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11 FÉVRIER 1998
Le 21 juin 1996, lors du Conseil européen de Florence, le président chilien et les plus hautes autorités de l'Union européenne ont signé solennellement un « Accord-cadre de coopération destiné à préparer, comme objectif final, une association à caractère politique et économique entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et la République du Chili, d'autre part. »
Le niveau de la cérémonie de signature témoigne de l'importance que la Communauté et ses États membres attachent au renforcement des liens économiques et politiques avec le Chili.
L'on admet, d'une manière générale, que la transition démocratique et le développement du régime parlementaire ne sont pas les seuls éléments de réussite. Grâce à une politique macro-économique orthodoxe et à une politique de « régionalisme ouvert », fondée sur des relations intensives en matière commerciale, en matière d'investissements et en matière de coopération avec les pays de l'O.C.D.E., les pays d'Amérique latine et de nombreux pays asiatiques, le Chili a également connu une forte croissance économique.
Par ailleurs, le Chili a toujours été demandeur pour ce qui est de l'établissement de relations avec la Communauté européenne et ses États membres.
Au cours des dernières années, nos relations bilatérales ont connu une évolution remarquable au niveau commercial et dans divers domaines de la coopération. Les nombreuses visites réciproques de personnalités de haut rang, au niveau fédéral comme au niveau régional, en témoignent.
L'Union européenne a emboîté le pas à cette évolution politique et économique favorable au Chili et en Amérique latine en général. Les Conseils européens de Corfou et de Essen ont donné le ton, puisqu'on y a opté, dans un premier temps, pour un partenariat nouveau et étendu avec le Mexique, le Mercosur et le Chili. En marge du Conseil européen de Madrid (15 décembre 1995) un accord-cadre interrégional a été signé avec le Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay). L'on est en train d'engager des négociations avec le Mexique.
L'accord avec le Chili qui est à l'examen vise à renforcer les relations existantes « en particulier en préparant une libéralisation commerciale progressive et réciproque en vue de jeter les bases d'une association de nature politique et économique conformément aux normes de l'Organisation mondiale du commerce et compte tenu de la sensibilité de certains produits ».
L'accord ouvre donc la perspective de relations à un niveau comparable à celui des relations avec les pays d'Europe de l'Est et avec certains pays du bassin méditerranéen. L'association sera toutefois réalisée en plusieurs phases. Dans un premier temps, l'on préparera une libéralisation commerciale progressive et réciproque, l'on étendra et l'on renforcera la collaboration dans de nouveaux domaines et l'on introduira des mécanismes permettant d'ouvrir un dialogue politique. La réalisation d'une association et la libéralisation effective du commerce qui y serait liée (deuxième phase) dépendront toutefois d'un accord ultérieur que les parties conclueront en fonction des progrès qui auront été réalisés pour ce qui est de l'exécution du présent accord.
Il s'agit donc de préparer, non de réaliser déjà, une éventuelle zone de libre-échange. Beaucoup d'États membres, dont la Belgique, estiment en effet qu'il ne serait pas bon de brûler les étapes en ce qui concerne la réalisation de zones de libre-échange avec les pays tiers. Selon les normes de l'Organisation mondiale du commerce en ce qui concerne les zones de libre-échange, l'on ne peut exclure aucun secteur, sinon les concessions commerciales s'appliqueraient erga omnes . Les conséquences pourraient donc être très lourdes pour les secteurs industriel et agricole de l'une et de l'autre partie. Voilà pourquoi l'on a opté pour la formule de la libération progressive et réciproque.
En attendant, l'accord jette les bases d'une coopération économique renforcée. Les capitaux européens représentent déjà 44 % du total des investissements effectués dans l'industrie et le secteur des services du Chili. Priorité est donnée à la construction de réseaux entre les entreprises et, en particulier, entre les P.M.E., dans le domaine du commerce, des investissements, des services, de la technologie et des systèmes d'information et de communication. On stimulera, en outre, la coopération industrielle et la coopération avec les entreprises en organisant des contacts entre entreprises et en soutenant des initiatives de coopération. L'Union européenne dispose à cet égard d'un arsenal d'instruments comme AL-Invest, E.C.I.P., BCnet, etc.
