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Sénat de Belgique

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 1999

30 SEPTEMBRE 1999


Proposition de loi élargissant le droit de codécision du patient par l'institution d'une déclaration de volonté relative au traitement (1)

(Déposée par M. Frans Lozie et Mme Jacinta De Roeck)


DÉVELOPPEMENTS


La médecine a enregistré d'importants succès.

Bien des maladies infectieuses qui étaient autrefois fréquentes et connaissaient une issue fatale relativement rapide ont été plus ou moins vaincues.

Il y a toutefois un revers à la médaille.

Aujourd'hui, les gens ne meurent plus de ces maladies, mais d'autres, qui s'accompagnent de souffrances d'une nature et d'une intensité nouvelles.

Plus les gens vivent longtemps, plus ils courent de risques d'être frappés d'une longue maladie dégénérative que la médecine ne parvient pas encore à vaincre; ceux qui en souffrent n'en voient pas moins leur espérance de vie augmenter.

En effet, ils ont de moins en moins de chances d'être délivrés par une mort rapide et relativement douce, ce qui vaut d'ailleurs également pour les victimes (souvent jeunes) d'accidents de la route, qui souffrent de blessures graves ou qui ont sombré dans le coma.

Les gens sont donc confrontés plus souvent que dans le passé à des situations de déchéance prolongée et à d'autres situations sans espoir sur le plan médical, alors qu'ils ont tendance à supporter de moins en moins la souffrance et qu'ils lui confèrent de moins en moins un sens positif. Ils craignent que, dans les circonstances visées, leur vie ne soit prolongée inutilement par l'acharnement thérapeutique d'un médecin traitant, dont ils ne connaissent pas à priori l'attitude à l'égard de la souffrance.

Dans le large contexte social que constituent nos familles, nos amis, nos collègues et nos autres connaissances, beaucoup d'entre nous sont confrontés, de façon poignante, à des cas de personnes qui réclament pour elles-mêmes le droit de mourir dans la dignité. Ces personnes demandent expressément à pouvoir codécider de la manière dont elles quitteront la vie. Elles ne veulent pas laisser au médecin le soin de prendre des décisions relatives à la fin de leur vie, mais beaucoup souhaitent qu'il leur apporte une aide compétente.

Elles désirent éviter le déclin de leur personnalité, l'état d'entière dépendance et des souffrances parfaitement inutiles à leurs yeux. Elles demandent, dès lors, que l'on crée un cadre légal qui tienne dûment compte de leurs souhaits légitimes.

Par-delà les différences de conceptions philosophiques et d'idéologies politiques, se dégage chaque jour davantage un large appui social pour modifier le droit pénal dans les sens suivants :

a) Le médecin traitant qui a renoncé à entamer un traitement prolongeant la vie ou qui a arrêté un tel traitement dans une situation sans espoir du point de vue médical, ne peut plus être puni; cela doit même devenir la règle. On a réalisé de tels progrès dans le domaine des connaissances et de la technologie médicales qu'il est possible désormais de retarder la mort physiologique au-delà du moment où la vie devient insupportable ou au-delà de celui où elle a perdu tout son sens aux yeux de l'intéressé. Dans la pratique, l'application effrénée de technologies médicales revient trop souvent à prolonger la vie au-delà de sa limite naturelle et, dès lors, à prolonger inutilement les souffrances.

b) Il ne faut pas qu'un médecin coure encore le risque d'avoir à comparaître en justice pour avoir administré des analgésiques à un patient, même pas si ceux-ci ont eu pour effet d'abréger la vie. Il y a lieu d'adapter la législation à l'évolution des choses qui veut déjà que de tels actes soient considérés comme des actes médicaux fondés dans le cadre des soins palliatifs.

D'autres modifications du Code pénal s'imposent. La législation actuelle est inhumaine. En effet, elle oblige le patient soit à recourir à des moyens extrêmes (saut par une fenêtre d'hôpital, pendaison, noyade, accident de voiture camouflé, utilisation d'une arme à feu, ...), soit à accepter une déchéance croissante jusqu'à l'instant ultime, soit à inviter le médecin à commettre un acte illégal. Elle laisse le médecin devant le choix de commettre un acte illégal, à la demande ou non du patient, ou d'écarter la demande d'aide compétente de celui-ci. Beaucoup de personnes qui ont assisté de près aux souffrances inhumaines d'un de leurs proches, estiment que la possibilité doit être ouverte de mettre fin, dans certaines circonstances et sous certaines conditions, d'une manière humaine à la vie d'une personne qui le demande expressément. L'assistance au suicide et l'administration de substances euthanasiantes sont relativement simples à pratiquer du point de vue technique mais, du point de vue psychique et émotionnel, la décision d'y recourir reste heureusement difficile. L'interdiction légale dont elles sont frappées rend leur exécution trop difficile. Et c'est celui qui est directement intéressé, à savoir le patient, qui en est la principale victime.

Par le biais d'une adaptation du Code pénal, nous offrons aux citoyens la possibilité légale de souscrire, s'ils le souhaitent, en toute liberté, avec un médecin, une déclaration de volonté relative au traitement. Le médecin peut, en toute liberté, accepter d'exécuter la déclaration de volonté relative au traitement ou refuser de prêter son assistance. S'il prête son assistance dans le respect des exigences de rigueur, il ne peut pas faire l'objet de poursuites pénales. Comme beaucoup de personnes décèdent à l'hôpital ou dans un autre établissement de soins, nous disposons que la direction de ceux-ci ne peut pas empêcher l'exécution éventuelle d'une déclaration de volonté relative au traitement.

