confiance des victimes et si leur travail est connu des victimes qui savent qu'elles peuvent s'adresser à ces comités, ils pourraient faire un travail efficace. Rien qu'en Flandre, le nombre d'enfants-victimes pour l'année 2000 est d'environ 5 000. Si on adapte ce chiffre au niveau national, en tenant compte du fait qu'il ne s'agit vraisemblablement que du sommet de l'iceberg, on réalise que la situation est grave car de nombreuses victimes d'actes incestueux ne savent souvent pas où s'adresser.
Ils pourraient faire un travail pédagogique avec l'aide des spécialistes pour établir, par exemple, les profils des pédocriminels, les types de réactions des victimes, ce qui permettrait d'aider la police dans son travail. Il faut en outre être conscient du fait que certains magistrats ont peut-être aussi des tendances pédophiles et donc profiler et filtrer ces magistrats dans un rapport qui serait adressé au Conseil supérieur de la Justice.
M. Beghuin ajoute que le terme auxiliaire est peut-être un peu trop fort mais les comités blancs pourraient en tout cas aider la police. Il faudrait toutefois qu'ils puissent collaborer en disposant de moyens légaux qui limiteraient les risques dans leur chef.
Il y a un dossier où il y a des preuves flagrantes qu'en 1989-1990, un père de famille pédophile faisant partie d'un réseau et ayant été condamné travaillait avec Dutroux. Toutes les preuves ont été adressées à Neufchâteau mais les autorités judiciaires ont fait la sourde oreille. Cette personne est sortie de prison et visite régulièrement une femme ayant six enfants mineurs.
Cette situation est évidemment très grave et ils souhaitent dans de tels cas, fournir une collaboration à la police.
Mme Thijs constate que la Belgique est davantage un pays de consommation qu'un pays de production. Les membres de la commission ont pu le constater également au cours de leur visite à Moscou, où il était plutôt question de Français et d'Allemands qui ouvrent leur site en Russie et pas tellement de Belges. Toutefois, si un Belge ouvre un site au départ de la Russie, il n'est pas punissable en Belgique. Que peut faire la commission pour remédier à cette situation ? Elle souhaite également savoir s'il y a eu une augmentation du nombre de dénonciations depuis que l'on a fait savoir, il y a quelques semaines, que Child Focus était le point de signalement officiel et unique.
En outre, elle constate que le cadre de la FCCU ne comporte actuellement que 12 personnes, alors que 28 sont prévues. Il est pourtant clair que pour de tels problèmes, le cadre de la FCCU doit pouvoir fonctionner pleinement. Elle demande si la commission peut intervenir en l'espèce d'une manière ou d'une autre. Les moyens financiers font apparemment défaut, mais elle estime qu'il faudrait peut-être adapter les priorités politiques. Elle souhaiterait savoir dans quelle mesure la limitation de ses capacités compromet le travail de la FCCU.
Enfin, elle aborde le problème de la responsabilité du fournisseur d'accès en ce qui concerne le matériel illégal qu'il n'a pas fait disparaître du serveur et dont il n'a pas signalé l'existence aux autorités. Certains fournisseurs d'accès peuvent être tentés de conserver des sites illégaux sur leur serveur pour attirer les visiteurs. Comment s'attaque-t-on à ce problème ? Quel est le délai moyen pour que les fournisseurs d'accès signalent un site illégal aux autorités et combien de temps en moyenne laissent-ils subsister le site illégal sur leur serveur ?
M. Beirens répond qu'il ne dispose pas encore de chiffres exacts en ce qui concerne les dénonciations à Child Focus. Toutefois, il ne pense pas qu'on assistera à une augmentation spectaculaire.
En ce qui concerne le cadre de la FCCU, on a effectué en 2001 une estimation sur la base du plan d'entreprise, dans lequel des ensembles de tâches ont été définis. On a calculé à l'époque que la FCCU aurait besoin de 28 personnes. On a demandé que cette extension de cadre soit approuvée, mais elle dépend du transfert de personnel administratif de la police fédérale.
