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Sénat de Belgique

Annales parlementaires

JEUDI 2 DÉCEMBRE 1999 - SÉANCE DE L'APRÈS-MIDI

(Suite)

Question orale de Mme Magdeleine Willame-Boonen au ministre des Télécommunications et des Entreprises et Participations publiques sur «l'émission par La Poste, ce 6 décembre, d'un timbre à l'effigie de Lénine»

Mme Magdeleine Willame-Boonen (PSC). - Le Comité philatélique belge a décidé d'émettre une série de timbres à 17 francs - à raison de vingt par an et ce jusqu'en 2002 - qui formeront ce qu'il appelle une rétrospective d'adieu au XXe siècle.

Vingt de ces quatre-vingts timbres seront mis en vente dès ce lundi 6 décembre, d'où ma question orale : parmi ceux-ci, un sera frappé de l'effigie de Lénine.

(M. Jean-Marie Happart, vice-président, prend place au fauteuil présidentiel.)

Différents ouvrages scientifiques dont un, écrit en 1994 par Dimitri Volkogonov, ancien directeur de l'Institut de l'histoire militaire, traduit en français en 1995, s'appuyant sur les archives secrètes de l'ex-URSS, révèle le vrai visage de celui qui ne fut pas seulement le plus grand révolutionnaire de ce siècle - ce qui n'est pas moralement répréhensible - mais aussi le véritable père des camps de concentration soviétiques, un homme qui sema la terreur dans son pays et dont le régime coûta la vie à plusieurs centaines de milliers de personnes.

À sa décharge, le Comité philatélique explique, paraît-il, que le timbre ne peut plus être supprimé car il est dessiné, gravé, imprimé et empaqueté, ... et qu'il est indéniable que Lénine a marqué le siècle.

Soit. L'explication est incontestable. Lénine a effectivement marqué le siècle comme l'ont malheureusement fait aussi d'autres grands dictateurs comme Staline, Hitler, Pol Pot et, dans une moindre mesure, Pinochet... pour ne citer qu'eux.

Méritent-ils pour autant d'être collés, notamment par des enfants qui pourraient se demander qui est ce monsieur sur le timbre, sur tout le courrier privé mais aussi sur le courrier public du Royaume ?

Quelle image désire-t-on donner de notre pays à l'étranger ? Celle d'un État qui n'a pas tiré les leçons de l'Histoire ?

La Poste est certes une entreprise publique autonome et vous me répondrez que vous ne disposez d'aucune compétence directe en la matière mais, ce qui m'intéresse, c'est de savoir quel est votre avis personnel sur ce sujet et si vous le ferez savoir publiquement au Comité philatélique.

M. Rik Daems, ministre des Télécommunications et des Entreprises et Participations publiques. - Ma réponse sera la même que celle que j'ai déjà donnée à deux reprises à la Chambre. Il s'agit d'une émission de quatre-vingts timbres, parmi lesquels dix porteront l'effigie de personnalités, à savoir le pape Jean XXIII, le Roi Baudouin, Willy Brandt, Kennedy, Gandhi, Martin Luther King, Lénine, Che Guevera, Golda Meir, Nelson Mandela.

Pour ce qui est du choix des personnalités retenues, je vous informe qu'il existe au sein de la Poste, entreprise autonome, une commission philatélique, constituée de façon pluraliste, laquelle décide de manière autonome, précisément pour éviter des critiques de la part du gouvernement ou de personnes exerçant des responsabilités à l'intérieur ou à l'extérieur de la Poste. Il m'est donc impossible d'influencer les décisions de cette commission.

Je voudrais souligner que ce choix opéré en 1998 - oserais-je dire sous le précédent gouvernement? - fut présenté en décembre 1998. A l'époque, je n'ai entendu aucune remarque. Pour une fois que je poursuis la politique du précédent gouvernement, la nouvelle opposition me critique!

Mme Magdeleine Willame-Boonen (PSC). - Je trouve que la réponse est particulièrement dérisoire. Elle en devient banale. Sachant que ce timbre sortira le 6 décembre, je me réjouis à l'idée de voir sur une même enveloppe l'image de Lénine et celle du futur couple princier.

M. Rik Daems, ministre des Télécommunications et des Entreprises et Participations publiques. - Si notre collègue avait émis les mêmes critiques l'année dernière au sein d'une assemblée démocratique, j'aurais pu les accepter aujourd'hui. Dans les circonstances actuelles, je ne les accepte pas.