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Sénat de Belgique

SESSION DE 1996-1997

8 JUILLET 1997


Projet de loi modifiant la loi ordinaire du 16 juillet 1993 visant à achever la structure fédérale de l'État


Procédure d'évocation


RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES ET DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES PAR M. COENE


La commission a discuté le projet de loi à l'examen au cours de ses réunions des 27 mai, 18 juin, 2 et 8 juillet 1997.

I. EXPOSÉ INTRODUCTIF DU SECRÉTAIRE D'ÉTAT J. PEETERS

Depuis quelque temps déjà, le Gouvernement a pris l'habitude d'introduire, le plus souvent en début d'année, un projet de loi tendant à rendre plus opérationnelle la législation en matière d'écotaxes. C'est également le cas du présent projet.

Lorsque les écotaxes furent instaurées en 1993, il s'agissait d'un instrument économique relativement nouveau et au sujet duquel on n'avait pratiquement pas d'expérience. Dans les années suivantes, il a fallu adapter le système de manière quasi permanente afin, d'une part, de le maintenir opérationnel et, d'autre part, d'assurer que la philosophie de base du règlement initial demeure respectée. Le présent projet est relativement court. Il entend mettre en oeuvre les avis de la Commission du Suivi et ce, même si le Gouvernement propose de n'adopter qu'en partie certaines propositions formulées par la Commission du Suivi.

Les papiers

On se souviendra sans doute que lors de la discussion de la précédente modification de la loi, la Commission du Suivi n'avait pas encore finalisé l'examen de l'écotaxe sur les papiers. Pour cette raison, il a été décidé à l'époque de reporter d'un an l'application de ces dispositions légales.

La Commission du Suivi a procédé à un examen approfondi de ces questions et a finalement émis l'avis suivant en tenant compte du fait qu'il est encore toujours impossible de déterminer a posteriori (par exemple, en cas d'importation de produits finis) la teneur en fibres recyclées de certaines catégories de papiers :

­ tout d'abord, elle propose d'instaurer des normes de produits en vue de bannir du flux de papier certaines matières qui rendent le recyclage plus difficile;

­ partant de la considération que le prix des vieux papiers doit se stabiliser afin d'assurer une collecte et une transformation constantes, la Commission a proposé une taxe de financement sur le papier toutes-boîtes. Le Gouvernement a préféré ne pas adopter cette suggestion pour deux raisons : il souhaite se borner à imposer au secteur du papier une obligation de résultats au niveau de l'élimination du flux de déchets des vieux papiers et à laisser au secteur le choix des moyens à mettre en oeuvre pour y arriver. De plus, il ne lui semblait pas indiqué de soumettre certains produits (papier toutes-boîtes) à une taxe spécifique plus élevée.

­ la Commission du Suivi était également d'avis qu'un système d'Écolabel devrait être mis sur pied et que les régions devraient faire garantir le recyclage en prévoyant une obligation de reprise. Ces deux points ne relèvent évidemment pas du domaine du présent projet;

­ enfin, la Commission a estimé qu'il importait de rendre le texte applicable conformément aux règles européennes et internationales en matière de libre circulation de biens. Elle a proposé de suspendre l'application de la loi pendant quatre ans, période au cours de laquelle le secteur devrait démontrer qu'il est en mesure d'éliminer du flux des déchets une quantité suffisante de papier, et ce par la mise en place de son propre système. En ce qui concerne la période de suspension, le Gouvernement va moins loin que la Commission du Suivi. Il se rallie à l'idée d'imposer d'une sorte d'obligation de résultats.

Le Gouvernement propose de reporter l'écotaxe sur les papiers jusqu'au 31 décembre 1997. Pour le 1er septembre 1997, un arrêté royal pris après concertation avec les régions déterminera le pourcentage des papiers mis à la consommation qui doit être collecté et recyclé.

Si le secteur respecte cet objectif, aucune écotaxe ne sera due. En d'autres termes, la taxe sera une « épée dans les reins » qui obligera le secteur à réaliser les objectifs imposés.

Les rasoirs jetables

À la suite d'une plainte, la Commission européenne a examiné l'écotaxe sur les rasoirs quant à la compatibilité avec les articles 30 et 95 du Traité C.E.E. Pour l'ensemble de la loi, le Gouvernement a toujours argué que l'applicabilité de l'article 95 du Traité exclut celle de l'article 30. La Commission européenne argue toutefois que la Cour de Justice, tout en reconnaissant que l'application de l'article 95 exclut celle de l'article 30, précise également que si l'article 95 ne peut être appliqué en raison de l'absence d'une production nationale, un recours à l'article 30 est possible. La Commission européenne a mis l'État belge en demeure. Cette mise en demeure est basée, d'une part, sur la considération que la mesure constitue une entrave à la libre circulation des produits concernés, et d'autre part sur le fait que tant les avis de la Commission du Suivi que les discussions parlementaires initiales ont fait apparaître qu'il n'y a pas de différence significative entre les effets sur l'environnement des rasoirs jetables à lames interchangeables et ceux des rasoirs jetables sans lames interchangeables et dès lors qu'il y a disproportionnalité entre l'effet de la mesure et l'objectif de celle-ci.

Le Gouvernement propose de donner suite à cette mise en demeure et d'abroger l'écotaxe en question.

À cet égard, l'adoption de la position de la Commission peut être mise à profit pour la défense du système belge des écotaxes. En effet, si l'on adopte le point de vue que l'article 30 est d'application si l'article 95 ne peut pas être invoqué en raison de l'absence de production nationale, l'on reconnaît a contrario que si l'article 95 peut effectivement être invoqué, l'article 30 n'est pas applicable.

Vu les offensives possibles d'autres secteurs industriels contre la législation belge sur la base de l'article 30, cela constitue un point important.

Les emballages de boissons

Il est également proposé d'exonérer de l'écotaxe les emballages de boissons constitués de matériaux d'usage peu courant et difficilement recyclables. Il s'agit notamment des emballages de boissons constitués de porcelaine, de cristal, de bois et de grès.

II. DISCUSSION GÉNÉRALE

Un membre déclare que le projet à l'examen est l'exemple d'une législation par « essais et erreurs », dans laquelle on en est à la cinquième modification. C'est une législation qui se révèle misérable, et, avec une cinquième modification, on ne sait finalement pas ce qu'il en reste. Pourtant, le thème est très intéressant comme élément d'une discussion en commission.

Un autre membre est d'avis que le projet de loi à l'examen ne concerne plus « l'écotaxe », mais bien une « éco-farce ». En effet, l'ensemble de la législation environnementale constitue l'exemple type d'un amateurisme et d'un dilettantisme du plus haut niveau.

L'intervenant rappelle l'historique de cette législation.

La loi initiale du 16 juillet 1993 visait à soumettre à une écotaxe les rasoirs jetables, les piles, les appareils photo jetables, les pesticides, le papier et les emballages de certains produits industriels à partir du 1er janvier 1994, et les emballages de boissons à partir du 1er avril 1997.

Le 11 janvier 1994, le Gouvernement a déposé un projet visant à suspendre ces mesures, mais le Conseil d'État a demandé l'accord des Gouvernements régionaux et de la Commission du Suivi qui n'a été installée que fin novembre 1993. Le Conseil d'État a également fait remarquer que l'on aurait en fait déjà dû voter le projet, puisqu'il existait en fait, à ce moment, une taxe mais qui n'était toutefois pas recouvrée. Le Gouvernement a, en fin de compte, retiré son projet de loi, pour demander ensuite à M. Dupré et consorts de déposer à nouveau le même texte sous la forme d'une proposition de loi, ce qui permettait d'éviter de devoir demander l'avis du Conseil d'État.

Le 3 juin 1994, la majorité a déposé une nouvelle proposition visant à reporter l'écotaxe. Son objectif était de reporter, pour la plupart des produits, la perception de la taxe, mais en fait, elle venait bien trop tard (presque cinq mois trop tard). L'écotaxe pour les rasoirs jetables était applicable depuis le 1er janvier 1993, tandis que celle pour les piles serait applicable à partir du 1er janvier 1995, celle pour les appareils photo jetables à partir du 1er juillet 1994, celle pour les pesticides, le P.V.C. et les emballages de produits industriels au plus tard en mars 1995. Pour les emballages de boissons, l'on maintenait la date du 1er avril 1994, mais le Gouvernement pouvait octroyer une dérogation jusqu'au 1er janvier 1995, s'il s'avérait que les entreprises en question avaient déjà consenti des efforts.

Bien qu'il fût clair, à ce moment-là, qu'un certain nombre de dispositions n'étaient pas réalisables, l'on a continué à suivre la même logique intrinsèque que celle qui sous-tendait la proposition initiale.

Le 9 février 1995, le Gouvernement demandait à nouveau de suspendre la mesure pour les piles jusqu'au 1er juillet 1995, et de prolonger la période de neutralisation (possibilité d'exonération) pour les emballages de boissons jusqu'au 30 juin 1995.

À la suite de la dissolution du Parlement, ce projet de loi ne pouvait plus être voté par le Sénat. En conséquence, l'approbation finale a lieu trop tard, à savoir le 1er janvier 1995. Les seuls produits soumis à l'écotaxe depuis le 1er janvier 1995 sont les rasoirs jetables et les appareils photo jetables, alors que c'est précisément pour ces produits que l'écotaxe est tout à fait illégale.

