2-801/1

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Sénat de Belgique

SESSION DE 2000-2001

25 JUIN 2001


Projet de loi portant assentiment à l'Accord entre le gouvernement du Royaume de Belgique et le gouvernement de la République fédérale d'Allemagne concernant la protection réciproque des informations classifiées, signé à Bruxelles le 7 novembre 1996


SOMMAIRE


EXPOSÉ DES MOTIFS


L'accord visé ici a pour but de protéger les informations classifiées échangées entre les deux États ou transmises dans le cadre de contrats gouvernementaux et d'en assurer la sécurité.

En particulier, les Parties devront préserver et garantir le degré de classification attribué à une information déterminée, et ne pourront utiliser ces données pour d'autres fins ni les transmettre à des tiers.

Les Parties s'engagent à n'habiliter les personnes devant prendre connaissance d'informations classifiées qu'après une enquête de sécurité appropriée.

Les Parties s'informeront mutuellement de leur intention de passer un contrat classifié. Au moment de l'exécution du contrat, les Parties veilleront à ce que les mesures de sécurité aient été prises.

Les négociations, qui ont été menées essentiellement par écrit, se sont déroulées sans problèmes notables.

Plus de trois années se sont écoulées entre la signature et la présentation de cet Accord au Parlement. Comme le Conseil d'État, lors de l'examen d'un accord similaire, avait émis des objections vu qu'à ce moment-là la Belgique ne possédait aucune législation relative aux enquêtes de sécurité, le dossier n'a été soumis au Parlement qu'après la publication le 7 mai 1999 de la loi du 11 décembre 1998 relative à la classification et aux habilitations de sécurité.

Le ministre des Affaires étrangères,

Louis MICHEL.

Le ministre de la Défense,

André FLAHAUT.


PROJET DE LOI


ALBERT II,

Roi des Belges,

À tous, présents et à venir,
SALUT.

Sur la proposition de Notre ministre des Affaires étrangères et de Notre ministre de la Défense,

NOUS AVONS ARRÊTÉ ET ARRÊTONS :

Notre ministre des Affaires étrangères et Notre ministre de la Défense sont chargés de présenter, en Notre nom, aux Chambres législatives et de déposer au Sénat le projet de loi dont la teneur suit :

Article 1er

La présente loi règle une matière visée à l'article 77 de la Constitution.

Art. 2

L'Accord entre le gouvernement du Royaume de Belgique et le gouvernement de la République fédérale d'Allemagne concernant la protection réciproque des informations classifiées, signé à Bruxelles le 7 novembre 1996, sortira son plein et entier effet.

Donné à Bruxelles, le 18 juin 2001.

ALBERT

Par le Roi :

Le ministre des Affaires étrangères,

Louis MICHEL.

Le ministre de la Défense,

André FLAHAUT.


ACCORD

entre le Gouvernement du Royaume de Belgique et le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne concernant la protection réciproque des informations classifiées

LE GOUVERNEMENT DU ROYAUME DE BELGIQUE

et

LE GOUVERNEMENT DE LA RÉPUBLIQUE FÉDÉRALE D'ALLEMAGNE,

DÉSIREUX l'un et l'autre d'assurer, conformément aux principes fondamentaux et aux normes minimum de sécurité adoptés par l'Organisation de l'Atlantique Nord, la sécurité des informations classifiées échangées entre les instances officielles des deux États, ou transmises à des firmes industrielles allemandes ou belges dans le cadre de contrats gouvernementaux;

ANIMÉS par l'idée de créer une réglementation sur la sécurité, applicable à tous les accords de coopération et contrats impliquant un échange d'informations classifiées qui seraient éventuellement conclus entre les Parties contractantes,

SONT CONVENUS DE CE QUI SUIT :

Article 1

Définition et dispositions générales

Au sens du présent Accord; la notion d'« information classifiée » comprend tout matériel, document, élément ou substance de tout genre, transmis oralement, visuellement, par écrit, par moyen électronique ou sous n'importe quelle autre forme, auxquels les autorités compétentes d'une Partie contractante ont conféré elles-mêmes ou ont ordonné de conférer un degré de classification.

Article 2

Protection réciproque, habilitations, inspections et contrôles

(1) Les Parties contractantes prendront, dans le cadre de leur législation nationale, toutes les mesures propres à assurer la sécurité des informations classifiées, transmises aux termes du présent Accord ou produites chez un adjudicataire dans le cadre d'un contrat classifié. Elles garantiront à ces informations classifiées la même protection que celle accordée à leurs propres informations classifiées d'un degré équivalent. Dans la mesure où les dispositions applicables aux informations classifiées de l'OTAN prévoient une protection plus stricte, les Parties contractantes appliqueront une protection de ce type. Les instances compétentes des Parties contractantes prendront connaissance des dispositions en matière de sécurité en vigueur auprès de l'autre Partie contractante.