Il s'agit de personnel du Calog qui remplirait des fonctions administratives, ce qui permettrait aux policiers opérationnels de se concentrer sur leur véritable travail. À un moment donné, on a évoqué le transfert de 200 membres de La Poste à la police fédérale pour assumer les tâches administratives. Cela aurait permis de libérer 10 policiers pour la FCCU. Comme ce transfert n'aura manifestement pas lieu, on n'a aucune certitude sur la taille effective du cadre de la FCCU, qui a cependant déjà été approuvé.
Mme Thijs estime que si le transfert du personnel de La Poste n'a pas lieu, il faut trouver une autre solution pour l'extension du cadre.
M. Beirens souligne le principe de la mobilité : lorsqu'un poste est déclaré vacant, les gens peuvent poser leur candidature à ce poste. C'est ainsi que bientôt, à l'issue des épreuves de sélection, cinq nouveaux membres du personnel viendront s'ajouter : trois inspecteurs principaux et deux membres de la police locale. Toutefois, pour le poste vacant de commissaire, il n'est pas certain que l'on trouvera quelqu'un. Pour l'instant, on doit néanmoins se borner à engager des policiers, mais pas de personnel administratif. Il faudra attendre une prochaine vague de mobilité pour pouvoir éventuellement engager du personnel supplémentaire.
Avec un effectif supérieur, la FCCU pourrait s'occuper de projets axés sur le volet belge d'internet. Si un lien technique était constaté avec la Belgique, elle pourrait gérer le dossier.
Lorsqu'un ressortissant belge crée un site en Russie, on applique effectivement le principe selon lequel seules les autorités étrangères sont compétentes sur leur propre territoire et la police belge ne peut pas intervenir.
Mme Lizin précise que la police de Moscou est compétente pour tout le territoire russe en matière de pédopornographie. Ils sont d'accord pour bloquer immédiatement un site pédopornographique lorsque M. Hauppe, notre officier de liaison, les prévient de l'existence d'un tel site. Elle estime qu'il faut travailler plus rapidement et il faut passer davantage par le canal de l'offficer de liaison compétent.
M. Beirens répond que son service n'a pas la capacité de déterminer à quel service de police étranger il doit transmettre les informations disponibles. La FCCU travaille par l'intermédiaire d'Interpol.
Pour les États-Unis et l'Angleterre, on sait exactement quels services de police s'occupent de cette criminalité informatique parce que les compétences sont clairement définies, mais pour les autres pays, c'est loin d'être aussi évident. Il estime en outre travailler avec la célérité qui s'impose : dès qu'une information tombe, elle est immédiatement transmise à Interpol. Il est impossible pour la FCCU de travailler plus vite. En revanche, il n'a aucune prise sur la manière dont travaille Interpol. Il est évidemment demandeur d'une coopération internationale plus efficace et plus rapide.
Pour ce qui est de la responsabilité des fournisseurs d'accès, il ne pense pas qu'un fournisseur d'accès belge laisse longtemps des sites pédopornographiques sur son serveur. La plupart des fournisseurs d'accès réagissent très rapidement lorsqu'ils constatent la moindre chose et la FCCU transmet sans délai les informations au magistrat compétent de manière que le site puisse être entièrement bloqué. Il arrive que l'on puisse bloquer un tel site en une heure de temps.
Il peut par contre arriver que des groupes de nouvelles, avec de la pédopornographie, voient le jour et que les fournisseurs d'accès ne puissent pas toujours les contrôler efficacement.
En réponse à une question de M. Malmendier sur la collaboration avec les mouvements citoyens, il estime que si les comités blancs veulent se rendre utiles en la matière, ils doivent se contenter de jouer le rôle d'intermédiaire pour des personnes qui veulent signaler quelque chose ou fournir des informations. La recherche active suppose un travail spécialisé qui est l'apanage des services de police. Il estime inacceptable que certains groupements infiltrent des sites parce que c'est formellement interdit par la loi.
