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M. François Roelants du Vivier (MR). - Le président de la commission de la protection de la vie privée vient de faire parvenir aux membres des deux Chambres le rapport d'activités de cette commission pour 1999, 2000 et 2001 qui couvre donc trois ans d'activités alors que normalement le rapport doit être transmis tous les ans. Le président de la commission s'explique à ce sujet, le retard étant dû au fait que la situation de la commission est préoccupante.
Depuis 1992, nous disposons heureusement d'une autorité indépendante de contrôle et de protection des données. Il s'agit en effet de protéger les libertés fondamentales quelles que soient les techniques concernées. Il convient évidemment que cette autorité indépendante, en l'occurrence la commission de protection de la vie privée, soit pleinement opérationnelle afin de remplir les missions que lui a confiées, à l'époque, le Législateur. Or, dès les premières lignes du rapport de la commission, le constat suivant s'affiche « ni la commission, ni son secrétariat ne disposent plus des moyens, notamment organisationnels et en personnel, leur permettant d'assurer correctement leurs diverses missions et de faire face aux évolutions ».
On assiste en effet à une double évolution : d'une part, celle de la technique informatique sans cesse plus prégnante - il suffit d'évoquer le phénomène Internet qui s'introduit partout y compris sous la forme de l'e-government - et d'autre part, une seconde évolution qui concerne la commission de la vie privée dont le personnel, qui comptait 34 agents en 1997, n'en compte plus aujourd'hui que 18 et un mi-temps.
Dans des pays comparables au nôtre en terme de population, les Pays-Bas ou la Suède, les instances comparables à notre commission de protection de la vie privée disposent chacune d'une équipe d'une cinquantaine de personnes. La différence est donc grande.
Outre ce manque d'agents, la commission elle-même n'est pas au complet. Trois de ses seize membres ont démissionné, certains depuis plusieurs années, et leur remplacement n'a toujours pas eu lieu alors qu'il devrait être proposé au Parlement en vertu des articles 24 et 25 de la loi sur la protection de la vie privée.
Bref, en tout cas, à la lecture du rapport de la commission et encore davantage à la suite de mes contacts avec les responsables de celle-ci, j'estime que la situation vire à la catastrophe. Qu'il me suffise de souligner que, s'agissant d'une matière où, comme je l'ai déjà dit, l'informatique prend une place de plus en plus prépondérante, la commission ne dispose en tout et pour tout que de deux informaticiens dont l'un ne l'est pas au sens technique, et on mesurera le risque encouru par le citoyen dont la vie privée n'est, le cas échéant, pas protégée par des moyens appropriés.
La tendance aurait dû être inverse, à savoir un renforcement du personnel de la commission, eu égard à l'évolution technologique, singulièrement lorsqu'on sait que les techniques d'écoute et d'intrusion dans la vie privée par des moyens informatiques sont de plus en plus redoutables d'efficacité.
Je ne puis imaginer, monsieur le ministre, que, dans un État démocratique comme le nôtre, le gouvernement se satisfasse d'une situation où la vie privée des citoyens est, de fait, de moins en moins protégée. Des mesures énergiques doivent être prises pour redresser une situation qui est de moins en moins tolérable.
En outre, je vous le dit franchement, monsieur le ministre, je pense que pour assurer pleinement l'indépendance de la commission de la protection de la vie privée, il serait préférable de la détacher d'un département ministériel pour la rattacher aux Chambres législatives. Mais auparavant, je souhaiterais savoir ce que vous répondez à l'état des lieux effectué par la commission de la protection de la vie privée.
Je serai très attentif à votre réponse car l'enjeu est celui des libertés fondamentales de chaque citoyen.
M. Marc Verwilghen, ministre de la Justice. - À la lecture de votre question, monsieur Roelants du Vivier, et en vous écoutant maintenant, je dois vous avouer que j'ai cru entendre la voix du président de la commission. J'ai reçu ce dernier à plusieurs reprises et je sais qu'il plaide toujours avec beaucoup de conviction pour sa cause, ce qui est d'ailleurs compréhensible.
En ce qui concerne les problèmes de personnel du secrétariat de la commission de la protection de la vie privée, le cadre statutaire du secrétariat est resté identique depuis 1997et prévoit quinze personnes, dont un conseiller et six conseillers adjoints. Il est complet, à l'exception d'un conseiller adjoint qui a démissionné et dont le remplacement est en cours, et d'un traducteur, dont le travail est assuré par le service du traduction de mon ministère.
En ce qui concerne les contractuels, l'arrêté royal du 21 décembre 2001 autorisant des administrations et autres services des ministères et des organismes d'intérêt public à engager des contractuels en vue de répondre à des besoins exceptionnels et temporaires en personnel autorise l'engagement de cinq conseillers adjoints supplémentaires, d'un assistant administratif et d'un commis. Ce personnel est déjà engagé et est en fonction, à l'exception d'un conseiller adjoint qui prendra ses fonctions en juillet.
Le personnel du secrétariat de la commission se compose donc d'un conseiller, d'un informaticien, de onze conseillers adjoints, d'un chef administratif, de quatre assistants administratifs, de deux commis et d'un employé administratif.
Par contre, le conseil des ministres du 9 octobre 2001 a décidé de bloquer les recrutements dans l'ensemble de la fonction publique pour des motifs budgétaires. Les contractuels qui partent ne seront donc pas remplacés.