(2) Les Parties contractantes ne permettront à aucun État tiers d'avoir accès aux dites informations classifiées sans l'autorisation préalable de l'autorité compétente sur l'ordre de laquelle la classification a été établie et elles utiliseront ces informations exclusivement dans le but indiqué.

(3) L'accès aux informations classifiées ne pourra être autorisé qu'aux personnes dont la mission officielle exige qu'elles en prennent connaissance et qui, pour les informations classifiées « CONFIDENTIEL » et au-dessus, auront été dûment habilitées et instruites à cet effet, après avoir fait l'objet d'une enquête de sécurité conformément à la législation nationale.

(4) Les Parties contractantes veilleront, chacune sur leur territoire, à faire observer les dispositions en matière de sécurité et à organiser les inspections de sécurité nécessaires.

(5) Les autorités compétentes d'une Partie contractante autoriseront, d'un commun accord, les experts en sécurité de l'autre Partie contractante à effectuer des visites occasionnelles sur leurs territoires respectifs, afin de discuter des procédures et des mesures à appliquer en matière de sécurité et de protection des informations classifiées. Toute autorité concernée accordera à ces experts l'assistance nécessaire pour qu'ils puissent constater qu'une information classifiée fournie par les autorités compétentes susvisées bénéficie d'une protection adéquate. Aucun droit de contrôle n'est cependant prévu.

Article 3

Contrats

(1) L'autorité compétente d'une Partie contractante désireuse de passer un contrat classifié avertira en temps utile l'autorité compétente de l'autre Partie contractante de son intention, en lui indiquant l'adjudicataire choisi, l'objet du contrat et ses éléments classifiés.

(2) L'autorité compétente de la Partie contractante dont relève l'adjudicataire informera l'autorité compétence de l'autre Partie contractante sur les conditions de sécurité présentes chez l'adjudicataire (firme, personnel, entreposage des informations classifiées).

Article 4

Attribution du degré de classification, clause de sécurité

(1) L'autorité compétente de la Partie contractante dont relève l'adjudicateur conférera un degré déterminé de classification à toute information classifiée transmise ou produite dans le cadre du contrat, et communiquera à l'autorité compétente de la Partie contractante dont relève l'adjudicataire, sous forme de liste, un relevé récapitulatif de cette classification.

(2) L'autorité de l'adjudicateur informera en même temps l'autorité de l'adjudicataire du fait que l'adjudicataire s'est engagé, vis-à-vis de l'adjudicateur, à accepter les prescriptions de sécurité de son propre Gouvernement pour le traitement des informations classifiées qui lui ont été confiées et à effectuer, en cas de besoin, les déclarations requises à cet effet auprès de l'autorité compétente de son pays. À cet effet, une clause de sécurité sera insérée dans le contrat avec l'adjudicataire.

(3) L'autorité compétente dont relève l'adjudicataire accusera réception, par écrit, de la liste de classification qui lui a été transmise et la transmettra à son tour à l'adjudicataire.

(4) Cette autorité veillera à ce que l'adjudicataire traite les éléments classifiés du contrat conformément à la clause de sécurité, au même titre que les informations classifiées de son propre pays, en fonction du degré de classification qui leur a été attribué dans la liste de classification lui transmise.

(5) Les Parties contractantes veilleront à ce qu'aucun contrat classifié ne soit adjugé ou qu'aucune phase des travaux classifiés ne soit entreprise avant que l'autorité de sécurité dont relève l'adjudicataire n'ait confirmé que les mesures de sécurité requises ont été prises chez ce dernier ou peuvent l'être en temps opportun.

(6) Deux copies du contrat seront envoyées au Gouvernement du pays où s'effectueront les travaux. Une copie est destinée à l'autorité gouvernementale compétente, la deuxième à l'adjudicataire.

(7) Dans la mesure où l'autorité compétente de l'adjudicateur autorise un contrat de sous-traitance, les paragraphes de 1 à 6 seront également d'application.

Article 5

Degrés de classification

(1) Les informations classifiées transmises seront en outre marquées par l'autorité compétente de l'Etat destinataire, ou à son initiative, du degré national de classification équivalent.