Selon nous, il n'y a aucune incompatibilité entre la déclaration de volonté relative au traitement et le développement des soins palliatifs. Ils répondent tous deux à un besoin et se complètent.

Un malade souhaite rester aussi longtemps que possible dans son environnement habituel. Une amélioration de l'encadrement des soins à domicile permettrait de retarder l'hospitalisation. Nous plaidons, dès lors, pour que les pouvoirs publics améliorent l'encadrement des soins informels et des soins palliatifs à domicile. Cela permettrait de retarder l'irruption du sentiment douloureux d'aliénation, mais la plupart des patients arrivés en phase terminale finissent quand même leur vie à l'hôpital. Les soins palliatifs doivent être développés de telle manière qu'ils fassent partie intégrante de la pratique quotidienne, et ce, dans le cadre tant des hôpitaux et des maisons de retraite qu'au domicile du patient.

La possibilité de recourir aux soins palliatifs est parfois présentée, à tort, comme un substitut au droit de souscrire une déclaration de volonté relative au traitement. Il est vrai qu'en combattant efficacement la douleur et en offrant un meilleur encadrement psycho-social, l'on peut, dans de nombreux cas, retarder la demande d'administration de substances euthanasiantes. L'on ne peut, toutefois, pas la prévenir définitivement. En effet, les soins palliatifs n'offrent pas de solution à celui qui trouve que continuer à vivre n'ajoute plus rien à la qualité de sa vie et ne revient plus qu'à prolonger son inutilité.

C'est pourquoi la direction d'un établissement ne peut jamais s'opposer à l'acceptation et/ou à l'exécution, par un médecin relevant de lui, d'une déclaration de volonté relative au traitement; elle ne peut a fortiori pas l'interdire.

L'administration de soins palliatifs à domicile ne rend pas nécessairement toujours superflue non plus la demande d'exécution d'une déclaration de volonté relative au traitement.

Il ressort d'une enquête menée aux Pays-Bas que les facteurs de souffrance qui sont invoqués le plus souvent pour justifier les demandes expresses d'euthanasie ou d'assistance au suicide adressées aux médecins généralistes sont :

­ une faiblesse ou une fatigue généralisée,

­ une dépendance ou une infirmité,

­ une perte de dignité ou une déchéance,

­ une souffrance physique,

­ une incapacité de manger ou de boire,

­ une invalidité, une immobilité,

­ un essoufflement, une sensation d'étouffement.

Par ailleurs, certains malades considèrent que les soins à domicile, même s'ils sont bien intégrés dans le cadre de soins palliatifs, sont une charge trop lourde pour leur conjoint ou compagnon (parfois âgé et seul), pour leur ménage ou pour leurs parents.

L'évolution de la science et de la technique dans le monde médical soulève des questions d'ordre éthique. La question de la déclaration de volonté en matière de traitement en est une. Elle nous amène forcément à réfléchir au sens des notions de vie humaine et de dignité humaine, à réenvisager le rôle du médecin et à adapter la législation.

Un traitement médical ne peut pas priver le patient du droit de mourir dans la dignité. Il doit lui permettre de s'incliner devant l'inévitable, surtout si c'est ce qu'il souhaite quant à lui. En tant que législateur fédéral, nous devons prendre nos responsabilités en déposant une proposition de loi réglementant cette matière.

Nous l'avons élaborée à la lumière :

a) du débat sur les soins palliatifs et l'euthanasie qui s'est développé dans notre pays;

b) de l'évolution qui se dessine dans les pays voisins;

c) des propositions de loi déposées par d'autres membres du parlement au cours des législatures précédentes.

Commentaire des articles

Art. 2

Les définitions des notions de patient et de patient se trouvant en phase terminale n'appellent aucun commentaire.

Pour prévenir tout conflit de compétence et toute confusion, il est prévu que seul le tribunal de première instance de l'endroit où le patient a son dernier domicile connu est compétent en cas de contestation se rapportant à l'article 3, § 1er , et/ou à l'article 3, § 2.

L'expression « déclaration de volonté relative au traitement » rend mieux que d'autres, comme « testament de vie », l'objet de la présente proposition de loi, qui vise notamment :

1. à conférer une force obligatoire à la déclaration par laquelle le patient exprime sa volonté de recevoir un traitement déterminé d'un médecin généraliste ou spécialiste, sans immixtion de la direction de l'hôpital;

2. à permettre aux seules personnes majeures, capables d'exprimer leur volonté, et mineures émancipées d'établir une déclaration de volonté relative au traitement;

3. à mettre à l'abri de toutes poursuites judiciaires le médecin traitant qui a exécuté la déclaration de volonté relative au traitement dans le respect des exigences de rigueur imposées;

4. à permettre au patient de désigner une personne ou une association mandatée pour intervenir dans le dialogue avec le médecin concerné au sujet de l'exécution de la déclaration de volonté relative au traitement.

