1-46

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Sénat de Belgique

Belgische Senaat

Annales parlementaires

Parlementaire handelingen

SÉANCE DU JEUDI 23 MAI 1996

VERGADERING VAN DONDERDAG 23 MEI 1996

(Vervolg-Suite)

QUESTION ORALE DE MME DELCOURT-PÊTRE AU MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES SUR « LE REMBOURSEMENT DE LA PILULE CONTRACEPTIVE »

MONDELINGE VRAAG VAN MEVROUW DELCOURT-PETRE AAN DE MINISTER VAN SOCIALE ZAKEN OVER « DE TERUGBETALING VAN DE PIL »

M. le Président. ­ L'ordre du jour appelle la question orale de Mme Delcourt au ministre des Affaires sociales sur « le remboursement de la pilule contraceptive ».

La parole est à Mme Delcourt.

Mme Delcourt-Pêtre (PSC). ­ Monsieur le Président, dans le cadre des mesures d'économie imposées au secteur du médicament, le Gouvernement a notamment pris une mesure, favorable aux patients, consistant en une diminution de 2 p.c. du prix des spécialités remboursables à partir du 1er mai, et ce en concertation avec l'industrie pharmaceutique.

Dans cette liste de médicaments remboursables figurent depuis 1989 les pilules contraceptives dont l'INAMI assure actuellement le remboursement à concurrence de 20 p.c.

Certaines firmes pharmaceutiques ont informé le ministre des Affaires économiques, qui contrôle le prix des médicaments, qu'elles souhaitent ne pas modifier le prix de base des pilules qu'elles commercialisent. Elles ont dès lors demandé que ces pilules ne figurent plus dans la liste des médicaments remboursables. Si elles obtiennent gain de cause, cela se traduira pour les femmes par une augmentation immédiate de l'ordre de 20 p.c. du prix de leur pilule contraceptive.

Compte tenu de la faveur que connaissent les contraceptifs oraux dans notre pays et du fait que les contraceptifs concernés représentent environ 80 p.c. du marché, les conséquences d'un « déremboursement », particulièrement pour les femmes à faibles revenus, risquent d'être dramatiques.

Par ailleurs, il me paraît inadmissible que des firmes pharmaceutiques, aussi puissantes soient-elles, puissent faire reporter entièrement sur les patientes les conséquences d'une décision politique, par ailleurs prise en concertation avec toute l'industrie pharmaceutique.

Forcer ainsi les femmes à se tourner vers d'autres marques de pilules qui restent remboursées, voire vers un autre moyen contraceptif, alors que ce sont des motifs médicaux et psychologiques qui les ont amenées à choisir telle pilule, est en soi tout à fait blâmable.

Mme la ministre peut-elle me faire savoir s'il existe, dès lors, des moyens de contraindre ces firmes pharmaceutiques à exécuter les décisions politiques prises lors des tables rondes sur le prix du médicament et à empêcher un « déremboursement », qui risque d'être néfaste pour la santé publique ?

M. le Président . ­ La parole est à Mme De Galan, ministre.

Mme De Galan , ministre des Affaires sociales. ­ Monsieur le Président, je remercie Mme Delcourt de me permettre d'éclairer cette affaire d'une autre manière que par le biais de la presse ou de communiqués tronqués.

La deuxième table ronde sur le prix du médicament s'est tenue à Mons, le 7 février de cette année. Elle réunissait les trois ministres compétents en la matière, à savoir le ministre des Affaires économiques, mon collègue de la Santé publique et moi-même, ainsi que les médecins, les mutuelles, l'industrie pharmaceutique, les distributeurs et les pharmaciens.

À l'issue de cette table ronde, plusieurs décisions ont été prises. Nous avons d'abord décidé du blocage des prix des médicaments pour l'année 1996, ainsi que de l'instauration de ce fameux réseau Pharmanet qui doit permettre une prescription plus adéquate et l'adaptation d'un certain nombre de pratiques de la part des praticiens prescripteurs et des mutualités.

Nous avons également décidé de l'entrée en vigueur au 1er mai d'une diminution de 2 p.c. sur le prix des médicaments remboursés. Cependant, nous avons accordé un délai supplémentaire d'un mois aux pharmaciens, grossistes, distributeurs, pour se conformer à cette mesure, afin de leur permettre de s'adapter à cette situation. En effet, ils doivent également tenir compte d'un certain nombre d'impératifs en la matière, notamment en ce qui concerne la rotation des stocks. Cette diminution étant répercutée sur le prix du ticket modérateur, le patient en bénéficiera également.

