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Sénat de Belgique

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 1999

14 JUILLET 1999


Proposition de loi tendant à lutter contre la discrimination et modifiant la loi du 15 février 1993 créant un Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme (1)

(Déposée par M. Philippe Mahoux et consorts)


DÉVELOPPEMENTS


Les démocraties contemporaines se sont bâties autour de l'affirmation de principe que les différences entre individus ne sont pas, a priori, valorisables, ni en droit, ni dans les relations de la vie sociale : ces différences ne peuvent justifier une discrimination entre les personnes.

Les articles 10 et 11 de la Constitution, l'article 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 2 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, les articles 2 et 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, l'article 13 du Traité d'Amsterdam, et d'autres instruments internationaux consacrent ce principe.

En vérité, l'égalité en dignité et en droit fonde toute notre vision des droits de l'homme.

Si les différentes normes constitutionnelles et internationales trouvent à s'appliquer directement, elles invitent également le législateur à intervenir pour garantir à chacun une protection efficace et effective contre toute discrimination. Au demeurant, sans loi, il reste difficile de faire valoir un droit à la non-discrimination. Des chercheurs et praticiens du droit ont dénoncé l'absence de loi à plusieurs occasions, et suggéré des modifications législatives (2).

Le législateur est déjà intervenu en ce sens. La loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme et la xénophobie, incrimine les discriminations fondées sur la race, la couleur, l'ascendance et l'origine nationale ou ethnique d'une personne ou d'un groupe de personnes.

Mais d'autres situations discriminatoires existent. Elles se développent dans le cadre des relations de travail, pour l'accès à certaines activités et à certains services, ... Les personnes qui en sont les victimes ne font pas l'objet d'une protection spécifique.

Le sexe d'une personne, son état de santé actuel ou futur (détecté par un test génétique prévisionnel), son orientation sexuelle... sont, entre autres, des caractéristiques qui motivent parfois des comportements discriminatoires.

Les auteurs de la présente proposition pensent que, sur le modèle de législations étrangères, notre pays doit se doter d'une loi qui réprime efficacement ces discriminations, tant sur le plan pénal que par la facilitation des actions civiles.

Ils ont voulu limiter le champ d'application de la loi à une série de motifs de discrimination. Il s'agit de caractéristiques qui s'imposent aux personnes, et que celles-ci ne maîtrisent pas, ou ne peuvent maîtriser entièrement. L'on n'a pas le choix de son sexe, de son état de santé, des conditions de sa naissance, de sa constitution physique, et l'on ne maîtrise pas son orientation hétérosexuelle ou homosexuelle, ni son état civil une fois que celui-ci est acquis.

Les discriminations opérées sur base de ces caractéristiques semblent particulièrement intolérables.

Les auteurs de la proposition n'ont pas voulu, pour l'instant, étendre le champ d'application de la loi aux discriminations opérées sur base des orientations politiques, philosophiques ou religieuses, tout en laissant le débat ouvert, et en condamnant a priori ce type de discriminations.

Mais la prise en compte de tels critères peut faire problème. Dans des pays où des législations plus générales existent, des partis extrémistes ou des organisations intégristes s'appuient en effet sur la loi pour tenter d'interdire toute critique ou toute mise en cause publiques de leurs choix politiques ou des conséquences politiques de leurs choix religieux. Or, nous devons précisément, sur ces questions, garantir la possibilité du débat public et de la critique, aussi sévère soit-elle.

Enfin, les auteurs de la proposition n'ont pas voulu simplement étendre le champ d'application de la loi du 30 juillet 1981 susvisée. Il est apparu à certains que la spécificité de la lutte contre le racisme et la xénophobie méritait peut-être une législation particulière. Ils ont voulu par ailleurs favoriser une régulation civile des comportements discriminatoires, en proposant certaines solutions nouvelles, et en limitant le champ de la pénalisation.

Mais le débat sur un regroupement de la législation existante et de la loi proposée reste évidemment ouvert.

COMMENTAIRE DES ARTICLES

Article 2

Cet article définit la discrimination et détermine le champ d'application de la loi en précisant une série de critères qui motivent la discrimination.

Ceux-ci n'appellent pas de commentaires particuliers. Peut-être faut-il simplement préciser que l'orientation sexuelle vise l'homosexualité ou l'hétérosexualité. En outre, la proposition ne change rien aux dispositions légales existantes qui visent à réprimer des actes sexuels qui sont irrespectueux des personnes.

