1-758/13

1-758/13

Sénat de Belgique

SESSION DE 1997-1998

15 JUILLET 1998


Projet de loi organique des services de renseignement et de sécurité


Procédure d'évocation


AMENDEMENTS

redéposés après l'approbation du rapport


Nº 98 DE M. CEDER

Art. 7

Au 1º de cet article, supprimer les mots « et constitutionnel ».

Justification

L'article 7, 1º, dispose que la Sûreté de l'État a notamment pour mission de collecter des renseignements relatifs aux activités qui menacent « la pérennité de l'ordre démocratique et constitutionnel ». En ce qui concerne l'ordre constitutionnel, il est toutefois assez clair, comme le Conseil d'État l'a d'ailleurs fait remarquer dans son avis, que cet ordre n'est que provisoire, étant donné la procédure de révision prévue par la Constitution elle-même.

Selon la formulation actuelle, tout parti qui plaide pour que l'on poursuive la réforme de l'État menace la pérennité de l'ordre constitutionnel et constitue donc une cible pour la Sûreté de l'État. Cependant, il doit être possible de combattre la pérennité de l'ordre constitutionnel actuel. La formulation proposée est donc insatisfaisante.

Nº 99 DE M. CEDER

Art. 8

Au 1º, c) , de cet article, supprimer les mots « racistes, xénophobes, anarchistes, nationalistes, autoritaires ou totalitaires ».

Justification

1. Le reste du point c) indique clairement ce que l'on vise : « les conceptions... contraires... aux principes de la démocratie ou des droits de l'homme... ».

2. On ne voit d'ailleurs pas clairement la finalité de cette énumération. Est-elle synonyme du reste du point c) ? Dans ce cas, elle est superflue. L'énumération est-elle limitative à l'égard du reste du point c) ? Dans ce cas, la Sûreté de l'État ne pourrait pas s'intéresser, par exemple, aux conceptions communistes ou fondamentalistes, car elles ne figurent pas sur la liste. À moins que l'énumération d'idéologies ne soit extensive par rapport au reste du point c) ? Dans ce cas, le législateur dirait implicitement qu'il y a des conceptions totalitaires qui ne sont pas contraires à la démocratie ou aux droits de l'homme.

Nº 100 DE M. CEDER

(Amendement subsidiaire à l'amendement nº 99)

Art. 8

Au 1º, c) de cet article, supprimer le mot « nationalistes ».

Justification

1. Pourquoi vise-t-on le nationalisme ? Par le passé, le nationalisme a parfois pris des formes totalitaires. Toutefois, c'est aussi le cas, par exemple, du socialisme ou du catholicisme et, actuellement, de l'islam. Par ailleurs, personne ne peut nier qu'il existe un « nationalisme de libération » (qui a, par exemple, permis aux États baltes de se libérer du joug soviétique). Le Sénat s'est déjà prononcé plusieurs fois de manière absolument positive sur certains nationalismes (kurde, ogoni, ...) hors d'Europe.

2. Qu'entend-on d'ailleurs par « nationalisme » ? S'agit-il du « nationalisme populaire » des Flamands, des Bretons ou des Basques, par exemple ? Ou s'agit-il du patriotisme des porte-drapeaux tricolores ?

3. Le présent amendement est un amendement subsidiaire à l'amendement qui vise à supprimer toutes les dénominations idéologiques.

Nº 101 DE M. CEDER

Art. 8bis (nouveau)

Insérer un article 8bis , libellé comme suit :

« Art. 8. Pour remplir la mission visée au § 1er , 1º, y compris la collecte de données à caractère personnel, la Sûreté de l'État peut faire usage d'une « liste d'associations subversives ». Cette liste est établie, sur l'avis de la Sûreté de l'État, par le Comité ministériel. Elle doit être soumise chaque année, par le ministre de la Justice, au Sénat, qui l'approuve et la fait publier dans le mois. Les groupements suspectés de participer à des activités terroristes et les groupements dont la publication du nom pourrait nuire gravement à une enquête en cours ne doivent pas figurer sur la liste qui est transmise au Sénat.

