2-935/1 (Sénat)
1490/001 (Chambre)

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Sénat et Chambre des Représentants de Belgique

SESSION DE 2001-2002

19 NOVEMBRE 2001


Le Conseil européen informel de Gand du 19 octobre 2001


RAPPORT

FAIT AU NOM DU COMITÉ D'AVIS FÉDÉRAL CHARGÉ DES QUESTIONS EUROPÉENNES

PAR MM.
Ph. MAHOUX (S) ET H. DE CROO (Ch)


SOMMAIRE


  1. Briefing concernant le Conseil européen de Gand
    1. Exposé du premier ministre
    2. Échange de vues
    3. Réponse du premier ministre
    4. Répliques
  2. Debriefing concernant le Conseil européen de Gand
    1. Exposé du premier ministre
    2. Échange de vues
    3. Réponses du premier ministre

Annexes :
Déclaration des chefs d'État et de gouvernement de l'Union européenne et du président de la Commission européenne ­ Préparation de la mise en circulation de l'euro
Déclaration des chefs d'État et de gouvernement de l'Union européenne et du président de la Commission européenne ­ Conséquences des attentats du 11 septembre 2001 et lutte contre le terrorisme
Déclaration des chefs d'État et de gouvernement de l'Union européenne et du président de la Commission européenne ­ Discussion de la situation économique

Le comité d'avis a consacré deux réunions au Conseil européen informel de Gand (le 19 octobre 2001). Le présent rapport est un aperçu succinct des discussions qui ont eu lieu avec le premier ministre, M. Guy Verhofstadt, avant et après le conseil.

Il est en effet d'usage, au comité d'avis, d'organiser, avant et après chaque réunion du Conseil européen, un échange de vues avec le premier ministre et/ou un autre membre du gouvernement belge sur la préparation du Conseil européen et la position qu'entend y défendre la Belgique ainsi que sur les résultats de ce Conseil.

A. BRIEFING CONCERNANT LE CONSEIL EUROPÉEN DE GAND

Le mercredi 17 octobre 2001, une réunion commune du Comité d'avis fédéral chargé des questions européennes, de la commission des Relations extérieures et de la Défense du Sénat ainsi que de la commission des Relations extérieures de la Chambre des représentants a été organisée à l'occasion du Conseil européen de Gand (19 octobre 2001). Au cours de son exposé, M. Verhofstadt a fourni des détails sur les priorités de la présidence belge et les positions du gouvernement belge.

1. Exposé du premier ministre

Le premier ministre fonde son exposé sur la lettre énonçant les thèmes à traiter qu'il a envoyée à ses collègues et à laquelle il fait référence. Il souligne en outre que, comme le Sommet de Gand est un sommet informel et les sommets de ce type ne donnent jamais lieu à des conclusions, l'objectif est de préparer de manière assez condensée une série de dossiers dans la perspective du sommet de Laeken. Il est toutefois possible de tirer quand même une série de conclusions.

a) L'introduction de l'euro

On procédera tout d'abord à une dernière évaluation de l'introduction de l'euro et on réalisera un état des lieux dans les divers États membres. On se basera, à cet effet, sur un rapport élaboré par le président du Conseil ECOFIN, M. Reynders, le président de la Banque centrale européenne, M. Duisenberg, et le commissaire Solbes. Les trois intéressés participeront au débat.

b) Conséquences économiques des événements du 11 septembre 2001

On abordera ensuite les conséquences économiques des événements du 11 septembre 2001. Le Conseil consacrera une première discussion à la situation économique mondiale et européenne. On demandera éventuellement que soit rédigé très rapidement un rapport analysant les conséquences des attentats terroristes du 11 septembre 2001. Ce rapport permettrait de prendre des initiatives en vue de lutter contre le ralentissement de la croissance.

c) La Déclaration de Laeken

La troisième discussion concernera la Déclaration de Laeken et l'avenir de l'Europe. L'objectif est d'obtenir un premier échange de vues à ce sujet. Le premier ministre fera tout d'abord le point sur les travaux du « Groupe de Laeken » et indiquera quels seront les thèmes principaux et la structure de cette déclaration. On discutera ensuite du quasi-consensus qui a été dégagé à propos de la méthode. On a réalisé des progrès considérables en la matière au Conseil « Affaires générales ». L'objectif est de désigner une présidence forte, ainsi qu'un présidium composé d'un représentant respectivement de la Commission européenne, des parlements nationaux, du Parlement européen et des gouvernements nationaux. Ces quatre composantes seraient également représentées au sein d'une Convention. Les modalités de création de ces structures ont déjà été exposées au cours de la réunion de la COSAC.

Le premier ministre souligne que le texte de la Convention doit être de préférence un texte de consensus. Sinon, il faudrait à tout le moins formuler une série d'options et indiquer la valeur de celles-ci, de manière qu'on puisse voir clairement s'il s'agit d'options majoritaires ou d'options minoritaires. Il faut donc trouver une voie médiane entre un texte de consensus et un ensemble de suggestions non contraignantes, pour que l'on puisse obtenir un plus grand engagement vis-à-vis des résultats de la Convention.

d) La lutte contre le terrorisme

Le dernier sujet de discussion concerne l'Afghanistan et la lutte contre le terrorisme. On entend, en l'occurrence, examiner la situation actuelle à la lumière des décisions prises le 21 septembre 2001. À cette date, le Conseil européen spécial a tiré des conclusions substantielles et cohérentes concernant les événements du 11 septembre 2001, la légitimité de la réaction américaine et les objectifs de cette réaction. Par ailleurs, on a élaboré un plan d'action contre le terrorisme et examiné les possibilités diplomatiques de l'Union européenne dans ce conflit. Il faut à présent évaluer tous ces aspects. La tâche principale sera, en l'espèce, d'évaluer la mise en oeuvre du plan d'action. La Commission établira d'ailleurs un rapport intermédiaire sur l'exécution du plan d'action.

Au demeurant, les États-Unis ont transmis une série de demandes concrètes à la présidence belge en réponse à la demande faite par le premier ministre de faire des propositions concernant une série de mesures que l'Union européenne pourrait prendre. Ces mesures seront présentées au Conseil, tout comme un aperçu des initiatives qui auront déjà été prises en la matière, et elles seront examinées à la lumière du rapport de la Commission.

e) Élargissement

Enfin, il y aura un bref échange de vues sur les progrès des négociations relatives à l'élargissement, sur la base d'une note informative de la Commission européenne sur l'élargissement. Le véritable débat de fond en la matière pourra se dérouler à Laeken, lorsque le rapport stratégique annuel de la Commission sera disponible.

f) Conclusion

Voilà les cinq thèmes qui seront examinés au cours du Conseil européen. Le premier ministre tient une fois encore à mettre l'accent sur le débat relatif à l'Afghanistan, dans le cadre duquel il convient de poursuivre sur la voie tracée le 21 septembre 2001. Il faudra étoffer la position européenne commune, notamment en confirmant le point de vue sur les résolutions 1368 et 1373 des Nations unies, et définir plus avant le rôle de l'Union européenne dans les domaines humanitaire et diplomatique.

Il est donc possible que des décisions soient prises en la matière, même si cette procédure est particulièrement inhabituelle dans le cadre d'un Conseil européen informel.

2. Échange de vues

M. Marc Eyskens, député, confirme que ce sommet est important en raison du moment où il a lieu. Les conséquences économiques des événements du 11 septembre 2001 sont vraisemblablement plus graves qu'on ne l'a pensé initialement et s'ajoutent à un ample mouvement de récession amorcé avant cette date. C'est ce que révèlent notamment divers indicateurs de croissance, que l'on a dû corriger. Les conséquences sont de surcroît considérables dans certains secteurs.

Il y a en outre une diminution de la demande d'investissement, qui est encore renforcée par une diminution de la demande de consommation, créant ce que les économistes appellent communément un « effet multiplicateur ». Il y a sur terre une série de pays où ce problème se pose de manière encore plus aiguë, tels que le Japon (malgré un taux directeur de 0 %), l'Argentine, la Turquie, etc. D'une manière générale, les pays en développement pâtissent beaucoup des chutes généralisées des prix. Les cours peu élevés du pétrole constituent aussi un problème pour des pays tels que la Russie et leur économie. La question qui se pose alors inévitablement est de savoir comment l'Europe peut faire face à une telle situation.

La seule éclaircie dans la grisaille est toutefois que l'on ne connaît pas actuellement de stagflation. On n'observe donc pas d'inflation s'accompagnant d'une croissance économique très faible. Si l'inflation est à peine perceptible, les autres difficultés sont quant à elles multiples.

On peut prendre une série de mesures. C'est ainsi qu'il convient d'étudier le principe de la politique d'argent à bon marché, qui se caractérise par un abaissement des taux d'intérêt par la Banque centrale européenne. Il convient toutefois en l'espèce de faire preuve de prudence lorsque l'on agit sur le taux directeur, comme le fait actuellement la BCE. Une politique monétaire quantitative est bien plus intéressante, en ce sens que l'on procède à une injection massive de liquidités dans le circuit économique.

Le taux d'intérêt doit par contre être épargné afin de ne pas affaiblir l'euro et d'éviter des situations comme en a connu le Japon, où, à cause d'un taux de 0 %, l'argent était devenu si bon marché qu'on préférait thésauriser (phénomène appelé communément « trappe de liquidités »).

De plus, il y a une marge très étroite pour une inflation keynésienne, ce qui nécessite que l'on doive à tout moment défendre le pacte de stabilité. Il y a très peu de pays en Europe qui peuvent compter sur un surplus budgétaire, et la Belgique doit elle aussi faire preuve d'une extrême prudence. On ne peut donc réduire, en faisant preuve d'une très grande prudence, la pression fiscale et parafiscale que dans la mesure où il y a suffisamment d'effets de retour.