Substances euthanasiantes : pour éviter des discussions vaines et sans fin, nous avons renoncé à utiliser les expressions « euthanasie indirecte », « euthanasie active », « euthanasie passive » et « orthothanasie ».

Les notions « substances euthanasiantes », « devoir de notification », « assistance aux mourants », « soins palliatifs », « officier compétent de l'état civil » et « état désespéré du point de vue médical » sont définies à l'article 2 de la proposition de loi.

Contrairement à ce qui est prévu, par exemple, dans le testament de vie proposé par l'Association pour mourir dans la dignité et Recht op Waardig Sterven , les possibilités de choix et, dès lors, le devoir de notification prévus dans la déclaration de volonté relative au traitement ne concernent que l'assistance au suicide d'un patient qui se trouve dans un état désespéré du point de vue médical et qui souhaite être délivré, d'une part, et l'administration de substances euthanasiantes, d'autre part. Nous estimons que les autres possibilités offertes par le testament de vie propagé par lesdites organisations relèvent des actes médicaux fondés et que l'administration ou non de soins palliatifs à un patient ne peut dépendre de l'existence ou non d'un testament de vie. Cette limitation des possibilités permet à la société de mieux contrôler l'application de la loi et décharge les médecins d'une administration inutile, dans l'intérêt du patient comme du leur.

La définition de la notion de soins palliatifs est reprise littéralement de l'arrêté royal du 19 août 1991.

Nous reprenons les définitions des notions de traitement médical et d'acte médical du projet de Charte des droits du patient.

Art. 3

1. Il est indispensable que tout patient ait le droit d'obtenir des informations objectives du médecin qu'il consulte pour qu'il puisse se prononcer en faveur ou en défaveur de l'application de traitements médicaux qui lui sont proposés. C'est pourquoi nous prévoyons que ce droit doit être reconnu à tout un chacun. Nous allons donc plus loin que le Code de déontologie médicale, qui dispose que le médecin doit s'efforcer d'éclairer son malade sur les raisons de toute mesure diagnostique ou thérapeutique proposée; en principe, le pronostic doit être révélé au patient. Il y aurait lieu, dès lors, d'adapter les articles 29, 33 et 42 du Code de déontologie médicale.

Ces derniers temps, l'on revendique de plus en plus, outre le droit de connaître la vérité, le droit de refuser de la connaître. Notre formulation permet au patient de dire lui-même dans quelle mesure il souhaite être informé du diagnostic et des prévisions relatives à sa maladie. Nous parvenons à concilier ainsi le droit de savoir et le droit de refuser de savoir.

2. Le patient dont émane la demande explicite d'information a droit, lorsqu'il se trouve en phase terminale ou si la qualité de sa vie a été altérée de manière dramatique à la suite d'une maladie, d'un accident ou d'une autre cause quelconque (victime d'un accident de la route, tétraplégique, patient souffrant d'une forme avancée de sclérose en plaques, ...), à un soutien optimal en raison de sa vulnérabilité physique et émotionnelle. C'est pourquoi il ne suffit pas que le médecin traitant se contente d'apprendre la vérité au patient. Il doit le faire dans le contexte global de l'accompagnement du mourant.

Dans le cadre de l'accompagnement du patient, le médecin traitant doit fournir, au patient qui en fait la demande explicite, des informations objectives sur la possibilité d'établir une déclaration de volonté relative au traitement; il doit également dire au patient s'il pourra ou non compter sur son aide pour ce qui est de l'exécution de cette déclaration de volonté, et lui expliquer les raisons qui motivent son attitude. En cas de refus, le médecin doit envoyer son patient chez un confrère.

Il s'agit d'une obligation essentielle. Nous souhaitons que tous les patients avec lesquels un contact reste possible soient informés, à leur demande, d'une manière humaine et appropriée, sur la possibilité d'établir une déclaration de volonté relative au traitement. Le patient atteint de démence sénile qui est informé dès le moment où le médecin a établi le diagnostic, peut encore établir valablement une déclaration de volonté relative au traitement. Si le médecin s'abstient de l'informer, il prend, en poursuivant le traitement, l'engagement moral de fournir jusqu'au bout des soins palliatifs à ce patient. Il est inadmissible qu'un médecin mette fin activement à la vie d'un patient si celui-ci n'a fait aucune déclaration de volonté en la matière.

3. La plupart des médecins fourniront effectivement toutes les informations dont ils disposent au patient qui le leur demande explicitement; il est possible que quelques médecins refusent de le faire. C'est pourquoi le droit à l'information doit être obligatoire.

Pour garantir au mieux le respect obligatoire du droit qu'a le patient ou son mandataire d'être informé sur son état de santé, le tribunal de première instance de l'endroit où le patient a son domicile est déclaré seul compétent. C'est pour les mêmes raisons que nous recourons à la formule du référé.

En cas de conflit d'intérêts entre le patient et les membres de sa famille, le médecin traitant doit toujours faire primer les intérêts du patient. Cela implique que le médecin doit aider le patient dont l'état est désespéré du point de vue médical à faire un usage optimal de son droit de choisir un traitement.

Art. 4

Révision d'une partie du Code pénal et des articles y relatifs du Code de déontologie médicale de l'Ordre des médecins

1. Dans le cadre de notre philosophie générale, le médecin traitant consentant et ses collaborateurs sont les exécutants compétents de la volonté expresse du patient. Cet article met à l'abri de toutes poursuites pour homicide volontaire ou lésions corporelles volontaires, le médecin traitant qui a respecté les exigences de rigueur dans l'exécution de la déclaration de volonté relative au traitement et qui s'est acquitté de son devoir de notification.