Ci-après, le tableau d'équivalence des degrés de classification nationaux :

Pour le Royaume de Belgique

TRES SECRET / ZEER GEHEIM

SECRET / GEHEIM

CONFIDENTIEL / VERTROUWELIJK

DIFFUSION RESTREINTE /

BEPERKTE VERSPREIDING

Pour la République fédérale d'Allemagne :

STRENG GEHEIM

GEHEIM

VS-VERTRAULICH

VSD-NUR FUR DEN DIENSTGEBRAUCH

(2) Cette obligation d'apposer des marques de classification s'appliquera aussi aux informations classifiées produites chez l'adjudicataire dans le cadre de l'exécution de contrats portant sur des informations classifiées ainsi qu'aux informations classifiées reproduites à cet effet.

(3) Les éléments du contrat qui ne constituent pas des informations classifiées (par exemple, les secrets industriels et commerciaux) devront porter une marque qui se distingue nettement des degrés de classification énumérés ci-dessus.

(4) La modification ou la suppression des degrés de classification ne pourra s'opérer dans l'Etat destinataire que sur requête de l'autorité d'origine ou de l'autorité qui a pris l'initiative de la classification. L'autorité concernée de l'Etat d'origine informera l'autre autorité de son intention de modifier ou de supprimer un degré de classification.

Article 6

Transmission des informations classifiées

(1) En principe, les informations classifiées seront transmises d'un Etat à l'autre par le courrier diplomatique ou militaire.

(2) L'autorité compétente en accusera réception et les acheminera par une voie sûre et protégée vers le destinataire.

(3) Les autorités compétentes pourront dans le cadre d'un projet bien déterminé conclure un arrangement général ou limité, permettant de renoncer à la voie du courrier diplomatique pour des informations classifiées jusqu'au degré de classification « SECRET » inclusivement, dans la mesure où l'utilisation dudit courrier constituerait une entrave exagérée au transport où à l'exécution d'un contrat.

En pareil cas :

­ La personne assurant le transport devra être habilitée à avoir accès aux informations classifiées d'un degré de classification équivalent;

­ L'expéditeur devra conserver un relevé des informations classifiées transportées. Un exemplaire de ce relevé sera remis au destinataire, qui le transmettra à l'autorité compétente de son pays;

­ L'information classifiée devra être emballée selon les normes en vigueur pour le transport de telles informations dans les limites du territoire national;

­ La remise de l'information classifiée devra s'effectuer contre accusé de réception.

(4) L'autorité de sécurité dont relève l'expéditeur délivrera un laissez-passer valant autorisation de transport, que la personne chargée du transport des informations classifiées devra porter sur elle.

(5) Pour le transport d'informations classifiées représentant un certain volume, les autorités compétentes détermineront cas par cas le moyen de transport, l'itinéraire et l'escorte.

Article 7

Visites

(1) Les visiteurs d'une Partie contractante ne pourront avoir accès, sur le territoire de l'autre Partie contractante, aux informations classifiées et aux installations protégées dans lesquelles des informations classifiées sont traitées ou produites, sans l'autorisation préalable de l'autorité compétente de la Partie contractante visitée. Cette autorisation ne sera accordée qu'aux personnes ayant fait l'objet d'une enquête de sécurité et habilitées à avoir accès aux informations classifiées.

(2) Les visiteurs seront annoncés à l'instance compétente de la Partie contractante visitée par le canal de l'instance compétente de la Partie contractante d'origine, quatre semaines au moins avant le début de la visite. La demande de visite fera mention, pour chaque visiteur, de ses nom, prénom, lieu et date de naissance, nationalité, niveau d'habilitation ainsi que de l'installation à visiter, du but précis et de la date de sa visite.

(3) L'autorisation de visite pourra être accordée de commun accord par les autorités compétentes, pour une période déterminée ne dépassant pas douze mois. En outre, des listes de visiteurs possédant une autorisation de visite valable pour un an, pourront être échangées.

Article 8

Incidents de sécurité

(1) Tout incident de sécurité où une infraction à la sécurité relative à une information classifiée visée par le présent Accord est présumée ou constatée, devra être communiqué sans délai à l'autorité nationale de sécurité de l'autre Partie contractante.

(2) Les enquêtes et poursuites en matière d'infractions à la sécurité seront menées par les autorités et les tribunaux compétents de la Partie contractante qui a compétence, conformément à la réglementation nationale.

Article 9

Frais

Dans les rapports entre les Parties contractantes, les frais assumés par une autorité pour la mise en oeuvre de mesures de sécurité ne seront pas remboursés.

Article 10

Autorités compétentes

Les instances et autorités gouvernementales compétentes en matière de sécurité sur le territoire de chacune des Parties contractantes sont désignées dans l'Annexe. Tout changement sera communiqué dans les meilleurs délais.

