2-918/1

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Sénat de Belgique

SESSION DE 2000-2001

3 OCTOBRE 2001


Proposition de résolution relative à la quatrième conférence ministérielle de l'Organisation mondiale du commerce

(Déposée par Mme Marie Nagy et M. Michiel Maertens)


DÉVELOPPEMENTS


Le Sénat,

A. Vu la résolution DOC 50 0112/008 du 25 novembre 1999 de la Chambre des représentants;

B. Vu la position du gouvernement belge du 7 octobre 1999 concernant la troisième conférence ministérielle de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) à Seattle;

C. Vu la décision du Conseil des ministres de l'Union européenne définissant le mandat de négociation de l'Union pour la troisième conférence ministérielle de l'OMC;

D. Considérant l'échec de cette troisième conférence ministérielle de l'OMC;

E. Vu les travaux du groupe de travail de l'OMC consacré depuis le début de l'année 2000 à la mise en oeuvre des accords issus de l'Uruguay Round;

F. Vu les débats des sessions formelles et informelles du Conseil général de l'OMC depuis le début de l'année 2000;

G. Considérant que les enjeux et les objectifs d'une conférence ministérielle de l'OMC doivent être clairement définis, compris et partagés par tous;

H. Considérant que le projet d'un nouveau cycle de négociations s'est heurté, lors de la conférence de Seattle, à l'opposition des pays en développement et que cette opposition continue à s'exprimer tant chez ces derniers que dans la société civile;

I. Considérant que l'option d'un nouveau cycle de négociations, défendue par l'Union européenne, n'a pas rencontré l'adhésion des États membres de l'OMC et constitue un des facteurs de l'échec de la troisième conférence ministérielle à Seattle;

J. Considérant que l'opposition des pays en développement est motivée par le refus des pays industrialisés et de l'OMC elle-même de remplir les engagements convenus à l'issue de l'Uruguay Round, au moment de la signature des Accords de Marrakech, à savoir procéder à terme à une évaluation de l'impact économique, social et environnemental de ces accords et les réviser en conséquence;

K. Considérant que les instances chargées de procéder, au siège de l'OMC, à l'évaluation de la mise en oeuvre des accords existants ont, après 18 mois de réunions, failli à leur mission;

L. Considérant que l'opposition des pays en développement est motivée également par les modalités de fonctionnement de l'OMC, tant en ce qui concerne le processus de décision (recours systématique aux consultations informelles et opacité de ces consultations) qu'au niveau du mécanisme de règlement des différends dont la procédure, la nécessité d'expertise et la pratique en matière de sanctions pénalisent les pays les moins avancés;

M. Considérant que, de l'avis des pays en développement et de nombreux observateurs spécialisés dans le fonctionnement des institutions internationales, l'OMC est une institution qui, dans les faits, fonctionne sur la base de rapports de forces et non sur la base de règles également applicables à tous les États membres;

N. Considérant que les thèmes les plus fréquemment évoqués à couvrir par le lancement d'un nouveau cycle (commerce électronique) ne concernent principalement que les pays industrialisés;

O. Considérant la proposition avancée par les États-Unis et par l'Union européenne, le 25 juin 2001 à Genève, de faire adopter lors de la quatrième conférence ministérielle une déclaration inspirée de celle de Punta del Este (Uruguay Round), laquelle ne prenait aucun engagement sur des points précis tout en autorisant des négociations sur les matières les plus diverses, en ce compris des matières n'ayant pas un rapport direct avec le commerce;

P. Constatant l'accroissement considérable du déficit démocratique en ce qui concerne le contrôle parlementaire sur des matières dont la compétence a été transférée à des institutions internationales dotées de surcroît d'un pouvoir normatif s'imposant directement aux États membres, tant au niveau de leurs institutions nationales que locales;

1. Rappelle la résolution DOC 50-0112/008 du 25 novembre 1999 de la Chambre des représentants, dont la pertinence et l'actualité restent entières;

2. Insiste pour que toutes les discussions en cours (agriculture et services) ou futures au sein de l'OMC intègrent le respect des normes fondamentales de l'Organisation internationale du travail et les traités internationaux en matière d'environnement;

3. S'inquiète sur le choix du Qatar comme lieu d'organisation de la conférence ministérielle de novembre 2001 et particulièrement des garanties que la société civile aura d'y accéder et de s'y exprimer;

4. Demande que le gouvernement belge, en particulier dans le cadre de la présidence du Conseil des ministres de l'Union européenne et alors que se prépare la quatrième conférence ministérielle de l'OMC, s'efforce :

a) de faire reconnaître la légitimité et la pertinence des griefs exprimés par les pays en développement;

b) de mettre à l'ordre du jour, indépendamment de tout nouveau cycle de négociations commerciales, la réforme du fonctionnement de l'OMC tant au niveau du processus de décision qu'au niveau du mécanisme de règlement des différends;

c) de faire précéder toute décision d'ouvrir un nouveau cycle de négociations d'une décision préalable de résoudre, avant d'entamer de telles négociations, les problèmes posés par l'application des accords existants, au besoin par leur révision;

d) de ne pas accorder un chèque en blanc pour un éventuel nouveau « round » sur le modèle de la déclaration de Punta del Este;

e) d'obtenir que toute déclaration ministérielle relative à un nouveau « round » délimite avec précision les matières soumises à la négociation, à l'exclusion de toute autre;

5. Demande au gouvernement de s'associer à une réflexion indispensable sur la nécessaire adaptation du contrôle parlementaire exercé sur des institutions internationales auxquelles des éléments de la souveraineté nationale ont été transférés et qui disposent du pouvoir d'imposer directement leurs normes aux institutions nationales et locales des États membres.

6. Insiste enfin pour que la Belgique, alors présidente de l'Union européenne, exprime avec fermeté aux organisateurs et au pays hôte de la conférence ministérielle notre attachement à la libre expression démocratique de tous et de toutes les opinions.

Marie NAGY.
Michiel MAERTENS.