Cela implique l'adaptation de l'article 95 de la version de 1992 du Code de déontologie médicale : le médecin ne peut pas provoquer délibérément la mort d'un malade ni l'aider à se suicider. En vertu de notre article, toute personne qui a prêté directement ou indirectement son assistance, est également mise à l'abri de toutes poursuites. C'est pourquoi il est particulièrement important que le médecin traitant et ses collaborateurs puissent montrer qu'ils ont effectivement agi en experts médicaux, à la demande du patient et dans son intérêt.

2. Le patient a, dès à présent, le droit d'accepter ou de refuser un traitement médical. Il est généralement admis que le médecin qui décide, par un acte médical fondé, et ce dans l'intérêt du patient dont l'état est désespéré du point de vue médical, de renoncer à entamer un traitement curatif ou d'arrêter un traitement curatif, ne peut pas être poursuivi. Par contre, l'application des traitements palliatifs peut continuer. À cet égard, nous allons plus loin que ce que l'Ordre des médecins prescrit à ses membres dans la version de 1992 du Code de déontologie médicale :

« Art. 96. ­ Lorsqu'un malade se trouve dans la phase terminale de sa vie tout en ayant gardé un certain état de conscience, le médecin lui doit toute assistance morale et médicale, pour soulager ses souffrances morales et physiques et préserver sa dignité. Lorsque le malade est définitivement inconscient, le médecin se limite à ne prodiguer que des soins de confort. »

Les divers courants philosophiques et idéologiques présents dans notre pays admettent également ce refus, médicalement justifié, de ne pas appliquer ou poursuivre un traitement, autrement dit le refus de l'acharnement thérapeutique.

Par cette modification, nous adaptons la loi aux nouvelles conceptions et à l'évolution de la pratique médicale, et ce dans l'intérêt de tous les patients.

3. La plupart des courants philosophiques et idéologiques présents dans notre pays admettent, depuis plus de vingt ans, qu'un des effets secondaires non désiré d'un traitement palliatif de la douleur appliqué dans l'intérêt du patient puisse être de hâter la mort de celui-ci. C'est pourquoi les traitements palliatifs sont régulièrement appliqués dans nos hôpitaux et maisons de soins. Par cette modification, nous adaptons la loi aux nouvelles conceptions et à l'évolution de la pratique médicale.

4. Il faut éviter que le patient et le médecin ne soient plongés dans l'incertitude en raison d'une contradiction entre les dispositions du Code pénal et les articles correspondants du Code de déontologie médicale de l'Ordre des médecins.

Art. 5

De la déclaration de volonté relative au traitement

Le droit de codécision du patient est concrétisé par la force obligatoire de la déclaration de volonté relative au traitement.

1. Nous souhaitons préserver au mieux le droit du patient qui reste capable de manifester sa volonté, de codécider quel traitement il entend se voir appliquer dans une situation déterminée. C'est pourquoi nous nous efforcons d'élaborer un texte qui soit aussi complet que possible mais qui reste applicable. Nous offrons à chacun, et ce même longtemps avant le moment éventuel où il se retrouverait dans une situation de fait qui viderait de son sens le reste de sa vie en raison de la diminution de la qualité générale de celle-ci, la possibilité d'exprimer valablement en droit son souhait de ne pas subir certains traitements. Tant que le patient est conscient et peut s'exprimer d'une manière compréhensible, il peut souscrire, avec un médecin consentant, une déclaration de volonté relative au traitement ou modifier la déclaration de volonté relative au traitement qu'il aurait déjà faite. Le patient peut, évidemment, toujours annuler la déclaration de volonté relative au traitement qu'il aurait faite en établissant une nouvelle déclaration de volonté et ce, sans que le consentement du médecin soit requis. Il est évident que le patient qui se trouve dans le coma ou qui est atteint de démence sénile, qui se retrouverait, à la suite d'un accident, dans la situation qu'il aurait précisément voulu éviter ou dans la phase terminale d'un long processus de déchéance qui se serait déroulé de manière imperceptible, ne pourrait pas établir une nouvelle déclaration de volonté. Pour nous, cela implique aussi que la déclaration de volonté relative au traitement doit être exécutée dans ces cas-là.

2. Partant de notre préoccupation de permettre à chaque patient d'exprimer autant que possible sa volonté et de permettre au médecin d'informer le patient de manière adéquate sur les possibilités légales de déclaration de volonté relative au traitement qui lui sont ouvertes, nous proposons de formuler les choses comme suit :

A. Que le médecin m'aide à mettre fin à mes jours au cas où je ne souhaiterais plus continuer à vivre dans un état désespéré du point de vue médical.

B. Que me soient administrées des substances euthanasiantes.

L'intéressé doit porter sur lui (par exemple jointe à sa carte d'identité) sa déclaration de volonté relative au traitement. Nous réduisons ainsi le risque que sa volonté ne soit pas respectée par un médecin traitant qui ne serait pas le médecin de famille habituel et qui ignorerait que le patient a rédigé et signé une telle déclaration.