La proposition ne circonscrit pas la discrimination, comme le fait la définition de la loi du 30 juillet 1981, à la limitation de l'exercice d'un droit ou de la jouissance d'une liberté fondamentale. Elle tend au contraire à prendre en compte toutes les situations discriminatoires. Aussi, la proposition vise-t-elle la discrimination dans l'exercice d'un droit, mais aussi en dehors de l'exercice d'un droit ou d'une liberté de la personne. Elle vise tous les cas où un individu, une personne morale, une autorité publique, dispose de la possibilité de provoquer un traitement discriminatoire sans violation d'une liberté garantie ou d'un droit, comme par exemple dans l'adoption d'un acte administratif, la conclusion d'un contrat, l'accès à un lieu ouvert au public, ... (3)

Par ailleurs, certaines distinctions entre les personnes peuvent être justifiées, et à ce titre ne pas constituer une discrimination. La proposition détermine les critères qui permettent au juge d'apprécier si la distinction est fondée sur des motifs légitimes et non arbitraires.

Ces critères sont inspirés de la jurisprudence de la Cour d'arbitrage et de la Cour européenne des droits de l'homme. Ils visent d'une part l'objectivité de la mesure et le rapport raisonnable et proportionnel avec le but qu'elle poursuit, et d'autre part son efficacité par rapport à d'autres mesures plus respectueuses des droits des personnes.

Ce dernier critère permettra au juge d'effectuer un contrôle d'opportunité limité. La Cour d'arbitrage s'est longtemps interdit d'exercer un tel contrôle, en justifiant son attitude par le refus de se substituer au législateur. Mais la jurisprudence de la Cour a évolué, et admet aujourd'hui que le rejet de mesures aussi efficaces et plus respectueuses des droits fondamentaux puisse fonder l'annulation d'une loi.

Mais, dès lors qu'un droit fondamental est en jeu, il est tout à fait justifié que les tribunaux de l'ordre judiciaire exercent ce contrôle. De même, le Conseil d'État pourrait annuler un acte administratif dès lors que celui-ci opère une distinction, même objectivement justifiée mais qui pourrait être remplacée par des mesures d'efficacité supérieure ou comparable.

La Commission ainsi que la Cour européenne des droits de l'homme ont utilisé à plusieurs reprises ce critère de l'efficacité comparable pour sanctionner des États, lorsque les législations incriminées « auraient pu atteindre leur but en recourant à d'autres critères de distinction » (4). Ainsi que le soulignent les professeurs Schaus, Corten et Blero, « même s'il ne saurait être question de remplacer l'État dans le choix des mesures les plus appropriées aux objectifs qu'il poursuit, les organes de la Convention européenne des droits de l'homme sanctionnent un choix écartant des mesures moins dommageables pour les droits et libertés des personnes placées sous sa juridiction »(5). Ces mêmes auteurs soulignent que le refus de tout contrôle d'opportunité, par le biais notamment du critère de l'efficacité comparable, ne peut plus se justifier au regard de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme.

Il faut au demeurant souligner que la nécessité d'un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé écarte toute mesure gravement attentatoire aux droits de la personne, et donc au principe de la non-discrimination, même si la mesure présente une grande efficacité et n'est pas susceptible d'être remplacée. La jurisprudence de la Cour de Strasbourg est claire à cet égard.

Toutefois, pour préserver la séparation des pouvoirs, la proposition ne permet pas au juge de l'ordre judiciaire de se prononcer sur le caractère discriminatoire des distinctions opérées par la loi. Il revient à la Cour d'arbitrage, sur base des articles 10 et 11 de la Constitution, d'opérer ce contrôle, et le cas échéant, de sanctionner le législateur.

Pour éviter de mettre en cause des relations, y compris des relations de travail, qui sont directement liées à la conviction religieuse ou philosophique des personnes, le § 2 de l'article précise que l'organisation interne des communautés religieuses et des organisations philosophiques reconnues par le Roi, ne sont pas visées par la loi.

Enfin, il faut rappeler que la loi ne vise évidemment pas les relations entièrement privées entre les individus, en ce compris celles qui naissent de l'association entre des personnes, pour des raisons qui leur sont propres et sur base de critères qui leur sont communs.

Article 3

La victime d'une discrimination est généralement en position de faiblesse par rapport à l'auteur de l'acte. Pour cette raison, l'on impose à l'auteur d'une distinction, dès lors que celle-ci est critiquée, de prouver son caractère objectivement justifié et le rapport raisonnable et proportionnel avec le but poursuivi.

Articles 4, 5, 6 et 7

Les articles 4 et 5 tendent à réprimer pénalement les comportements discriminatoires les plus critiquables :

­ les incitations à la discrimination, ou la publicité donnée à celle-ci;

­ les discriminations commises par des fonctionnaires ou officiers publics, qui doivent être les premiers garants du respect de la légalité et de l'égal traitement de chacun;

­ les infractions, comme par exemple des coups et blessures volontaires, lorsque l'intention criminelle ou délictueuse de l'auteur est guidée par certaines caractéristiques de la victime.