La loi du 4 avril 1995 portant des dispositions fiscales, élaborée en période préélectorale, prévoyait que l'instauration de l'écotaxe sur les piles et les emballages de boissons serait à nouveau reportée jusqu'à fin 1995.

La modification de février 1996 est arrivée, elle aussi, à nouveau trop tard. Pour les emballages de boissons, l'écotaxe est assimilée à 15 francs, quel que soit le contenu, et est levée sur tous les emballages au lieu de l'être uniquement sur les emballages d'eau pétillante, de bière et de boisson rafraîchissante. Le recyclage est également assimilé à la réutilisation. Si le producteur parvient à atteindre des pourcentages de recyclage déterminés (suivant un schéma contenant des dispositions chaque année plus sévères et allant jusqu'à l'an 2000), il peut obtenir une exonération, comme c'est le cas pour les emballages réutilisables et consignés. L'on supprime l'exception aux termes de laquelle les emballages en PVC ne pouvaient jamais faire l'objet d'une exonération. Les emballages PVC sont donc assimilés à tous les autres emballages de boissons. Les piles sont exonérées si elles sont incluses dans un système de collecte et de recyclage. L'écotaxe sur le papier est reportée d'un an.

Le projet de loi qui vous est soumis constitue la cinquième modification de la loi sur les écotaxes depuis son élaboration ou la cinquième modification en trois ans et demi ! C'est bel et bien une législation par « essais et erreurs », indigne d'un pays civilisé. Des cinq modifications qui ont été apportées, quatre ont été déposées tardivement et les délais ont été dépassés. Cela en dit long sur la sécurité juridique !

De plus, il est assez inhabituel de modifier une loi en en permutant l'ordre des articles.

Le projet qui vous est soumis ne reprend qu'une partie des propositions faites par la Commission du Suivi. En outre, le Conseil d'État signale que le projet de loi définitif n'a pas été à nouveau soumis à cette même Commission du Suivi, comme il se doit. Le Gouvernement prétend que la version déposée ne diffère en rien des propositions faites par la Commission, de sorte qu'il n'est pas nécessaire de la lui soumettre à nouveau. C'est là une interprétation du Gouvernement, qui veut ainsi se soustraire aux règles. Même si le contenu ne présente que peu de différences, il faut une fois pour toutes suivre les procédures arrêtées.

En ce qui concerne l'écotaxe sur le papier, l'intervenant signale que son groupe a déjà déclaré clairement en 1993 que cette taxe était irréalisable, puisqu'aucune technique ne permettait de mesurer le taux de fibres recyclées dans le nouveau papier, ce qui a pour conséquence de rendre le contrôle impossible. La Commission du Suivi a confirmé cette thèse l'année dernière. L'on a demandé un report de la mesure pendant un an afin de trouver d'autres solutions.

Le Gouvernement constate à présent que cette technique est effectivement irréalisable et change de cap. L'on ne tient plus compte du taux de fibres recyclées, mais on lève une écotaxe sur tout le papier mis en circulation. Le producteur peut obtenir une exonération s'il atteint un taux de recyclage déterminé du papier en organisant lui-même des collectes sélectives ou en les faisant organiser par un établissement agréé, en d'autres termes Fost Plus.

Cette réglementation est, évidemment, davantage conforme à la politique régionale en matière de déchets, qui se base sur la collecte sélective. Alors qu'en ce qui concerne les emballages de boissons, les taux de recyclage à atteindre sont fixés dans la loi sur les écotaxes, ils seront, en ce qui concerne le papier, déterminés par un arrêté royal qui doit être pris avant le 1er septembre 1997; celui-ci sera, certes, confirmé ultérieurement par une loi. Ce procédé donne l'impression que le Gouvernement essaye une fois de plus de mettre le Parlement hors jeu et de ne pas lui accorder un droit de regard en la matière.

En outre, l'application de cette écotaxe sur le papier est une fois de plus reportée d'un an. Cela signifie que cette écotaxe, qui devait déjà être applicable à partir du 1er janvier 1994, le sera peut-être le 1er janvier 1998.

La nouvelle réglementation est d'ailleurs tout à fait différente de la réglementation existante et s'applique à tous les types de papier. Les entreprises qui avaient décidé d'investir en fonction des dispositions de la loi existante, qui ne sera désormais jamais mise à exécution, sont confrontées à une toute nouvelle situation, de sorte que leurs investissements s'avèrent avoir été inutiles. De plus, elles demeurent dans l'incertitude en ce qui concerne les nouveaux investissements qu'elles devront consentir, puisque le Gouvernement ne précisera que le 1er juin 1997 quels types de papier il soumettra à l'écotaxe.

L'intervenant aborde ensuite le problème des rasoirs jetables. Ceux-ci faisaient partie, avec les appareils photo jetables, de la rubrique des articles jetables. Il vaudrait peut-être mieux donner un autre intitulé à cette rubrique, puisqu'à la suite de la suppression du premier produit, elle ne contient plus qu'un seul produit.

Si l'on a décidé de supprimer l'écotaxe sur les rasoirs jetables, c'est à la suite d'une décision de la Commission européenne, aux termes de laquelle cette taxe est contraire aux articles 95 et 30 du Traité C.E.E. De plus, des examens ont montré qu'il n'y a pas de différence, du point de vue des conséquences pour l'environnement, entre les rasoirs jetables et les rasoirs à lame interchangeable, de sorte que l'écotaxe en question ne se justifie pas. La Commission a déclaré que cette mesure entraînait une importante distorsion de la concurrence et a mis l'État belge en demeure le 24 septembre 1996.

L'article 95 prévoit qu'un État membre ne peut pas frapper les produits importés d'autres États membres d'une imposition supérieure à celle qui frappe les produits nationaux similaires, de sorte qu'il ne peut pas protéger sa production nationale. L'article 30 prévoit toutefois qu'un État membre ne peut pas imposer de restrictions quantitatives à l'importation, ni toutes autres mesures d'effet équivalent.

Lors de l'élaboration de la loi sur les écotaxes, le Gouvernement belge a toujours prétendu que l'application de l'article 95 excluait l'application de l'article 30. La Commission européenne affirme toutefois que, s'il n'y a pas de production nationale (ce qui est le cas pour les rasoirs jetables), l'article 30 est applicable. C'est pourquoi elle a condamné l'État belge. Toutefois, le Gouvernement belge déduit immédiatement de la thèse avancée par la Commission que, si l'article 95 est applicable, c'est-à-dire s'il existe une production nationale, l'on ne peut dès lors invoquer l'article 30, ce qui peut s'avérer utile dans le cas de plaintes éventuelles dont serait saisie la Commission européenne. Cette interprétation du Gouvernement n'est certainement pas convaincante et n'a d'ailleurs jamais été confirmée par la Commission européenne.

L'on aurait facilement pu éviter pareilles bavures législatives si l'on avait respecté les principes d'une bonne administration, en faisant par exemple dresser des bilans écologiques avant de prendre des initiatives législatives.

Un certain nombre de producteurs de rasoirs jetables ont consenti pour le seul marché belge d'importants investissements qui s'avèrent aujourd'hui inutiles. De plus, ceux qui n'ont pas fait le moindre effort sont récompensés. La législation en matière d'écotaxes est en effet l'exemple type d'une mauvaise législation, voire même d'une législation perverse.

Normalement, les États membres de l'Union européenne sont responsables des dommages causés aux particuliers ou aux entreprises qui sont dus à la violation du droit européen. Il serait intéressant de savoir combien cette bavure coûtera au Trésor belge. En effet, tout producteur qui a consenti des frais supplémentaires pour se conformer à cette législation belge contraire au droit européen a le droit de réclamer le remboursement de ces frais. De plus, un certain nombre de producteurs qui se sont conformés à la loi et produisent des rasoirs à lames interchangeables se trouvent face à un stock qu'ils pourront difficilement vendre, contrairement à ceux qui produisent encore des rasoirs sans lames interchangeables. Eux aussi subissent un dommage dont ils peuvent exiger le remboursement par l'État belge.

En ce qui concerne les emballages de boissons, l'intervenant remarque qu'ils étaient tous frappés d'une écotaxe à la suite de la précédente modification de la loi. Il s'avère à présent qu'il existe également des emballages de boissons constitués de porcelaine, de cristal, de bois et de grès. Ceux-ci sont utilisés dans des quantités si minimes et sont si difficile à recycler qu'il est opportun de prévoir une exception. C'est là une chose que l'on aurait pu savoir à l'avance.

Pour conclure, le même commissaire souligne que, non seulement le projet de loi à l'examen constitue la cinquième modification ­ mais probablement pas la dernière ­ de la loi sur les écotaxes, mais que cette modification est encore plus flagrante dans l'erreur que les précédentes. En effet, l'on reconnaît aujourd'hui que le système proposé pour le papier n'est pas réalisable, et l'on passe à un système tout à fait différent. L'absence de dispositions exactes en ce qui concerne les types de papier a pour conséquence que l'impact de la nouvelle réglementation n'est pas clair.

La farce devient tout à fait incroyable en ce qui concerne les rasoirs jetables. L'on admet désormais ouvertement, certes sous la contrainte de la Commission européenne, que l'on a levé un impôt illégal. Abstraction faite des dommages réclamés par les producteurs lésés, la situation est encore plus dramatique du fait que l'écotaxe sur les rasoirs jetables est la seule à avoir jamais été perçue.