Dès que le médecin traitant connaît l'existence de la déclaration de volonté relative au traitement, il est tenu, ou, le cas échéant, l'établissement dans lequel le patient est hospitalisé est tenu d'autoriser le médecin consentant à exécuter la déclaration de volonté relative au traitement, à moins que le nouveau médecin n'exécute cette déclaration de volonté après accord du médecin consentant.

Il est impossible, pour des raisons pratiques, d'exiger légalement que la déclaration de volonté relative au traitement soit renouvelée chaque année, voire tous les trois ans; de plus, la technologie médicale peut réaliser des progrès que ni le médecin ni le patient ne pouvaient prévoir au moment de l'établissement de la déclaration de volonté relative au traitement. C'est pourquoi, tant que le patient est conscient, le moment où la déclaration de volonté relative au traitement sera exécutée doit être fixé dans le cadre d'un dialogue entre le patient et le médecin traitant. Au cas où le patient conscient et le médecin ne parviendraient pas à un accord, il appartiendrait au juge du fond de décider en référé. Si le patient n'est plus conscient, la déclaration de volonté relative au traitement doit être exécutée.

Pour augmenter les possibilités d'imposer l'exécution de la déclaration de volonté relative au traitement dans de tels cas, nous prévoyons, au volet B de la déclaration de volonté, la possibilité, pour le patient concerné, de mandater une personne majeure ou mineure émancipée consentante ou une organisation agréée à engager ultérieurement, en son nom, le dialogue avec le médecin qui avait précédemment donné son accord.

3. Les formules de déclaration de volonté relative au traitement doivent être distribuées par l'état civil des communes et par les médecins (généralistes, spécialistes), dans les cabinets privés et en milieu hospitalier, de manière que les patients puissent exercer de manière optimale leur droit de choisir.

4. Les compagnies d'assurances ne peuvent inscrire aucune clause dans leurs contrats qui les exonérerait du paiement du montant assuré aux proches de l'assuré qui aurait exercé son droit de codécision. La loi sur le contrat d'assurance terrestre doit, dès lors, être adaptée dans le sens susmentionné, comme il l'a été en ce qui concerne le suicide.

L'expression « mort volontaire », désignant l'acte par lequel une personne décide de mettre fin à ses jours, est neutre d'un point de vue éthique, tandis que le terme « suicide » implique la réprobation de l'acte.

On ne peut fixer à l'avance le moment où l'on recourt à l'exécution de la déclaration de volonté relative au traitement. La non-adaptation de la loi sur le contrat d'assurance terrestre contraindrait encore toujours le patient à vivre au-delà du terme qu'il souhaite, et ce, pour des raisons économiques.

Art. 6

Des devoirs du médecin

1. Le § 1er de cet article garantit aux médecins et aux auxiliaires paramédicaux qu'ils ne pourront jamais être forcés de souscrire une déclaration de volonté relative au traitement.

La liberté du médecin doit être définie de manière optimale, dans le propre intérêt du médecin et dans celui du patient. Nous acceptons néanmoins de subordonner la liberté du médecin au droit de codécision du patient. Il ne faut pas que les chances du patient d'être aidé effectivement soient hypothéquées par un refus tardif du médecin au moment où l'exécution devrait avoir lieu. Or, comme il y a beaucoup de médecins, ce risque est réel.

2. Le § 2 de cet article vise à garantir au patient qu'il pourra trouver un médecin traitant disposé à respecter les termes de sa déclaration de volonté relative au traitement.

3. Pour indiquer qu'il s'est effectivement engagé à exécuter la déclaration de volonté relative au traitement, le médecin traitant en conserve un exemplaire, après avoir dûment signé les deux autres, dont le patient en garde un par-devers lui.

4. Ces exigences de rigueur ont été inspirées en partie par le débat qui a eu lieu aux Pays-Bas. Selon nous, il y a lieu de les inscrire dans la loi même et il ne faut pas laisser à l'Ordre des médecins le soin de les définir et de les interpréter.

Grâce aux obligations limitées qui sont imposées au médecin, la procédure proposée reste applicable. Le médecin ne doit remplir que peu de formulaires supplémentaires; il est préférable que la société limite sa mission de contrôle à l'essentiel. Il est inutile de contrôler des pratiques qui constituent des actes médicaux fondés.

Tant que le patient est suffisamment conscient, le médecin traitant doit lui laisser la possibilité de confirmer sa déclaration de volonté relative au traitement, de la modifier partiellement ou de la révoquer, avant d'exécuter la déclaration de volonté relative au traitement. Si ce n'est plus le cas, le médecin traitant consulte d'abord la personne ou l'organisation mandatée s'il hésite quant à l'opportunité d'exécuter la déclaration de volonté relative au traitement au moment précis en question. Dès lors, les objections qui pourront être soulevées en raison de l'absence d'une disposition imposant la confirmation périodique de la déclaration de volonté relative au traitement sont sans objet.

Le dossier écrit remplit deux fonctions importantes :

a) il constitue, pour le médecin, l'instrument par excellence qui lui permet de remplir le devoir de notification qu'il a et qui est visé à l'article 6, § 1er ;

b) il permet au procureur du Roi d'apprécier le soin avec lequel le médecin a procédé, à la lumière des dispositions légales inscrites à l'article 6, § 2. L'on évite, grâce à lui, que la relation de confiance entre le médecin et le patient ne soit mise en péril, par l'institution de la déclaration de volonté relative au traitement, en raison des soupçons incontrôlables d'abus éventuels qui pourraient surgir.

