1-508/3

1-508/3

Sénat de Belgique

SESSION DE 1996-1997

29 JANVIER 1997


Projet de loi relative au travail de nuit


Procédure d'évocation


RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES PAR MME CANTILLON


La Commission des Affaires sociales a discuté le présent projet de loi, qui a été évoqué par le Sénat le 16 janvier 1997, au cours de sa réunion du 22 janvier 1997.

I. EXPOSÉ INTRODUCTIF DE LA MINISTRE DE L'EMPLOI ET DU TRAVAIL

Pour commenter le projet de loi à l'examen, la ministre s'est basée sur l'exposé introductif qu'elle avait présenté à la commission de la Chambre (voir le doc. Chambre, nº 1-643/3, 1995-1996, pp. 2 à 7).

La ministre a ensuite précisé quelles modifications la Chambre des représentants a apportées au projet de loi initial.

La commission de la Chambre a ainsi adopté un amendement du Gouvernement (art. 38, § 2) qui prévoit une concertation tant dans les entreprises où le travail de nuit est déjà autorisé pour les hommes que dans les entreprises où l'on souhaite introduire le travail de nuit. Cette concertation permet d'examiner l'encadrement du travail de nuit sur la base d'une « check-list ». L'objectif est de vérifier notamment si l'entreprise a pris suffisamment de mesures pour veiller au respect des dispositions de la C.C.T. nº 46.

La « check-list » permettra aussi de vérifier s'il y a égalité de rémunération entre hommes et femmes.

Une autre modification apportée par la Chambre des représentants concerne la période d'essai dans les entreprises qui ont déjà recours au travail de nuit. Les travailleurs qui entrent dans un régime de travail comportant des prestations de nuit pourront se familiariser avec ce régime de travail pendant une période de trois mois, au lieu des deux mois prévus initialement.

Grâce à une troisième modification, les travailleurs qui décident, au cours de leur période d'essai ou immédiatement après celle-ci, de retourner à un régime de travail avec des prestations de jour sont protégés contre le licenciement.

Au cours de la période d'essai, le travailleur peut être remplacé par un travailleur recruté dans les liens d'un contrat de travail temporaire ou intérimaire. C'est la quatrième modification qui a été apportée.

Enfin, il a été prévu que le Conseil national du travail transmettra chaque année un rapport sur le travail de nuit au Gouvernement fédéral et aux Chambres fédérales.

II. DISCUSSION GÉNÉRALE

Une commissaire fait remarquer que le projet de loi a vu le jour parce que la ministre a pris ses responsabilités dans un dossier pour lequel les partenaires sociaux ne parvenaient pas à un consensus.

Le projet permet d'équilibrer trois principes, à savoir le principe d'égalité de traitement entre hommes et femmes de l'Union européenne ­ même si ce principe a été interprété de manière par trop légaliste ­, le principe de la protection des travailleurs, en particulier ceux avec charge de famille, et, enfin, celui de la flexibilisation du temps de travail.

L'intervenante se rallie aux principes qui sous-tendent la loi et selon lesquels le travail de nuit est toujours interdit, se fait sur une base volontaire et nécessite un encadrement social.

À cet égard, l'intervenante ne comprend pas pourquoi la ministre s'est opposée, à la Chambre des représentants, à l'insertion dans la loi du principe selon lequel le travail de nuit ne peut pas être considéré comme un emploi convenable en ce qui concerne l'application de la réglementation du chômage. Il est vrai que ce principe figure dans ladite réglementation, mais sa définition légale offrirait davantage de garanties.

Il s'agit ici d'un principe fondamental qui se situe dans le prolongement direct des points de départ précités. Il convient d'inclure les principes fondamentaux dans la loi même, et non dans les arrêtés d'exécution ministériels.

Une autre intervenante est également satisfaite de constater que l'on maintient le principe de l'interdiction du travail de nuit. Elle comprend par ailleurs que la ministre souhaite mettre la législation belge en conformité avec la réglementation européenne.

Si l'interdiction continue à être la règle générale, il convient, selon l'intervenante, d'être très strict en ce qui concerne les mesures d'encadrement pour les cas dans lesquels le travail de nuit est autorisé.