Les données à caractère personnel qui ont été réunies à propos de sympathisants d'un groupement dont le nom figure sur la liste doivent être détruites sans délai, lorsque le groupement en question n'est plus apparu sur la liste pendant trois années successives. »

Justification

En pratique, la Sûreté de l'État collecte des données sensibles sur des personnes et des associations sur la base d'une liste. Or, il y a un flou total en ce qui concerne les critères que l'on utilise pour dresser cette liste, pour l'évaluer et pour la mettre à jour. L'on peut déduire de l'article 8 de la CEDH que le citoyen qui fait partie de certaines associations peut s'attendre à faire l'objet d'une collecte de données à caractère personnel.

Il convient aussi de remarquer à cet égard que la fonction publique est incompatible avec l'appartenance à une « association subversive ». En d'autres termes, un fonctionnaire qui fait partie de pareille association peut être révoqué sans qu'il ne lui soit octroyé aucune indemnité.

Il est dès lors indiqué que l'on soumette chaque année la liste pour approbation au parlement. La publication annuelle du nom des groupements qui sont placés sous surveillance, à l'exemple de ce qui se fait à l'étranger, permettrait l'ouverture d'un débat démocratique sur le contenu de cette liste et contribuerait à ce que la condition de prévisibilité soit remplie.

On a d'ailleurs prévu une clause qui permet, dans des circonstances exceptionnelles, de procéder à ladite publication.

Nº 102 DE M. CEDER

Art. 11bis (nouveau)

Insérer un article 11bis , libellé comme suit :

« Art. 11bis. ­ Pour remplir la mission visée au § 1er , 1º, y compris la collecte de données à caractère personnel, le Service général du renseignement et de la sécurité peut faire usage d'une « liste d'associations subversives ». Cette liste est établie par le Comité ministériel sur avis du SGR. Elle doit être soumise chaque année par le ministre de la Défense nationale au Sénat, qui l'approuve et la fait publier dans le mois. Les groupements suspectés de participer à des activités terroristes ou les groupements dont la publication du nom pourrait nuire gravement à une enquête en cours ne doivent pas figurer sur la liste qui est transmise au Sénat.

Les données à caractère personnel qui ont été réunies à propos de sympathisants d'un groupement dont le nom figure sur la liste doivent être détruites sans délai lorsque le groupement en question n'est plus apparu sur la liste pendant trois années successives. »

Justification

Cf. ci-dessus.

Nº 103 DE M. CEDER

Art. 12bis (nouveau)

Insérer un article 12bis , libellé comme suit :

« Art. 12bis. ­ La Sûreté de l'État et le Service général du renseignement et de la sécurité ne rechercheront, n'analyseront et ne traiteront pas de renseignements ayant trait à des membres de la Chambre des représentants, du Sénat, du Parlement européen et des parlements des communautés et des régions, à la condition que leur parti ait obtenu au moins deux élus à la Chambre et deux élus au Sénat durant deux législatures consécutives de la Chambre et du Sénat. »

Justification

Actuellement, on surveille aussi les élus de la Nation. Le chef de la Sûreté de l'État l'a admis à l'occasion d'entretiens avec Humo et Knack . Il est inquiétant sur le plan du principe que des représentants du pouvoir législatif qui ont été élus démocratiquement et sont supposés contrôler le pouvoir exécutif, soient espionnés par un service appartenant à ce pouvoir exécutif.

Il ne faut toutefois pas qu'une organisation puisse se soustraire à l'attention de la Sûreté de l'État en adoptant la forme d'un parti. Ce serait effectivement trop facile. Il n'est pas non plus à exclure qu'un pseudo-parti politique obtienne un élu presque par accident, comme l'a montré l'exemple de Rossem.

On peut cependant prévoir que si un parti politique dispose pendant deux législatures d'au moins deux élus nationaux à la Chambre et au Sénat, la Sûreté de l'État ne sera plus autorisée à surveiller les élus nationaux et régionaux de ce parti. Dans ce cas, en effet, ce parti aura démontré, dans le cadre d'élections, qu'il dispose d'une légitimité démocratique suffisante.

Jurgen CEDER