Enfin, du fait l'introduction de l'euro, l'on ne pourra plus recourir à la solution consistant à adapter les cours de change.

Force est dès lors de conclure qu'il faudra suivre très attentivement l'évolution du coût. Il s'avère qu'on se situe, en Belgique, au-dessus de la norme autorisée en matière de coût salarial, avec tous les problèmes qui s'ensuivent.

Un deuxième point concerne l'Afghanistan. Les opérations militaires qui s'y déroulent ne sont pas terminées. Il est plus que vraisemblable qu'il y aura des opérations terrestres limitées pour tenter de capturer des terroristes afin de les traduire en justice, ce qui est primordial d'un point de vue juridique. Ceci pose problème à plus d'un parti de la majorité.

Il importe par conséquent de réfléchir, au Sommet européen, à une solution politique qui ne peut en aucun cas consister à confier le pouvoir à l'alliance du Nord, mais plutôt à créer un gouvernement de coalition oeuvrant dans le cadre d'une tutelle internationale. La charte des Nations unies peut, à cet égard, constituer une source d'inspiration. Une solution associant les Nations unies pourrait donc certainement être une option. Dans ce cadre, il ne faut pas oublier de continuer à rechercher une solution aux problèmes entre Israël et la Palestine.

Enfin, en ce qui concerne la Déclaration de Laeken, M. Eyskens tient à attirer l'attention sur l'existence, parallèlement à l'article 5 du Traité OTAN, d'un article 5 dans le Traité de Bruxelles relatif à l'UEO. La question du contrôle parlementaire de la politique de défense européenne est aujourd'hui intergouvernementale, non communautaire. Le Sommet européen doit donc être l'occasion d'inviter les parlements nationaux, le Parlement européen et l'Assemblée de l'UEO à rechercher une certaine forme de synergie entre eux. La suppression de la dernière n'est pas une solution, étant donné que cela créerait un vide qui ne pourrait être comblé par aucune autre assemblée.

M. Georges Dallemagne, sénateur, souhaite aussi revenir sur les problèmes en Afghanistan. En effet, le 21 septembre 2001, l'Europe s'est clairement déclarée solidaire des États-Unis. Or, aujourd'hui, la Belgique et d'autres États membres émettent de plus en plus de réserves et de doutes à propos de cette solidarité. La question de la poursuite, de l'utilité et de la finalité des bombardements doit dès lors être posée. Le moins que l'on puisse dire est que l'objectif est assez vague et a glissé, ces derniers temps, de la neutralisation de la personne de Ben Laden vers l'élimination du régime taliban pour en arriver aujourd'hui à une situation où l'on ne sait plus très bien quelle doit être la suite des événements.

L'action militaire est dans l'impasse et les efforts politiques et diplomatiques restent flous. La question est dès lors de savoir si l'Union européenne prendra position en l'espèce et comment elle voit l'avenir. Il importe que les États-Unis ne soient pas les seuls à déterminer l'avenir de l'Afghanistan, mais que l'Union européenne ait aussi un rôle à jouer.

Force est par ailleurs de constater qu'au sein de l'Europe elle-même, les actions ont été relativement hétérogènes. La question est dès lors de savoir comment l'Union européenne peut reprendre l'initiative et comment la présidence peut renforcer son rôle. Le fossé actuel entre les diverses initiatives individuelles des États membres et le manque d'uniformité dans l'action européenne est flagrant.

Ensuite, une question interne subsiste à propos de l'information du Parlement en ce qui concerne la situation sur le terrain. Il existe actuellement, au Sénat, une commission « Participation aux missions à l'étranger », qui s'est réunie trois fois et n'a obtenu, à ce jour, que des informations qui étaient déjà de notoriété publique. Cela signifie-t-il qu'il n'y a pas d'autres informations disponibles, ou cette commission peut-elle être réactivée de sorte qu'un échange d'informations plus confidentielles puisse avoir lieu ?

M. Herman De Croo, président de la Chambre, propose d'examiner la création d'un forum où le Sénat et la Chambre puissent être informés de manière confidentielle et mener un débat ouvert. Un tel forum, à l'image des comités P et R, où le gouvernement peut compter sur la confidentialité des réunions destinées à informer les représentants des groupes politiques, fait actuellement défaut.

M. André Geens, sénateur, tient à faire remarquer que la commission « Participation aux missions à l'étranger » du Sénat n'est pas composée de manière traditionnelle, et peut se réunir en toute confidentialité.

M. Dirk Van der Maelen, député, tient à formuler trois considérations à propos de la Déclaration de Laeken. On demande tout d'abord au premier ministre s'il peut communiquer davantage d'informations sur la « Convention » et sur la manière dont les divers parlements belges y seront représentés. Il y a ensuite la question de savoir ce qu'il en est du forum qui représente la société civile et doit l'associer à la « Convention ». Enfin, M. Van der Maelen souhaite aussi obtenir des informations sur le contrôle parlementaire de la politique de défense européenne. Il renvoie à cet égard à la résolution qui est en cours d'examen tant à la Chambre qu'au Sénat à propos de cette question. Ce point de vue commun des deux chambres invite à étudier la possibilité de créer un organe mixte Parlement européen-parlements nationaux.

Par ailleurs, il y a la question de la Pologne. L'adhésion semble poser quelques problèmes. Bien que la Pologne soit le plus grand État candidat à l'adhésion de la première vague, il est indéniable que la transposition de l'acquis communautaire y pose problème.

M. Van der Maelen souhaite revenir sur l'évaluation de la situation en Afghanistan. Si cette évaluation s'impose, il est tout aussi nécessaire de suspendre simultanément les bombardements.

Les arguments qui le justifient sont aujourd'hui plus solides que jamais : la liste des cibles à frapper est épuisée, le risque de dommages collatéraux est plus élevé que jamais, des fissures apparaissent lentement mais sûrement dans le soutien des pays arabes à l'intervention américaine, la situation humanitaire en Afghanistan est catastrophique et les Talibans semblent prêts à envisager d'extrader Ben Laden. Ce sont là autant d'arguments valables qui justifient d'aborder au Sommet européen la question d'une interruption des actions en Afghanistan.

Enfin, M. Van der Maelen se réjouit de l'intervention de l'Union européenne, le 21 septembre 2001, et du travail formidable accompli par le premier ministre et par le ministre des Affaires étrangères, M. Louis Michel. Il est à espérer qu'une activité diplomatique intense pourra se déployer à nouveau sur le terrain après le Sommet de Gand.

Il conviendra à cette occasion de souligner le rôle des Nations unies. Ainsi, l'Union européenne doit certainement soutenir le mandat de M. Brahmini, désigné par M. Koffi Annan, et ce non seulement dans le cadre du volet « coalition », mais aussi au niveau de la coordination de l'aide humanitaire. Un rôle comme celui que M. Kouchner a joué dans les Balkans, semble tout indiqué. De plus, il faut envisager à moyen terme la création au sein des Nations unies d'une agence de lutte contre le terrorisme. Une telle agence sera un facteur de stabilité et renforcera l'assise de cette lutte. Il ne fait aucun doute que les Nations unies ont un rôle à jouer au Proche-Orient, comme l'a affirmé M. Eyskens. Enfin, la lutte contre le terrorisme va de pair avec le tarissement des sources de financement des groupements terroristes. Les progrès enregistrés au sein du Conseil des ministres de l'Intérieur constituent un pas dans la bonne direction. Mais il faudrait aller plus loin et déclarer que le secret bancaire n'est pas un droit fondamental. Il faut lever le tabou qui entoure la question du secret bancaire si l'on veut détruire les constructions financières complexes de ces groupements terroristes.

M. Pieter De Crem, député, est d'avis que la technique précitée consistant à recourir à une Convention renforcera la légitimité du débat sur l'Europe, mais il relève aussi que cela ne devra pas conduire à vider l'élément « convention » de sa substance.

Par ailleurs, le Manifeste des 13, qui est intitulé « Réveillons l'Europe », demande que l'on fasse preuve de plus de créativité et d'audace dans le cadre du projet global européen. Le gouvernement doit dûment tenir compte de ce manifeste très précieux.

En ce qui concerne les actions en Afghanistan, il est clair qu'une controverse s'est fait jour au sein du gouvernement, ce qui se traduit aujourd'hui par l'absence symbolique de plusieurs membres des groupes Agalev, Écolo et PS. Ce manque d'unanimité porte sur la définition de la solidarité avec les États-Unis dans la lutte contre le terrorisme. Cette lutte est manifestement remise en question par certaines composantes du gouvernement et cette situation n'est d'ailleurs pas sans rappeler les divergences d'opinion gênantes constatées lorsque l'article 5 du Traité OTAN a été déclaré applicable. Une nouvelle notion s'est apparemment développée à propos des limites de cette solidarité, comme en témoignent les déclarations du ministre Michel à ce sujet. Cette dissension au sein du gouvernement empêche la présidence belge d'adopter une position cohérente.

M. De Crem souhaite poser cinq questions concrètes à propos de cette position. Premièrement, il souhaite connaître la position du gouvernement belge sur les actions militaires en Afghanistan. Deuxièmement, il souhaite savoir si le gouvernement maintiendra le point de vue défendu au mois de septembre ou s'il le modifiera. Troisièmement, si ce point de vue est adapté, les adaptations apportées seront-elles ou non fondées sur une évaluation faite à Gand ? Dans le même ordre d'idées, on peut se demander si la présidence belge mettra l'accent sur d'autres options permettant de démanteler les réseaux terroristes; Quatrièmement, il souhaite savoir si lors du Sommet de Gand, le gouvernement belge fera part d'un point de vue propre et, dans l'affirmative, quel est ce point de vue. Cinquièmement, M. De Crem demande quelle a été la réaction des chefs de gouvernement des autres États membres de l'UE lorsque cette évaluation a été mise à l'ordre du jour du Sommet de Gand.