L'intervenante estime, elle aussi, que le problème du « travail convenable » devrait être réglé par la loi. Enfin, elle s'oppose à ce que le travail de nuit puisse être instauré à la suite d'une simple modification du règlement du travail. À son avis, seule une C.C.T. peut instaurer le travail de nuit. Elle dépose un amendement dans lequel ce principe est arrêté (voir ci-après).

Une troisième intervenante abonde dans le même sens que les intervenantes précédentes.

Elle se dit particulièrement préoccupée par la question de l'automaticité de l'entrée dans le travail de nuit. Elle se demande s'il n'y a pas à cet égard une contradiction entre le projet de loi et la C.C.T. nº 46, qui prévoit une négociation avec le travailleur sur son acceptation à faire ce type de travail.

L'intervenante soulève ensuite le problème de la réversibilité de la décision. Il peut y avoir des circonstances dans la vie d'un travailleur ayant été amené à accepter le travail de nuit, qui ne sont pas des circonstances médicales mais liées à des modifications dans sa vie personnelle. Dans ce cas, la réversibilité n'est pas prévue.

L'intervenante souhaite des éclaircissements à ce sujet.

Un dernier intervenant regrette que les partenaires sociaux ne soient pas parvenus à trouver un accord sur le travail de nuit. Il ne peut qu'approuver l'initiative de la ministre, qui a pris une décision en la matière.

Le commissaire marque son accord sur le texte proposé ainsi que sur les modifications apportées par la Commission des Affaires sociales de la Chambre des représentants et particulièrement sur le fait que l'employeur soit tenu de consulter les représentants des travailleurs au sujet des adaptations nécessaires des conditions de travail des travailleurs occupés dans un régime de travail comportant des prestations de travail de nuit.

Le commissaire prend acte du fait que chaque année un rapport sur le travail de nuit et sur son évolution sera mis à la disposition du Gouvernement et des Chambres fédérales. Il souhaite que ce document soit à la base d'un échange de vues entre le Gouvernement, le Conseil national du travail et la commission.

La ministre précise une fois de plus que le travail de nuit continue à être l'exception, tant pour les hommes que pour les femmes.

La ministre a profité de l'occasion que lui fournissait l'adaptation de la réglementation applicable aux femmes pour adapter également celle applicable aux hommes. En fait, la loi vise donc à assouplir la réglementation qui s'applique aux femmes et à offrir aux hommes une plus grande protection.

De nombreuses matières sont réglées par la C.C.T. nº 46, qui a été rendue obligatoire par un arrêté royal. Par conséquent, les entreprises ne peuvent y déroger. Dans le cas contraire, les travailleurs sont tenus de déposer une plainte.

Pour permettre l'application correcte de ladite C.C.T., la ministre a créera un nouveau moyen de contrôle, à savoir la « check list » .

C'est ainsi que l'égalité de rémunération ne figurera pas dans la C.C.T. nº 46; la « check list » envisagera par contre cet aspect, qui est réglé dans une autre loi.

La ministre estime que l'on a pris les mesures d'accompagnement et d'encadrement maximales. Les règles doivent être identiques pour les hommes et pour les femmes, à l'exception des règles concernant la protection de la grossesse et de la maternité.

Ensuite, la ministre répond à la remarque de la première intervenante en déclarant que la loi sur le travail règle tout ce qui touche au « travail ». La réglementation sur le chômage, quant à elle, règle tous les aspects du « chômage ». L'on a maintenu cette logique légistique.

La C.C.T. nº 46 prévoit que les travailleurs peuvent être employés dans des régimes de travail avec des prestations de nuit uniquement sur une base volontaire.

La réglementation du chômage règle cet aspect de mise au travail « volontaire » en ce qui concerne le chômage. Les textes y afférents seront soumis au comité de gestion de l'O.N.E.M., qui doit donner son avis à ce sujet.

La ministre souligne une fois de plus qu'elle souhaite maintenir la logique des deux réglementations et elle s'engage à adapter sous peu la réglementation sur le chômage.

Quant au problème de la réversibilité, la ministre observe qu'il faut partir du principe que les conditions de travail sont fixées par les deux parties, c'est-à-dire l'employeur et le travailleur. En principe, ces conditions ne peuvent être modifiées que par un nouvel accord entre ces deux parties.

