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Belgische Senaat

Handelingen

DONDERDAG 28 JUNI 2001 - NAMIDDAGVERGADERING

(Vervolg)

Mondelinge vraag van de heer Josy Dubié aan de staatssecretaris voor Ontwikkelingssamenwerking over «de bijzondere zitting van de algemene vergadering van de Verenigde Naties gewijd aan de aidsproblematiek» (nr. 2-669)

M. Josy Dubié (ECOLO). - Monsieur le secrétaire d'État, vous venez de rentrer de New York où vous avez assisté à une session spéciale de l'Assemblée générale de l'Organisation des Nations Unies consacrée au Sida. Ce fléau entraîne une catastrophe humaine, sociale et aussi économique, en particulier en Afrique sub-saharienne.

Pourriez-vous nous expliquer les conclusions de cette session et en particulier les raisons pour lesquelles l'expression « groupe à risques », concernant les groupes de personnes les plus touchées par l'épidémie, n'a pu être retenue dans la déclaration finale ? Je crois connaître la réponse à cette dernière partie de ma question. En effet, j'ai lu dans la presse que cette expression de « groupe à risques » - qui concerne essentiellement les drogués par injection, les prostituées et les homosexuels - n'a pas été retenue sous l'influence et la pression de certains pays musulmans et du Vatican. On sait qu'il a fallu environ cinq cents ans au Vatican pour reconnaître qu'il s'était trompé en condamnant Galilée qui avait affirmé que la terre tournait autour du soleil. Combien de centaines d'années faudra-t-il attendre avant que le Vatican ne considère les « groupes à risques » comme étant plus vulnérables que les autres et devant être protégés de manière plus précise ? J'aimerais entendre vos explications sur ce qui s'est passé à New York et sur les raisons pour lesquelles la notion de « groupes à risques » ne figure pas dans la déclaration finale.

M. Eddy Boutmans, secrétaire d'État à la Coopération au développement. - J'ai en effet assisté à la plus grande partie de la session extraordinaire de l'Assemblée générale. J'ai dû partir un peu avant la fin pour être présent au Parlement lors des débats sur le plan d'action Afrique. J'ai suivi de près les discussions mais je n'ai pas assisté à leur dernière partie. Toutefois, j'ai reçu des informations sur les groupes vulnérables. Le texte final précise qu'il faut aider ceux qui sont soumis au plus grand risque de nouvelle infection. On n'emploie donc pas l'expression « groupe à risques ». Je dispose du texte en anglais. Je le traduis à l'instant : « Les personnes qui ont le plus grand risque d'être exposées à de nouvelles infections comme indiqué par des facteurs tels que l'histoire locale de l'épidémie, la pauvreté, les pratiques sexuelles, l'usage éventuel de drogues, la façon de vivre, l'institutional location, » - je crois qu'il s'agit des détenus - « la structure sociale rompue et les mouvements de population... ». Les termes employés sont donc en effet assez approximatifs ou très vagues. Je crois qu'il faut quand même placer ce document dans son contexte.

Et ce contexte est le suivant. C'est quand même la première fois que, lors d'une telle réunion au plus haut niveau mondial, une assemblée spéciale des Nations unies, tous les représentants de tous les pays approuvent une déclaration politique dont le sens est extrêmement clair : il faut reconnaître que le sida est un problème, un défi majeur qui se pose à l'humanité et se posera encore dans les années et probablement les décennies à venir. Un plan d'action et des moyens considérables et additionnels doivent être consacrés à la lutte pour la prévention de cette maladie ainsi qu'aux moyens de soigner ceux qui en souffrent.

J'ai toutefois cru comprendre que M. Kofi Annan et notre compatriote Peter Piot - auquel on a d'ailleurs remis le prix Nelson Mandela pour son oeuvre dans la lutte contre ce fléau - sont globalement satisfaits du résultat.