Mme Miet Smet, députée européenne, souligne qu'une évaluation de la situation en Afghanistan doit porter surtout sur l'intervention de l'Union européenne dans ce conflit. Force sera de constater que malgré tous les efforts déployés par la présidence, cette intervention n'a pas été fameuse : on a agi en ordre dispersé et l'unité européenne doit être recherchée fort loin. Or, ce sont précisément les crises qui font avancer l'Europe. C'est la récession des années nonante qui a permis d'arriver à ce que l'on mène une politique de l'emploi au niveau européen. On ne peut dès lors qu'espérer que la situation en Afghanistan permettra d'engranger des progrès dans le domaine de la politique étrangère et de sécurité commune. Les propositions déposées jusqu'à ce jour sont très minces à cet égard. Il est donc logique que le Manifeste des 13 en appelle à plus d'ambition dans ce domaine.

Le second point qu'elle désire aborder concerne la date de l'élargissement, à savoir 2004. Cette date doit être maintenue et il faudra faire pression sur les pays candidats à l'adhésion pour qu'ils poursuivent les réformes nécessaires. La Pologne, par exemple, est confrontée à une série de problèmes qui n'ont rien de nouveau et l'Europe devra investir des sommes considérables pour permettre à ce grand pays de faire son entrée dans l'UE. Le problème sera identique pour les autres pays candidats.

Une dernière observation concerne un article paru dans le « Financial Times », dans lequel Berlin demande quand l'Allemagne pourra intervenir militairement. Parallèlement, le chancelier Schröder exige que la BCE diminue ses taux d'intérêts. Il y a donc beaucoup d'autres éléments dont il faudra tenir compte.

M. Georges Clerfayt, député, soutient globalement la politique étrangère du gouvernement. Il considère cependant que plusieurs observations s'imposent. S'agissant de la lutte contre le terrorisme, l'Union européenne peut donner le bon exemple en veillant à ce que tous les États membres ratifient le Traité de Rome relatif au tribunal pénal international. L'UE est en outre très bien placée pour convaincre les États-Unis d'en faire autant.

De plus, il convient de souligner le rôle des Nations unies à cet égard. L'ONU doit retrouver sa place au coeur de la lutte contre le terrorisme afin d'éviter un choc des civilisations.

Par ailleurs, l'Union européenne doit intervenir à nouveau dans le conflit israélo-palestinien. Le président Bush s'est prononcé récemment en faveur de la création d'un État palestinien. On constate donc une évolution sensible qui donne à l'UE une belle occasion de jouer un rôle plus actif dans la recherche d'une solution définitive à ce conflit.

M. Clerfayt déclare soutenir les suggestions de M. Eyskens concernant le rôle de la Belgique et de l'UE dans la création d'un contrôle parlementaire de la politique de sécurité commune. Le président du Sénat, M. Armand De Decker, a déjà fait une série de propositions dans ce sens.

Enfin, la Déclaration de Laeken ne peut pas oublier la Charte des droits fondamentaux. L'Union européenne doit se soumettre à la juridiction de la Cour européenne des droits de l'homme, ce qui permettra finalement de clarifier les rapports entre cette Cour et la Cour de Justice des Communautés européennes.

Mme Martine Dardenne, députée, souhaite tout d'abord souligner que l'arrivée tardive des membres du groupe Écolo/Agalev ne constitue absolument pas un signe de quelque nature que ce soit à l'égard de la politique du gouvernement.

Mme Dardenne confirme également la nécessité de créer un tribunal pénal international. Elle souhaite en outre voir renforcer le rôle potentiel de l'ONU dans la situation politique actuelle. Enfin, il est primordial que l'Union européenne joue un rôle sur la scène politique internationale car elle est la mieux placée pour nouer un dialogue constructif avec le monde arabe.

3. Réponse du premier ministre

a) Rôle de l'Union européenne dans la lutte contre le terrorisme

Le premier ministre revient tout d'abord sur les observations de Mme Smet concernant le rôle de l'Union européenne dans le conflit en Afghanistan. Le 21 septembre 2001, l'Union européenne a pour la première fois parlé d'une seule voix dans une matière qui est encore en plein développement dans le cadre des deuxième et troisième piliers. Auparavant, l'Europe avait non pas 1 mais 15 points de vue sur les problèmes tels que l'Irak. L'objectif est donc que le Conseil de Gand prenne à nouveau clairement position et qu'il arrête son point de vue en fonction des événements intervenus depuis le 21 septembre 2001.

Il va de soi que le rôle spécifique de l'Union européenne dans ce conflit doit être renforcé et la solidarité européenne doit être traduite dans les faits. Le Sommet de Gand évaluera dès lors la mise en oeuvre du plan d'action contre le terrorisme. Quelque 73 actions ont été décidées et font actuellement l'objet d'une discussion au Conseil affaires générales, sur la base d'un premier rapport d'évaluation. L'Europe ne peut plus se permettre de ne rien dire. Le Conseil européen de Gand devra prendre position.

Il convient en outre d'observer que la liste que les États-Unis ont transmise à la demande de la présidence européenne et qui propose une série de mesures à prendre pour lutter contre le terrorisme, démontre une nouvelle fois que l'Union européenne est reconnue comme interlocuteur officiel.

Il va de soi que les États membres continueront à prendre des initiatives individuelles sur le terrain. Mais cela ne pose aucun problème tant que l'Europe peut continuer à défendre un point de vue commun chaque fois que cela s'impose, comme lors du Sommet de Gand.

Il n'est pas exclu que le Conseil européen confie de nouveaux mandats à la présidence belge en vue d'une médiation dans le conflit au Moyen-Orient. On ne pourra toutefois communiquer d'informations supplémentaires à ce sujet qu'au moment où ces mandats seront attribués.

b) Le rôle des Nations unies

Le premier ministre est tout à fait d'accord pour considérer que les Nations unies doivent jouer un rôle plus important dans ce conflit. Il faut continuer à développer les efforts diplomatiques en vue de maîtriser le conflit actuel.

Le gouvernement belge est très favorable à la création d'un tribunal pénal international. L'Union européenne devra travailler davantage encore à rendre possible la création de ce tribunal.

c) Aide humanitaire

Sur le plan de l'aide humanitaire aussi, l'Union européenne peut jouer un rôle très spécifique, car les instruments et les programmes flexibles requis existent déjà au sein de l'UE. Il est d'ailleurs parfaitement possible que l'on attribue de nouveaux mandats en la matière à la présidence. C'est d'ailleurs également ce que l'on a fait le 21 septembre 2001.

d) Les conséquences économiques du 11 septembre 2001

Le premier ministre souscrit au raisonnement de M. Eyskens en ce qui concerne le pacte de stabilité. C'est en effet grâce à ce pacte que les fondements de l'économie européenne sont sains. Le pacte doit par conséquent être conservé et défendu à tout prix.

Il n'empêche qu'il y a lieu, maintenant, d'évaluer l'économie suite aux événements du 11 septembre 2001. La présidence belge entamera l'évaluation lors du Conseil européen de Gand.

e) La Déclaration de Laeken et l'avenir de l'Europe

Le premier ministre confirme que l'on se dirige vers un consensus quant à la méthode. À ce sujet, le forum jouera un rôle pivot. Comme la proposition prévoit actuellement que cet organe inclura deux parlementaires nationaux, les parlements concernés joueront un rôle important dans le fonctionnement du forum.

Les ministres des Affaires étrangères ont fait récemment une proposition qui permettra de mieux concrétiser le rôle de ce forum. Le but serait de créer de manière souple un réseau par l'intermédiaire duquel les partenaires sociaux, les ONG et d'autres parties pourront entrer en contact direct avec la Convention et inversement. On évite ainsi la formation de deux grands groupes lourds. Cette proposition sera défendue à Laeken.

La question relative au rôle des parlements nationaux doit être examinée dans le cadre plus large de la fusion des trois piliers européens. La Déclaration de Laeken abordera très certainement cette problématique.

En ce qui concerne le Manifeste des 13, le premier ministre tient à souligner qu'il constitue un appui bienvenu pour la présidence.

f) Élargissement

Au Sommet de Gand, le débat sur l'élargissement sera mené sur la base du rapport intermédiaire de la Commission européenne. En ce qui concerne la Pologne, le premier ministre prévoit de se rendre dans ce pays dans les jours à venir.

g) Réunion supplémentaire en vue de la communication d'informations sensibles

Le premier ministre est disposé à participer à une réunion supplémentaire éventuelle au cours de laquelle des informations militaires concrètes sur les actions sur le terrain pourront être échangées. Cette rencontre pourra compléter les informations qui ont déjà été communiquées au sujet des diverses contributions à l'action en Afghanistan.

4. Répliques

M. Raymond Langendries, député, partage en grande partie les vues du premier ministre. Il est en effet de la plus haute importance que ce conseil informel puisse prendre une position commune formelle sur l'actualité politique, comme il l'a déjà fait le 21 septembre 2001. À ce sujet, il est extrêmement important que les points de vue nationaux de certains États membres ne viennent pas miner cette vision commune. Il y a toujours un risque de division au sein de l'Union européenne. Une présidence belge forte aura donc un rôle crucial à jouer à ce sujet. Pour cela, il faut un gouvernement uni et fort qui ne se laisse pas aller à des disputes internes.

M. Langendries propose de créer rapidement, au sein de la Chambre des représentants et éventuellement au sein du Sénat, un organe confidentiel qui puisse transmettre certaines informations spécifiques et sensibles aux parlementaires. Le premier ministre est certainement favorable à cette proposition, puisqu'il était l'un des partisans de la création, au sein du Sénat, d'une commission des missions à l'étranger. À l'époque, on n'est pas parvenu à créer un tel organe à la Chambre, mais il faut tenter de le faire à nouveau aujourd'hui.

Le premier ministre Guy Verhofstadt souscrit entièrement à cette proposition.