Bref, comme on l'a dit, il ne s'agit pas d'une écotaxe mais d'une « éco-farce ».

Le secrétaire d'État déclare que la législation relative aux écotaxes se développe peut-être de manière empirique, mais que chaque modification en améliore la qualité.

Un commissaire fait observer qu'en effet, il est tout à fait normal qu'une législation qui a été si souvent modifiée en un bref laps de temps se soit améliorée. Le contraire eût été tout à fait illogique.

Le secrétaire d'État remet à la commission le relevé de la législation en matière d'écotaxes (voir : annexe 1).

Ensuite, il affirme qu'il est exact que le pourcentage de recyclage à atteindre pour le papier doit être fixé par arrêté royal, mais que cet arrêté royal doit être confirmé par une loi dans un certain délai, pour que le Parlement puisse prendre la décision finale. Le Gouvernement a précisément choisi de légiférer par le biais d'un arrêté royal pour pouvoir réagir rapidement à l'évolution dans ce secteur.

L'écotaxe sur le papier ne s'appliquera pas à tous les types de papier. Le Roi déterminera quels sont les types de papier auxquels s'applique le pourcentage de recyclage, mais il y aura d'abord une concertation avec le secteur concerné et avec les régions. Ainsi ne fixera-t-on pas seulement les types de papier auxquels la législation modifiée s'appliquera, mais également les pourcentages de recyclage et, surtout, l'évolution de ces derniers. Il va de soi que les régions seront associées à cette concertation.

En ce qui concerne le droit à une indemnisation pour des investissements faits à mauvais escient ou pour des stocks invendables, le secrétaire d'État affirme que, jusqu'à présent, l'on n'a formulé aucune demande. En tout cas, l'État belge prendra les précautions juridiques nécessaires pour éviter de telles demandes d'indemnisation.

D'ailleurs, la suppression de l'écotaxe sur les rasoirs jetables a été annoncée il y a plus de sept mois; bien avant le dépôt du projet de loi à la Chambre. Vu le laps de temps qui s'est écoulé entre la discussion à la Chambre et le vote définitif sur le projet au Sénat, les entreprises qui avaient adapté leurs produits en proposant des rasoirs jetables en deux pièces ont disposé d'environ un an pour liquider leur stock limité. Dans la pratique, ces entreprises n'auront subi aucun préjudice.

Un membre estime que cela n'empêche que, si la firme « Bic », puisqu'il s'agit d'elle, a mis au point un rasoir qui ne tombe plus sous la définition du rasoir jetable, elle a dû faire des investissements qui ne sont probablement pas amortis à l'heure actuelle.

Ce que cette firme a produit n'a pas couvert le coût de ses investissements. Il est donc possible qu'à cause des signaux contradictoires envoyés par le législateur belge, incité en cela par l'exécutif, la firme « Bic » aurait matière à demander des dommages et intérêts, puisque c'est sur la base de la mise en demeure européenne que le Gouvernement modifie la législation.

Mais l'intervenant ne veut pas préjuger et créer un précédent qui rendrait possible un procès en la matière.

Le secrétaire d'État déclare que, sur le marché, il n'y a pas de producteurs belges de rasoirs jetables. Le marché était partagé entre trois firmes étrangères : Gillette, Bic et Schick. Gillette et Schick vendaient des rasoirs jetables d'une pièce et des rasoirs jetables de deux pièces à lames interchangeables. Bic n'a jamais fait d'investissement en vue de s'adapter à la loi et s'est uniquement battu juridiquement.

Un membre fait remarquer que Bic n'a pas fait d'investissements en Belgique, mais bien en France.

Le secrétaire d'État précise qu'il n'en est rien pour les rasoirs deux pièces. Le cheval de bataille de Bic est le rasoir jetable une pièce. Bic n'a jamais fait d'investissements pour produire des rasoirs deux pièces. La seule qui ait fait un effort, c'était Schick, qui avait inventé le rasoir jetable en deux pièces, sous forme d'un paquet contenant cinq manches et deux têtes. La question a été posée de savoir si ces têtes constituaient les lames interchangeables dont parle la loi. Dans le doute, la définition du rasoir jetable a été adaptée. Quant à Bic, il semble peu probable qu'elle demande des indemnités pour des investissements qu'elle n'a pas faits.

Un membre fait remarquer que s'il était l'avocat de Bic, il trouverait certainement de très bons arguments, même en dehors de ce que connaît actuellement le ministre, pour obtenir une indemnité. La firme Bic ne va peut-être pas trouver opportun d'aller en justice, mais c'est une possibilité et le dossier de l'État belge n'est pas étanche à 100 %. Bien entendu, tout ceci est en dehors de la compétence du législateur.

Un autre commissaire demande au ministre de bien vouloir rappeler quel est le rôle de la Commission du Suivi. Est-ce à la suite des avis émis par cette Commission que les modifications à la législation ont été décidées ou bien n'a-t-elle pas été consultée ? Dans quelle mesure le Gouvernement suit-il les avis de cette Commission ?

Lors des débats qui ont eu lieu lorsqu'a été créée cette Commission du Suivi, on a largement discuté de son rôle, parce que, par son seul avis, elle joue déjà un rôle de législateur. C'est, au fond, une fonction dont le Parlement s'est départi en lui donnant cette possibilité, puisque, dans toute la législation originale, son rôle est fondamental et c'est souvent son avis qui a été transformé en législation.

Le secrétaire d'État souligne que le rôle de la Commission du Suivi est clairement prévu à l'article 389 de la loi du 16 juillet 1993. Sa mission est énumérée en 8 points.

Ainsi la Commission a-t-elle notamment pour mission d'évaluer ou de faire évaluer les écotaxes, notamment en ce qui concerne leurs effets micro et macro-économiques, en particulier en matière d'emploi et d'efficacité écologique. Les avis en matière d'emballage de boissons et de papier se fondent principalement sur l'évaluation pratique des bilans écologiques, des effets socio-économiques et de l'efficacité écologique.

La Commission peut également proposer d'adapter les tarifs, de modifier les conditions ou de supprimer les écotaxes, ainsi que d'en créer de nouvelles. En outre, la Commission a pour mission de rédiger un rapport annuel et de participer à la mise sur pied et à l'organisation des campagnes d'information et de sensibilisation relatives aux écotaxes.

La Commission du Suivi a un rôle très important quant au fond. Elle émet également des avis sur tout projet de modification de la loi ou des arrêtés d'exécution.

Un membre de la commission ne doute pas un seul instant que, pour les rasoirs jetables et pour les matériaux d'emballage de boissons qui sont évoqués dans le projet de loi, les secteurs concernés soient d'accord. Mais, dans le domaine du papier, la proposition faite par le Parlement a-t-elle au moins fait l'objet d'une concertation avec le secteur privé ?

D'expérience personnelle, l'intervenant sait qu'il n'y a rien dont l'industrie ait tant horreur que des changements incessants dans les dispositions relatives à l'environnement. Lors des précédentes modifications, on n'a pas suivi ce secteur qui ne voulait pas de cette écotaxe sur le papier. Cette fois, y a-t-il eu des concertations ou le Gouvernement règle-t-il ces problèmes sans se soucier de la faisabilité de ce qu'il propose ?

Ce dernier fixe d'ailleurs déjà, à l'article 2, la date du 1er juin 1997 pour prendre l'arrêté royal d'exécution de ce projet. Le Gouvernement va-t-il déposer un amendement pour modifier cette date ?

Comme simultanément, dans toute l'Europe, on a adopté des législations de récupération du papier, le prix de ce papier passe par d'énormes fluctuations, qui semblent se traduire par le fait qu'il n'y a plus aucun intérêt économique à récupérer le papier, contrairement à ce qui se passait il y a quelques années.

Puisque le Gouvernement a fait appel à la Commission du Suivi, le membre voudrait que celle-ci fournisse l'évolution, au cours des dix dernières années, du prix et du volume du papier de récupération, notamment en Belgique et en Allemagne. En effet, on dit qu'en Allemagne la récupération est tellement forte que des excédents de papier récupéré ont été déversés sur la Belgique, ce qui a pour conséquence que le prix s'est effondré.

Le membre aimerait disposer d'un exposé détaillé sur cette affaire qui est le seul élément macro-économique intéressant dans le projet de loi qui nous est soumis.

Le secrétaire d'État remet à la commission des graphiques démontrant l'évolution des prix du papier (voir : annexe 2). Les chiffres ont été relevés à l'expédition d'usines situées en Flandre. Cependant, tout en ne disposant pas d'informations pour les deux autres régions du pays, on peut supposer que dans ces autres régions les prix ne doivent pas être trop différents de ceux enregistrés dans la Région flamande du pays.

En ce qui concerne l'arrêté royal qui arrêtera les types de papier et les pourcentages de recyclage, un autre membre estime que les arguments avancés par le secrétaire d'État ne sont pas fondés. En effet, l'habilitation prend fin le 1er juin 1997. Soit l'on connaît déjà le contenu de cet arrêté royal, si bien que l'on pourrait très bien intégrer les dispositions en question par voie d'amendement dans la loi en projet, soit la concertation n'est pas encore terminée et il faudra déposer un nouveau projet de loi pour obtenir l'habilitation du Parlement. Ainsi l'entrée en vigueur prévue au 1er janvier 1998 est-elle extrêmement sujette à caution.