Art. 7

De la procédure de notification

Cette formulation limite le devoir de notification en cas d'exécution d'une déclaration de volonté relative au traitement à l'essentiel, à savoir l'assistance au suicide et l'administration de substances euthanasiantes.

Cette procédure nous semble particulièrement importante pour les raisons suivantes :

1. La procédure de notification doit également apporter la garantie que la déclaration de volonté relative au traitement sera exécutée avec sérieux.

2. Elle permet à la collectivité (notamment au Sénat, à la Chambre des représentants et au Conseil fédéral de bioéthique) d'obtenir des informations fiables relatives à un grand nombre de décisions médicales concernant la fin de la vie. L'on pourrait envisager d'adapter la nouvelle loi en fonction de ces informations.

Art. 8

Des sanctions

Les amendes élevées indiquent que le législateur accorde une grande importance au respect des dispositions en question.

Frans LOZIE.
Jacinta DE ROECK.

PROPOSITION DE LOI


Article premier

La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.

Art. 2

Pour l'application de la présente loi, il y a lieu d'entendre par :

1º droit de choisir du patient : le droit de l'intéressé de demander ou de refuser certains traitements médicaux, sur la base d'informations objectives fournies, notamment, par le médecin traitant;

2º traitement médical : un ensemble individualisé et coordonné d'actes médicaux adaptés aux besoins médicaux d'une seule personne;

3º acte médical : l'acte relevant de l'art de guérir, comme prévu dans l'arrêté royal nº 78 du 10 novembre 1967 relatif à l'exercice de l'art de guérir, de l'art infirmier, des professions paramédicales et aux commissions médicales;

4º patient : toute personne recevant un traitement médical;

5º patient se trouvant en phase terminale : tout patient, entré ou non en phase terminale aiguë, dont le médecin suppose, d'après toutes ses connaissances de l'art de guérir, qu'il se trouve dans un état désespéré au point de vue médical;

6º tribunal compétent : le tribunal de première instance de l'endroit où le patient a son domicile;

7º déclaration de volonté relative au traitement : l'expression écrite du souhait explicite d'une personne majeure capable que son médecin traitant abrège la phase ultime de sa vie et réduise ses souffrances et/ou sa déchéance psychique prévisibles;

8º substances euthanasiantes : produits pharmaceutiques qui permettent d'abréger et d'adoucir la phase ultime de la vie;

9º devoir de notification : l'obligation, pour le médecin traitant, en cas d'assistance à la mort volontaire ou d'administration de substances euthanasiantes, de notifier, dans les 24 heures du décès, au procureur du Roi de son arrondissement, l'exécution de la déclaration de volonté relative au traitement;

10º officier compétent de l'état civil : l'officier de l'état civil visé à l'article 78 du Code civil;

11º assistance aux mourants : le processus d'aide psychologique fournie par le médecin traitant et le personnel soignant, afin que le patient puisse préparer et accepter dans les meilleures conditions la fin de son existence et, subsidiairement, afin que les parents proches éventuels puissent accepter le choix du patient;

12º soins palliatifs : l'aide et l'assistance pluridisciplinaire qui sont dispensées à domicile, dans un hébergement collectif non hospitalier ou dans un hôpital, afin de répondre autant que possible aux besoins physiques, psychiques et spirituels des patients durant la phase terminale de leur maladie, et qui contribuent à la préservation d'une qualité de vie;

13º état désespéré du point de vue médical : un état pour lequel, dans l'état des connaissances et des pratiques médicales courantes, il n'y a aucun espoir raisonnable de rétablissement;

14º personne physique mandatée : une personne majeure, membre de la famille ou non, qui a accepté d'agir au nom du patient dans le cadre de la déclaration de volonté relative au traitement;

15º personne morale mandatée : une association sans but lucratif ou une institution d'utilité publique dont l'objet statutaire est d'aider les personnes dont l'état est désespéré du point de vue médical à mettre fin à leurs jours ou de promouvoir l'euthanasie active volontaire à la demande expresse du patient.

Art. 3

§ 1er . Le patient a toujours le droit d'obtenir une information correcte concernant son état de santé; le médecin traitant communique cette information sous une forme simple. Si le patient ne l'a pas demandé préalablement de manière explicite, le médecin décide lui-même, dans l'intérêt du patient, de communiquer ou non le diagnostic et les prévisions exacts. À la demande écrite préalable du patient, le médecin traitant communique le diagnostic et les prévisions exacts à l'intéressé.

§ 2. Lorsque la qualité de vie générale du patient, notamment son autonomie, a été altérée de manière radicale par un accident, par une maladie ou par une autre cause quelconque, sans qu'il puisse pour autant être considéré comme se trouvant en phase terminale, le médecin explique au patient qui en a fait la demande par écrit, quel est le diagnostic, ce que sera la qualité de sa vie selon les prévisions et quelles sont les possibilités ouvertes par l'article 4.

