2-196/1

2-196/1

Sénat de Belgique

SESSION DE 1999-2000

24 NOVEMBRE 1999


Proposition de loi modifiant les articles 335 et 358 du Code civil en ce qui concerne le nom de l'enfant (1)

(Déposée par M. Vincent Van Quickenborne)


DÉVELOPPEMENTS


La présente proposition de loi fait suite à une proposition de loi sur le double nom, qui a été déposée il y a quelque temps (le 26 septembre 1995, doc. Sénat, nº 1-112/1). Contrairement à celle-ci, elle prévoit que l'on fera référence, dans le double nom de l'enfant, d'abord au nom de la mère, ensuite à celui du père.

Elle prévoit donc que le nom de l'enfant commence par le nom de la mère et se termine par celui du père. En mentionnant aussi bien le nom du père que celui de la mère, on souligne le lien qui unit l'enfant à ses parents.

Cette option bouscule encore plus nos traditions en ce sens qu'elle permettra d'indiquer plus clairement la filiation maternelle et de la tracer plus facilement; jusqu'ici, c'est la filiation paternelle qui est mise en évidence et facile à établir. Divers éléments plaident toutefois pour mentioner le nom de la mère avant celui du père.

Premièrement, cela permet de remédier à cette longue attitude de dénigrement à l'endroit de la femme et, à tout le moins, discriminatoire à l'égard de la mère. Il importe aussi de confirmer de la sorte, dans le nom, le lien intime qui unit la mère et son enfant. C'est, en fin de compte, la mère qui porte l'enfant durant neuf mois en son sein et c'est aussi elle qui, dans de nombreux cas, assure l'essentiel de son éducation au sein de la famille.

Je suis catégoriquement opposé à tout système qui limiterait le nom à un patronyme unique. Dans certains milieux, l'on affirme que la seule bonne chose à faire est d'opter pour la mention du nom de la mère. Cela ne serait sans doute pas une bonne chose, car on ne ferait ainsi que remplacer une discrimination (mention exclusive du nom du père) par une autre (mention exclusive du nom de la mère), et l'on n'aurait pas progressé.

Il serait également inopportun de donner aux garçons le nom du père et aux filles celui de la mère. Il importe que tous les enfants d'une même famille continuent à porter le même nom.

COMMENTAIRE DES ARTICLES

Article 2

Désormais, le nom de l'enfant comportera deux parties. La première sera le nom de sa mère et la seconde celui de son père.

Le nom ne pouvant comporter que deux parties, si la mère et/ou le père portent un double nom, seule la première partie du nom de chacun sera transmise à l'enfant.

Si seule la filiation paternelle ou la filiation maternelle est établie, l'enfant se verra conférer le nom complet du seul parent concerné.

Si la filiation paternelle et maternelle sont établies, mais que le père est marié avec une autre femme, l'enfant recevra le nom complet de sa mère.

Cet article règle également le port du nom dans le cas où la filiation paternelle n'est connue qu'après que la filiation maternelle a été établie, et donc après que l'enfant a reçu le nom de la mère.

Article 3

A) Cet article règle les conséquences de l'adoption pour le patronyme. L'adoption confère à l'adopté le même nom qu'en cas de filiation ordinaire. Ici aussi, on maintient l'exception selon laquelle l'adopté peut conserver son nom initial. Dans la législation actuelle, cela conduit à un double patronyme; dans la nouvelle législation, on pourrait avoir un triple patronyme.

B) La règle en cas de nouvelle adoption est mise en conformité avec les principes précités.

C) Cet article règle en outre les conséquences de l'adoption d'une personne majeure.

D) Le § 3 de l'article 358 du Code civil doit être supprimé, puisque la disposition qu'il contient fonde la discrimination dont la femme est l'objet. L'adoption doit toujours avoir les mêmes effets, que l'adoptant soit une femme ou un homme.

E) En cas d'adoption par une veuve, il faut que son nom et celui de son conjoint décédé puissent être ajoutés au nom de l'adopté ou s'y substituer.

Article 4

Cet article permet de donner aux enfants mineurs, nés avant l'entrée en vigueur des présentes modifications de loi, le même nom que celui de leurs frères ou soeurs qui naîtront ou seront adoptés après l'entrée en vigueur de la loi en projet.

Vincent VAN QUICKENBORNE.

PROPOSITION DE LOI


Article 1er

La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.

Art. 2

À l'article 335 du Code civil, inséré par la loi du 31 mars 1987, sont apportées les modifications suivantes :

A) le § 1er est remplacé comme suit :

« § 1er . L'enfant dont seule la filiation paternelle est établie porte le nom de son père. L'enfant dont la filiation paternelle et la filiation maternelle sont établies en même temps, porte la première partie du nom de sa mère ou, si celle-ci n'a qu'un nom, le nom de sa mère, suivi(e) de la première partie du nom de son père ou, si celui-ci n'a qu'un nom, du nom de son père, sauf si le père est marié et reconnaît un enfant conçu pendant le mariage par une autre femme que son épouse. »;

B) le § 3, alinéa 1er , dernière phrase, est remplacé par la disposition suivante :

« Toutefois, les père et mère ou l'un d'eux, si l'autre est décédé, peuvent déclarer, dans un acte dressé par l'officier de l'état civil, que l'enfant portera également la première partie du nom de la mère ou, si celle-ci n'a qu'un nom, le nom de la mère, suivi(e) de la première partie du nom du père ou, si celui-ci n'a qu'un nom, du nom du père. »

Art. 3

À l'article 358 du même Code, inséré par la loi du 31 mars 1987, sont apportées les modifications suivantes :

A) le § 1er est remplacé comme suit :

« § 1er . L'adoption confère à l'adopté(e), en le substituant au sien, le nom de l'adoptant(e) ou, en cas d'adoption simultanée par les époux, la première partie du nom de la femme ou, si celle-ci n'a qu'un nom, le nom de la femme, suivi(e) de la première partie du nom du mari ou, si celui-ci n'a qu'un nom, du nom du mari.