Un membre propose, étant donné que le Parlement n'a pas pour habitude de voter des lois inapplicables, de déposer un amendement signé par tous les groupes pour modifier la date du 1er juin, en indiquant par exemple celle du 1er octobre, ce qui donnerait au Gouvernement le temps de ratifier l'arrêté royal le 1er mars 1998 par exemple. Cela lui paraît indispensable si la commission ne veut pas se ridiculiser.

Le secrétaire d'État affirme que le projet de loi initial ne prévoyait aucune date. Celle du 1er janvier 1997 n'a été insérée qu'au cours de la discussion du projet à la Chambre.

Le secrétaire d'État est d'accord pour que l'on aligne la date prévue à l'article 2 du projet sur celle prévue à l'article 3, à savoir le 1er septembre 1997. En effet, en pratique, un seul arrêté royal fixera tant les types de papier que les pourcentages de recyclage. D'ici au 1er septembre 1997, l'on pourra conclure la concertation, pleinement en cours, avec le secteur et avec les régions. On a également demandé l'avis de la Commission du Suivi à propos du projet d'arrêté royal.

Un commissaire fait observer que, contrairement à ce que le secrétaire d'État affirme, la date du 1er juin 1997 était déjà prévue dans le projet de loi initial. À la Chambre, l'on n'a fait qu'ajouter, par voie d'amendement, la date de confirmation de l'arrêté royal. L'intervenant déduit de l'intervention du secrétaire d'État que jusqu'à présent, l'on n'a pris aucune décision pour résoudre le problème.

Le secrétaire d'État déclare que l'on soumet actuellement une série d'idées aux régions, car ce sont elles qui devront atteindre les pourcentages de recyclage. De plus, le 16 mai 1997, l'on a demandé l'avis de la Commission du Suivi. Celle-ci n'a pas encore fini de délibérer.

La Commission du Suivi doit, à son tour, demander l'avis des trois conseils régionaux de l'environnement et du Conseil central de l'économie, lesquels ont dix jours pour se prononcer. Les lettres sont parties le mardi 20 mai dernier.

Un membre de la commission, qui a été membre pendant trente ans du Conseil central de l'économie, assure que si on lui donne dix jours, l'avis qu'il rendra ne servira pas à grand-chose. Le ministre pense-t-il vraiment qu'il pourra en sortir en fixant la date au 1er septembre ? Nous nous trouvons devant une période où, pendant deux mois, les régions, leurs parlements, leurs exécutifs, vont tourner à vitesse réduite. Il serait plus sage d'accepter une date un peu plus tardive, comme le 1er octobre. Sinon, le Gouvernement s'enferme dans des délais insoutenables.

Le secrétaire d'État précise que les délais prévus sont inscrits dans la loi et dans les arrêtés d'exécution. Les avis demandés seront rendus avant le mois de juillet et par conséquence cet arrêté royal pourra être délibéré en temps utile par le Conseil des ministres.

Un autre membre se demande s'il ne faudrait pas, en conséquence, remplacer la date limite de validité de l'exemption, à savoir le 31 décembre 1997, par le 30 juin 1998, pour que les entreprises disposent d'un délai de préparation raisonnable. Est-il possible pour les entreprises de s'adapter d'ici le 31 décembre 1997, surtout vu le fait que les arrêtés royaux ne pourront jamais être pris avant le 1er juin 1997 ?

Le secrétaire d'État souligne que la date du 1er septembre 1997 est une date réaliste.

Il plaide également pour que l'on conserve la date du 1er janvier 1997, parce que le secteur négocie depuis quelques mois avec les régions et les autorités fédérales. Le secteur sait très bien quels efforts l'on attend de lui. D'ailleurs, l'on relèvera graduellement les pourcentages de recyclage afin de ne pas lui poser d'exigences impossibles à satisfaire. Ainsi, les pourcentages que l'on fixera pour 1997 seront en réalité à peu près identiques à ceux que l'on atteint actuellement dans la pratique. Par la suite, on relèvera les pourcentages.

Un commissaire déclare que la meilleure façon de s'en rendre compte est de leur demander de venir exposer leur point de vue devant la commission, puisque les délais nous le permettent. Nous demanderons donc que les représentants des fédérations professionnelles du papier viennent nous en parler lors de la prochaine réunion sur ce projet de loi.

Le secrétaire d'État estime que les discussions concernant la confirmation des arrêtés royaux seront l'occasion pour le Parlement de discuter des modalités d'exécution avec le secteur concerné. Actuellement, de telles discussions seraient prématurées parce que le Gouvernement n'a encore formulé aucune proposition, étant donné que les avis du secteur, de la Commission du Suivi ou des conseils consultatifs régionaux ne sont pas encore disponibles. Ces arrêtés royaux seront soumis pour confirmation au Parlement avant la fin de l'année, donc, avant l'entrée en vigueur effective de l'écotaxe.

Un membre estime que ce serait une excellente occasion pour le ministre d'entendre ce que le secteur du papier pense aujourd'hui de ce problème. Il y a sûrement réfléchi puisque son existence est en jeu. La commission a donc intérêt à l'écouter, même si l'arrêté royal qu'on va prendre n'est pas encore prêt; ce sera une source d'information supplémentaire.

III. AUDITIONS DES REPRÉSENTANTS DES FÉDÉRATIONS PROFESSIONNELLES DU SECTEUR DU PAPIER

Le président déclare qu'en vue d'illustrer les modifications prévues par le présent projet de loi, la commission a demandé aux représentants du secteur du papier de bien vouloir expliquer leur point de vue devant la commission. Les invités sont :

­ M. J. Dooms, Fetra Division Enveloppes Gropaca (grossistes papier carton);

­ M. J. Buysse, Febelgra;

­ M. P. Berkvens, Gropaca;

­ M. J.-P. Coene, Grape;

­ M. Ph. della Faille, Fetra.

Le président rappelle que l'introduction des écotaxes en 1993 a été faite dans des conditions qui ont soulevé un certain nombre de questions au sein du monde politique et économique. Comment le secteur du papier a-t-il perçu l'introduction de ces écotaxes et les modifications successives de la loi initiale ? Comment le secteur voit-il les effets économiques de ces écotaxes sur ses activités ?

À un moment donné, on a accusé la récupération du papier à une grande échelle d'être à l'origine de fluctuations énormes dans les prix et de l'effondrement des prix du papier. Le système des écotaxes et de la récupération peut-il avoir des effets pervers sur le marché du papier ?


M. della Faille, représentant de Fetra, souligne que la ratio legis de la loi du 16 juillet 1993 était de promouvoir l'utilisation de papier recyclé pour des raisons écologiques (sauver la forêt,...) et afin de diminuer la montagne de déchets. Le secteur du papier a toujours argumenté que la loi n'était pas le bon moyen pour favoriser l'utilisation de papier recyclé.

D'une part, la récupération du papier était une réalité en Belgique depuis de très nombreuses années : à l'époque, environ 850 000 tonnes de vieux papier y étaient déjà récupérées. En plus, l'utilisation de papier recyclé se faisait déjà naturellement. Pour le secteur des emballages, le chiffre de papier-carton recyclé était de 65 % et il est de 72 % actuellement.

D'autre part, la loi partait d'un présupposé inexact, notamment en partant de l'idée que le papier recyclé était plus cher que le papier non recyclé. Or, le secteur du papier a démontré devant la Commission du Suivi que c'était l'inverse. Pour le secteur de l'emballage, le papier recyclé coûtait même moitié moins cher que le papier non recyclé. Le secteur avait donc tout intérêt à utiliser du papier recyclé. L'objectif de la loi est erroné.

En outre, en taxant le papier non recyclé, on allait avoir de moins en moins de papier non recyclé. Or, pour faire du bon papier recyclé, il faut des fibres vierges, ce qui signifie que le secteur serait obligé d'importer de la pâte vierge pour faire du bon papier recyclé.

Le secteur a perçu la loi sur les écotaxes d'une manière très négative puisqu'il a estimé que la loi allait avoir des effets économiquement désastreux et inverses au but poursuivi par le législateur. Pendant plusieurs années, le secteur du papier a essayé par tous les moyens de démontrer que les auteurs de la loi sur les écotaxes s'étaient trompés.

Le représentant de Febelgra, M. Buysse, évoque plus particulièrement les effets de cette loi sur le plan économique. Le texte initial de la loi sur les écotaxes prévoyait que la taxe serait prélevée sur le papier de base (c'est-à-dire le papier vierge non traité) ce qui aurait eu pour effet d'exonérer de facto les périodiques importés du paiement de l'écotaxe, alors que les produits de l'industrie graphique belge, eux, y auraient été soumis. Cette situation aurait provoqué le déplacement vers l'étranger d'un volume de production important, causant ainsi la perte de milliers d'emplois en Belgique. Par conséquent, le texte initial de cette loi introduisait une discrimination en défaveur de l'industrie domestique. À la demande d'un commissaire, l'intervenant précise que le secteur n'a pas déposé plainte contre cette mesure auprès de la Commission européenne.

Le seul moyen d'éviter cette discrimination est de taxer le produit final, à savoir les périodiques imprimés.