M. Pieter De Crem, député, souhaite encore obtenir quelques éclaircissements. Il aimerait que le premier ministre donne une réponse plus claire à la question de la solidarité. Cette question restera d'actualité après la présidence belge. Est-il exact de dire que le gouvernement belge ne modifiera pas son attitude vis-à-vis des actions en Afghanistan, que le gouvernement approuve l'utilisation des moyens mis en oeuvre et les mesures qui sont prises, que l'ensemble du gouvernement soutient ce point de vue et qu'il n'y a pas de limites à la solidarité avec les partenaires de l'OTAN ? Vu les positions prises que défend actuellement le premier ministre, on peut répondre à cette question par l'affirmative.

B. DEBRIEFING SUR LE CONSEIL EUROPÉEN DE GAND

Le premier ministre, M. Guy Verhofstadt, a participé, le mercredi 24 octobre 2001, à un échange de vues sur les résultats du Conseil européen informel de Gand (19 octobre 2001) avec les membres du Comité d'avis fédéral chargé de questions européennes, de la commission des Relations extérieures et de la Défense du Sénat et de la commission des Relations extérieures de la Chambre des représentants.

1. Exposé du premier ministre

Le premier ministre attire l'attention sur la discussion qu'il a eue dans la matinée avec les membres du Parlement européen au sujet du Conseil informel de Gand. Ce débat a été très fructueux et les résultats sont largement positifs.

Le premier ministre fait également référence à l'exposé qu'il a fait le 23 octobre 2001 lors de l'ouverture de l'année académique du campus Natolin du Collège européen en Pologne. Dans ce discours, le premier ministre a émis des réflexions sur le nouvel ordre mondial après le 11 septembre 2001.

En ce qui concerne le Conseil européen de Gand, même, les chefs d'État et les chefs de gouvernement de l'Union européenne ainsi que le président de la Commission ont fait trois déclarations. Ces déclarations portent :

­ sur les conséquences des attentats du 11 septembre 2001 et la lutte contre le terrorisme;

­ sur l'examen de la situation économique;

­ sur la préparation de la mise en circulation de l'euro.

Le Sommet de Gand a été convoqué sous la forme d'un Conseil européen informel. Le but n'était donc pas de parvenir à une décision. L'ordre du jour comprenait trois points essentiels :

­ l'introduction de l'euro;

­ la Déclaration de Laeken;

­ l'élargissement.

Il va de soi que les événements internationaux ont également été au centre des préoccupations. Il en a été largement question dans la première partie des débats.

a) Événements du 11 septembre 2001

Dans ce cadre, les travaux ont été poursuivis sur la base des conclusions et des décisions qui avaient été prises au cours du sommet informel du 21 septembre 2001. Le point de vue commun qui en a résulté et a défini la légitimité des actions et les conditions dans lesquelles elles pouvaient éventuellement être entreprises, a été évalué au cours du Sommet de Gand, ce qui a donné lieu à des conclusions supplémentaires, eu égard aux changements qui étaient intervenus sur la scène internationale. Ces conclusions ont été adoptées à l'unanimité, comme ce fut le cas pour les conclusions du 21 septembre 2001.

L'« incident » qui a eu lieu dans la matinée du 19 octobre 2001, à savoir l'entretien entre MM. Blair, Chirac et Schröder, a donné l'impression qu'on tentait d'installer une espèce de directoire. Telle ne fut absolument pas leur intention, et les pays concernés ont clairement affirmé qu'il s'agissait d'une réunion militaire purement technique, tout à fait indépendante du processus décisionnel du Conseil européen. Le premier ministre a accepté ces explications, ainsi que le Parlement européen, à une grande majorité.

Le Conseil européen soutient explicitement les opérations militaires lancées après le 7 octobre 2001. Ces opérations sont légitimes au regard de la résolution nº 1368 des Nations unies. Un appel a toutefois été lancé pour que l'on veille à ce que ces actions soient et restent ciblées et épargnent autant que possible la population civile.

Ce qui est nouveau, c'est que l'on a décidé qu'il fallait, déjà maintenant, engager une action diplomatique en vue de la constitution en Afghanistan d'un nouveau régime, stable et représentatif, qui respecterait les droits de l'homme et de la femme. À cette fin, on a décidé d'investir en Afghanistan et de mettre en oeuvre un plan de reconstruction, avec l'aide financière nécessaire de l'Europe. Il faut en outre trouver un appui politique pour réaliser cette idée, ce qu'essaiera de faire notamment une mission dans les pays voisins de l'Afghanistan.

b) Plan d'action contre le terrorisme

On a examiné de près l'exécution rapide et complète de ce plan. Les 79 mesures qui y figurent ont été évaluées, le Conseil soulignant qu'il fallait agir plus rapidement sur un certain nombre de points.

Il y a tout d'abord le mandat d'arrêt européen et les procédures d'extradition. Les ministres de la Justice et des Affaires étrangères devront enregistrer des résultats dans ce dossier pour le 7 décembre 2001. Le Conseil européen a toutefois déjà décidé à Gand de retenir le principe de la double incrimination comme élément de base. Un deuxième problème concernant le champ d'application du mandat européen a également trouvé une solution. Le Conseil européen est à la conclusion qu'il fallait supprimer le principe de la double incrimination pour tous les crimes graves, mis à part quelques exceptions spécifiques comme l'avortement, etc. Cette décision figurait déjà dans les conclusions de Tampere. Le premier ministre s'est engagé, devant le Parlement européen, à clôturer ce dossier pour le 7 décembre 2001. S'il n'y parvient pas, le Conseil européen de Laeken en achèvera l'examen.

Un deuxième point de ce plan d'action concerne une liste transmise par les États-Unis contenant 47 propositions de mesures dont ils espèrent la mise en oeuvre par l'Union européenne. La plupart de ces propositions figurent déjà au plan d'action européen. On examinera les autres propositions pour voir quelles autres mesures on pourra annoncer, eu égard aux exigences et aux restrictions constitutionnelles des différents États membres.

Le troisième point concerne le rôle plus actif que l'Union européenne devra jouer dans la lutte contre les différents conflits qui déchirent le monde. On a surtout fait référence, en la matière, à la situation au Proche-Orient, et le Conseil a donné mandat à MM. Solana, Prodi, Michel et au premier ministre pour lancer un nouveau dialogue dans cette région. Ce mandat est de la plus grande importance. L'Union européenne doit essayer, en concertation étroite avec les États-Unis, de trouver une solution qui se fonde sur le principe d'une coexistence pacifique d'un État israélien et d'un État palestinien. Ce mandat prendra cours dès la troisième semaine de novembre. Le premier ministre est disposé à venir expliquer la mise en oeuvre de ce mandat au comité d'avis.

On peut conclure que l'Union européenne est tout doucement en train de mettre sur pied une politique étrangère, dans le cadre de laquelle les Quinze réussissent, en période de crise, à adopter une position commune.

c) Mise en place de l'euro

La discussion en la matière a eu lieu sur la base d'un rapport de la Commission européenne dans lequel étaient énumérés les derniers points posant problème en ce qui concerne l'introduction de l'euro.

Le Conseil européen a constaté que la plupart des problèmes avaient entre-temps trouvé une solution, mis à part quelques points noirs. Ceux-ci concernent la préparation des pouvoirs locaux, la préparation des petites entreprises et le danger d'une augmentation éventuelle des prix. Le Conseil a également invité le Conseil ECOFIN à élaborer, avant le Conseil de Laeken, un règlement abaissant les taux des transactions financières transfrontalières au niveau des taux nationaux.

On a enfin discuté du ralentissement de la croissance économique. Un certain nombre de positions ont été adoptées qui se fondent, d'une part, sur le pacte de stabilité et, d'autre part, sur la mise en oeuvre totale du processus de Lisbonne. Si l'on tient compte de ces deux piliers, on peut certainement afficher un optimisme prudent.

d) Déclaration de Laeken

La préparation de cette Déclaration a constitué l'objet principal des discussions au cours du Sommet européen informel de Gand. Les débats se sont déroulés dans un climat très positif.

En ce qui concerne la méthode, l'on a décidé d'instituer une « Convention » avec, à sa tête, une présidence réduite, composée d'un président et d'un représentant, respectivement, du Parlement européen, de la Commission européenne, des gouvernements nationaux et des parlements nationaux. De plus, les pays candidats à l'adhésion doivent pouvoir jouer pleinement leur rôle d'interlocuteur à part entière en la matière. Il n'y a qu'une seule exception : si un point particulier fait l'unanimité, l'on a décidé qu'aucun pays candidat à l'adhésion ne pourrait rompre ce consensus.

On ne s'est pas prononcé sur la nature du texte. S'il s'avère faire l'objet d'un consensus, il n'y aura pas de problème. Dans les autres cas, il faudra préciser clairement si une proposition a l'appui d'une majorité ou d'une minorité ou, éventuellement, d'un seul État membre. Le premier ministre aura, à ce propos, un entretien la semaine prochaine avec M. Napolitano, président de la Commission institutionnelle du Parlement européen, pour veiller à ce que et le Parlement européen et la présidence se trouvent sur la même longueur d'onde.

Le premier ministre a fait un exposé à Gand sur le contenu éventuel de la Déclaration de Laeken. Les points suivants y figureront notamment :

­ nouvelle répartition des compétences dans les deux sens;

­ davantage d'institutions démocratiques;

­ droit de codécision pour le Parlement européen;

­ début de la scission des traités européens;

­ extension nette des compétences de l'Union européenne en ce qui concerne les deuxième et troisième piliers.

e) Élargissement

L'état de la question concernant l'élargissement a brièvement été examiné sur la base d'un rapport de la Commission. Il faudra, au cours du Conseil de Laeken, lancer à nouveau un signal fort montrant clairement qu'élargissement il y aura et que ce processus est irréversible.