Article 11

Influence d'autres accords existants

Toute convention et tout contrat préexistant entre les Parties contractantes en matière de sécurité des informations classifiées, resteront pleinement applicables pour autant que leurs dispositions ne soient pas en contradiction avec le présent Accord.

Article 12

Révision

Toute Partie contractante pourra à tout moment demander par écrit une révision du présent Accord. Des négociations portant sur cette révision pourront ensuite être entamées.

Article 13

Entrée en vigueur, durée de validité, dénonciation

(1) Le présent Accord entrera en vigueur un mois après la date à laquelle les Parties contractantes se seront mutuellement informées de ce que les conditions internes nécessaires à son entrée en vigueur sont remplies.

(2) Le présent Accord est conclu pour une durée indéterminée.

(3) Toute Partie contractante pourra dénoncer le présent Accord par écrit, moyennant un préavis de six mois. En pareil cas, les informations classifiées transmises aux termes du présent Accord, continueront à être traitées selon les dispositions du présent Accord.

FAIT à Bruxelles le 7 novembre 1996 en deux originaux, chacun en langues française, néerlandaise et allemande, chaque texte faisant également foi.

Pour le gouvernement du Royaume de Belgique :

Ministre des Affaires étrangères

Erik DERYCKE.

Pour le gouvernement de la République fédérale d'Allemagne :

Ambassadeur

Dr. Rolf HOFSTETTER.


ANNEXE

1. Autorité de sécurité

Pour le Royaume de Belgique :

Autorité Nationale de Sécurité (ANS)

Ministère des Affaires Étrangères

Direction Générale des Services Généraux

rue des Quatre-Bras, 2

B-1000 BRUXELLES

Tél. : 32/2-501-86-15

32/2-501-85-14

Télex : 21376

23979

25733

25731

Téléfax : 32/2-501-80-58

Pour la République fédérale d'Allemagne :

Bundesministerium des Innern

Referat I S 4

Graurheindorfer Str. 198

D-53117 BONN

Tél. : 49/228-681-5241

49/228-681-5315

Télex : 886896

Téléfax : 49/228-681-3791

2. Autorité nationale de sécurité, chargée des visites, du transport (de la transmission) d'informations classifiées, ainsi que de la sécurité dans les entreprises industrielles :

Pour le Royaume de Belgique

Ministère de la Défense Nationale

SGR/SMI

Quartier Reine Elisabeth

rue d'Evere, 1

B-1140 BRUXELLES

Tél. : 32/2-701-46-14

Télex : 21808

Téléfax : 32/2-243-00-94

Pour la République fédérale d'Allemagne :

Bundesministerium für Wirtschaft

Villemombler Strasse 76

D-53123 BONN

Tél. : 49/228-615-2523/2069 (Visites)

Télex : 886747

Téléfax : 49/228-615-2676/4007 (Visites)


AVANT-PROJET DE LOI SOUMIS À L'AVIS DU CONSEIL D'ÉTAT


Avant-projet de loi portant assentiment à l'Accord entre le gouvernement du Royaume de Belgique et le gouvernement de la République fédérale d'Allemagne concernant la protection réciproque des informations classifiées, signé à Bruxelles le 7 novembre 1996.

Article 1er

La présente loi règle une matière visée à l'article 77 de la Constitution.

Art. 2

L'Accord entre le gouvernement du Royaume de Belgique et le gouvernement de la République fédérale d'Allemagne concernant la protection réciproque des informations classifiées, signé à Bruxelles le 7 novembre 1996, sortira son plein et entier effet.


AVIS DU CONSEIL D'ÉTAT

30.712/4


Le CONSEIL D'ÉTAT, section de législation, quatrième chambre, saisi par le vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères, le 21 septembre 2001, d'une demande d'avis sur un avant-projet de loi « portant assentiment à l'accord entre le gouvernement du Royaume de Belgique et le gouvernement de la République fédérale d'Allemagne concernant la protection réciproque des informations classifiées, signé à Bruxelles le 7 novembre 1996 », a donné le 16 mai 2001 l'avis suivant :

Le projet n'appelle aucune observation.

La chambre était composée de :

M. R. ANDERSEN, président du Conseil d'État;

MM. P. LIENARDY et P. VANDERNOOT, conseillers d'État;

M. J.-M. FAVRESSE, assesseur de la section de législation;

Mme C. GIGOT, greffier.

Le rapport a été présenté par M. J. REGNIER, premier auditeur chef de section. La note du Bureau de coordination a été rédigée et exposée par Mme V. FRANCK, référendaire adjoint.

La concordance entre la version néerlandaise et la version française a été vérifiée sous le contrôle de M. R. ANDERSEN.

Le greffier, Le président,
C. GIGOT. R. ANDERSEN.