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M. Francis Poty (PS). - La presse annonce un accord gouvernemental pour lutter contre le tabagisme et un arrêté redessinant les paquets de cigarettes, ainsi que des contrôles sérieux dans l'horeca.
Je ne puis qu'applaudir à cette volonté d'action qui va dans le sens d'une directive européenne, mais aussi du combat de l'OMS et du Conseil de l'Europe où, en tant que rapporteur, je mets la main à des recommandations à adresser aux pays membres.
À cet égard, je suis parfaitement d'accord avec la contre-publicité qui doit être développée d'urgence sur les paquets de cigarettes, avec des slogans percutants imprimés lisiblement.
Cependant, la philosophie qui sera développée devant le Conseil de l'Europe aborde le problème sous un angle peut-être nouveau.
Tout d'abord, respecter en priorité la santé des non-fumeurs et donc, indirectement, celle des fumeurs, amenés à réduire ou à cesser ainsi leur consommation. À cet égard, les slogans proposés me semblent insuffisants. Par exemple, au Canada, un avertissement précise en lettres blanches sur grand fond noir que « La fumée du tabac provoque le cancer du poumon chez les non-fumeurs », appelant ainsi au respect de ceux qui ont fait le choix de vivre sans le tabac et au respect de le santé des autres.
Ensuite, l'interdiction de fumer doit être totale dans les endroits fermés publics, sauf dans les lieux bien isolés prévus à cet effet.
Enfin, il convient d'appliquer le principe du pollueur payeur et de réclamer une redevance - non une taxe - nouvelle d'un montant important, conformément aux recommandations de l'OMS, pour financer la contre-publicité et la recherche voire les soins en matière de santé. Les recommandations de l'Organisation mondiale de la santé soulignent que seule une augmentation conséquente décourage les jeunes de commencer à fumer.
Quel est, madame la ministre, votre sentiment vis-à-vis de ces options et vos priorités dans les actions que vous désirez mener dans les prochaines semaines, voire dans les prochains mois ?
(M. Jean-Marie Happart, vice-président, prend place au fauteuil présidentiel.)
Mme Magda Aelvoet, ministre de la Protection de la consommation, de la Santé publique et de l'Environnement. - Les actions de contrôle dans le secteur Horeca ont justement pour objectif de faire respecter en priorité la santé des non-fumeurs. Nous disposons depuis 1991 d'un arrêté royal dont l'application n'a toutefois pas toujours été exemplaire, et c'est un euphémisme. Dès mon entrée en fonction, j'ai demandé à plusieurs reprises que l'instance responsable, l'Inspection des denrées alimentaires, s'en occupe. Nous avons mené l'année passée une grande action de contrôle exigeant le respect des deux mesures prévues : d'une part, des installations d'extraction de la fumée doivent être présentes dans tous les cafés, restaurants, etc. où l'on fume. D'autre part, les établissements dépassant 50m² doivent prévoir des zones séparées « fumeurs » et « non-fumeurs ».
Nous avons pu constater lors de la grande action de l'année dernière que le fait d'annoncer l'action a un effet positif sur le comportement des exploitants. Nous avons ainsi constaté lors du deuxième contrôle une amélioration nette par rapport au premier contrôle.
Je regrette profondément que certains médias présentent ces contrôles comme une chasse aux sorcières ou une déclaration de guerre au secteur. Ce n'est pas du tout le cas. Je fais respecter le dispositif réglementaire, ce qui est absolument nécessaire.
En ce qui concerne l'évolution au plan européen, l'arrêté royal qui va transposer les dispositifs européens sera une traduction fidèle des décisions européennes. Vous citez l'exemple du Canada. Nous constatons que dans un certain nombre de domaines, l'Europe est plus performante alors qu'elle l'est moins dans d'autres domaines. Au sein de l'OMS, je sais que l'Europe joue un rôle plutôt plus positif que de nombreux autres pays, selon ce que m'en a dit Mme Brundtland lors de sa visite d'il y a quelques semaines à Bruxelles. Nous essayons d'adopter une attitude conséquente, tant pour la politique nationale, européenne qu'internationale, que ce soit au Conseil de l'Europe ou à l'OMS.
En ce qui concerne l'interdiction de fumer dans les endroits publics, nous disposons d'un arrêté assez bien fait. Il y a environ quatre ans, on nous a adressé des réclamations selon lesquelles les interdictions de fumer à Bruxelles-National n'étaient pas assez clairement signalées. Depuis lors, les choses ont évolué. Il y a clairement des zones réservées aux fumeurs, toutes les autres zones leur étant interdites.
Pour ce qui est de l'isolement, nous n'en sommes pas encore là. À Zaventem - Bruxelles-National - par exemple, les zones « non fumeurs » sont délimitées mais pas complètement isolées.
Quant à l'évolution du dossier « Fonds Tabac », nous avons pris, en cabinet restreint, une décision importante qui doit encore être négociée avec les régions et les communautés, dont relèvent les politiques de prévention. Ce point sera débattu au début de la semaine prochaine et j'espère vivement pouvoir créer ce Fonds en 2002.
Par ailleurs, une augmentation de la redevance n'est pas prévue dans un premier temps. La Belgique a mené une politique de relèvement des prix. Les fonds dégagés par la hausse des accises permettront de financer la publicité antitabac qui sera réalisée, dans une très large mesure, par les communautés et les régions. Celles-ci seront très étroitement associées à l'élaboration du dossier.
M. Francis Poty (PS). - Je remercie madame la ministre pour ses propositions très intéressantes. Je ne puis que l'encourager dans un combat que je sais difficile parce que des forces d'inertie considérables sont ici en jeu. Je sais que la route sera longue et en tant que sénateur de communauté, je ne manquerai pas d'intervenir afin qu'il y ait un investissement à ce niveau également.