Article 8

L'article 8 pose le principe de l'interdiction de toute discrimination. Il ouvre la possibilité d'actions en réparation devant les juridictions civiles, ou en annulation devant le Conseil d'État. Il donne, de manière non limitative, une série d'exemples des situations discriminatoires les plus courantes.

Article 9

L'article 9 prévoit la nullité des clauses d'un contrat contraires à la loi, comme c'est le cas en matière de contrat de travail ou de pratiques de commerce.

La protection de la partie la plus faible, par hypothèse victime de la discrimination, suppose en effet que tout le contrat ne devienne pas caduc par le simple effet de la clause nulle. Le contrat de travail, par exemple, ne sera pas nul, mais uniquement la clause discriminatoire.

Articles 10, 11, 12 et 13

Les articles 10, 11, 12 et 13 déterminent des règles de compétence et de procédure spécifiques aux actions civiles auxquelles l'application de la loi pourrait donner lieu. Ces dispositions constituent l'élément le plus important de la loi proposée. En effet, si ce ne sont les dispositions pénales, les autres dispositions rappellent, en délimitant sa portée et le pouvoir d'appréciation du juge, le contenu de normes constitutionnelles et internationales dont les victimes de discrimination peuvent déjà se prévaloir devant les juridictions nationales. Mais c'est précisément l'organisation d'une procédure spécifique qui va permettre à celles-ci de faire respecter leurs droits de manière effective.

L'article 10 organise une action en cessation, sur le modèle de l'action qui existe en matière de pratiques de commerce. Il semble en effet qu'une des manières les plus efficaces de lutter contre les discriminations, réside dans la possibilité pour le juge de mettre fin très rapidement au comportement discriminatoire.

L'article 11 permet au juge de prononcer une astreinte pour contraindre l'auteur de la discrimination à respecter la décision qui a été rendue.

Sur le modèle de ce qui existe en matière de lutte contre le racisme et la xénophobie, l'article 12 ouvre un droit d'action à une série d'associations, dont le Centre pour l'égalité des chances.

L'article 13 organise une procédure rapide pour les actions civiles intentées sur base de la loi proposée. Parce que le respect de droits fondamentaux est en jeu, les auteurs de la proposition considèrent en effet que ces litiges méritent un traitement exceptionnel, différent de celui de conflits purement privés.

Articles 14 et 15

Les articles 14 et 15 étendent les compétences du Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme, à la lutte contre les discriminations que la loi proposée entend combattre. Le rôle éducatif et régulateur des conflits d'une telle institution est en effet particulièrement important. Mais il n'apparaît pas nécessaire de créer un nouvel organe à côté de celui qui existe déjà, et qui a fait la preuve de son efficacité.

Il faudra toutefois veiller, dès lors que l'on accroît ses compétences, de donner au Centre pour l'égalité des chances les moyens nécessaires à l'accomplissement de ses nouvelles missions.

Philippe MAHOUX.

PROPOSITION DE LOI


Article premier

La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.

CHAPITRE 1er : Dispositions générales

Art. 2

§ 1er . Dans la présente loi, il y a lieu d'entendre par discrimination, les comportements qui, sans autorisation de la loi, ont directement ou indirectement pour but ou pour effet, dans les domaines politique, économique, social ou culturel ou dans tout autre domaine de la vie sociale, d'établir une distinction entre les personnes, les groupes de personnes ou les communautés, fondée sur le sexe, l'orientation sexuelle, l'état civil, la naissance, l'âge, la fortune, l'état de santé actuel ou futur, un handicap ou une caractéristique physique, dénuée de justification objective et sans rapport raisonnable et proportionnel avec le but poursuivi.

La distinction n'est pas objectivement justifiée si elle peut manifestement être remplacée par d'autres mesures d'efficacité supérieure ou comparable, plus respectueuses des personnes concernées.

§ 2. La présente loi ne s'applique pas à l'organisation interne des communautés religieuses et des organisations philosophiques, reconnues par le Roi.

Art. 3

La preuve du caractère objectivement justifié d'une distinction et du rapport raisonnable et proportionnel avec le but poursuivi par son auteur est toujours à charge de celui-ci.