Un commissaire signale qu'il n'est pas aisé de calculer une telle taxe. Plutôt que d'imposer les journaux, les livres ou les magazines, il serait nettement plus simple de taxer les poids importants.

M. Buysse admet qu'il est difficile de trouver un équilibre entre la discrimination de notre propre industrie et les charges administratives. Pour introduire une écotaxe sur le produit final, il faudrait effectivement enregistrer des centaines de milliers de contribuables.

Un membre de la commission estime que les efforts du secteur du papier ont connu un succès. La liste des modifications apportées à la loi de base du 16 juillet 1993 démontre que l'entrée en vigueur de l'écotaxe sur les papiers a été reportée à plusieurs reprises :

1. par l'arrêté royal du 23 décembre 1993 pour un an;

2. par l'arrêté royal du 27 décembre 1994 pour un an;

3. par la loi du 7 mars 1996 à nouveau pour un an.

M. della Faille explique que la raison des différents reports était un argument technique, notamment qu'il est impossible de contrôler le taux de fibres recyclées.

À la demande d'un membre de savoir si la technique permet de contrôler ce taux, les représentants du secteur du papier expliquent que ce ne serait pas le cas.

M. Berkvens, qui représente la Gropaca, déclare que, si le report a été accordé, c'est parce qu'à l'époque, les autorités s'étaient focalisées exclusivement sur le critère du contrôle des fibres recyclées. À l'époque de l'élaboration de la loi, l'industrie du papier avait toutefois avancé d'autres arguments fondés pour montrer que la loi était inacceptable, mais le critère du contrôle est le seul que l'autorité ait retenu à l'époque. Le secteur n'a pas eu l'occasion d'examiner avec les autorités tous les autres arguments de fond qui pouvaient être avancés contre la loi.

C'est ainsi que l'on en est arrivé à accorder par trois fois un report de l'entrée en vigueur de la loi sur la base de ce seul critère, que le secteur ne considérait en fait pas comme étant le plus important. Le secteur accordait beaucoup plus d'importance au contenu même de la loi.

Pendant trois ans, le secteur a cependant eu l'occasion d'orienter le débat au sein de la Commission du Suivi vers la vraie problématique, à savoir la réduction du flux des déchets. Les discussions qui ont été menées avec la Commission du Suivi ont abouti à faire déplacer l'accent, c'est-à-dire de la taxation des produits vers une meilleure maîtrise du flux des déchets.

Un membre se demande s'il serait plus efficace de laisser au marché le temps de récupérer plutôt que d'imposer des taux de recyclage.

M. J.-P. Coene, représentant de Grape, admet que la solution optimale pour le secteur serait la suppression de la loi sur les écotaxes. Toutefois, s'il existe une loi, il faut au moins qu'elle soit applicable. Or, le projet de loi à l'examen contient toujours plusieurs éléments qui rendent la loi inapplicable.

Le même membre de la commission souhaite savoir si le secteur estime que les dispositions de l'arrêté royal délibéré en Conseil des ministres et pris au plus tard le 1er septembre, puis ratifié par le Parlement au plus tard le 31 décembre 1997 après accord des régions, ne seront pas nécessairement meilleures que les dispositions actuelles de la loi.

Selon M. della Faille, il y a progrès parce que les matières premières ne seront plus taxées. L'écotaxe sera due sur les produits, à l'exception des emballages en papier et/ou en carton, les livres, les papiers domestiques et sanitaires. Le Roi déterminera la liste des produits qui seront soumis à une écotaxe de 10 francs par kg.

Le secteur veut exprimer deux craintes : la première crainte est de savoir quels produits seront mis sur cette liste; la deuxième concerne le taux de recyclage imposé qui peut ne pas être réaliste.

En ce qui concerne la récupération de papier et les objectifs futurs, M. Berkvens cite les chiffres suivants :

La consommation « apparente » de papier, de carton et d'enveloppes en Belgique atteindra quelque 2,5 millions de tonnes en 1997. La collecte et le recyclage du papier représentent 950 000 tonnes environ. Ce chiffre englobe les déchets ménagers ainsi que les déchets qui sont produits avant et après la consommation.

L'engagement pris par l'industrie à l'issue des campagnes de sensibilisation qui ont été lancées en collaboration avec les autorités et les conseils de l'environnement a donné un coup d'accélérateur aux collectes sélectives, en particulier au niveau des ménages. La collecte sélective auprès des ménages a ainsi augmenté de 10 à 15 % en deux ans. En 1996, ces collectes représentaient 230 000 tonnes sur un potentiel de 650 000 tonnes, soit un résultat très favorable.

Un commissaire dit être quelque peu surpris par ces chiffres. D'après lui, seules trois communes de l'agglomération bruxelloise procèdent actuellement à une collecte sélective de papier. La ville de Bruxelles, qui est la plus importante de l'agglomération, n'a pas de collecte sélective de papier sur son territoire.

Il y a là un problème parce que certains ne considèrent pas la destruction par combustion comme une bonne récupération et voudraient procéder au recyclage systématique du papier. Personnellement, le système de récupération par combustion convient au membre. Certains peuvent avoir une autre philosophie qui consiste à recycler de façon plus noble le maximum de papier pour l'incorporer dans de nouveaux produits.

M. Buysse déclare que cette remarque est tout à fait fondée. La réponse à la question de savoir si les pourcentages fixés en matière de récupération et de recyclage pourront être atteints dépend de trois acteurs, à savoir l'industrie, les communes et le citoyen. Le citoyen doit trier ses déchets, la commune doit en assurer la collecte et l'industrie doit veiller à recycler effectivement les déchets collectés.

La loi sur les écotaxes confie cette responsabilité exclusivement à l'industrie. Si le citoyen ne trie pas ses papiers, l'industrie ne pourra jamais atteindre des pourcentages de récupération plus élevés. Dans le pire des cas, l'industrie sera pénalisée par une écotaxe, même si elle consent les efforts nécessaires. Le caractère conjoint de cette responsabilité ne figure pas dans la loi.

Selon M. Berkvens, l'on peut faire une distinction selon les régions. En effet, certaines sont plus avancées que d'autres dans l'organisation de la récolte du papier et du carton usagés.

Ainsi collecte-t-on environ 230 000 tonnes de papier de déchets ménagers sur un total potentiellement disponible de 650 000 tonnes, ce qui représente environ 36 % pour l'ensemble du pays. En Flandre, ce pourcentage se situe entre 46 et 52 %, alors que pour la Région bruxelloise, il s'élève à 17 % et, pour la Région wallonne, à environ 12 %.

Une telle disparité peut s'expliquer par des différences d'organisation et de sensibilisation, mais également par le degré de faisabilité technique de la collecte. Il est beaucoup plus difficile d'organiser des collectes sélectives dans la Région bruxelloise, où il y a davantage d'appartements et de bureaux.

C'est aussi une question de sens des responsabilités. Si ce dernier s'est renforcé nettement en Flandre, il ne s'est pas encore exprimé dans les autres régions. Cependant, l'industrie montre par tous les moyens sa volonté de lancer, avec les pouvoirs publics et le citoyen, des campagnes de sensibilisation dans ces régions également, afin d'améliorer les pourcentages de recyclage.

Enfin, l'intervenant souhaite faire observer qu'en ce qui concerne l'article 2 du projet de loi à l'examen, il faudrait intégrer dans la liste des exceptions une autre catégorie, à savoir celle du papier administratif et des enveloppes.

Il faut exclure cette catégorie du champ d'application de la future loi parce que le papier administratif est le seul type de déchet qui n'est pas gérable, car l'on ne dispose de chiffres ni concernant sa consommation, ni concernant le flux des déchets. Un tel papier a une structure d'importation extrêmement complexe, si bien qu'il est impossible de déterminer son flux exact d'importation, sa consommation ou le flux des déchets.

Il est impensable et inimaginable pour le secteur que le papier administratif et les enveloppes figurent dans la liste positive, vu que l'on ne peut déterminer aucun quota pour la collecte.

M. Berkvens tient à porter cet avis à la connaissance du législateur, pour éviter que la nouvelle loi ne soit inapplicable.

Un membre de la commission déclare qu'il peut comprendre les arguments en ce qui concerne les enveloppes. Personnellement, il reçoit chaque jour un volume de courrier important, certainement comparé à un ménage normal. Il est très difficile de récupérer ces enveloppes et d'avoir une idée claire des flux d'enveloppes. Pour le papier administratif, il y a toutefois tous les travaux en matière d'informatique. Il faut essayer de les récupérer.

M. J.-P. Coene souligne que l'idée de base de la loi est que celui qui met sur le marché paie une taxe s'il ne peut pas prouver que dans une certaine catégorie de produits un certain pourcentage sera récupéré et recyclé. Or, celui qui met sur le marché est incapable de prouver ce pourcentage étant donné qu'il ne connaît pas le flux. La loi est donc inapplicable.

Le membre de la commission estime que les fournisseurs du papier injecté dans le circuit informatique doivent connaître les chiffres.

M. J.-P. Coene explique que la Belgique est un marché particulièrement ouvert, surtout pour le papier administratif. Le secteur n'arrive pas à déterminer la quantité de papier administratif qui passe les frontières, imprimé ou non. Les canaux de distribution des produits administratifs sont tellement vastes que le secteur n'arrive pas à imaginer comment canaliser ces chiffres. Rien que la Poste transporte chaque mois des tonnes de papier importés et exportés.