La FCCU a besoin d'informations techniques pour lui permettre d'effectuer des recherches et des vérifications sur internet plutôt que de photos d'enfants victimes de la pédopornographie. Il ne pense toutefois pas que les comités blancs puissent traquer effectivement les sites pédopornographiques sur internet.
M. Kohl précise que la Charte des comités blancs interdit expressément aux membres de faire eux-mêmes des recherches. Ils peuvent en revanche échanger des informations sur la pédocriminalité. Il s'inquiète cependant du fait que lorsque des informations sont confiées à la police, il arrive que rien ne soit fait ou qu'elles ne soient pas transmises à qui de droit. Le contrôle des suites données à ces communications au sein des services de police et des parquets est insuffisant et les comités blancs pourraient exercer ce contrôle.
Mme Thijs estime personnellement que les comités qui s'occupent de pédopornographie ne devraient pas exister. Il y a suffisamment de points de contact officiels et les services de police sont compétents pour donner suite à ces affaires.
1re recommandation
Il convient de donner aux associations citoyennes intéressées l'opportunité de se concentrer sur les aspects préventifs de la lutte contre la pédopornographie à laquelle elles revendiquent de participer.
Ces aspects préventifs consistent dans la promotion d'une véritable culture de réprobation, de protection et d'aide active au sein de la société.
Les associations citoyennes devraient être notamment encouragées à :
soutenir des initiatives publiques ou privées;
participer à la diffusion de brochures d'information;
placer des filtres sur des ordinateurs dans leur entourage direct;
diffuser des listes de points de contact;
distribuer du matériel d'éducation critique;
mener des campagnes de sensibilisation aux règles de sécurité;
participer à la promotion de sites éducatifs.
2e recommandation
Une convergence des efforts des autorités et des associations citoyennes doit être organisée. Celle-ci créerait la transparence et le climat de confiance indispensables au succès des efforts entrepris de part et d'autre.
3e recommandation
Un arrêté royal organisant la conservation des données pendant douze mois dans les archives des fournisseurs d'accès à internet, doit entrer en vigueur le plus rapidement possible.
4e recommandation
L'éthique des fournisseurs d'accès à internet doit être renforcée. Une pratique de labels doit être développée.
5e recommandation
Les missions et le fonctionnement des associations citoyennes doivent être clairement définis. À défaut, on risquerait d'assister à des comportements anarchiques ou poujadistes, dont les causes seraient davantage à rechercher dans l'ignorance de la législation applicable que dans les aspirations profondes des citoyens. Il faut également garantir les associations citoyennes contre les pédophiles susceptibles de les infiltrer.
6e recommandation
Child Focus devrait conclure des protocoles d'accord avec les associations citoyennes fondés sur leurs compétences. Sur base de critères qu'il établirait préalablement, cet organisme public agréerait les associations citoyennes signataires d'un protocole d'accord, dont il veillerait au respect.
Child Focus informerait les associations citoyennes agréées des suites réservées aux affaires portées à sa connaissance par celles-ci.
Cet organisme public fédérerait le réseau des associations citoyennes agréées. Il deviendrait le point de contact civil centralisé et l'interface entre ce réseau et les autorités, de sorte que la proximité, la confiance et la convivialité indispensables à un véritable changement comportemental dans notre société seraient garanties.
7e recommandation
Les associations citoyennes doivent se donner elles-mêmes les moyens d'agir, afin de rester autonomes et critiques pour parer à l'éventualité d'une carence des autorités. Cela implique l'abandon de l'idée de tout monopole et la création d'un réseau dont la décentralisation permettrait de briser les tabous et d'intensifier la lutte contre la phédophilie partout en Belgique et, dès lors, de rassembler les moyens privés indispensables au fonctionnement d'une force de première ligne.
8e recommandation
Child Focus devrait conclure un accord de collaboration avec le parquet fédéral, qui est l'instance chargée de poursuivre les auteurs d'actes de pédopornographie sur internet.
9e recommandation
Un cadre légal doit être donné à la formation dispensée par les associations citoyennes. Le MAPI devrait recevoir les moyens nécessaires à l'organisation d'une formation continuée au sein de celles-ci.