Dans le cadre du travail de nuit, il y a des réversibilités temporaires (par exemple les cas de maternité) et des réversibilités liées à l'âge. Ainsi la C.C.T. nº 46 prévoit qu'à partir de l'âge de 55 ans, le travailleur peut demander son transfert à un travail de jour sans justifier de raisons médicales. À partir de 50 ans, il peut demander son transfert pour des raisons médicales pour autant qu'il compte 20 ans d'ancienneté dans le travail de nuit. La même convention reconnaît une priorité particulière à donner aux travailleurs qui n'ont pas atteint l'âge de 50 ans, s'ils peuvent faire valoir des raisons sérieuses (médicales, sociales, familiales ou autres) et demandent un transfert à un travail de jour.

Un commissaire fait remarquer que d'après le Conseil d'État, l'on accorde au Roi des compétences trop étendues. Le Conseil d'État a également fait observer qu'il conviendrait de revoir fondamentalement l'article 37. L'on n'a pas tenu compte de ces observations. Le membre ne met pas en cause le contenu du projet de loi, mais bien sa forme.

La ministre répond que l'on ne saurait suivre les remarques du Conseil d'État. Quand, dans le projet, il est question d'arrêtés royaux, il s'agit en réalité d'arrêtés pris sur l'avis des commissions paritaires concernées.

Selon un autre commissaire, il n'y a pas de lien évident entre les différentes dispositions du projet de loi, et notamment entre les articles 37 et 38.

Dans son introduction, la ministre a souligné qu'il est possible qu'une commission paritaire ne parvienne pas à se mettre d'accord sur l'autorisation du travail de nuit pour les femmes. L'intervenante confirme que cette possibilité n'est pas seulement théorique.

Ainsi l'on sait que, plus particulièrement dans le secteur du pétrole, les hommes souhaitent garder pour eux certaines fonctions qui impliquent un travail de nuit. Au demeurant, la commission a déjà dénoncé cette situation.

Aux termes du projet de loi, si aucune C.C.T. n'est conclue, le Roi peut, sur la base des dispositions de l'article 37, prendre des initiatives visant à autoriser le travail de nuit, en l'occurrence, pour les femmes. L'intervenante ne comprend dès lors pas bien la réponse que la ministre a donnée au préopinant, selon laquelle il faut d'abord conclure une C.C.T.

La ministre précise que pour introduire le travail de nuit dans une entreprise, il y a lieu d'ouvrir deux « portes ».

L'on ouvre la première « porte » à l'aide d'une clef fournie en partie par la loi (art. 36) et en partie par un arrêté royal (art. 37).

Ensuite, l'on doit ouvrir une deuxième porte au moyen d'une procédure au sein de l'entreprise (art. 38).

Dans les trois cas prévus à l'article 37, § 2, un arrêté royal fournit la clef une fois la commission paritaire consultée. S'il s'avère, six mois plus tard, que l'on n'est pas parvenu à ouvrir cette première porte ­ en d'autres termes, si la commission paritaire ne parvient pas à un accord ­, le législateur lui-même fournit la clef qui permet d'ouvrir la deuxième porte (art. 38).

La loi du 17 mars 1987 relative à l'introduction de nouveaux régimes de travail dans les entreprises se fonde sur le même principe : lorsque l'on n'est pas parvenu à conclure une convention sectorielle, l'on ouvre la première porte pour permettre la conclusion d'accords au niveau des entreprises.

Selon le premier intervenant, ce n'est pas le législateur qui ouvre la deuxième porte, mais le Roi, à qui l'on a délégué un pouvoir général à cet effet.

L'intervenant fait ensuite remarquer que le § 2 du même article ne précise pas la procédure à suivre.

À la réponse de la ministre selon laquelle cette procédure est définie dans la loi sur le travail, l'intervenant réplique qu'il eût convenu, dans un souci de clarté, de faire référence à cette dernière.

La ministre réplique que l'article 37 ne fait pas référence à la loi sur le travail parce qu'il deviendra un article de ladite loi. Par ailleurs, le Conseil d'État a proposé, dès 1971, de faire figurer dans cette dernière un article disposant qu'il convient toujours de consulter la commission paritaire avant de promulguer un arrêté royal d'exécution de cette loi (voir l'art. 47 de la loi sur le travail).

Le commissaire faire encore observer que l'article 37, § 1er , permet d'étendre les dérogations à l'interdiction du travail de nuit prévues à l'article 36.

La ministre répond que l'on permet aux partenaires sociaux de proposer des dérogations, qui sont ensuite confirmées par arrêté royal. Telle est la logique de la loi sur le travail.