Ceci n'est que le premier inconvénient de la loi. Le deuxième inconvénient est la série de discriminations entre le papier, qui est aussi un média, et les autres médias. Les autres médias vont prendre de l'ampleur par rapport au média papier.

Le membre fait observer que les autres médias, tel que la radio ou la télévision, n'ont pas de support matériel.

Selon M. J.-P. Coene, cela n'empêche que le média papier sera un produit qui sera plus taxé que les autres.

Une autre discrimination concerne les produits administratifs. Pratiquement tous les produits administratifs en papier existent également en d'autres supports synthétiques. Par exemple : fardes, chemises, matériel de classement, ... Après l'entrée en vigueur d'une écotaxe sur le papier, ces autres supports ne seront pas taxés, ce qui amène à la contradiction que ce sont les produits les moins écologiques qui ne sont pas taxés.

La dernière discrimination est la discrimination entre les producteurs belges et les producteurs étrangers. Ceci est rédhibitoire pour la Belgique.

Le membre signale que l'Allemagne, les Pays-Bas et les pays scandinaves ont une conscience écologique au moins aussi grande, que la Belgique. Par conséquent, le régime pour les producteurs n'y est pas nécessairement plus généreux que le régime belge.

M. J.-P. Coene confirme que le projet de loi prévoit un régime moins souple en Belgique qu'en Allemagne ou aux Pays-Bas. Le système Fost-Plus est tout à fait équivalent au système allemand. Le fait que la loi ne prévoit pas des exemptions pour le papier administratif a pour conséquence que ce papier entre dans le système alors que ce n'est pas le cas à l'étranger.

Divers membres de la commission estiment qu'un amendement visant à ajouter le papier administratif et les enveloppes à la liste des exceptions est nécessaire.

Le ministre des Finances fait observer que si le Sénat accepte un tel amendement, il faudra redemander l'accord des régions.

Selon M. Buysse, les régions sont d'accord. En effet, elles estiment qu'il est préférable que ce soient elles, plutôt que le pouvoir fédéral, qui règlent cette matière. Un tel amendement ne poserait pas de difficultés vis-à-vis des régions.


Le ministre des Finances souhaite répondre à certaines objections importantes que le secteur du papier a soulevées.

Tout d'abord, les taux de récupération sont-ils réalistes ? La moyenne nationale est actuellement de 36 %, mais le taux diffère énormément d'une région à l'autre : en Flandre entre 45 et 52 %, 17 % en Wallonie et 12 à 13 % à Bruxelles. Il en a été tenu compte dans le projet d'arrêté royal où une moyenne nationale de 30 % est proposée pour 1997.

Un membre estime que même 30 % seront difficilement réalisables à brève échéance en Wallonie et à Bruxelles. Étant donné cette énorme différence de pourcentage, il craint que la Flandre en prenne argument pour pavoiser vis-à-vis des mauvais résultats de la Wallonie.

Le ministre rappelle qu'il s'agit d'une moyenne nationale. Cet arrêté a été rédigé en collaboration avec les trois régions qui étaient d'accord sur les taux proposés pour 1997 et 1998. Et les pourcentages initialement proposés pour 1999 et 2000 ont été revus à la baisse.

La deuxième remarque du ministre concerne la discrimination entre les entreprises belges et les entreprises étrangères. En matière d'écotaxe sur le papier, le principe est le même que pour toutes les autres écotaxes, à savoir qu'il y a en principe une écotaxe de 10 francs par kg, sauf si on prouve que l'on atteint un certain taux de ramassage et de recyclage du papier.

Le moment d'exigibilité de l'écotaxe a été placé au bas de la chaîne commerciale lors de la livraison au détaillant. À ce moment-là, les redevables belges et étrangers sont sur le même pied.

La troisième remarque du ministre concerne la liste des produits.

L'article 2 prévoit que sont uniquement exemptés les livres, les papiers domestiques et sanitaires ainsi que les emballages en papier et/ou carton parce qu'ils sont visés ailleurs. Le Gouvernement insiste pour conserver ce texte, puisque la loi prévoit que le Roi peut établir une liste positive des produits soumis à l'écotaxe.

Le but de cet arrêté royal est d'établir une liste qui serait très restreinte au début. On y a fait figurer au départ les papiers qui ne posaient, en principe, pas de problème (les bottins, les journaux, les annonces publicitaires, etc.). À la demande de certains, et c'est cela qui pose problème, il a été question d'ajouter le papier de bureau, format A3 à A5, et les enveloppes. La solution serait de supprimer ces derniers produits de l'arrêté royal plutôt que de prévoir une exception dans la loi.

Un membre déclare qu'on a plus confiance dans le législateur que dans le Roi, en ce domaine.

Le ministre fait remarquer que la loi fixe les trois grandes exemptions, et c'est tout. Par l'arrêté royal, on va pouvoir élargir progressivement la liste des produits soumis à l'écotaxe. Si on modifie la loi, il faut redemander l'accord des régions et l'avis de la Commission du Suivi.

Le membre rappelle que les régions seraient d'accord. Il admet que c'est moins confortable pour le Gouvernement, mais il s'agit d'une garantie supplémentaire.

Concernant les chiffres cités en matière de papier récyclé, un membre voudrait savoir s'ils ne comprennent pas la récupération sous forme de combustion.

Le ministre répond par la négative.

Le membre constate donc que la discrimination contre laquelle il s'élève existe toujours.

En effet, lorsqu'on brûle le papier usé dans des incinérateurs, il ne reste rien, sauf des fumées qui ne sont pas nocives. Or, on ne tient pas compte de ce mode de destruction propre.

Après l'échange de vues organisé par la commission avec des fédérations professionnelles du secteur du papier, le ministre des Finances constate que les fédérations ont reformulé les mêmes remarques que celles qu'elles avaient déjà formulées auparavant, en particulier au sein de la Commission du Suivi et, notamment, leur opposition à la taxation des papiers de bureau et des enveloppes.

Le Gouvernement qui a déjà eu connaissance de ces remarques est disposé à en tenir compte dans l'arrêté royal qui sera pris en exécution de l'article 2.

IV. DISCUSSION DES AMENDEMENTS

Seuls les articles faisant l'objet d'un amendement sont examinés.

Article 2

M. Coene dépose l'amendement nº 1 qui vise à supprimer la dernière phrase du § 1er proposé à cet article.

L'auteur de l'amendement estime en effet que la définition de la notion « produits en papier et/ou carton mis à la consommation » doit être réglée par la loi et non par un arrêté royal.

Le ministre ne peut pas marquer son accord sur l'amendement. En effet, l'amendement impliquerait que l'écotaxe serait immédiatement due sur tous les papiers et les cartons, sauf les trois exceptions légales prévues.

L'amendement nº 1 est rejeté par 6 voix contre 3.

M. Weyts et consorts déposent l'amendement nº 5 visant à compléter, au premier paragraphe de l'article 2, les mots « les produits en papier et/ou carton » par les mots « de même que les enveloppes et le papier à écrire et à imprimer, en feuilles séparées, dans les dimensions comprises entre A3 et A5 ».

Un membre de la commission explique que la justification de cet amendement est l'incapacité technique dans laquelle se trouvent actuellement l'industrie et l'administration de donner une vision claire du volume des papiers en question et, surtout, le problème des voies par lesquelles ces produits sont mis sur le marché.

Le ministre demande de ne pas prévoir dans la loi une exception pour les enveloppes et les feuilles de papier à écrire et à imprimer dans les dimensions comprises entre A3 et A5.

En effet, l'article 2 du projet de loi a pour but de définir le champ d'application potentiel de l'écotaxe sur le papier et le carton. En principe, tout le papier et le carton, sauf les livres (qui ne sont pas des objets jetables), les papiers domestiques et sanitaires (qui ne sont ni réutilisables, ni recyclables) et les emballages en papier et/ou en carton (qui sont déjà visés par d'autres dispositions particulières), sont susceptibles d'être soumis à cette écotaxe de 10 francs par kg.

Toutefois, pour des raisons techniques, il a été jugé préférable d'établir par arrêté royal une liste de produits à soumettre à l'écotaxe. Cette liste sera restreinte au départ mais pourra éventuellement être élargie par la suite.

Au nom du Gouvernement, le ministre prend l'engagement que dans ce projet d'arrêté royal (et ce afin de tenir compte d'un certain nombre d'objections techniques formulées par les représentants du secteur), le Gouvernement n'inclura pas, au départ, les deux types de produits qui font l'objet des principales contestations, à savoir les enveloppes et les feuilles de format A3 à A5.

Le ministre demande de ne pas faire une exception légale et de laisser dans la loi la possibilité de compléter ultérieurement la liste reprise dans l'arrêté royal, lorsque les objections techniques auront été rencontrées. Il se peut parfaitement qu'à l'avenir, les données statistiques concernant le papier de bureau soient disponibles et que, dès lors, l'objection technique existante disparaisse. À ce moment, on pourra, par arrêté royal, compléter la liste des produits soumis à l'écotaxe.

Un membre de la commission fait observer que celle-ci a pris la peine d'écouter les représentants du secteur du papier. Il souhaite que le ministre veuille bien informer le Sénat le jour où il décidera de soumettre ces produits à l'écotaxe parce qu'il estimerait que les objections techniques seraient levées.