Lorsque le patient se trouve en phase terminale, mais que la communication reste possible entre lui et le médecin, ce dernier explique au patient qui en a fait la demande expresse, dans le cadre du processus d'assistance aux mourants, comment se présente la maladie et comment elle évoluera selon les prévisions, quels sont les soins palliatifs qui peuvent être administrés, quelles sont les possibilités pratiques à cet égard, et il l'informe de la possibilité d'établir une déclaration de volonté relative au traitement.

§ 3. Si le médecin refuse de fournir les informations visées aux §§ 1er et 2, le patient lui-même, ou son mandataire, peut, par requête adressée au président du tribunal compétent, demander communication des informations concernant son état de santé. Les règles prévues aux articles 1025 et suivants du Code judiciaire s'appliquent à cette requête, laquelle ne doit pas être signée par un avocat.

Une copie de l'ordonnance est transmise, par pli judiciaire, au médecin traitant et à l'institution au sein de laquelle le patient réside. Ceux-ci sont obligés d'y donner suite.

Si cela s'avère nécessaire, le greffier fait rassembler les informations nécessaires.

Art. 4

§ 1er . Au titre VIII, chapitre 1er , du Code pénal, il est inséré, sous une section V (nouvelle), intitulée « De l'exécution d'une déclaration de volonté relative au traitement », un article 417bis , libellé comme suit :

« Art. 417bis . ­ Par dérogation aux articles 392 et suivants, il n'y a pas d'infraction lorsque les actes qui ont entraîné directement ou indirectement la mort ont été commis par un médecin :

a) à la demande ferme et explicite du patient, confirmée ou non par une personne physique ou morale mandatée;

b) si le médecin a respecté les exigences de rigueur visées à l'article 6, § 4, de la loi du ... élargissant le droit de codécision du patient par l'institution d'une déclaration de volonté relative au traitement et a procédé à la notification imposée par l'article 7 de la même loi.

Toute personne qui aurait prêté directement ou indirectement son concours à l'accomplissement d'un tel acte ne peut pas non plus être accusée d'un crime ou d'un délit. »

§ 2. L'article 422bis du même code, inséré par la loi du 6 janvier 1961 et modifié par la loi du 13 avril 1995, est complété par l'alinéa suivant :

« Toutefois, le médecin qui, après avoir demandé conseil à un confrère au moins, renonce, dans le cadre de l'accomplissement d'actes médicaux justifiés, à appliquer un traitement curatif à un patient dont l'état est désespéré du point de vue médical ou à continuer à lui appliquer un tel traitement, à la demande ou non de l'intéressé ou de son mandataire, ne se rend coupable d'aucune infraction. »

§ 3. Dans le même code est inséré un article 422quater , libellé comme suit :

« Art. 422quater . ­ Les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables si les actes qui ont entraîné la mort ont été commis par un médecin qui a renoncé, dans le cadre de la dispensation de soins palliatifs médicalement justifiés, à appliquer ou à poursuivre un traitement. »

§ 4. Le médecin agissant conformément à la présente loi agit en conformité avec le code de déontologie médicale et ne peut pas faire l'objet de sanctions disciplinaires.

Art. 5

§ 1er . Toute personne majeure capable peut, à n'importe quel moment, rédiger une déclaration de volonté relative au traitement, dans laquelle elle opte pour une des possibilités suivantes :

1º elle demande au médecin consentant de venir lui porter assistance, au cas où, son état étant devenu désespéré du point de vue médical, elle aurait décidé, après avoir été bien informée, de mettre fin à ses jours;

2º elle demande au médecin consentant de mettre fin à sa vie en lui administrant des substances euthanasiantes.

§ 2. Elle peut mandater, dans la déclaration de volonté relative au traitement, ou ultérieurement, par écrit, une personne majeure consentante, membre de sa famille ou non, ou une personne morale, pour agir en son nom en justice, en vue de l'exécution de sa déclaration de volonté relative au traitement, au cas où elle n'en serait plus capable elle-même.

La déclaration de volonté relative au traitement est établie en trois exemplaires au moins, dont le patient garde un par-devers lui. Il peut en déposer un ou plusieurs exemplaires auprès d'un médecin ou d'une des personnes visées au premier alinéa.

Le Roi peut fixer les modalités de son contenu.

§ 3. Des formules contenant la déclaration de volonté relative au traitement sont distribuées gratuitement par les services de l'état civil de chaque commune et sont remises sur simple demande à quiconque le désire. La direction des établissements hospitaliers et de soins ne peut pas empêcher la diffusion des formules par d'autres personnes.

§ 4. Dans la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre, modifiée par la loi du 16 mars 1994, l'article 101, § 1er , est modifié comme suit :

1º le mot « suicide » est remplacé chaque fois par les mots « mort volontaire »;

2º le paragraphe est complété par un deuxième alinéa, libellé comme suit :

« Nonobstant les dispositions du premier alinéa, l'assurance couvre la mort volontaire du patient dont l'état est désespéré et le décès d'un patient à la suite de l'administration légale de substances euthanasiantes. »

Art. 6

§ 1er . Aucun médecin, aucun praticien de l'art infirmier ni aucun auxiliaire paramédical ne peut être contraint de prêter son concours à l'exécution de la déclaration de volonté du patient relative au traitement, ni de l'exécuter lui-même, s'il n'a pas donné son consentement initialement. Le médecin qui a donné son consentement à l'exécution d'une déclaration de volonté relative au traitement peut révoquer sa décision tant que le patient ne se trouve pas dans l'état décrit et qu'il a encore une chance raisonnable de trouver un autre médecin qui acceptera d'exécuter cette déclaration. Le médecin est tenu de notifier explicitement sa nouvelle décision au patient; il conserve pour preuve une lettre signée pour réception par le patient. Le patient informe lui-même de la situation nouvelle la personne physique ou morale qu'il a mandatée.