Parmi les autres domaines de coopération, on trouve le développement social, qui est axé sur la lutte contre l'extrême pauvreté et l'aide aux couches sociales les plus démunies, la coopération avec les administrations publiques, en vue de préparer une ouverture des échanges commerciaux, le secteur culturel et audiovisuel et la lutte contre les stupéfiants.
Les dépenses de coopération seront pour la plupart à charge du budget de la Communauté, dans lequel on a prévu un poste spécial pour la coopération avec les pays d'Amérique latine et d'Asie. D'autres projets seront financés par le biais d'autres postes budgétaires qui sont axés sur des thèmes tels que la coopération en matière de drogue, le cofinancement par des O.N.G., la démocratie et les droits de l'homme, l'énergie, etc.
L'accord instaure un dialogue politique régulier se déroulant selon les termes contenus dans la déclaration commune qui a déjà été signée à l'occasion du Conseil européen de Madrid en décembre 1995 et qui fait partie de l'accord. De part et d'autre, on a senti la nécessité de donner un fondement politique à l'accord pour qu'il puisse contribuer à l'approfondissement des liens historiques et culturels, à la consolidation de la démocratie, à la défense des valeurs communes et au maintien d'un équilibre entre les relations qu'entretient le Chili avec les États-Unis et avec l'Union européenne. Il convient de noter, dans ce cadre, que l'on a fait expressément du respect des principes démocratiques et des droits de l'homme un « chapitre essentiel » de l'accord.
Dans le cadre de la mise en oeuvre de l'accord, l'on ne pourra pas feindre d'ignorer que le processus de rapprochement entre le Chili et le Mercosur a abouti, en juin 1996, à la conclusion d'un « Acuerdo de Complementación Económica ». On en a déjà tenu compte lors des négociations et l'on a tenté d'établir un parallélisme avec l'accord qui a été conclu avec le Mercosur, ce qui se traduit par une approche similaire caractérisée par une association en deux phases. Dans une déclaration commune concernant la coopération économique interrégionale, l'on confirme le lien de libéralisation commerciale et de coopération avec le Mercosur et avec le Chili. Il est capital, tant d'un point de vue politique que d'un point de vue pratique, de faire le lien avec l'accord-cadre qui a été conclu avec le Mercosur. Promouvoir la coopération régionale est l'un des objectifs prioritaires de l'Union et le lien doit, en outre, contribuer à une simplification des procédures de coopération et de consultation.
L'accord-cadre avec le Chili est, au niveau européen, un accord mixte et il doit dès lors être ratifié tant par la Communauté que par les États membres. Au niveau belge, l'on a aussi considéré que cet accord était mixte, ce qui signifie qu'il ne lui suffira pas d'être ratifié au niveau fédéral, mais qu'il devra aussi l'être par les Conseils de région et de communauté.
Un membre note qu'il existe des liens étroits entre le Chili et l'Europe. Sur le plan culturel comme dans le domaine linguistique, l'Amérique latine et, en particulier, les pays comme le Chili et l'Argentine, sont plus proches de l'Europe que des États-Unis.
Un autre membre déclare que l'Europe s'intéresse de plus en plus à l'Amérique latine.
Un troisième intervenant dit que le fait que l'armée continue à jouer un rôle dominant au Chili l'inquiète.
Un membre fait référence à la note de politique gouvernementale « La Belgique et l'Amérique latine », du 21 mars 1997. Il souhaiterait obtenir un aperçu des principales conventions bilatérales qui ont déjà été conclues avec le Chili.
L'intervenante signale que la Convention à l'examen met l'accent sur les aspects économiques. L'intervenante estime qu'il faut également aborder les problèmes sociaux et la question du respect des droits de l'homme.