Il convient surtout, en la matière, de s'attarder sur la situation en Pologne. L'entretien que le premier ministre a eu, il y a quelques jours, avec les membres du nouveau gouvernement polonais, lui a laissé l'impression qu'un certain nombre de points « noirs » pourront encore trouver une solution dans les semaines à venir, de sorte qu'un rattrapage pourra avoir lieu.

Les événements du 11 septembre 2001 ont sans aucun doute montré qu'un élargissement est plus que nécessaire. Seule une Union européenne solide pourra jouer un rôle dans le nouvel ordre mondial multipolaire.

f) Conclusion

Le Conseil européen informel a été très utile pour la suite de la préparation du Sommet de Laeken.

Pour ce qui est de l'« incident ayant impliqué trois chefs d'État ou de gouvernement », les vives réactions de la présidence belge et du Conseil européen garantissent clairement que l'on évitera à l'avenir ce genre de choses.

2. Échange de vues

M. Karel Pinxten, député, souhaite tout d'abord souligner le caractère paisible du Sommet informel de Gand comparé à ceux de Göteborg et de Gênes. Le choc provoqué par les événements du 11 septembre 2001 y a indéniablement contribué, même si le dialogue engagé par le premier ministre a certainement eu également un impact. En outre, il est très positif que l'on ait exprimé une très grande solidarité vis-à-vis de la lutte internationale à mener contre le terrorisme de même qu'à l'égard de notre partenaire dans cette lutte, à savoir les États-Unis d'Amérique.

Une tension est cependant nettement apparue dans deux domaines. Il y a tout d'abord la tension entre petits et grands États membres, qui s'est manifestée à Gand. Cette tension peut être différemment appréciée, mais elle devient importante si on l'associe à la deuxième tension, qui existe entre l'approche communautaire et l'approche intergouvernementale. Cette dernière tension est particulièrement dangereuse au moment où il faut précisément progresser sur le plan de la politique étrangère et de la sécurité commune. Alors que l'intergouvernemental devrait perdre en importance, il semble bien que ce soit le contraire qui se passe.

À ce sujet, on peut se demander si des initiatives ont déjà été prises en ce qui concerne les conflits asymétriques, c'est-à-dire les conflits avec des acteurs qui ne sont pas des États ou qui sont des États soutenant en l'occurrence des groupements terroristes.

Le troisième point de l'intervenant concerne la Convention. La vision du premier ministre au sujet du consensus semble aller à l'encontre de la Déclaration faite le 5 octobre 2001 par la COSAC, qui insistait avec force sur un consensus. En outre, il paraît y avoir, du fait du Conseil des Affaires générales, quelque confusion quant à la nature et au rôle de la Convention. Cette question a-t-elle été éclaircie à Gand ?

Le dernier point de l'intervenant porte sur l'irréversibilité de l'élargissement. Ce n'est pas nouveau et tout le monde est d'accord là-dessus. Mais les événements internationaux ont quelque peu modifié la donne au niveau des relations entre l'Union européenne et l'OTAN, des relations entre les États membres et des rapports avec les pays tiers. Il est en effet indéniable que des pays tels que le Royaume-Uni et la Russie ont renforcé leur position sur le plan mondial.

À cela s'ajoute le changement fondamental de la situation économique. C'est pourquoi, l'intervenant se demande jusqu'où l'on ira à Laeken dans le dossier de l'élargissement. Cette question est très importante et intéresse également les États candidats.

Enfin, M. Pinxten espère qu'à l'avenir, le tandem Verhofstadt-Prodi fonctionnera mieux que cela n'a été le cas ces derniers temps.

Mme Muriel Gerkens, députée, se réjouit de ce que la présidence belge tienne à coeur l'idée communautaire européenne et en particulier la politique étrangère et de défense. Il est en effet essentiel que l'Union européenne devienne un interlocuteur à part entière sur le plan international pour ce qui est du règlement des conflits. L'UE a un atout supplémentaire à jouer en la matière du fait qu'elle n'est pas directement impliquée dans les conflits en Afghanistan et au Moyen-Orient, ce qui lui permet d'intervenir de manière impartiale et objective.

Dans ce contexte, une évaluation est plus qu'indispensable. Elle est surtout nécessaire dans le domaine humanitaire. Il y a lieu d'en appeler à un arrêt temporaire des bombardements pour éviter une véritable catastrophe. Cet arrêt est également nécessaire pour permettre à l'Union européenne de procéder à une évaluation de la situation stratégique dans la région. On pourra ainsi oeuvrer à l'installation d'un nouveau régime démocratique en Afghanistan. Cette installation doit être réalisée dans un cadre multilatéral et en collaboration avec les Nations unies.

Enfin, les demandes et les requêtes des États-Unis d'Amérique doivent être examinées d'un oeil critique afin d'éviter que des droits fondamentaux ne soient violés dans le cadre de la mise en oeuvre de celles-ci. Les démarches doivent surtout se faire dans le cadre du mandat d'arrêt européen. On ne peut accéder aveuglément à certaines revendications quand on sait que les États-Unis d'Amérique agissent assez légèrement en ce qui concerne certains droits et sont très réticents vis-à-vis du Tribunal pénal international.

Mme Leen Laenens, députée, réitère l'appel à l'arrêt des bombardements afin de donner la priorité absolue à l'aide humanitaire dans la région.

Mme Laenens se joint au premier ministre pour regretter le « sommet des trois grands » parce que celui-ci ne s'est intéressé qu'au seul aspect militaire. Il faut espérer qu'il n'y aura plus de réunion technique comme celle-là. À côté des questions militaires, en effet, les aspects diplomatiques et politiques jouent également un grand rôle. L'Union européenne peut jouer un rôle important en la matière. Enfin, en marge de cette question, l'intervenante souligne que la solidarité, si elle est sans équivoque, n'est pas pour autant inconditionnelle. Une telle action n'est en effet admissible que si elle est dirigée contre les moyens utilisés par les terroristes. Elle ne peut être interprétée comme une vengeance.

Un deuxième point porte sur le plan d'action contre le terrorisme. Mme Laenens espère que l'on pourra prendre connaissance des 79 mesures qui figurent dans le plan d'action. Elle espère également que certaines de ces mesures concernent la suppression du secret bancaire, etc.

Dans ce contexte, il y a lieu de souligner la nécessité d'une Cour internationale de Justice. La question fera l'objet d'une résolution qui sera examinée incessamment au Parlement. La présidence pourrait profiter de l'occasion pour convaincre les quatre États membres qui ne l'ont pas encore fait, de signer la Convention à ce sujet.

La définition du terrorisme constitue un autre point délicat. Certaines pratiques auxquelles l'on assiste actuellement, entre autres au Moyen-Orient, sont également inadmissibles. Il est donc nécessaire d'élaborer d'urgence une définition du terrorisme. Cela peut se faire éventuellement dans le cadre d'un débat qui est mené actuellement aux Nations unies au sujet d'une Convention globale contre le terrorisme. L'Inde a déjà déposé une proposition à ce sujet en 1997.

L'intervenante se félicite de la mission de la présidence belge au Moyen-Orient. Le mandat au Congo, reconfirmé récemment, doit aussi retenir l'attention. Le dialogue intercongolais, qui vient d'être lancé, demande déjà à être débloqué.

L'élimination du terrorisme implique qu'il faille s'attaquer aux racines de celui-ci. Il est donc temps de fixer les bonnes priorités. Les centaines de millions qui sont consacrés à la lutte contre le terrorisme contrastent violemment avec la difficile collecte de fonds destinés à la lutte contre le sida et d'autres maladies.

Enfin, il est dommage que, dans la déclaration sur la situation économique, on insiste tant sur l'importance des négociations qui ont lieu dans le cadre de l'Organisation mondiale de la Santé, alors que la politique actuelle relative au commerce mondial est précisément une des causes des problèmes que nous connaissons.

Mme Anne-Marie Lizin, sénatrice, se réjouit des résultats du Conseil européen informel de Gand. Elle fait toutefois remarquer qu'une évaluation des actions en Afghanistan doit également se fonder sur les informations que donnent les partenaires. On peut citer l'exemple de la Russie, qui renforce actuellement les frontières avec le Tadjikistan et le Kazakhstan, afin de faire obstacle au trafic de stupéfiants, dont le volume a doublé depuis le début de 2001. Ce renforcement a entraîné un affaiblissement du contrôle aux autres frontières, comme à Kaliningrad. Cela signifie-t-il, dans le cadre de la solidarité, que l'Union européenne a renforcé ses propres contrôles ? A-t-elle pris des mesures supplémentaires pour lutter contre ce trafic de stupéfiants ?

Une deuxième question concerne les droits de la femme. Existe-t-il déjà des indications concrètes qui permettent de penser que le nouveau régime afghan oeuvrera effectivement au respect des droits fondamentaux de la femme ? C'est surtout le droit à l'enseignement qui est crucial en l'espèce. En a-t-on parlé au cours du Conseil européen informel de Gand ?

En ce qui concerne le terrorisme, point n'est besoin d'attendre des initiatives européennes. Dans la passé, Mme Lizin a déjà déposé une proposition de loi, mais celle-ci est restée sans suite jusqu'à présent. Le texte de la proposition tient dûment compte de valeurs démocratiques et de droits fondamentaux. Il est plus qu'un simple texte technique. Il y a donc encore beaucoup à faire en la matière.

M. Dirk Van der Maelen, député, souligne tout d'abord qu'il faut suspendre les bombardements sur l'Afghanistan. Il est clair, au vu des événements sur le terrain, qu'une catastrophe humanitaire est en train de se dérouler. M. D. Van der Maelen appelle dès lors tout le monde à inciter les États-Unis d'Amérique et le Royaume-Uni à être extrêmement prudents dans leurs actions.