§ 2. Le médecin qui a des scrupules à exécuter lui-même, en tout ou en partie, la déclaration de volonté relative au traitement, a le devoir d'adresser immédiatement son patient à un confrère. Dans ce cas, il ne peut conserver aucune copie de la déclaration de volonté relative au traitement.

§ 3. En conservant un exemplaire rempli et signé de la déclaration de volonté du patient relative au traitement, le médecin s'engage légalement à fournir une aide active à l'exécution de cette déclaration. Le médecin généraliste/spécialiste consentant conserve cet exemplaire de la déclaration de volonté tant qu'elle n'a pas été modifiée ou révoquée. Lorsque le patient est envoyé à un autre médecin traitant (par exemple un spécialiste), la déclaration de volonté relative au traitement est également remise à celui-ci, à condition que le patient le permette et que le nouveau médecin l'accepte. Si le nouveau médecin traitant n'est pas disposé à exécuter lui-même la déclaration de volonté relative au traitement, l'obligation en incombe au premier médecin.

§ 4. Lorsqu'il aide le patient à mettre fin à ses jours ou lui administre des substances euthanasiantes, le médecin traitant respecte les exigences de rigueur définies ci-dessous :

1º il doit demander formellement au patient, pour autant que celui-ci est encore en état de le faire, de confirmer qu'il souhaite toujours que sa déclaration de volonté relative au traitement soit exécutée, ou de la révoquer, et ce en présence d'un témoin majeur. Si le patient n'est plus conscient, le médecin prend contact avec la personne physique ou l'organisation mandatée;

2º avant d'exécuter la déclaration de volonté relative au traitement, il doit demander à un confrère de confirmer par écrit que l'état du patient est désespéré du point de vue médical;

3º il doit constituer un dossier écrit contenant les documents suivants :

a) un diagnostic concernant l'état de la maladie et son évolution prévisible;

b) la confirmation écrite du confrère;

c) une copie de la déclaration de volonté relative au traitement, confirmée conformément au § 4, 1º;

d) un document portant l'indication de la nature des traitements appliqués ou des substances administrées ainsi que les doses de ces substances qui ont été administrées;

4º il doit administrer les substances appropriées et des doses adéquates de celles-ci;

5º il doit remplir l'obligation de notification qui est visée à l'article 6, § 1er , en envoyant au médecin légiste l'ensemble du dossier écrit contenant les documents précités;

6º après avoir exécuté la déclaration de volonté d'un patient relative au traitement, il doit conserver le dossier établi au nom de celui-ci pendant cinq ans.

Art. 7

§ 1er . Au plus tard le jour ouvrable suivant l'assistance au suicide ou l'administration de substances euthanasiantes dans le cadre de l'exécution d'une déclaration de volonté relative au traitement, le médecin traitant doit remplir son obligation de notification en transmettant au procureur du Roi de son arrondissement une copie du dossier écrit, visé à l'article 6.

§ 2. Le procureur du Roi engage des poursuites contre le médecin traitant si celui-ci n'a pas respecté les exigences de rigueur définies à l'article 6, § 4.

§ 3. L'inhumation ou l'incinération ne peut avoir lieu qu'après que le procureur du Roi ou son délégué, assisté par un médecin légiste, a dressé un procès-verbal de l'état du corps et que le procureur du Roi a donné son autorisation à l'officier de l'état civil et à la famille.

§ 4. Chaque année, le procureur du Roi rédige, à l'intention du ministre de la Justice, un rapport indiquant le nombre des déclarations de volonté relatives au traitement qui ont été exécutées et le nombre des contestations judiciaires auxquelles elles ont éventuellement donné lieu.

§ 5. Chaque année, le ministre de la Justice adresse aux commissions compétentes de la Chambre et du Sénat et au Conseil fédéral de la bioéthique un rapport établi sur la base des rapports annuels précités.

§ 6. Le Roi fixe les modalités des procédures visées aux §§ 1er à 4.

Art. 8

Toute infraction à l'article 3, § 3, est punie d'une amende de 1 000 à 10 000 francs.

Art. 9

Sont considérées comme valables les déclarations de volonté relatives au traitement qui ont été rédigées avant l'entrée en vigueur de la présente loi par une personne majeure capable et qui remplissent les conditions définies dans la présente loi.

Il en va de même des déclarations de volonté qui ne répondent pas tout à fait aux règles fixées par arrêté royal, mais qui ont été rédigées avant l'entrée en vigueur de celles-ci.

Si cela est nécessaire et pour autant qu'il est encore en état de le faire, le patient est invité à rédiger une nouvelle déclaration de volonté, conforme aux nouvelles règles.

Frans LOZIE.
Jacinta DE ROECK.

(1) La présente proposition de loi a déjà été déposée par M. Boutmans au Sénat le 11 octobre 1995, sous le numéro 1-122/1 ­ 1995/1996.