Une autre intervenante renvoie à l'article 37, § 2, 2º, où il est question de prestations de nuit pour exécuter les travaux pour lesquels une permanence est jugée nécessaire. Qui juge de cette nécessité ? Prévoit-on des critères en la matière ?

La ministre répond que les partenaires sociaux négocient toujours sur ce point, soit dans les secteurs, soit dans les entreprises.

Une des préopinantes admet qu'à propos du travail de nuit, le projet de loi introduit l'égalité entre les hommes et les femmes, mais des inégalités subsistent pour les rémunérations liées aux classifications des fonctions. Que fait-on pour réformer ces classifications et permettre de retrouver une égalité à cet égard ?

Pour ce qui est de la réversibilité, l'intervenante se demande pourquoi la loi ne prévoit pas la possibilité d'accorder une priorité aux travailleurs et aux travailleuses qui le souhaitent, lorsqu'un emploi correspondant à leurs qualifications est vacant dans le travail de jour. Ce genre de disposition a d'ailleurs été accepté pour le travail à temps partiel.

La ministre approuve la première remarque, mais, en ce qui concerne la loi sur le travail, l'on a proposé un nombre maximum d'adaptations.

Les difficultés en matière de classifications surgissent quand les partenaires sociaux négocient ces dernières. Les seules à pouvoir intervenir en la matière sont les travailleuses elles-mêmes et leurs représentantes. Elles peuvent déposer une plainte. Force est néanmoins de constater que l'on ne dépose presque pas de plaintes.

En ce qui concerne la deuxième remarque, la ministre renvoie à la réponse qu'elle a déjà donnée à ce propos.

III. VOTES

Article 2

L'amendement nº 1 de Mme Dardenne est rejeté par 1 voix et 8 abstentions.

Article 6bis (nouveau)

L'amendement nº 2 de Mme Dardenne est rejeté par 8 voix et 1 abstention.

L'ensemble du projet de loi a été adopté par 6 voix et 3 abstentions.

Le présent rapport a été approuvé à l'unanimité des 8 membres présents.

La rapporteuse,
Bea CANTILLON.
La présidente,
Lydia MAXIMUS.

TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION


CHAPITRE PREMIER

Disposition générale

Article premier

La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.

CHAPITRE II

Modifications de la loi du 16 mars 1971 sur le travail

Art. 2

§ 1er . Au chapitre III, section IV , de la loi du 16 mars 1971 sur le travail, les articles 35 à 38, modifiés par les lois des 4 février 1987, 17 mars 1987 et 21 mars 1995 et par l'arrêté royal nº 225 du 7 décembre 1983 sont remplacés par les dispositions suivantes :

« Section IV

Travail de nuit

Sous-section première

L'interdiction du travail de nuit

Art. 35

§ 1er . Les travailleurs qui entrent dans le champ d'application du chapitre III, section II, tel qu'il est déterminé par les articles 1er , 3 et 4 ou en vertu de ceux-ci, ne peuvent exécuter un travail de nuit.

§ 2. Par travail de nuit, il faut entendre le travail exécuté entre 20 heures et 6 heures.

Sous-section 2

Dérogations à l'interdiction du travail de nuit

Art. 36

Par dérogation à l'article 35, il peut être travaillé la nuit, pour autant que la nature des travaux ou de l'activité le justifie :

1º dans les hôtels, motels, terrains de camping, restaurants, entreprises de restauration, chez les traiteurs, dans les salons de consommation et dans les débits de boissons;

2º dans les entreprises de spectacles et de jeux publics;

3º dans les entreprises de journaux;

4º dans les agences d'information et dans les agences de voyage;

5º dans les entreprises de réparation et d'entretien de navires;

6º dans les entreprises vendant au détail des carburants et des huiles pour véhicules automobiles, mais uniquement en ce qui concerne les travailleurs occupés à la vente;

7º dans les entreprises exploitant des emplacements de parcage pour véhicules automobiles;

8º dans les entreprises de production, de transformation ou de transport de gaz, d'électricité, de vapeur ou d'énergie nucléaire et dans les entreprises de distribution d'eau;

9º dans les établissements ou par des personnes dispensant des soins de santé, de prophylaxie ou d'hygiène;

10º pour l'exécution de travaux agricoles;