Quant à la tension entre le « communautaire » et l'« intergouvernemental », la présidence belge a effectué un très bon travail en vue de renforcer le rôle de l'Europe dans le cadre existant. L'« incident » qui a eu lieu au cours du Sommet informel de Gand a montré qu'il y a encore beaucoup de chemin à faire, mais cet élément ne peut qu'inciter à progresser le plus rapidement possible en la matière. La décision d'intensifier l'activité diplomatique au Moyen-Orient en témoigne. Le conflit israélo-palestinien se trouve dans une phase très critique, et M. D. Van der Maelen craint que la date fixée au cours de la troisième semaine de novembre ne soit trop tardive. En outre, il faut mettre sur pied une action commune à laquelle participeront l'ONU, l'Union européenne et les cinq membres permanents de l'ONU pour amener le plus rapidement possible les Israéliens et les Palestiniens à la table des négociations.

Au Sommet européen de Laeken, il faudra progresser en matière de politique étrangère. Cela devra ressortir clairement des textes. L'on prépare actuellement une résolution relative à la politique étrangère et de sécurité commune qui comportera une série de suggestions. Il faudra réfléchir à la notion de politique européenne de défense et de sécurité commune et il conviendra de renforcer la « Policy Unit » autour de M. J. Solana, afin de jeter des passerelles entre les diplomaties nationales.

Enfin, il y a encore le plan d'action contre le terrorisme. Même si l'on adopte un grand nombre de conventions pour combattre le blanchiment d'argent et que l'on crée les structures nécessaires pour ce faire, on n'arrivera à rien tant que l'on ne se sera pas attaqué aux structures « offshore » ou que l'on n'aura pas reconsidéré le secret bancaire. Ce point doit aussi devenir une priorité de la politique européenne.

Mme Josée Lejeune, députée, demande des explications concernant l'élargissement de l'UE. Chaque État candidat à l'adhésion doit transposer en droit interne l'acquis communautaire et acquérir la capacité administrative requise pour en assurer le respect. Ne faut-il pas examiner et évaluer cette capacité afin de voir si les États candidats à l'adhésion sont à même de le faire ? Cette évaluation doit être considérée comme une aide supplémentaire préparatoire à l'adhésion.

En ce qui concerne la nouvelle mission au Moyen-Orient, Mme J. Lejeune demande que l'on précise en quoi celle-ci consistera et que l'on explique ce que l'Union européenne peut faire afin de surmonter l'impasse actuelle et de contribuer à l'installation de la paix dans la région.

Enfin, il y a la question de savoir si l'état d'esprit et les mentalités qui régnaient à Gand étaient fondamentalement différents de ceux qui régnaient à Nice.

M. Georges Dallemagne, sénateur, se demande quelle est actuellement l'attitude du gouvernement. Il y a quelques jours, un certain nombre de partis de la majorité ont demandé l'arrêt des bombardements sur l'Afghanistan. En réaction, le premier ministre a proposé une évaluation lors du Conseil européen informel de Gand. Mais cette évaluation n'a pas encore été fortement poussée. Elle s'est plutôt limitée à une série de contributions de ministres. Le premier ministre peut-il fournir quelques détails à propos de cette évaluation ? Que s'est-il exactement passé à Gand ? La réponse à cette question est importante pour le Parlement, car elle lui permettra de juger les actions et la position du gouvernement. Elle lui permettra, en outre, de mieux évaluer les actions en Afghanistan.

Une deuxième remarque déplore « l'incident des trois » qui a eu lieu au cours du Sommet informel de Gand. Il est assez invraisemblable, selon M. Dallemagne, que la réunion ne fut qu'une réunion technique. L'incident évoque en tout cas l'image d'une Europe à deux vitesses, ce qu'il y a lieu d'éviter.

Pour le reste, M. Dallemagne demande ce que le premier ministre envisage de faire pour résoudre les grands problèmes que pose pour le moment l'acheminement de l'aide humanitaire sur le terrain. L'Union européenne a-t-elle l'intention de faire quelque chose sur ce point ?

L'incident concernant M. Prodi est regrettable. Le moment n'est pas idéal pour laisser des tensions se développer entre la présidence et la Commission européenne.

M. Ferdy Willems, député, demande également comment l'on pourrait mettre fin le plus rapidement possible aux bombardements. Il faut en outre développer rapidement l'aide humanitaire.

Le premier ministre a fait référence à un nouvel ordre mondial. Celui-ci nécessitera toutefois beaucoup de courage et d'énergie, puisqu'il pourra avoir, pour l'Europe aussi, un certain nombre de conséquences très dangereuses.

On peut faire à cet égard deux remarques. Tout d'abord, le premier ministre s'est réjoui de la mise en place, en Afghanistan, d'un nouveau gouvernement de type classique. M. Willems aurait voulu savoir, étant donné la confusion qui règne dans le pays, quelle serait la composition d'un tel gouvernement. D'autre part, le premier ministre a aussi souligné qu'Israël constituait un des grands points chauds du moment. Ce pays abuse avec arrogance de la situation en Afghanistan à ses propres fins et assimile la situation dans laquelle il se trouve à celle qui règne en Afghanistan. Comment le premier ministre conçoit-il sa mission au Moyen-Orient et comment pense-t-il pouvoir aider à débloquer la situation ?

M. Philippe Mahoux, président du Comité d'avis fédéral chargé des questions européennes, souhaite préciser la position de la COSAC concernant la Convention. La résolution définit clairement le statut des candidats à l'adhésion ainsi que celui des résultats des discussions. Le texte final doit traduire les points de vue des parlements nationaux et du Parlement européen.

Mme M. Gerkens, députée, a raison en ce qui concerne la méthode que la Belgique adoptera pour préparer la déclaration de Laeken.

Une remarque supplémentaire à propos du mandat d'arrêt européen concerne le fait que les États-Unis d'Amérique appliquent encore la peine de mort. Cette donnée constitue un obstacle important à la conclusion rapide d'un accord sur l'extradition de présumés terroristes.

Enfin, le cas de l'Afghanistan a montré clairement qu'il y avait un paradoxe entre, d'une part, la recherche d'une grande coalition contre le terrorisme et, d'autre part, la tendance isolationiste qui caractèrise le monde politique américain, comme l'ont clairement révélé encore les problèmes posés par le Protocole de Kyoto et l'OMC. Et bien qu'il semble y avoir un rapprochement entre les positions des États-Unis d'Amérique et de l'Union européenne en ce qui concerne la situation au Moyen-Orient, tous les efforts possibles restent nécessaires pour aboutir à une solution qui soit acceptable pour tout le monde.

3. Réponse du premier ministre

a) Conflit au Moyen-Orient

En ce qui concerne le Moyen-Orient, il faut effectivement tirer parti de l'occasion qui se présente, dès lors que le point de vue des États-Unis d'Amérique s'est quelque peu modifié et se rapproche davantage de la vision européenne. La difficulté est actuellement de parvenir à réunir les parties autour de la table des négociations. Une seule mission ne suffira pas pour réaliser une percée. Il faudra augmenter et maintenir la pression sur les deux parties et préparer soigneusement les efforts diplomatiques, ce que l'on est en train de faire. C'est pourquoi il faudra encore attendre quelque peu avant de pouvoir envoyer une mission qui soit efficace et cohérente.

Cette mission est de la plus grande importance et doit certainement avoir lieu. Jadis, les conséquences d'un monde bipolaire occultaient encore quelque peu les différents conflits, mais, à l'heure actuelle dans un monde multipolaire, les conflits sont bien plus complexes et dangereux. Il convient dès lors de régler d'urgence le conflit qui déchire le Moyen-Orient pour éviter que la situation n'empire.

On peut, dans ce contexte, comprendre l'observation de M. Pinxten, qui demande que l'on soit attentif aux dangers et aux caractéristiques typiques des conflits asymétriques. Ceux-ci ne se règlent pas entre États, mais sont souvent une affaire interne. Ces guerres, qui sont tout sauf classiques, exigent une autre approche, qui nécessite de nouvelles idées quant au rôle à jouer par la communauté internationale. Les conclusions du Sommet informel de Gand mentionnent ces conflits pour la première fois et parlent d'une « zone de non-droit ». Ces régions à problèmes exigent une nouvelle approche, tant au niveau international (Nations unies) qu'au niveau régional. Il s'agit de trouver une solution intermédiaire entre des structures comme l'ONU, où 189 États doivent se mettre d'accord, et un État « gendarme » unique qui devrait contrôler la totalité du monde. Un rôle pourrait être dévolu, dans le cadre de cette voie médiane, aux grands accords de coopération régionaux. Ce fédéralisme mondial doit permettre de contrôler les nouvelles tensions.

b) Actions en Afghanistan

Très peu de temps après le 7 octobre, l'Union européenne a libéré les fonds nécessaires, et ce pour un montant de 370 millions d'euros. Deux observations ont été formulées à ce sujet au Sommet informel de Gand. Tout d'abord, il faut partir du principe que les pays voisins ne peuvent pas se retrouver victimes de ces actions. La contribution de l'Union européenne doit dès lors être de nature à ne pas engendrer d'effets négatifs pour les pays de la région. Il faut ensuite insister sur le fait que les camps de réfugiés existants ne peuvent être que temporaires. Il convient donc d'écarter l'actuel régime afghan et de le remplacer par un nouveau régime, stable et représentatif, qui respecte les droits de l'homme et de la femme, ce que l'Union européenne a d'ailleurs souligné une fois de plus le 19 octobre 2001.

On a procédé à une évaluation des actions menées en Afghanistan sur la base du rapport des ministres des Affaires étrangères. Le Conseil a estimé à l'unanimité que ces actions ciblées devaient le rester et qu'il fallait à tout prix épargner la population civile. On peut s'attendre à ce que le Sommet de Laeken prenne à nouveau position en la matière.

c) Situation en Russie

En ce qui concerne le problème de la drogue et la situation en Russie, le premier ministre signale qu'il s'agit là d'un point essentiel dans le paquet de mesures sur lesquelles le Conseil européen s'est mis d'accord. Le trafic de drogue est, en effet, une source importante de revenus pour les organisations terroristes.

