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Belgische Senaat

Parlementaire handelingen

DONDERDAG 2 MAART 2000 - NAMIDDAGVERGADERING

(Vervolg)

Mondelinge vraag van mevrouw Anne-Marie Lizin aan de minister van Binnenlandse Zaken over «de oplevering van het Telerad-systeem» (nr. 2-168)

Mme Anne-Marie Lizin (PS). - Je vous interroge pour la deuxième fois sur le même sujet, monsieur le ministre. La première fois, le secrétaire d'État Deleuze avait lu votre réponse. Aujourd'hui, nous avons le plaisir de votre présence en direct. J'aimerais savoir qui a signé la réception du matériel Telerad. J'aimerais savoir également ce que vous savez aujourd'hui de ce qu'on savait à l'époque de son inadéquation complète. Je rappelle que le 2 février, vous aviez demandé à M. Deleuze de me donner lecture de quelques passages hautement risqués dans lesquels vous me répondiez qu'il semblait peu judicieux de prétendre que le réseau était défaillant. Nous devons certes constater, me disiez-vous, qu'il ne peut, à l'heure actuelle, rencontrer son niveau de performance habituel. Vous confirmiez que le système Telerad remplit son rôle de manière satisfaisante pour assurer de manière ininterrompue la sécurité de la population belge. Voilà ce que M. Deleuze a dit le 2 février 2000 à cette même tribune.

On vous a peut-être donné ces informations. Je tiens à dire que M. Vande Lanotte, votre prédécesseur, vous avait longuement entretenu de ses inquiétudes et des raisons pour lesquelles il faisait réunion sur réunion à l'époque, en 1997, à propos d'une firme appelée Consenvi, du CEN de Mol et de l'IRE de Fleurus, pour essayer de comprendre pourquoi, en 1997 déjà, les alarmes de ce splendide système ne fonctionnaient pas. Dans la façon dont on a réceptionné le matériel, dont la Belgique entière sait maintenant le coût, a-t-on pris la précaution de protéger l'État par rapport à un non-fonctionnement dont on savait déjà, j'en suis convaincue, monsieur le ministre, qu'il conduirait à des problèmes n'ayant rien à voir avec le bogue de l'an 2000 ? Aujourd'hui, les spécialistes rient du fait qu'on vous ait fait dire des choses de ce genre. Cela n'a rien à voir avec le bogue. Les alarmes n'ont jamais fonctionné et le système de mesurage est manuel, ce qui veut dire que même les données qu'on vous a dit de nous lire à la tribune le 2 février, celles de 10 h 01, 11 h 01, 12 h 01, etc. ne concernaient pas leurs propres balises fédérales.

En ce qui concerne les alarmes, a-t-on au moins pris la précaution, dans l'acte de réception, de se prémunir contre son non-fonctionnement ? En 1997, M. Vande Lanotte disait que la garantie entre la réception provisoire et la réception finale prévoit que si le taux de disponibilité du réseau n'est pas atteint pour des raisons imputables à l'entrepreneur - maintenant, on sait également qui c'est - celui-ci est tenu d'effectuer des actions correctives nécessaires en remplaçant le matériel niveau de disponibilité de 99%. On n'a jamais atteint les 70%. Et donc, ce sont bien l'association Vinçotte et Controlatom qui ont signé des documents sur des éléments, à mon avis, non valables. Alors, sur quelles bases, par exemple, a-t-on pu réellement clôturer la réception définitive? Vos prédécesseurs ont-ils fait procéder à un audit? Que contenait cet audit? Menez-vous déjà ou mènerez-vous une enquête à ce sujet? Avez-vous déjà pris la précaution, monsieur le ministre, de demander à la Cour des comptes de vérifier les conditions de ce marché?

M. Antoine Duquesne, ministre de l'Intérieur. - Madame Lizin, vous me connaissez un peu et donc, vous savez que je n'aime pas le cinéma, sauf quand j'y vais pour me distraire, mais certainement pas en matière de sécurité. Je n'aime pas que dans le cadre des questions, on me dise n'importe quoi et, surtout, qu'on me fasse dire n'importe quoi. J'ai dit et je maintiens qu'en tout cas, ce qui était nécessaire pour assurer la sécurité de la population jouait pleinement. Ce n'est pas à vous que je dois donner un cours sur les mécanismes de sécurité, vous êtes une spécialiste en la matière. Vous savez donc qu'un certain nombre de systèmes existent, d'abord dans les centrales elles mêmes, et que tout incident doit être signalé à l'autorité.

Vous savez aussi que lorsque les balises installées, qu'il s'agisse des balises générales qui doivent alerter sur les événements extérieurs ou des balises se trouvant aux clôtures autour des établissements, ne donnent pas automatiquement l'information, celle-ci peut être collectée manuellement.

C'est cela que j'ai dit. Je n'ai jamais dit que ce contrat TELERAD était le meilleur qui ait jamais été conclu en Belgique. Au contraire, et pourtant on aurait pu penser que c'était un excellent contrat quand on voit à la fois les précautions qui ont été prises et le coût que cela représente.

La décision a en effet été prise en 1982, du temps du secrétaire d'État, M. Aerts. La phase d'étude a duré près de dix ans. Le concept a été développé par un syndicat d'étude dont faisaient partie tant le Centre d'étude de l'énergie nucléaire de Mol que l'Institut des radioéléments de Fleurus. Tout cela ne me rassure pas.