Le ministre confirme son engagement.

Une commissaire exprime sa préoccupation concernant la déclaration du ministre. En principe, elle n'est pas d'accord sur l'objectif poursuivi par l'amendement nº 5. Si l'on considère le projet de loi tel qu'il est soumis, le Parlement doit faire confiance au Gouvernement pour le contenu de l'arrêté royal. Si le ministre confirme aujourd'hui déjà que l'arrêté royal prévoira une exception pour les enveloppes et pour le papier à écrire et à imprimer dans les dimensions comprises entre A3 et A5, il ne restera pour ainsi dire plus rien de l'objectif initial de l'écotaxe sur les papiers.

L'industrie du papier a effectivement fait part de ses doléances à la commission, mais en fin de compte il s'agit d'une mesure visant à diminuer la consommation de papier. Il est inimaginable que l'argument avancé par l'industrie d'augmenter la production prenne subitement le pas et que l'on accorde des exceptions.

Le ministre souligne que le Parlement a toujours le droit d'interpeller le Gouvernement sur la manière dont il exécute la loi.

Toutefois, il ne s'agit pas d'établir des exceptions dans l'arrêté royal, mais bien d'établir une liste positive des produits soumis à l'écotaxe. Dans un premier temps, les deux produits susmentionnés ne seront pas repris dans la liste, puisque tous les avis sont négatifs, y compris l'avis de l'administration des douanes et des accises chargée d'appliquer l'écotaxe. L'administration reconnaît que l'écotaxe sur ces produits est actuellement inapplicable car incontrôlable. Or, personne n'a intérêt à prendre une disposition inapplicable.

Le ministre tient à souligner qu'il souhaite que les objections techniques soient levées le plus rapidement possible afin de pouvoir compléter l'arrêté royal en ajoutant ces produits à la liste positive. Le jour où il en sera décidé ainsi, le ministre s'engage à donner une explication en commission.

Un autre membre déclare que le régime proposé lui pose problème. En vertu de l'article 2, le ministre ne peut prendre les arrêtés royaux qu'après accord des régions. Si on ne parvient à aucun accord avec les régions, le ministre ne pourra prendre aucun arrêté royal. Il s'ensuivra que le texte de la loi sera appliqué tel quel. Comme la loi ne prévoit aucune exception pour les enveloppes et le papier de bureau, il pourrait y avoir un vide juridique. Il y a donc une zone d'ombre du fait que tant de personnes doivent intervenir avant que l'on puisse fixer quoi que ce soit.

Un commissaire partage cette vision des choses et déclare que l'article 2 est effectivement clair. Si aucune liste positive n'est dressée, l'écotaxe de 10 francs par kilo s'appliquera à tous les produits. L'intervenant estime toutefois qu'il serait exceptionnel que les régions ne marquent pas leur accord.

Selon un autre membre, aucune écotaxe ne pourrait être perçue si aucun arrêté d'exécution n'était pris.

Il renvoie aussi à l'avis du Conseil central de l'économie où il est question, au point 9, d'un mode de pesage différent des déchets recyclés. L'intervenant invite le ministre à en tenir compte lors de l'élaboration de l'arrêté royal.

Le ministre tient à souligner qu'il faut l'accord des régions. Il y a un accord sur un projet d'arrêté royal concernant les pourcentages et la liste des produits à soumettre à la taxe, pour autant qu'on n'y inclue pas les enveloppes et les feuilles de format A3 à A5. Il y a donc actuellement un accord officieux des régions. Le ministre ne peut pas demander officiellement leur accord tant que la loi n'est pas votée ni leur remettre le projet d'arrêté royal en bonne et due forme.

Un membre de la commission souhaite savoir si au cas où le seul amendement adopté par le Sénat serait l'amendement qui change la date, le ministre serait obligé de consulter à nouveau les régions sur l'arrêté royal approuvé.

Le ministre souligne qu'il consultera officiellement les régions sur le projet d'arrêté royal tel qu'il sera après le vote de la loi.

Un commissaire déclare que tant les catégories de papier que les contenus en fibres recyclées diffèrent apparemment de ceux fixés dans la loi du 16 juillet 1993. Le ministre peut-il donner la liste des catégories de papier et des contenus prévus dans le projet d'arrêté royal ?

Le ministre déclare que les régions ont marqué leur accord sur la liste positive suivante : d'une part, les journaux, les hebdomadaires, les mensuels, les revues, les périodiques, la presse régionale et, d'autre part, les annuaires téléphoniques et de téléfax, les publications, les imprimés publicitaires et les publicités toutes-boîtes à caractère commercial (voir annexe 3).

Un membre se réfère à l'exposé introductif du Premier ministe à la Chambre. Celui-ci a expliqué que « le Gouvernement propose de reporter l'écotaxe sur les papiers jusqu'au 31 décembre 1997. Pour la fin septembre 1997, un arrêté royal, pris après concertation avec les régions, déterminera le pourcentage des papiers mis à la consommation qui doit être collecté et recyclé. Si le secteur respecte cet objectif, aucune écotaxe ne sera due. En d'autres termes, la taxe sera « l'épée dans les reins » qui obligera le secteur à réaliser les objectifs imposés. »

Ceci va dans le sens de la politique des collectes selectives, déjà partiellement pratiquée dans les régions et qui se développe. Il est donc fondamental si on veut aboutir au recyclage souhaité, que subsiste la possibilité de l'écotaxe sur les produits que l'amendement nº 5 vise à exclure de son application.

Le ministre confirme la déclaration du Premier ministre et explique que ces objectifs sont fixés en termes de pourcentages dans l'arrêté royal pris en exécution de l'article 2. Il y a un accord avec les régions sur les chiffres suivants : 30 % du papier doivent être collectés et recyclés en 1997, 40 % en 1998, 55 % en 1999 et 70 % à partir de 2000.

Si ces objectifs sont atteints, il n'y aura effectivement pas d'écotaxe. Le ministre répète que la difficulté actuelle pour les enveloppes et les feuilles de format A3 à A5 est une difficulté d'application pratique parce que, dans l'état actuel de l'appareil statistique, il n'est pas possible de déterminer si, oui ou non, ces pourcentages sont atteints.

Deux évolutions sont possibles afin d'arriver à soumettre ces produits à l'écotaxe.

La première est celle suggérée par le Conseil central de l'économie, notamment qu'il y a peut-être une autre manière de définir l'objectif à atteindre. Si on peut se mettre d'accord avec les régions, on complète l'arrêté royal et l'objectif à atteindre pour les enveloppes et les feuilles de format A3 à A5 sera formulé autrement.

L'autre évolution possible est une amélioration de notre appareil statistique afin de pouvoir soumettre les enveloppes et les feuilles de format A3 à A5 à l'objectif formulé en pourcentage, comme c'est le cas pour les autres produits.

Ce sont deux manières par lesquelles on pourrait arriver à ce que ces produits aussi soient soumis à l'écotaxe ou à un objectif qui, s'il est atteint, les dispense d'être soumis à l'écotaxe.

Le ministre prend l'engagement, au cas où le Gouvernement modifierait l'arrêté royal dans un sens ou dans l'autre (soit le mode de calcul alternatif suggéré par le Conseil central de l'économie, soit l'ajout d'un produit à la liste), d'informer les commissions compétentes du Sénat et de la Chambre que le Gouvernement estime les conditions réunies pour soumettre à l'écotaxe les enveloppes et les feuilles de format A3 à A5.

Après avoir entendu la déclaration du ministre, M. Weyts retire sa signature de l'amendement mais M. Hatry la maintient. M. Coene appose sa signature à l'amendement.

L'amendement est rejeté par 5 voix contre 3 et 1 abstention.

M. Coene dépose ensuite l'amendement nº 2 qui vise à remplacer la date du 1er juin 1997 par celle du 1er septembre 1997.

L'auteur de l'amendement souligne que la date du 1er juin 1997 est déjà dépassée depuis longtemps.

Le ministre dépose l'amendement nº 6 qui est un sous-amendement à l'amendement nº 2 et qui vise à remplacer la date proposée du 1er septembre 1997 par celle du 1er novembre 1997.

Le ministre explique que, vu les vacances parlementaires et le fait que le projet de loi amendé doit encore être réexaminé par la Chambre des représentants, il n'est plus possible de prendre l'arrêté royal pour cette date.

Un commissaire se demande s'il ne serait dès lors pas plus sensé de prévoir la date du 1er janvier 1998 pour rendre l'ensemble du projet de loi plus transparent.

Le ministre fait observer que l'industrie confirme que le pourcentage prévu pour l'année 1997 (30 %) est d'ores et déjà réalisé. La date du 1er novembre 1997 est donc tout à fait réaliste.

L'amendement nº 6 est adopté à l'unanimité des 9 membres présents. L'amendement nº 2, ainsi sous-amendé, est adopté par 6 voix et 3 abstentions.

Un commissaire déclare enfin que le texte du projet de loi à l'examen ne serait pas soumis à la Commission du Suivi. Ceci constitue une violation de l'article 389, 6º, de la loi ordinaire du 16 juillet 1993 parce que la consultation prescrite ne s'est pas déroulée de manière régulière. Le ministre peut-il dire quelle consultation a réellement eu lieu et sous quelle forme ?