CHAPITRE 2 : Dispositions pénales

Art. 4

§ 1. Est puni d'emprisonnement d'un mois à un an et d'une amende de cinquante francs à mille francs ou d'une de ces peines seulement :

­ quiconque, dans l'une des circonstances indiquées à l'article 444 du Code pénal, incite à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard de personnes, d'un groupe, d'une communauté ou des membres de celle-ci, en raison des particularités visées à l'article 2;

­ quiconque, dans l'une des circonstances indiquées à l'article 444 du Code pénal, donne une publicité à son intention de recourir à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne, d'un groupe, d'une communauté ou des membres de celle-ci, en raison des particularités visées à l'article 2.

§ 2. Est puni d'un emprisonnement de deux mois à deux ans, tout fonctionnaire ou officier public, tout dépositaire ou agent de la force publique qui, dans l'exercice de ses fonctions, commet une discrimination à l'égard d'une personne, d'un groupe, d'une communauté ou des membres de celle-ci.

Si le prévenu ou l'inculpé justifie qu'il a agi par ordre de ses supérieurs pour des objets du ressort de ceux-ci et sur lesquels il leur était dû obéissance hiérarchique, les peines sont appliquées seulement aux supérieurs qui ont donné l'ordre.

Si les fonctionnaires ou officiers publics prévenus ou inculpés d'avoir ordonné, autorisé ou facilité des actes discriminatoires, prétendent que leur signature a été surprise, ils sont tenus en faisant, le cas échéant, cesser l'acte, de dénoncer le coupable; sinon, ils seront punis personnellement.

Art. 5

Sous réserve des dispositions de l'article 4, lorsque les mobiles d'une infraction sont le sexe, l'orientation sexuelle, l'état civil, la naissance, l'âge, la fortune, l'état de santé actuel ou futur, un handicap ou une caractéristique physique de la victime, les peines correctionnelles pourront être portées au double, et les peines criminelles augmentées conformément à l'article 54 du Code pénal.

Art. 6

Sans préjudice de l'application des articles 31 et 32 du Code pénal, les auteurs des infractions visées aux articles 3 et 4 pourront être condamnés à l'interdiction, conformément à l'article 33 de ce même Code.

Art. 7

Les dispositions du livre Ier du Code pénal, sans exception du chapitre VII et de l'article 85, sont applicables aux infractions prévues par la présente loi.

CHAPITRE III : Dispositions civiles

Art. 8

Toute discrimination est interdite, et notamment lorsqu'elle consiste en :

­ le refus de fournir un bien ou un service;

­ l'entrave à l'exercice normal d'une activité économique, sociale, culturelle ou politique;

­ le refus d'établir un contrat de travail ou la résiliation d'un contrat de travail;

­ l'entrave à la poursuite d'une carrière professionnelle, ou la détermination des conditions de travail;

­ le refus de nommer un fonctionnaire ou la détermination de son affectation de service;

­ la diffusion, la publication ou l'exposition en public d'un texte, d'un avis, d'un signe, ou de tout autre support comportant une discrimination;

­ une mention dans un acte officiel ou un procès-verbal.

Sans préjudice d'autres sanctions, toute discrimination donne lieu à une réparation sous forme de dommages et intérêts.

Art. 9

Sont nulles les clauses d'un contrat contraires aux dispositions de la présente loi, et celles qui prévoient qu'un ou plusieurs contractants renoncent par avance aux droits garantis par la présente loi.

Art. 10

§ 1er . À la demande du procureur du Roi, de la victime de la discrimination ou d'un des groupements visés à l'article 12, le président du tribunal de première instance, ou selon la nature de l'acte, le président du tribunal du travail ou du tribunal de commerce, constate l'existence et ordonne la cessation d'un acte, même pénalement réprimé, constituant une infraction aux dispositions de la présente loi.

Le président du tribunal peut ordonner la levée de la cessation dès qu'il est prouvé qu'il a été mis fin aux infractions.

§ 2. Le président du tribunal peut prescrire l'affichage de sa décision ou du résumé qu'il en rédige, pendant le délai qu'il détermine, aussi bien à l'extérieur qu'à l'intérieur des établissements du contrevenant ou des locaux lui appartenant, et ordonner la publication ou la diffusion de son jugement ou du résumé par la voie de journaux ou de toute autre manière, le tout aux frais du contrevenant.

Ces mesures de publicité ne peuvent être prescrites que si elles sont de nature à contribuer à la cessation de l'acte incriminé ou de ses effets.

Art. 11

Sans préjudice des dommages et intérêts, le juge peut, à la demande de la victime de la discrimination ou d'un des groupements visés à l'article 12, condamner au paiement d'une astreinte l'auteur de la discrimination pour le cas où il ne serait pas mis fin à celle-ci.

Le juge statue conformément aux articles 1385ter à 1385nonies du Code judiciaire.