Les travaux ont débuté sur l'ordre de Mme Smet, en mai 1992. Ils ont duré six ans. La réception définitive a eu lieu en juin 1998 mais elle a été réalisée en deux temps.

Les premiers achats de matériel ont eu lieu en 1993. C'est ce que j'ai répondu il y a plusieurs mois à la Chambre à M. Poncelet, qui connaît très bien ce dossier. C'est la raison pour laquelle ces ordinateurs datant de 1993 n'étaient pas adaptés aux exigences pour surmonter le bogue de l'an 2000.

Dès le 29 juillet 1999, j'ai décidé d'aller au Conseil des ministres pour deux raisons. D'abord pour m'assurer qu'il n'y aurait pas de problème avec le passage de l'an 2000 mais aussi pour voir de plus près ce qui se passait au niveau de ce contrat de plus de 600 millions, qui entraîne des frais de fonctionnement de 80 millions par an, et des avis contrastés pour ne pas dire contradictoires concernant son efficacité compte tenu des moyens engagés.

Le gouvernement a été placé devant un choix. Pour procéder à l'adaptation nécessaire, on nous disait qu'il fallait engager un coût supplémentaire de près de 80 millions. Le gouvernement a opté pour une adaptation plus limitée de 20 millions, c'est-à-dire pour les balises se trouvant autour des centrales.

Les moyens ont été mis à disposition par le ministre de l'Emploi et du Travail mais la firme Fabricom, je ne sais pour quelle raison, n'a accepté de commencer les travaux qu'à partir du moment où le premier franc serait payé. Ces travaux n'ont commencé qu'au début du mois de décembre et ne sont pas encore terminés. Ils le seront dans le courant du mois de mars. Dans l'ensemble du dispositif, il y avait également des sous-traitants qui sont nécessaires pour la continuation de l'opération et qui ont aujourd'hui disparu, ce qui pose problème.

Et donc notamment pour le passage à l'an 2000, on a eu recours à la bascule manuelle des informations pour suivre les évolutions. Dans ces conditions, la sécurité était et est assurée. Mais pour ma part, je n'ai pas renoncé à voir clair dans ce dossier. Vous l'avez rappelé, on a souvent parlé d'un audit. Moi, je n'en parlerai pas mais je recommanderai au gouvernement de le faire. Je dispose de suffisamment d'informations pour proposer au gouvernement, le 17 mars prochain, de se livrer à un audit approfondi. J'espère disposer enfin au mois de juillet d'un diagnostic clair et précis sur le fonctionnement de ce réseau. C'est la première étape à accomplir et pour l'instant, je n'ai donc pas fait appel à la Cour des Comptes. Mais je ne l'exclus pas, madame, d'autant que comme vous le savez, je puis le faire sur la base d'une loi que j'ai moi-même proposée et fait adopter à l'unanimité par la Chambre. Je serais donc ravi si c'est nécessaire. Il faut y voir clair. Dans ce domaine de la sécurité nucléaire, il règne un certain désordre. Il faut une meilleure coordination des services. Il est grand temps de poursuivre l'installation de l'Agence fédérale et d'avoir des dispositifs plus performants pour l'analyse des choix et la collaboration des services.

Mme Anne-Marie Lizin (PS). - Je voudrais simplement remercier le ministre de sa réponse. Nous sommes sur la même longueur d'ondes quant à la nécessité de clarifier ce secteur de la sécurité nucléaire et des responsabilités fédérales en cette matière. Si je vous pose des questions, ce n'est pas que je veuille vous mettre vous-même en cause. Je sais bien que l'actuel ministre de l'Intérieur ne peut que faire procéder à de nouvelles vérifications. Je crois réellement qu'il faut le faire.

En effet, la protection de la population est une responsabilité fédérale mais elle relève aussi des bourgmestres et en aucun cas, nous ne considérerons ceci comme une matière mineure.

Pour des consommations potentiellement bien moins importantes, on a fait pour la dioxine une analyse bien plus détaillée. Ce dossier qui requiert du matériel adapté traîne depuis des années et je pense qu'il faut, à un moment donné, responsabiliser ceux qui auraient dû assumer correctement cette matière.

Vous savez bien que les balises régionales qui existent sont toujours les seules à fonctionner ! Je pense que l'Institut des radioéléments peut être fier de ses réalisations. Il est grand temps de le réécouter dans ce dossier afin de savoir avec précision comment il a pu, à bien moindres frais et dans un laps de temps beaucoup plus court, mettre des balises en place qui sont toujours les bonnes aujourd'hui.

Je n'exclus pas d'aller ultérieurement beaucoup plus loin dans ce dossier. J'attendrai cependant votre opinion et celle du gouvernement lorsque vous proposerez l'audit.

M. Antoine Duquesne, ministre de l'Intérieur. - Je vous dirai que je partage vos soucis. Vos questions sont de bonnes questions. Je n'ai pas dû me rendre auprès d'une balise avec un peu de plutonium pour me les poser ! Si je puis me permettre un conseil, je vous dirai qu'il ne faut pas en faire une habitude car une petite quantité de plutonium peut représenter un danger pour celui qui le manipule sans précautions et sans autorisation !