Le ministre confirme que le projet de loi est établi sur la base de tous les avis de la Commission du Suivi. Cette Commission a bien rendu un avis sur l'application de la loi relative aux écotaxes sur le papier, à savoir le 12 novembre 1996.

Selon un membre de la commission, la Commission du Suivi est, une fois de plus, une de ces nombreuses commissions sans valeur législative quelconque, qui retire au législateur une partie de ses compétences. Le membre a protesté de façon répétée sous la précédente législature contre cette habitude, car le Gouvernement confie à des gens désignés par lui une partie des compétences d'exécution d'arrêtés de pouvoirs spéciaux, ce qui est tout à fait inacceptable.

Le ministre fait observer que le législateur a voté cette disposition. Dans les travaux préparatoires de la loi du 16 juillet 1993, le ministre des Finances a exprimé, à titre personnel, ses réserves à l'égard de cette formule, mais une majorité parlementaire a souhaité se déssaisir d'une partie de ses pouvoirs.

Le membre rétorque que cette disposition a été votée sur la proposition d'un gouvernement dont le ministre faisait également partie.

Article 3

M. Coene dépose l'amendement nº 3 qui vise à remplacer, à la première phrase de l'article 384, alinéa 3, proposé au § 1er du présent article, les mots « 31 décembre 1997 » par les mots « 30 juin 1998 ».

L'auteur de l'amendement déclare que le délai actuel n'est plus réaliste en raison du retard pris.

Le ministre ne peut accepter l'amendement. En effet, l'adoption de l'amendement signifierait qu'il faudrait redemander l'accord des régions. Or, les régions ont pris clairement position et ne souhaitent pas reporter l'écotaxe sur le papier au-delà du 31 décembre 1997. Dans ce cas-ci, ce n'est donc pas la Commission du Suivi qui décide tout, puisqu'elle proposait un report de quatre ans, mais bien les régions qui n'ont pas accepté ce délai.

Un membre estime qu'une décision des régions n'est pas nécessairement plus sensée.

Selon le ministre, dans un État fédéral, il est plus normal de légiférer avec l'accord des régions qu'avec l'accord d'une commission.

L'amendement nº 3 est rejeté par 6 voix contre 3.

Le ministre dépose ensuite l'amendement nº 7. Cet amendement a pour but de remplacer la date du 1er septembre 1997 par celle du 1er novembre 1997. L'arrêté royal sera donc pris au plus tard le 1er novembre 1997 et sera ensuite ratifié par le Parlement au plus tard le 31 décembre 1997.

Un commissaire estime que le texte néerlandais de la deuxième phrase du § 1er n'est pas clair. La modification proposée à l'amendement nº 13 (doc. Chambre, nº 918/2, 1996-1997, p. 6) n'a manifestement pas correctement été apportée au texte néerlandais adopté par la commission de la Chambre.

La commission décide, pour améliorer le texte, d'apporter correctement la modification proposée à l'amendement nº 13.

L'amendement nº 7 est adopté à l'unanimité des 9 membres présents.

Article 4

M. Coene dépose l'amendement nº 4 visant à remplacer l'article 4 par ce qui suit : « L'article 376 de la même loi est supprimé ».

L'auteur estime que le raisonnement de la Commission européenne peut être étendu aux appareils photo à jeter. Il propose dès lors de supprimer cet article.

Le ministre demande le maintien du texte. Il n'y a pas lieu de supprimer les écotaxes sur les appareils photo à jeter. D'ailleurs, cette écotaxe n'a jamais été contestée par le secteur.

Un commissaire tient à souligner que le point de vue du Gouvernement entraînera à nouveau davantage de travail pour les tribunaux, étant donné qu'il y aura des contestations fondées sur l'avis de la Commission européenne. Le but de l'amendement proposé est d'éviter ces contestations. Le produit de l'écotaxe est pratiquement nul. Maintenir celle-ci ne fera que créer beaucoup de difficultés pour rien.

L'intervenant demande par conséquent qu'on fasse preuve de bon sens.

Un autre membre se réfère à un secteur bien connu par lui. Le fait de soumettre aux accises toute une production et une distribution de produits est une source de dépenses énorme. Par exemple, toute la production de L.P.G. devait être surveillée par des agents des accises qui en prélevaient 5 % pour la conduite automobile. Ces 5 % etaient les seuls à être taxés, les 95 % restants étaient exonérés. Ceci obligeait à mettre dans les dépôts agréés et dans les raffineries des dizaines d'agents pour contrôler alors qu'on ne touchait l'accise que sur 5 % de la production.

Selon le ministre, il n'y a pas de problème de ce genre en l'espèce puisqu'il s'agit d'un domaine où la taxe est efficace. Le secteur a organisé un système de collecte et l'écotaxe n'est pas payée. C'est vraiment un progrès du point de vue écologique.

Un membre a pris bonne note que le système actuel ne coûte rien et qu'il n'y a pratiquement plus d'appareils qui ne sont pas récoltés après usage.

Le ministre confirme que seuls les appareils photos jetables utilisés pour la plongée sous-marine ne sont pas collectés et recyclés.

Un commissaire déclare dès lors pouvoir partir du principe que, si des demandes en indemnisation sont introduites à ce propos contre l'État belge, le ministre les prendra à son compte personnel.

Le ministre constate que, jusqu'à présent, il n'y a pas eu de contestation du secteur et que le secteur a mis en place des réseaux de collecte, ce qui est un progrès écologique.

L'écotaxe sur les appareils photos jetables est un bon exemple de ce que la législation sur les écotaxes atteint ses objectifs. Elle ne les atteint pas partout parce que les difficultés techniques ne sont pas les mêmes pour tous les produits, mais, pour les appareils photos jetables, il y a un progrès puisqu'on a organisé la collecte et le recyclage de ce produit.

L'amendement nº 4 est rejeté par 6 voix contre 3.

V. VOTES

L'ensemble du projet de loi tel qu'il a été amendé a été adopté par 6 voix contre 2 et 1 abstention.

Le présent rapport a été approuvé par 7 voix et 1 abstention.

Le rapporteur,
Luc COENE.
Le président,
Paul HATRY.

TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION


Article premier

La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.

Art. 2

§ 1er . L'article 383, § 1er de la loi du 16 juillet 1993 visant à achever la structure fédérale de l'État est remplacé par la disposition suivante : « À l'exception des livres, des papiers domestiques et sanitaires et des emballages en papier et/ou carton, les produits en papier et/ou carton mis à la consommation sont soumis à une écotaxe de 10 francs par kg. Le Roi détermine, au plus tard le 1er novembre 1997, par arrêté délibéré en Conseil des ministres et confirmé par la loi avant le 31 décembre 1997 et après accord des régions, les termes « les produits en papier et/ou carton mis à la consommation. »

§ 2. Les paragraphes 2, 3 et 4 du même article sont supprimés.

Art. 3

§ 1er . L'article 384, troisième alinéa, de la même loi est remplacé par la disposition suivante : « Les produits visés à l'article 383 sont exonérés du 1er janvier 1997 au 31 décembre 1997. Après cette date, cette exonération ne peut être invoquée que par le contribuable qui démontre que le produit en papier et/ou carton qu'il a mis à la consommation est collecté et recyclé, soit par lui-même, soit par l'intervention d'un tiers, public ou privé, reconnu à cet effet par les régions, et ce, aux conditions et à concurrence du pourcentage déterminés par le Roi, par arrêté délibéré en Conseil des ministres, à confirmer par la loi avant le 31 décembre 1997, au plus tard le 1er novembre 1997 et dans le respect des dispositions régionales et communales applicables en matière de gestion des déchets, et plus particulièrement des dispositions régissant le ramassage de déchets ménagers. »

§ 2. L'article 384 est complété par un alinéa rédigé comme suit : « Lorsqu'il ressort que les taux déterminés conformément au présent article, troisième alinéa ne sont pas atteints, l'exonération de l'écotaxe est retirée pour l'année suivante. »

Art. 4

Dans l'article 376, § 1er , de la même loi, les mots « , à l'exception de ceux destinés à l'usage médical » sont supprimés.

Dans le même paragraphe, dans le tableau, les mots « rasoirs jetables .... 10 francs » sont supprimés.

Art. 5

L'article 371 de la même loi est complété par l'alinéa suivant : « Les emballages de boissons principalement constitués par un des matériaux repris à l'annexe 18 sont exonérés de l'écotaxe. »

Art. 6

Une annexe 18, rédigée comme suit, est insérée à la même loi :

« Annexe 18. ­ Les matériaux visés à l'article 371, deuxième alinéa, sont :

­ le bois;

­ le grès;

­ la porcelaine;

­ le cristal. »

Art. 7

À l'article 392, § 1er , de la même loi, il est inséré, après le deuxième alinéa, un alinéa libellé comme suit :

« Lorsque la présente loi confère aux redevables l'obligation d'atteindre des taux de collecte, de recyclage ou de valorisation de récipients pour boissons ou de récipients contenant certains produits industriels, l'atteinte de ces objectifs doit se faire conformément aux législations régionales en matière de gestion des déchets d'emballages, indépendamment du fait que celles-ci dérogent à la loi du 27 juin 1921 accordant la personnalité civile aux associations sans but lucratif et aux établissements d'utilité publique. »

Art. 8

À l'article 401 de la même loi, les 2º, alinéa 1er , et 6º sont abrogés.