Le problème de Kaliningrad a été abordé lors de la visite que le président Poutine a rendue, il y a peu, aux Institutions européennes, ... À cette occasion, il a été convenu qu'une délégation européenne serait envoyée à Kalinigrad et à Moscou afin de négocier le statut de cette région. Il y a lieu en effet de prévoir un statut très spécifique pour Kalinigrad qui fournisse la possibilité d'instaurer de bonnes relations entre la Russie et l'Europe.

d) La Déclaration de Laeken

En ce qui concerne le statut du texte de la convention, il faut éviter de compliquer inutilement les choses. Il est évident qu'un texte de consensus aurait beaucoup de poids au sein de la conférence. Au cas où l'on ne pourrait pas s'accorder sur un texte de consensus, on devrait indiquer, ce qu'est une option majoritaire et ce qui ne l'est pas. Le Conseil européen, le Parlement européen et la COSAC ont accepté ce point de vue. Le statut final de la convention sera fixé dans la Déclaration de Laeken.

Le premier ministre souligne aussi, à cet égard, l'importance du rapport sur le rôle des parlements nationaux et la vision qu'ils ont de l'avenir de l'Europe, que préparent le sénateur Ph. Mahoux et le député P. Chevalier.

Par rapport au Sommet de Nice, on s'est rendu compte, à la lumière des événements de septembre, de la nécessité d'accélérer l'intégration européenne à tous les niveaux et dans tous les domaines.

e) L'élargissement de l'Union européenne

Le 13 novembre 2001, la Commission européenne remettra le rapport stratégique annuel sur l'élargissement. Sur la base de ce rapport, il faudra faire quatre choses.

Il faudra tout d'abord continuer à insister, à Laeken, sur la nécessité de l'élargissement. Il faudra aussi souligner que le rythme des négociations sera maintenu. Ensuite, l'on donnera un signal supplémentaire aux candidats à l'adhésion en fonction de leurs prestations individuelles.

Enfin, l'on donnera un signal particulier au nouveau gouvernement polonais. En effet, la Pologne a pris un certain retard dans le processus d'adhésion. Toutefois, les signaux émis ces derniers jours sont positifs : conclusion récente d'un accord en matière d'environnement et volonté manifeste d'arriver encore cette année à un accord sur la libre circulation des personnes et du capital. En 2002, l'on pourra s'attaquer aux secteurs précaires que sont l'agriculture et les fonds structurels.

f) L'avenir de l'Europe

Les événements récents ont montré clairement qu'il est nécessaire de développer une politique étrangère, de sécurité et de défense commune. On peut y arriver de manière assez simple : il suffit de fusionner les trois piliers, ce qui est bien sûr plus facile à dire qu'à réaliser. Néanmoins, les chefs d'État et de gouvernement ont souligné presque à l'unanimité qu'il faut progresser en la matière. Le Parlement européen a également souligné cela. Ce point constituera dès lors un élément important de la déclaration de Laeken.

Il faut souligner qu'on applique déjà cette politique, par exemple en envoyant des missions au Moyen-Orient ou dans les pays voisins de l'Afghanistan.

g) L'OMC et l'antiglobalisme

Il est question de la conférence de Doha dans les textes. On y affirme que l'Union européenne doit donner un signal fort. Le gouvernement a d'ailleurs fixé le cadre dans lequel les négociations devraient se dérouler et dans lequel tous les éléments devraient être pris en considération.

Ce thème a un lien étroit avec l'antiglobalisme. Le mot « antiglobalisme » est d'ailleurs incorrect. Il a été convenu, au sein du Parlement européen, de ne plus l'employer et de parler plutôt de globalisme aveugle par opposition à un globalisme encadré ou éthique.

Ce qui est commun aux deux sujets en question est qu'il y a une demande de démocratisation des institutions. Il n'est pas réaliste de vouloir supprimer des institutions comme le FMI, l'OMC, etc. En les supprimant, on dévierait en effet vers un capitalisme aveugle. Il faut toutefois encadrer et démocratiser ces institutions. Cette question sera d'ailleurs abordée au cours d'une conférence internationale qui se tiendra à Gand la semaine prochaine.

h) Un groupe de travail au sein du Parlement fédéral

Le groupe de travail auquel M. Dallemagne a fait référence et dont il a été question au cours du briefing en vue du Sommet européen de Gand ne s'est pas encore réuni. Cependant, le premier ministre fera le nécessaire, avec le président du Comité d'avis fédéral, pour réunir ce groupe de travail et lui fournir les informations complémentaires nécessaires. On contactera également, à cet effet, le ministre de la Défense.

i) Conclusion

L'ordre du jour de Laeken est impressionnant et sera préparé de manière intensive. Les points à traiter sont divers et concernent notamment l'espace juridique dont il a été question à Tampere, la situation internationale, le développement de la défense européenne, le volet social, l'élargissement et la Déclaration de Laeken.

Les présidents-rapporteurs,
Philippe MAHOUX. (S)
Herman DE CROO. (Ch)


ANNEXES


DÉCLARATION DES CHEFS D'ÉTAT OU DE
GOUVERNEMENT DE L'UNION EUROPÉENNE ET DU
PRÉSIDENT DE LA COMMISSION EUROPÉENNE

Préparation de la mise en circulation de l'euro

Le Conseil européen a pris connaissance du dernier rapport d'évaluation de la Commission sur les préparatifs pour l'introduction des pièces et billets en euro. Ce rapport lui a été présenté par le ministre Didier Reynders, président du Conseil Ecofin, par le commissaire Solbes et par le président de la Banque centrale européenne, M. Wim Duisenberg.

La mise en circulation de l'euro est d'une importance historique. Le citoyen bénéficiera dans sa vie quotidienne d'un résultat concret et tangible de l'intégration européenne. La visibilité et la proximité de l'Europe s'en trouveront confortées.

Le Conseil européen a constaté avec satisfaction que :

­ les administrations nationales ont pratiquement achevé leurs préparatifs;

­ le dispositif prévu pour la pré-alimentation des banques et des commerces de détail dans la zone Euro est en place;

­ les mesures nécessaires ont été prises pour la sécurité, le transport et le stockage des billets et des pièces;

­ les campagnes d'information des États membres, de l'Eurosystème et de la Commission montent en puissance, avec une attention particulière pour les populations les plus fragiles;

­ le cadre pour la distribution des billets au secteur bancaire en dehors de la zone Euro a été mis en place.

Le Conseil européen tient à exprimer sa reconnaissance à l'égard des opérateurs économiques privés, et notamment les banques et les commerces, pour leurs efforts relatifs à la préparation du passage à l'euro fiduciaire.

Le Conseil européen salue la mise en place d'un réseau rapide d'information concernant le passage à l'euro fiduciaire. Ce réseau sera mis en place par les États membres, en collaboration avec la Commission européenne, la Banque centrale européenne et l'Eurosystème, et commencera à fonctionner au début du mois de décembre 2001.

Le Conseil européen s'est également félicité de la définition par la Commission de quarante bonnes pratiques destinées à assurer le succès du passage à l'euro; il en étudiera attentivement la mise en oeuvre, en tenant compte des situations nationales.

Le Conseil européen demande aux États membres, au Conseil Ecofin, à la Commission européenne et à la Banque centrale européenne d'accorder une attention particulière aux questions suivantes :

­ l'état de préparation des administrations locales. Il faudrait notamment accélérer les travaux de basculement dans les collectivités les plus petites;

­ l'effort supplémentaire qui devrait être fait à la préparation des petites et moyennes entreprises (moins de 50 personnes);

­ les acteurs économiques ont pris des engagements de stabilité des prix. Nous avons confiance dans le fait qu'ils assument leurs responsabilités. Les éventuels abus seront dénoncés;

­ l'amélioration du fonctionnement des systèmes de paiement transfrontaliers et notamment une réduction de leur coût. Le Conseil européen invite le Conseil Ecofin à adopter avant le Conseil européen de Laeken un règlement sur base de la proposition de la Commission, visant à aligner les tarifs de ces paiements sur les tarifs nationaux.


DÉCLARATION DES CHEFS D'ÉTAT OU DE
GOUVERNEMENT DE L'UNION EUROPÉENNE ET DU
PRÉSIDENT DE LA COMMISSION

La suite des attentats du 11 septembre 2001 et la lutte contre le terrorisme

Le Conseil européen exprime à nouveau et sans équivoque son soutien entier à l'action menée contre le terrorisme sous tous ses aspects dans le cadre défini par les Nations unies et il réaffirme sa solidarité totale avec les États-Unis.

1. Le Conseil européen a pris connaissance du rapport du président du Conseil affaires générales. Il accorde une importance particulière à l'information, à la consultation et à la coordination avec les États-Unis.

Le Conseil européen confirme son appui le plus ferme pour les opérations militaires, qui ont commencé le 7 octobre 2001 et qui sont légitimes aux termes de la Charte des Nations unies et de la résolution 1368 du Conseil de sécurité des Nations unies. Il constate que ces actions ciblées s'inscrivent dans la ligne des conclusions du Conseil européen extraordinaire du 21 septembre 2001. Les partenaires continueront à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour que les populations civiles soient épargnées.