Les parties peuvent toutefois convenir que l'adopté(e) conservera son nom ou la première partie de son nom, si celui-ci se compose de deux parties, suivi(e) de la première partie du nom de l'adoptant(e) ou des adoptants, ou, si celui(celle)-ci n'a ou ceux-ci n'ont qu'un nom, du nom de l'adoptant(e) ou des adoptants. »;

B) le § 2 est remplacé par la disposition suivante :

« § 2. En cas d'adoption, par le partenaire, d'un enfant adoptif de l'époux ou de l'épouse, ou en cas d'une nouvelle adoption, prévue à l'alinéa 2 de l'article 346, la première partie du nom du (de la) nouvel(le) adoptant(e) ou, si celui(celle)-ci n'a qu'un nom, le nom du(de la) nouvel(le) adoptant(e) est ajouté(e) comme partie à celui de l'adopté(e), peu importe que le nom de celui(celle)-ci ait été conservé ou modifié lors de l'adoption précédente.

Si lors de celle-ci, le nom de l'adoptant(e) a remplacé celui de l'adopté(e), les parties peuvent convenir que le nouveau nom de l'adopté(e) sera composé du nom qu'il(elle) tient de cette adoption précédente, suivi de la première partie du nom de l'adoptant(e) ou des adoptants, ou, si celui(celle)-ci n'a ou ceux-ci n'ont qu'un nom, du nom du (de la) nouvel(le) adoptant(e) ou des nouveaux adoptants.

Lorsque, lors de l'adoption précédente, le nom de l'adoptant(e) précédent(e) a été ajouté à celui de l'adopté(e), les parties peuvent convenir que le nom de ce(cette) dernier(ère) sera composé :

­ soit du nom originel de l'adopté(e), suivi de la première partie du nom du(de la) nouvel(le) adoptant(e) ou des nouveaux adoptants, ou, si celui(celle)-ci n'a ou ceux-ci n'ont qu'un nom, du nom du(de la) nouvel(le) adoptant(e) ou des nouveaux adoptants;

­ soit du nom de l'adoptant(e) précédent(e), suivi de la première partie du nom du(de la) nouvel(le) adoptant(e) ou des nouveaux adoptants, ou si celui(celle)-ci n'a ou ceux-ci n'ont qu'un nom, du nom du (de la) nouvel(le) adoptant(e) ou des nouveaux adoptants.

L'adopté(e) qui, avant une adoption précédente, portait le même nom que le(la) nouvel(le) adoptant(e) ou les nouveaux adoptants, reprend ce nom sans aucune modification. »;

C) le § 2bis , alinéa 2, est remplacé par la disposition suivante :

« Elles pourront également convenir, si l'adopté(e) a conservé son nom lors d'une adoption précédente, qu'il(elle) pourra le faire suivre de la première partie du nom de l'adoptant(e) ou des adoptants, ou, si celui(celle)-ci n'a ou ceux-ci n'ont qu'un nom, du nom de l'adoptant(e) ou des adoptants. »;

D) le § 3 est abrogé;

E) le § 4 est remplacé par la disposition suivante :

« § 4. En cas d'adoption par une veuve, les parties peuvent, de leur commun accord, solliciter du tribunal que la première partie du nom du défunt mari de l'adoptante ou, si celui-ci n'avait qu'un nom, le nom du défunt mari de l'adoptante, précédé(e) de la première partie de son nom à elle ou, si elle n'a qu'un nom, de son nom, soit substitué(e) ou ajouté(e) au nom de l'adopté(e). »

Art. 4

Disposition transitoire

Les modifications résultant des dispositions des articles 335 et 358 du Code civil n'ont d'effet qu'à l'égard des naissances ou adoptions postérieures à l'entrée en vigueur de la présente loi. Cependant, les enfants mineurs qui viendraient à avoir, par voie de filiation ou d'adoption, des frères et/ou des soeurs ressortissant à la présente réglementation, pourront également, à la demande de leurs père et mère, ou du seul parent dont la filiation est établie, faire adapter leur nom comme il est prévu dans la présente loi.

En pareil cas, le changement de nom pourra se faire dans un acte dressé par l'officier de l'état civil à la demande des père et mère, ou du seul parent dont la filiation est établie, et déclarant que l'enfant mineur portera également le nom de la mère à côté du nom du père.

Vincent VAN QUICKENBORNE.

(1) La présente proposition de loi a déjà été déposée au Sénat le 5 août 1997, sous le numéro 1-719/1 ­ 1996/1997.