Pourquoi n'a-t-on pas tenu un langage plus clair ? Déjà parler de groupes à risques, c'est s'exprimer avec prudence. Dans le premier texte que nous avons défendu, un certain nombre de groupes à risques étaient clairement identifiés. Dans mon intervention, j'ai fortement insisté pour que l'on replace la lutte contre le SIDA dans le contexte de la lutte contre la pauvreté. J'ai ajouté qu'il faudra fournir un effort important au niveau de l'information, de l'éducation et de la prévention. Cependant, j'ai aussi rappelé que, dans les pays les plus pauvres, le traitement des patients ne sera possible que si un système de santé général couvre les besoins essentiels. En effet on ne peut pas traiter un malade du SIDA sans hôpitaux, sans infirmiers, sans médecins, etc. On ne résout pas le problème des malades en ayant seulement un programme SIDA.

J'ai dit aussi qu'une attention particulière devait être accordée aux personnes les plus vulnérables comme les femmes, les hommes ayant des rapports sexuels avec d'autres hommes, les migrants sans statut, les prostituées, les personnes victimes d'exclusion sociale, les usagers de drogues par voie intraveineuse, les détenus, les enfants et les jeunes séropositifs et les femmes séropositives désireuses d'avoir un enfant. J'ai conclu en demandant de rendre hommage aux personnes qui appartiennent à ces catégories et qui se sont exprimées publiquement sur leur situation.

De concert avec presque tous les autres pays européens, j'ai tenu à ce que l'on admette dans un des groupes de travail, autour d'une des tables rondes, une association dont en principe l'admission faisait déjà l'objet d'un accord, le Gay and Lesbian Human Rights Group, contre lequel s'était dressé une opposition formée d'une certain nombre de pays islamiques. Finalement, il a fallu recourir au vote, ce qui est très rare au sein des Nation unies. Ce vote fut d'ailleurs précédé de nombreux incidents de procédures, mais in fine notre position a prévalu et le Gay and Lesbian Human Rights Group fut admis à la table ronde.

Je ne veux pas cacher que le problème est réel. Si dans certains pays, on ne veut pas que les groupes les plus vulnérables soient explicitement identifiés, il est probable que, dans la politique quotidienne, il sera difficile de tenir compte de l'existence de ces groupes et du droit qu'ils ont, dans l'intérêt général, à une attention particulière.

Cela dit, le texte renvoie aussi aux lignes directrices d'ONU-SIDA et de l'OMS qui mettent en évidence la nécessité d'une politique spécifique envers ces groupes à risques.

Il ne faut pas exagérer l'importance de ce manquement dans le texte. C'est la première fois que dans un texte d'une telle envergure, un accord est obtenu sur des points essentiels. Certes, le texte n'est pas parfait mais, pour les pays africains où les gens meurent par dizaines et centaines de milliers, sans que la sexualité homosexuelle ne joue de rôle prépondérant, le débat à ce sujet pouvait paraître disproportionné. Nous avons aussi débattu des prostitués car là aussi il y a des pays qui refusent de les identifier spécifiquement comme groupe à risques.

Cette session spéciale peut être considérée comme extrêmement positive. Je me rallie en ce sens à Peter Piot. Mais comme lui, je pense qu'il s'écoulera encore du temps avant que tous n'acceptent que ces gens ont droit à un traitement. Je le regrette.

M. Josy Dubié (ECOLO). - Je remercie le secrétaire d'État de ses commentaires. Je me réjouis également du fait que cette conférence ait pu avoir lieu. Il me semble effectivement très important que les pays soient tous présents. Je ne peux cependant m'empêcher de dénoncer cette hypocrisie et cet obscurantisme de certains pays qui refusent de reconnaître une réalité, d'appeler un chat, un chat, et d'utiliser les termes « homosexuel » et « prostituée ».

Je regrette donc que dans un texte aussi important, les personnes les plus menacées ne soient pas identifiées comme telles à cause de l'obscurantisme et de l'hypocrisie de certains.