11º pour l'exécution de travaux qui ne peuvent être interrompus en raison de leur nature;

12º pour l'exécution de travaux de transport, de chargement et de déchargement;

13º dans les pharmacies;

14º dans les entreprises de photographie et de cinéma, ainsi que dans les entreprises de distribution ou de diffusion de radio et de télévision;

15º dans les entreprises de distribution de produits pétroliers aux particuliers;

16º pour des travaux d'inventaires et de bilans, à condition qu'il ne soit pas travaillé pendant plus de sept nuits par travailleur et par année civile;

17º dans les boulangeries et pâtisseries artisanales;

18º dans les maisons d'éducation et d'hébergement;

19º pour l'exécution de travaux de surveillance et de garde qui ne peuvent pas être effectués à un autre moment;

20º pour l'exécution de travaux de nettoyage , de réparation et de conservation nécessaires à la continuation régulière de l'exploitation;

21º dans les cas prévus à l'article 26 de la présente loi.

Art. 37

§ 1er . Le Roi peut, s'il y a lieu et dans les conditions qu'Il détermine, autoriser le travail de nuit dans certaines branches d'activité, entreprises ou professions ou en vue de l'exécution de certains travaux.

§ 2. Si le Roi n'a pas exercé le pouvoir qui Lui est conféré en vertu du § 1er dans les six mois qui suivent l'entrée en vigueur du présent article, la procédure prévue à l'article 38 pourra être appliquée, à l'issue de ce délai, pour introduire un régime de travail comportant des prestations de nuit dans les cas suivants :

1º pour l'exécution de travaux organisés en équipes successives;

2º pour des travaux pour lesquels une permanence est jugée nécessaire;

3º dans les entreprises où les matières mises en ­uvre sont susceptibles d'altération rapide.

Sous-section 3

Introduction d'un régime de travail
comportant des prestations de nuit

Art. 38

§ 1er . S'il existe une délégation syndicale , un régime de travail comportant des prestations de nuit ne peut être introduit pour les travailleurs pour lesquels elle est compétente, que moyennant la conclusion entre l'employeur et toutes les organisations représentées au sein de cette délégation syndicale d'une convention collective de travail au sens de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires.

Par dérogation aux articles 11 et 12 de la loi du 8 avril 1965 instituant les règlements de travail, les dispositions de cette convention collective de travail qui modifient le règlement de travail sont introduites dans ce règlement dès le dépôt de cette convention collective de travail au greffe du Ministère de l'Emploi et du Travail.

§ 2. Dans les entreprises où il n'existe pas de délégation syndicale, un régime de travail comportant des prestations de nuit est introduit selon les règles prévues aux articles 11 et 12 de la loi du 8 avril 1965 instituant les règlements de travail.

§ 3. Avant d'entamer les procédures prévues aux §§ 1er et 2, l'employeur est tenu de consulter les représentants des travailleurs sur les adaptations nécessaires des conditions de travail des travailleurs occupés dans les régimes de travail visés au § 4.

Le Roi précise sur quelles matières au minimum doivent porter ces consultations.

Ces consultations se font au sein du conseil d'entreprise, ou à son défaut avec la délégation syndicale. Elles ont lieu avec le personnel à défaut du conseil d'entreprise et de délégation syndicale.

Le rapport des consultations sera transmis aux commissions paritaires compétentes. Le Roi en précise les modalités.

§ 4. Le Roi détermine ce qu'il faut entendre par régime de travail comportant des prestations de nuit.

§ 5. Un régime de travail comportant des prestations de nuit, introduit, conformément aux dispositions des §§ 1er et 2, ou de la loi du 17 mars 1987 relative à l'introduction de nouveaux régimes de travail dans les entreprises ne peut être appliqué que si l'employeur respecte les dispositions des conventions collectives de travail, conclues au sein du Conseil national du Travail, relatives aux mesures d'encadrement du travail en équipes comportant des prestations de nuit ainsi que d'autres formes de travail comportant des prestations de nuit et des conventions collectives de travail conclues en vertu de ces conventions.

§ 6. Le Roi peut fixer une autre procédure pour les employeurs qui ne relèvent pas du champ d'application de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. Cette procédure permet de modifier les mentions reprises dans le règlement de travail si ces employeurs sont soumis aux dispositions de la loi du 8 avril 1965 instituant les règlements de travail.