10e recommandation
Les « Computer Crime Units » doivent recevoir les moyens de fonctionner. À cet égard, le développement du « Federal Computer Crime Unit » et des « Computer Crime Units » au sein des zones de police est une excellente initiative des autorités.
Les budgets nécessaires à l'achèvement de la mise en place de ces structures doivent être accordés le plus rapidement possible. Les moyens techniques et la compétence des enquêteurs doivent permettre à tout moment de lutter le plus efficacement possible contre la criminalité sur internet.
11e recommandation
Pour lutter efficacement contre la pédopornographie sur internet, la collaboration avec Interpol, Europol et les pays du monde entier, particulièrement avec la Russie, les pays d'Europe centrale et orientale et les États-Unis, doit être renforcée.
Il convient de souligner à cet égard les efforts déjà réalisés par les autorités russes pour lutter contre la traite des êtres humains, et donc contre la pédophilie.
La commission multiplie d'ailleurs ses contacts avec les autorités russes en vue d'élaborer des modes de collaboration efficace entre les deux pays.
12e recommandation
La suggestion du ministre de la Justice de mettre en commun des informations recueillies par les cellules homologues de la « Federal Computer Crime Unit » en Europe doit être rencontrée, afin d'éviter de répéter inutilement des enquêtes ou des travaux d'identification. Les efforts menés dans les différents pays européens doivent être coordonnés.
13e recommandation
Une banque centrale de données doit être créée, où seraient conservées toutes les photographies saisies par les différents services de police du Royaume, en vue d'une meilleure identification des victimes et des auteurs d'infractions à caractère pédophile.
14e recommandation
Des filtres pour ordinateurs dans les trois langues nationales devraient être produits.
15e recommandation
Il convient de veiller à ce que les canaux de collaboration avec Interpol et avec les polices des pays de départ de la pédopornographie soient utilisés de façon très rapide, en particulier avec le Russie. Des procédures particulières pour internet existent et le Sénat recommande de les utiliser systématiquement.
Sur la base des propositions de recommandation faites par le rapporteur, la commission formule les recommandations suivantes :
1re recommandation
Les « Computer Crime Units » doivent recevoir les moyens de fonctionner. À cet égard, le développement du « Federal Computer Crime Unit » et des « Computer Crime Units » au sein des zones de police est une excellente initiative des autorités.
Les budgets nécessaires à l'achèvement de la mise en place de ces structures doivent être accordés le plus rapidement possible. Les moyens techniques et la compétence des enquêteurs doivent permettre à tout moment de lutter le plus efficacement possible contre la criminalité sur internet.
Afin de pouvoir exercer sa mission à part entière, l'effectif de la FCCU doit d'urgence être porté de 12 à 28 personnes, comme prévu.
2e recommandation
Pour lutter efficacement contre la pédopornographie sur internet, la collaboration avec Interpol, Europol et les pays du monde entier, particulièrement avec la Russie, les pays d'Europe centrale et orientale et les États-Unis, doit être renforcée.
Il convient de souligner à cet égard les efforts déjà réalisés par les autorités russes pour lutter contre la traite des êtres humains, et donc contre la pédophilie.
La commission multiplie d'ailleurs ses contacts avec les autorités russes en vue d'élaborer des modes de collaboration efficace entre les deux pays.
3e recommandation
La suggestion du ministre de la Justice de mettre en commun des informations recueillies par les cellules homologues de la « Federal Computer Crime Unit » en Europe doit être rencontrée, afin d'éviter de répéter inutilement des enquêtes ou des travaux d'identification. Les efforts menés dans les différents pays européens doivent être coordonnés.
Il est clair qu'il n'appartient pas aux organisations de citoyens de procéder à des enquêtes sur l'existence de matériel pédopornographique sur internet. Cela est et reste le monopole des autorités judiciaires. Un certain nombre d'associations reconnues par le Roi peuvent toutefois faire office de point de signalement anonyme.