Selon le rapport 1999-2001 de la commission, les problèmes de personnel seraient accrus par sa rotation élevée due à l'absence de perspective de carrière et au débauchage par des firmes privées qui proposent un salaire plus attractif.
À cet égard, il faut rappeler que les juristes du secrétariat de la commission sont des conseillers adjoints du ministère de la Justice détachés auprès de la commission et qu'ils sont payés au barème des fonctionnaires au grade de conseiller adjoint.
S'ils désirent être promus, ils ont la possibilité de demander une promotion dans le cadre de l'administration centrale du ministère de la Justice, lorsqu'une vacance se déclare.
En ce qui concerne le remplacement des membres, l'article 24 de la loi dispose que les membres de la commission sont désignés à tour de rôle par la Chambre et le Sénat sur des listes comprenant, pour chaque mandat à pourvoir, deux candidats présentés par le conseil des ministres.
Le stade de la procédure diffère actuellement selon les membres de la commission à remplacer. Pour le remplacement d'un membre suppléant francophone qui a démissionné, un courrier a été adressé à deux personnes anciennement candidates. Dès qu'elles auront confirmé leur candidature, les noms seront soumis au conseil des ministres, qui les présentera au Sénat. Dans le cas contraire, un appel aux candidats sera également publié au Moniteur belge mais cela prendra forcément plus de temps.
Pour le remplacement du membre effectif néerlandophone qui a démissionné, un appel aux candidats doit être publié incessamment au Moniteur belge. En fonction des candidatures reçues, le conseil des ministres choisira alors deux noms qu'il présentera au Sénat.
Pour le remplacement du membre suppléant francophone non démissionnaire, l'article 24 paragraphe 4 de la loi dispose que « les membres ne peuvent être relevés de leur charge par la Chambre qui les a nommés qu'en cas de manquement à leurs devoirs ou d'atteinte à la dignité de leur fonction ».
Conformément à la demande du président de la commission de la protection de la vie privée, qui souhaiterait remplacer ce membre en raison de son absentéisme, j'ai préparé un courrier destiné au président du Sénat afin que celui-ci organise un vote relevant ce membre de ses fonctions. Cela fait, il sera possible de faire un appel aux candidats dans le Moniteur belge pour pourvoir à son remplacement.
Pour ma part, je ne suis pas opposé au placement de la commission sous autorité de la Chambre. Il serait cependant utile que la commission s'exprime sur la question, mais il semblerait qu'il n'y ait aucun consensus en son sein pour ce faire. Selon moi, la proposition défendue par le président de la commission se fonde sur des éléments acceptables. Cependant, une position unique doit être prise à ce sujet.
Je suis disposé à rechercher toute solution qui permettra à la commission de remplir ses missions, entourée des garanties les plus hautes en matière de transparence et de démocratie. Comme vous pourrez le constater d'après les éléments que je vous ai communiqués, toutes les mesures sont prises à cet égard.
Reste la question de l'instance finalement responsable pour la commission, sur laquelle la commission devrait s'exprimer d'une seule voix.
M. François Roelants du Vivier (MR). - Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse, quelque peu compliquée en ce qui concerne les chiffres relatifs au personnel. Vous parlez de 21 personnes et le président de la commission de 18,5 unités, élément qui reste à vérifier. Par ailleurs, il semble qu'en 1997, ce chiffre était beaucoup plus élevé, soit 34 personnes. Vous faites état d'un cadre complet ou presque, mais les chiffres que vous présentez ne font aucune référence à la situation de l'époque.
Par ailleurs, monsieur le ministre, comme je l'ai signalé, l'attention portée à ce type de commission dans d'autres pays, comparables au nôtre, est telle que le personnel y est beaucoup plus important : en Suède ou aux Pays-Bas, ces commissions comptent près de 50 personnes et peuvent donc effectuer un travail beaucoup plus important. D'autant que, comme le montre le rapport, des plaintes sont également introduites par courrier électronique, ce qui occasionne un surcroît de travail.
Je suis heureux d'apprendre que la commission sera bientôt complète.
Enfin, pour ce qui concerne l'autorité responsable de la commission, le président de la commission, vous l'avez dit, a évoqué la possibilité des Chambres. J'avais eu pour ma part la même idée en lisant le document et je lui en avais parlé. Dès lors, je prendrai une initiative parlementaire en ce sens pour faire avancer le débat. Nous pourrons ainsi discuter plus largement de cette question.
M. Marc Verwilghen, ministre de la Justice. - Nous sommes tenus de respecter le cadre légal. Il est toutefois possible d'élargir celui-ci par une procédure qui peut être introduite par le président de la commission. Deux ministres doivent intervenir en la matière, à savoir le ministre du Budget et le ministre de la Fonction publique. Cette voie n'a pas été suivie. Je puis admettre que la charge de travail de la commission ait considérablement augmenté depuis le début de ses activités. Mais une jurisprudence s'est en quelque sorte installée, permettant d'avancer plus rapidement dans certains dossiers. Les procédures doivent être respectées. Comme je l'ai toujours dit au président de la commission, je ne suis pas opposé à un élargissement du cadre dans le cas où la commission ne serait pas en mesure de gérer l'afflux des dossiers avec le personnel actuellement prévu.
-Het incident is gesloten.
De voorzitter. - De volgende vergaderingen vinden plaats donderdag 18 april 2002 om 10 uur en om 15 uur.
(De vergadering wordt gesloten om 16.45 uur.)