Il peut également fixer, pour les employeurs qui ne relèvent pas du champ d'application de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires, des conditions équivalentes à celles prévues par les dispositions des conventions collectives de travail conclues au sein du Conseil national du Travail relatives aux mesures d'encadrement du travail en équipes comportant des prestations de nuit ainsi que d'autres formes de travail comportant des prestations de nuit. ».

§ 2. Dans le même chapitre III, section IV, l'article 38bis , inséré par la loi du 30 juin 1971 et modifié par l'arrêté royal nº 225 du 7 décembre 1983, est abrogé.

§ 3. Dans le texte néerlandais de l'article 17 de la même loi du 16 mars 1971, modifié par la loi du 17 mars 1987, les mots « ploegenarbeid verrichten » sont remplacés par les mots « arbeid verrichten in opeenvolgende ploegen ».

§ 4. Dans le texte néerlandais de l'article 22, 1 º, de la même loi du 16 mars 1971, modifié par l'arrêté royal nº 225 du 7 décembre 1983, les mots « ploegenarbeid wordt verricht » sont remplacés par les mots « arbeid in opeenvolgende ploegen wordt verricht ».

Art. 3

Il est inséré dans le chapitre III de la même loi une section V nouvelle, rédigée comme suit :

« Section V

Respect des horaires de travail

Art. 38bis

Il est interdit de faire ou de laisser travailler en dehors du temps de travail fixé dans le règlement de travail ou dans l'avis prévu à l'article 14,1º, de la loi du 8 avril 1965 instituant les règlements de travail en cas d'application de l'article 25 de la présente loi.

L'alinéa 1 n'est pas applicable :

1º en cas de travaux entrepris pour faire face à un accident survenu ou imminent;

2º en cas de travaux urgents à effectuer aux machines ou au matériel à condition que l'exécution en dehors des heures normales de travail soit indispensable;

3º en cas de travaux commandés par une nécessité imprévue, pour autant que la procédure prévue à l'article 26, § 1er , 3º, soit respectée;

4º pour des travaux d'inventaires et de bilans, à condition qu'il ne soit pas travaillé pendant plus de sept jours par travailleur et par année civile;

5º dans les entreprises de réparation et d'entretien de navires;

6º pour l'exécution de travaux de transport, de chargement et de déchargement;

7º en cas d'application de la dérogation prévue à l'article 24,§ 2, de la présente loi. »

Art. 4

Dans le chapitre III, section III de la même loi, il est inséré un article 34bis rédigé comme suit :

« Art. 34bis . ­ § 1er . Les jeunes travailleurs ne peuvent exécuter un travail de nuit.

Les jeunes travailleurs de plus de seize ans peuvent toutefois être occupés jusqu'à 23 heures dans les cas visés à l'article 26. L'employeur qui fait application de cette dérogation en avertit par écrit, dans les trois jours, le fonctionnaire désigné par le Roi.

Toutefois, le Roi peut, s'il y a lieu et dans les conditions qu'Il détermine, autoriser qu'il soit travaillé la nuit dans certaines branches d'activité , entreprises ou professions en vue de l'exécution de certains travaux ou pour certaines catégories de jeunes travailleurs.

Le Roi ne peut exercer ce pouvoir que pour les jeunes travailleurs de plus de 16 ans, sauf s'il s'agit d' une activité visée au chapitre II, section première, sous-section 3 .

§ 2 Par travail de nuit, il faut entendre le travail exécuté entre 20 heures et 6 heures.

Pour les jeunes travailleurs de plus de seize ans, ces limites sont fixées à 22 heures et 6 heures ou à 23 heures et 7 heures pour l'exécution :

1º de travaux dont l'exécution ne peut, en raison de leur nature, être interrompue;

2º de travaux organisés en équipes successives.

§ 3. En ce qui concerne les jeunes travailleurs et en cas d'application du § 1er , alinéa 3, le travail de nuit reste interdit entre minuit et quatre heures. ».

Art. 5

Dans le chapitre III, section III, de la même loi, il est inséré un article 34ter rédigé comme suit :

« Art. 34 ter. ­ L'intervalle entre la cessation et la reprise du travail doit être de douze heures de repos consécutives au moins. ».