Une autre décision visait à diminuer de 0 à 5 p.c. le prix des médicaments commercialisés depuis plus de quinze ans, et ce à partir du 1er septembre. Je me suis déjà expliquée sur le sujet, de manière très concrète, à la Chambre, lors d'une interpellation qui m'a été adressée par plusieurs collègues, tant de la majorité que de l'opposition. Cette diminution sera appliquée à partir du moment où l'industrie parviendra à trouver un montant équivalent d'économies en travaillant au niveau de simples copies de médicaments, lesquelles se distinguent des médicaments génériques et ne nécessitent pas d'études au niveau de la recherche fondamentale.

D'autres mesures décidées au cours de cette deuxième table ronde devront être peaufinées lors de la troisième table ronde, laquelle se tiendra en été.

Personnellement, lorsque je conclus un accord, je m'y tiens, en particulier lorsque celui-ci recueille l'assentiment des différentes parties concernées, à savoir, en l'occurrence, des représentants du monde de l'industrie ainsi que des intermédiaires et des prescripteurs.

J'ai cependant appris au mois d'avril que trois firmes avaient décidé de ne plus inscrire leurs spécialités dans la liste des médicaments à rembourser et qu'elles renonçaient à ce que je considérais pourtant comme un avantage. En effet, en général, les firmes préfèrent que leurs médicaments soient remboursés, ne fût-ce que pour des raisons de stratégie commerciale.

Ces firmes ont fait part de leur décision, par lettre, à l'INAMI et au ministère des Affaires économiques.

En tant que responsable des deniers publics et de la santé des patients, mais aussi en tant que femme, j'ai réagi et j'ai examiné les textes. Sur la base de la loi et non pas de l'arrêté royal qui ne donne pas au ministre compétent le pouvoir d'obliger au remboursement mais qui lui accorde le pouvoir de rembourser dès l'instant où les procédures sont mises en cause, j'ai demandé aux trois instances de l'INAMI de me remettre un avis quant à l'opportunité de cette démarche. Ces avis me seront remis dans un délai d'environ deux mois. Pendant cette période, comme je l'ai fait savoir, les choses resteront en l'état. La liste des médicaments dont le prix est diminué de 2 p.c., signée par Sa Majesté le Roi et par moi-même, paraîtra dans le Moniteur belge de demain ou d'après-demain, dans une édition spéciale car cette liste est assez longue. Par ailleurs, les spécialités produites par les trois firmes en question y sont reprises.

De plus, j'ai demandé à l'INAMI d'étudier une modification des textes qui, pour des raisons majeures de santé publique, permettrait aux ministres des Affaires sociales et de la Santé de maintenir certains produits dans la liste des médicaments à rembourser, et ce afin d'éviter que pareil incident se reproduise pour d'autres spécialités, qu'il s'agisse d'antibiotiques ou autres.

Dès l'instant où des normes budgétaires sont fixées, il importe que les firmes, très soucieuses du marché en termes de stratégie commerciale ­ ce que je peux comprendre ­, ne négligent pas l'aspect de santé publique. Tant pour les spécialités en cause produites par ces trois firmes que pour d'autres, un moyen doit être dégagé pour maintenir leur remboursement.

Entre-temps, un accord a été conclu avec l'ensemble des mutualités. Si, au niveau des officines, le moindre problème se pose ­ rupture de stock ou autres ­ la patiente peut demander le formulaire 704. Cette modalité assez technique, j'en conviens, est très utile. Ce formulaire lui permettra de se faire rembourser la valeur du ticket modérateur à l'officine.

Je vous vois réticent, monsieur Devolder, mais il s'agit pourtant de l'accord qui a été conclu ces derniers jours avec les mutualités pour ce type de produit. Nous attendons que les instances de l'INAMI aient rendu leurs trois avis sur cette démarche que je trouve peu correcte par rapport à l'accord de base.

Je pense poursuivre dans ce sens, mais j'ai invité les firmes à se réunir à nouveau pour discuter sereinement de l'accord qui avait été conclu unanimement à Mons le 7 février 1996.

M. le Président . ­ La parole est à Mme Delcourt pour une réplique.

Mme Delcourt-Pêtre (PSC). ­ Monsieur le Président, je remercie madame la ministre et je me réjouis de sa réponse. Il s'agit ici du respect d'un accord et il ne serait pas juste que les citoyens ­ en l'occurrence des femmes ­ en fassent les frais.

Des arrêtés royaux devront sans doute être pris. Je demande à madame la ministre d'être vigilante quant aux délais qui seront nécessaires à cette fin.

M. le Président . ­ La parole est à Mme De Galan, ministre.

Mme De Galan , ministre des Affaires sociales. ­ Monsieur le Président, je tiens à dire à Mme Delcourt que je veillerai attentivement aux suites de l'affaire.

M. le Président . ­ L'incident est clos.

Het incident is gesloten.