4e recommandation
Une banque centrale de données doit être créée, où seraient conservées toutes les photographies saisies par les différents services de police du Royaume, en vue d'une meilleure identification des victimes et des auteurs d'infractions à caractère pédophile.
5e recommandation
Des filtres pour ordinateurs dans les trois langues nationales ainsi qu'en russe et en anglais devraient être produits.
6e recommandation
Un arrêté royal organisant la conservation des données pendant douze mois dans les archives des fournisseurs d'accès à internet, doit entrer en vigueur le plus rapidement possible.
7e recommandation
L'éthique des fournisseurs d'accès à internet doit être renforcée. Une pratique de labels doit être développée.
La commission est consciente du fait que le terrain d'action d'internet est extrêmement grand et difficile à contrôler. Pourtant, il semble qu'un certain nombre de fournisseurs d'accès autorisent des groupes de nouvelles « non-censurés » alors qu'ils disposent des possibilités techniques pour supprimer ces groupes de nouvelles. La commission considère que l'on effectue également un travail préventif en supprimant du matériel illégal du net. Les fournisseurs d'accès à internet jouent un rôle crucial à cet égard. Il y a lieu de conclure un protocole de collaboration entre les autorités et les fournisseurs d'accès à internet, délimitant le rôle et les responsabilités de ces fournisseurs d'accès à internet.
8e recommandation
Child Focus devrait conclure un accord de collaboration avec le parquet fédéral, qui est l'instance chargée de poursuivre les auteurs d'actes de pédopornographie sur internet.
9e recommandation
Un cadre légal doit être donné à la formation dispensée par les associations citoyennes. Le MAPI (Movement against Pedophilia on the Internet de l'université de Namur) devrait recevoir les moyens nécessaires à l'organisation d'une formation continuée au sein de celles-ci.
10e recommandation
Child Focus devrait être amené à conclure des conventions de collaboration avec les associations citoyennes fondées sur leurs compétences.
Child Focus informerait les associations citoyennes agréées des suites réservées aux affaires portées à sa connaissance par celles-ci.
Child Focus deviendrait le point de contact civil centralisé et l'interface entre ce réseau et les autorités, de sorte que l'accessibilité, la confiance et la convivialité indispensables à un véritable changement comportemental dans notre société seraient garanties.
11e recommandation
Une convergence des efforts des autorités et des associations citoyennes doit être organisée. Celle-ci créerait la transparence et le climat de confiance indispensables au succès des efforts entrepris de part et d'autre.
12e recommandation
Il convient de créer un cadre légal de fonctionnement pour les associations citoyennes intéressées afin de concentrer leurs activités sur les aspects préventifs de la lutte contre la pédopornographie à laquelle elles revendiquent de participer.
Ces aspects préventifs consistent dans la promotion d'une véritable culture de réprobation, de protection et d'aide active au sein de la société.
Les associations citoyennes devraient être notamment encouragées à :
participer à la diffusion de brochures d'information;
diffuser des listes de points de contact;
distribuer du matériel d'éducation critique;
mener des campagnes de sensibilisation aux règles de sécurité sur internet;
participer à la promotion de sites éducatifs.
Les associations citoyennes concernées par la pédopornographie doivent disposer d'une structure transparente. Les autorités doivent savoir qui se trouve derrière une association citoyenne intéressée par ces matières et quelles initiatives sont prises par cette association. Les représentants de ces associations citoyennes doivent faire preuve d'un comportement irréprochable.
13e recommandation
Il convient de veiller à ce que les canaux de collaboration avec Interpol et avec les polices des pays de départ de la pédopornographie soient utilisés de façon très rapide, en particulier avec la Russie. Des procédures particulières pour internet existent et le Sénat recommande de les utiliser systématiquement.
Les recommandations ont été approuvées à l'unanimité des 9 membres présents.
Le présent rapport a été approuvé à l'unanimité des 9 membres présents.
Le rapporteur, | La présidente, |
Jean-Pierre MALMENDIER. | Anne-Marie LIZIN. |