2-197/1

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Sénat de Belgique

SESSION DE 1999-2000

24 NOVEMBRE 1999


Proposition de loi insérant dans le Code civil un article 233bis , relatif aux causes de divorce (1)

(Déposée par M. Vincent Van Quickenborne)


DÉVELOPPEMENTS


Il est aujourd'hui impossible, pour les personnes qui ont subi un changement de sexe, de dissoudre leur mariage pour la raison spécifique du changement de sexe. Il est par ailleurs impossible, pour les personnes mariées qui ont subi un changement de sexe, de faire également reconnaître ce changement en droit tant que leur mariage n'a pas été dissous.

Cette situation est à déplorer pour plusieurs raisons.

Dans certains cas, les milieux médicaux reconnaissent que le changement de sexe constitue une intervention thérapeutique indispensable. Cette intervention est aussi acceptée par la société et remboursée par l'INAMI. Le droit civil permet aux personnes qui ont subi pareille intervention de demander un changement de prénom.

Pourtant, notre système juridique interdit de procéder au changement de sexe en droit tant qu'il n'y a pas dissolution du mariage de l'intéressé. Le mariage relève en effet de l'ordre public et il est impossible, selon la jurisprudence en vigueur, de permettre à un conjoint marié de changer de sexe parce que l'on reconnaîtrait, ce faisant, un lien matrimonial entre deux personnes de même sexe. Les transsexuels mariés se voient donc actuellement obligés de demander le divorce alors que la cause de ce divorce n'est pas inscrite dans la législation. Bien souvent, la seule raison pour laquelle les conjoints mettent fin à leur mariage, qui dure depuis des années déjà, est l'impossibilité dans laquelle ils se trouvent d'obtenir un changement de sexe en droit, lequel permettrait de mettre l'état juridique de l'intéressé en conformité avec son état réel.

L'état de la personne relève toutefois aussi de l'ordre public. Il faut que chaque donnée de l'état civil soit conforme à la vérité et, si nécessaire, adaptée à la situation modifiée.

On se trouve là devant une situation tout à fait absurde. Tant le mariage que l'état personnel sont d'ordre public; dans le cas qui nous occupe, ils sont, conformément à la législation en vigueur, contraires l'un à l'autre.

Il est clair que les transsexuels sont actuellement acculés et contraints de divorcer sur la base de faits mensongers s'ils veulent obtenir un état personnel correct, ou de continuer à vivre dans le lien du mariage alors que leur situation réelle est contraire aux données de leur état civil, avec toutes les conséquences que cela entraîne. Cet état de choses est inacceptable et montre que notre système juridique n'est pas adapté aux situations de fait existantes. Aussi proposons-nous d'adapter le droit aux situations de fait qui se présentent de nos jours.

Nous souhaiterions que la loi soit modifiée de façon que la transsexualité figure parmi les causes de divorce prévues par la législation. Nous demandons en outre que l'octroi du changement de sexe en droit ne dépende plus de la dissolution du mariage. Une des conditions pour pouvoir contracter mariage est que les futurs conjoints soient de sexe opposé, mais le changement de sexe et, partant, l'identité de sexe dans les faits ne peuvent pas constituer une cause de nullité du mariage.

Nous proposons concrètement d'inscrire la transsexualité parmi les causes de divorce prévues au Code civil et, en même temps, de préciser dans notre droit que l'état d'époux ne peut pas empêcher un changement de sexe en droit.

Vincent VAN QUICKENBORNE.

PROPOSITION DE LOI


Article 1er

La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.

Art. 2

Il est inséré dans le Code civil un article 233bis , libellé comme suit :

« Art. 233bis. ­ Chacun des époux peut demander le divorce pour cause de changement de sexe de son conjoint ou de lui-même. L'existence du mariage ne peut empêcher le changement de sexe en droit. Ledit changement n'entraîne pas la dissolution d'office du mariage. »

Vincent VAN QUICKENBORNE.

(1) La présente proposition de loi a déjà été déposée au Sénat le 29 avril 1999, sous le numéro 1-1423/1 ­ 1998/1999.