Dans le même ordre d'idées, un membre demande si l'on peut exercer, dans le cadre de la conclusion des conventions de ce type, des pressions en vue d'obtenir une amélioration de la situation environnementale.
Un autre membre souhaite obtenir des précisions concernant le Conseil conjoint qui est prévu aux articles 33 et 34 des accords-cadre, dans le contexte du dialogue politique avec le Chili.
La Communauté européenne déploie les efforts nécessaires pour structurer le dialogue politique avec l'Amérique latine. Il va de soi que mettre en place un dialogue politique avec des pays comme le Nicaragua et le Guatemala n'est pas une mince affaire. Le ministre souligne le caractère surtout économique que les relations entre les deux continents ont. Il cite quelques statistiques : les échanges commerciaux avec le Chili représentent 5 milliards, les échanges avec le Brésil 23 milliards, et ceux avec l'Argentine 8 milliards de francs belges. Il existe de nombreux liens culturels entre l'Europe et l'Amérique latine, qui mettent en évidence des rapports solides. L'Amérique latine souhaite échapper à l'influence trop importante de l'A.L.E.N.A. (Accord de libre-échange nord-américain) (1). C'est pourquoi le Mercosur (2) (Mercado común del Sur) voudrait plutôt se profiler comme un concurrent de celui-ci. Il y a lieu de signaler que le Canada et le Mexique ne sont pas unanimement satisfaits du rôle dominant que jouent les États-Unis au sein de l'A.L.E.N.A. Dans ce contexte, le Chili adopte une position intermédiaire entre les deux blocs économiques précités. Le Chili n'est pas membre du Mercosur, mais il essaie d'adhérer à l'A.L.E.N.A.
L'Amérique centrale occupe une position difficile entre l'Amérique du Nord et l'Amérique du Sud. En fait, personne ne veut des pays de l'Amérique centrale. Les pays comme le Costa Rica sont plutôt considérés comme des composantes des États-Unis d'Amérique. Pourtant, en dépit de ces difficultés, ces pays sont de toute évidence plus stables économiquement que ceux de la région du Sud-Est asiatique.
Comme l'incertitude subsiste en ce qui concerne le respect des droits de l'homme en Amérique centrale, le ministre demande que l'on accorde suffisamment d'attention à cette région. Le dernier Conseil européen avec les pays d'Amérique centrale a adopté une conception large de la notion des droits de l'homme : l'on tient compte également des aspects sociaux, comme celui de la redistribution du travail.
Le rôle que joue l'armée au Chili continue cependant à poser problème. L'armée détient encore un pouvoir trop important. Il y a encore beaucoup de choses à faire dans le domaine de la coopération au développement. L'on a demandé au secrétaire d'État à la Coopération au développement de prendre des mesures en vue de soutenir la société civile.
Enfin, la protection de l'environnement reste une priorité absolue. Le ministre fait référence à la conférence de Kyoto, où il est apparu clairement que les divers blocs économiques avaient des priorités différentes. Il importe manifestement que nous nous adaptions à un monde différencié.
Les articles ainsi que l'ensemble du projet de loi ont été adoptés à l'unanimité des 8 membres présents.
Le présent rapport a été approuvé à l'unanimité des 12 membres présents.
Le rapporteur,
André BOURGEOIS. |
Le président,
Valère VAUTMANS. |
État des notifications :
Belgique; Danemark : 24 avril 1997; Allemagne : 2 septembre 1997; Grèce; Espagne : 22 mai 1997; France; Irlande; Italie : 23 décembre 1997; Luxembourg; Pays-Bas; Autriche : 26 novembre 1997; Portugal; Finlande : 2 octobre 1996; Suède : 30 janvier 1997; Royaume-Uni; C.E.; Chili : 24 février 1997.
(1) L'A.L.E.N.A. est entré en vigueur le 1er janvier 1994. Il regroupe les États-Unis, le Mexique et le Canada.
(2) Le Mercosur est entré en vigueur le 1er janvier 1995. Il regroupe l'Argentine, le Brésil, le Paraguay et l'Uruguay.