Art. 12

Le Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme peut ester en justice dans les litiges auxquels l'application de la présente loi donnerait lieu.

Peuvent également ester en justice dans les litiges auxquels l'application de la présente loi donnerait lieu, lorsqu'un préjudice est porté aux fins statutaires qu'ils se sont donnés pour mission de poursuivre :

1º tout établissement d'utilité publique et toute association, jouissant de la personnalité juridique depuis au moins cinq ans à la date des faits, et se proposant par ses statuts de défendre les droits de l'homme ou de combattre la discrimination;

2º les organisations représentatives des travailleurs et des employeurs, telles qu'elles sont définies à l'article 3 de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires;

3º les organisations représentatives au sens de la loi du 19 décembre 1974 réglant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités;

4º les organisations représentatives des travailleurs indépendants.

Toutefois, lorsque la victime de l'infraction ou de la discrimination est une personne physique, l'action des groupements visés aux premier et second alinéas ne sera recevable que s'ils prouvent qu'ils ont reçu son accord.

Art. 13

§ 1er . Les cours et tribunaux statuent toutes affaires cessantes sur les actions civiles exercées en vertu de la présente loi, à l'exception de l'action fondée sur l'article 10.

§ 2. L'action fondée sur l'article 10 est formée et instruite selon les formes du référé.

Elle est formée par requête, établie en quatre exemplaires et envoyée par lettre recommandée à la poste ou déposée au greffe de la juridiction compétente.

Sous peine de nullité, la requête contient :

1º l'indication des jours, mois et année;

2º les nom, prénoms, profession et domicile du requérant;

3º les nom et adresse de la personne physique ou morale contre laquelle la demande est formée;

4º l'objet et l'exposé des moyens de la demande.

Le greffier du tribunal avertit sans délai la partie adverse par pli judiciaire, auquel est joint un exemplaire de la requête, et l'invite à comparaître au plus tôt trois jours, au plus tard huit jours après l'envoi du pli judiciaire.

Il est statué sur l'action nonobstant toute poursuite exercée en raison des mêmes faits devant toute juridiction pénale.

Le jugement est exécutoire par provision, nonobstant tout recours et sans caution. Il est communiqué par le greffier de la juridiction, sans délai, à toutes les parties et au procureur du Roi.

CHAPITRE IV : Dispositions modificatives

Art. 14

L'article 2 de la loi du 15 février 1993 créant un Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme, modifié par la loi du 13 avril 1995, est remplacé par la disposition suivante :

« Art. 2. ­ Le Centre a pour mission de promouvoir l'égalité des chances et de combattre toute forme de distinction, d'exclusion, de restriction ou de préférence fondée sur :

1º la race, la couleur, l'ascendance, l'origine ou la nationalité;

2º le sexe, l'orientation sexuelle, l'état civil, la naissance, l'âge, la fortune, l'état de santé actuel ou futur, un handicap, ou une caractéristique physique. »

Art. 15

L'article 3, second alinéa, 5º, de la même loi, modifié par la loi du 13 avril 1995, est remplacé comme suit :

« 5º à ester en justice dans les litiges auxquels pourrait donner lieu l'application de :

­ la loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme ou la xénophobie;

­ la loi du 23 mars 1995 tendant à réprimer la négation, la minimisation, la justification ou l'approbation du génocide commis par le régime national-socialiste allemand pendant la seconde guerre mondiale;

­ la loi du 13 avril 1995 contenant des dispositions en vue de la répression de la traite des êtres humains et de la pornographie enfantine;

­ la loi du ... tendant à lutter contre la discrimination. »

Philippe MAHOUX.
Iris VAN RIET.
Chokri MAHASSINE.
Marie NAGY.
Frans LOZIE.

(1) La présente proposition de loi a déjà été déposée au Sénat le 31 mars 1999, sous le numéro 1-1341/1 - 1998/1999.

(2) Voir notamment B. Blero, O. Corten, A. Schaus, « Propositions de loi anti-discriminatoire », actes du colloque « Le droit, un défi au sida », Bruxelles, Bruylant, à paraître; la proposition de loi civile a été publiée sous le titre « Remèdes : la réparation civile », actes de la journée d'étude « Racisme, égalité, discrimination », Bruxelles, éd. de l'ADDE, 1996, pp. 78-91.

(3) cf. B. Blero, O. Corten, A. Schaus, ibid. , p. 81.

(4) CEDH, Affaire Inze, 28 octobre 1987, Série A, nº 126, § 44.

(5) B. Blero, O. Corten, A. Schaus, ibid ., p. 87, ainsi que la jurisprudence citée en note.