Le Conseil européen est déterminé à combattre le terrorisme sous toutes ses formes et partout dans le monde. En Afghanistan, l'objectif reste l'élimination de l'organisation terroriste Al Qaeda qui est à l'origine des attentats du 11 septembre 2001 et dont les dirigeants n'ont pas été livrés par le régime des Talibans. Il faut dès à présent, sous l'égide des Nations unies, oeuvrer pour favoriser l'émergence d'un gouvernement stable, légitime et représentatif de l'ensemble de la population afghane, respectueux des droits de l'homme et développant de bonnes relations avec tous les pays voisins. Dès que ce but sera atteint, l'Union européenne s'engagera avec la communauté internationale dans un programme large et ambitieux à la fois politique et humanitaire d'aide à la reconstruction de l'Afghanistan, en vue de la stabilisation de la région. La présidence, avec le Haut représentant et la Commission, poursuivra les contacts avec tous les pays de la région afin de les y associer.

Le Conseil européen poursuivra ses efforts pour renforcer la coalition de la communauté internationale pour lutter contre le terrorisme sous tous ses aspects.

2. Le Conseil européen a examiné la mise en oeuvre du plan d'action contre le terrorisme. En application de ce plan, 79 actions sont dorénavant engagées. Ces actions se suivent à un rythme soutenu et ont déjà produit leurs premiers résultats. Sans perdre de vue l'ensemble de ces actions, il demande au Conseil de se concentrer en particulier sur quatre points qui doivent devenir opérationnels dans les plus brefs délais :

­ l'approbation, lors du Conseil Justice et Affaires intérieures du 6 et 7 décembre 2001, à partir des progrès déjà réalisés, des modalités concrètes du mandat européen d'arrêt, de la définition commune des incriminations terroristes et du gel des avoirs. Le Conseil européen réaffirme sa détermination de supprimer le principe de la double incrimination pour un large éventail de faits, en particulier des délits terroristes, donnant lieu à une demande de remise directe;

­ le renforcement de la coopération entre les services opérationnels chargés de la lutte contre le terrorisme : Europol, Eurojust, les services de renseignement, les services de police et les autorités judiciaires. Cette coopération doit notamment permettre l'établissement avant la fin de l'année d'une liste des organisations terroristes;

­ la lutte effective contre le financement du terrorisme par l'approbation formelle de la directive contre le blanchiment de l'argent et la ratification accélérée par tous les États membres de la convention des Nations unies contre le financement du terrorisme. En outre les engagements pris au GAFI, dont le mandat devrait être élargi, doivent avant la fin de l'année être transformés en instruments réglementaires;

­ l'approbation sans délai des propositions de la Commission en matière de sécurité aérienne.

3. L'aide humanitaire vers l'Afghanistan et les pays limitrophes est une priorité absolue. L'Union européenne et les États membres dégageront, ensemble avec d'autres donateurs, toute l'aide humanitaire nécessaire pour faire face aux besoins de la population et des réfugiés afghans. L'Union inscrit ses efforts dans le cadre des Nations unies, du CICR et des autres organisations humanitaires. Elle exprime son appréciation pour l'offre de la Fédération de Russie de coopérer étroitement dans l'acheminement de l'aide.

Le Conseil européen a examiné l'impact économique et financier de la crise afghane sur les pays voisins qui accueillent des réfugiés. L'accueil des réfugiés dans ces pays ne peut être que temporaire, l'objectif étant leur retour en Afghanistan dès que la crise aura été résolue. L'Union mettra tout en oeuvre pour atténuer les conséquences négatives sur le plan économique, financier et humanitaire que ces pays subissent. Conformément aux conclusions du Conseil Affaires générales du 17 octobre 2001, l'Union accentuera ses relations avec les pays de la région.

4. Dans ce même cadre, le Conseil européen a aussi examiné les propositions concrètes de coopération que les autorités américaines ont formulé suite à la rencontre du 27 septembre dernier entre le président du Conseil européen et le président des États-Unis. L'examen technique de ces propositions a déjà été entamé et elles font d'ores et déjà l'objet de discussions entre les autorités américaines et la Troïka opérationnelle à Washington. La plupart de ces propositions sont déjà couvertes par le plan d'action de l'Union européenne. Par ailleurs, l'Union est prête à s'engager avec les États-Unis dans des initiatives réciproques telles que :

­ la facilitation de l'entraide judiciaire entre les autorités compétentes des États-Unis et des États membres, ainsi que de l'extradition en matière de terrorisme en conformité avec les règles constitutionnelles des États membres;

­ le renforcement des efforts communs en matière de non-prolifération et de contrôle à l'exportation tant pour les armes que pour des substances chimiques, bactériologiques et nucléaires susceptibles d'être utilisées à des fins terroristes;

­ l'intensification de notre coopération pour assurer la sécurité des passeports et des visas, ainsi que la lutte contre les faux documents.

5. Le Conseil européen a examiné les menaces d'emploi de moyens biologiques et chimiques dans les actions terroristes. Celles-ci appellent des réponses adaptées à la fois de chaque État membres et de l'Union européenne dans son ensemble. Aucune attaque de cette sorte n'a été constatée en Europe. Les autorités maintiendront une vigilance accrue et la coopération entre les services de renseignement, de police, de protection civile et de santé sera renforcée.

Parallèlement aux mesures déjà prises, le Conseil européen demande au Conseil et à la Commission de préparer un programme visant à améliorer la coopération entre les États membres en matière d'évaluation des risques, d'alerte et d'intervention, de stockage des moyens, et dans le domaine de la recherche. Ce programme devra porter à la fois sur la détection et l'identification des agents infectieux et toxiques, et sur la prévention et le traitement des agressions chimiques ou biologiques. La désignation d'un coordinateur européen pour des actions de protection civiles fera partie de ce programme.

Vis-à-vis des irresponsables qui profitent du climat actuel pour lancer des fausses alertes, les États membres réagiront avec fermeté, notamment en appliquant des sanctions pénales sévères pour ces infractions.

6. Le Conseil européen souligne la nécessité cruciale de relancer sans pré-condition le processus de paix au Moyen-Orient. Les résolutions 242 et 338 doivent rester le fondement d'un règlement politique, basé sur l'établissement d'un État palestinien et le droit d'Israël de vivre en paix et en sécurité. Un tel règlement passe nécessairement par la cessation de la violence et la reconnaissance du principe de deux États. La présidence du Conseil européen est chargée, ensemble avec le Haut représentant et la Commission, de se rendre dans les pays directement concernés afin d'examiner par quels moyens l'Union peut favoriser la relance d'un tel processus. L'Union attachera une importance particulière à la relance de l'activité économique et des investissements dans les territoires palestiniens.

7. L'Union européenne va accroître ses efforts dans d'autres régions du monde afin de favoriser un système mondial équitable de sécurité, de prospérité, de démocratie et de développement. Le droit doit être restauré dans les zones de non-droit. Le retour de la stabilité dans les Balkans reste une évidente priorité pour l'Union européenne.

8. Afin d'éviter l'amalgame entre le terrorisme et le monde arabe et musulman, le Conseil européen estime indispensable de favoriser le dialogue d'égal à égal entre nos civilisations, notamment dans le cadre du processus de Barcelone mais également par une politique active d'échanges culturels. L'Union invite les responsables dans les États membres à donner au dialogue entre les cultures une priorité concrète à la fois au plan international et à l'intérieur de leur société.


DÉCLARATION DES CHEFS D'ÉTAT ET DE
GOUVERNEMENT DE L'UNION EUROPÉENNE ET
DU PRÉSIDENT DE LA COMMISSION EUROPÉENNE

Examen de la situation économique

Le Conseil européen a examiné la situation économique au lendemain des événements du 11 septembre. Il a noté que le ralentissement économique a été accentué par ces événements, mais s'est déclaré convaincu que la solidité des données économiques fondamentales de l'Union et l'assainissement des finances publiques déjà réalisé contribueront à faire en sorte que l'impact en sera limité et temporaire. Il a confirmé son attachement au Pacte de stabilité et de croissance et sa volonté d'accélérer le processus de Lisbonne pour accroître le potentiel de croissance à long terme de l'Union.

Il a pris note du rapport de la Commission évaluant l'impact des événements du 11 septembre et de l'analyse des politiques qu'il convient de mener à la lumière de l'évolution de la situation économique. Il importe de souligner que les perspectives demeurent positives et que la stratégie de l'UE en matière de politique économique ne sera pas remise en cause. Il a noté qu'une nouvelle amélioration des perspectives concernant l'inflation et le maintien de la modération salariale fourniraient une marge de manoeuvre pour la politique monétaire.

Compte tenu de ce ferme engagement, le Conseil européen invite les États membres à envisager l'adoption de mesures appropriées et, à la lumière des recommandations de la Commission, à accorder une importance particulière aux éléments suivants :

­ aux effets positifs des réformes fiscales, dont certaines ont déjà été adoptées, sur l'économie européenne;

­ au renforcement de la confiance et de l'investissement privé, ainsi que, le cas échéant, des investissements publics dans le domaine des infrastructures, de manière à préserver le potentiel de croissance de l'économie;

­ aux stabilisateurs automatiques, dont il convient de permettre le jeu, conformément au Pacte de stabilité et de croissance;

­ à l'accélération de la mise en oeuvre d'efforts d'ajustement structurel sur les marchés du travail, des produits, des services et de la finance. Le Conseil européen de Barcelone fera le point des progrès accomplis à cet égard et donnera les nouvelles impulsions nécessaires;

­ à l'action qu'il convient d'entreprendre en faveur du lancement des négociations dans le cadre de l'OMC. L'incertitude qui pèse actuellement sur l'économie rend plus importante que jamais, tant au plan économique qu'au plan politique, une libéralisation des échanges fondée sur un système multilatéral reposant sur des règles et assortie d'une réelle prise en compte du développement.

Le Conseil européen réaffirme l'attachement de l'Union à la stratégie de Lisbonne et demande au Conseil d'accélérer les travaux visant à la mettre en oeuvre.

Le Conseil européen encourage la BEI à intensifier sa contribution, comme elle en a manifesté l'intention, en accordant des prêts, notamment à des projets d'infrastructures, afin de soutenir l'économie de la connaissance et de contribuer à favoriser l'investissement à long terme.