Art. 6

Il est inséré dans le chapitre III de la même loi une section VI nouvelle, rédigée comme suit :

« Section VI

Intervalles de repos

Art. 38ter

§ 1er . Les travailleurs qui entrent dans le champ d'application du chapitre III, section II, tel qu'il est déterminé par les articles 1er , 3 et 4 ou en vertu de ceux-ci ont droit, au cours de chaque période de vingt-quatre heures, entre la cessation et la reprise du travail, à une période minimale de repos de onze heures consécutives.

§ 2. Il peut être dérogé au droit prévu au § 1er :

1º dans les cas prévus à l'article 26;

2º pour les activités caractérisées par des périodes de travail fractionnées;

3º lorsque le travail est organisé en continu ou en équipes successives, uniquement en cas de changement d'équipe; il est toutefois interdit d'occuper un travailleur dans deux équipes successives;

4º dans les cas prévus par une convention collective de travail rendue obligatoire par arrêté royal. »

CHAPITRE III

Modifications de la loi du 4 août 1978 de réorientation économique et de la loi du 17 mars 1987 relative à l'introduction de nouveaux régimes de travail dans les entreprises

Art. 7

L'article 129, 1º, de la loi du 4 août 1978 de réorientation économique est abrogé.

Art. 8

L'article 2, 2º, de la loi du 17 mars 1987 relative à l'introduction de nouveaux régimes de travail dans les entreprises est remplacé par la disposition suivante : « 2º l'interdiction d'occuper des travailleurs la nuit, prévue par l'article 35 de la même loi; ».

CHAPITRE IV

Dispositions transitoires et finales

Art. 9

§ 1er . Les dispositions de l'article 2 de la présente loi ne sont pas applicables aux régimes de travail comportant des prestations la nuit entre 20 heures et 6 heures, qui sont mentionnés dans le règlement de travail à la date d'entrée en vigueur de la présente loi et qui sont réellement appliqués à cette date.

Les anciennes dispositions de la loi du 16 mars 1971 sur le travail leur restent applicables jusqu'à ce qu'une modification de ce régime doive faire l'objet d'une mention dans le règlement de travail.

À partir de l'entrée en vigueur de la présente loi, ces régimes de travail sont également accessibles aux travailleurs féminins.

§ 2. Les régimes de travail visés au § 1er ne peuvent continuer à être appliqués que si l'employeur respecte les dispositions des conventions collectives de travail conclues au sein du Conseil national du Travail relatives aux mesures d'encadrement du travail en équipes comportant des prestations de nuit ainsi que d'autres formes de travail comportant des prestations de nuit et des conventions collectives de travail conclues en vertu de ces conventions.

§ 3. Les travailleurs qui, avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi, sont occupés dans une entreprise selon un autre régime de travail qu'un régime de travail comportant des prestations entre 20 heures et 6 heures, et qui, à partir de la date susmentionnée, ou après celle-ci, sont occupés au sein de la même entreprise selon un régime de travail comportant des prestations entre 20 heures et 6 heures, ont droit à une période d'essai de trois mois pendant laquelle ils peuvent mettre fin à leur occupation dans un régime de travail comportant des prestations entre 20 heures et 6 heures, moyennant un préavis de sept jours. D'autres modalités ou une autre durée de cette période d'essai peuvent être fixées par convention collective de travail.

L'employeur ne peut faire un acte tendant à mettre fin unilatéralement à la relation de travail à partir du moment où le préavis visé à l'alinéa précédant lui a été notifié jusqu'à l'expiration d'un délai de trois mois à dater de la reprise du travail dans le régime de travail ne comportant pas de prestations entre 20 heures et 6 heures, sauf pour des motifs étrangers à cette demande de mettre fin à l'occupation dans un régime de travail comportant des prestations entre 20 heures et 6 heures. La charge de la preuve de ces motifs incombe à l'employeur.

Si le motif invoqué ne répond pas aux prescriptions du présent alinéa, ou à défaut de motif, l'employeur payera au travailleur une indemnité forfaitaire égale à la rémunération de six mois, sans préjudice des indemnités dues au travailleur en cas de rupture du contrat de travail.

§ 4. Dès l'entrée en vigueur de la présente loi, l'employeur est tenu de consulter les représentants des travailleurs sur les adaptations nécessaires des conditions de travail des travailleurs occupés dans les régimes de travail visés au § 1er dans lesquels des femmes ne pouvaient pas être occupées avant l'entrée en vigueur de la présente loi.

Le Roi précise sur quelles matières au minimum doivent porter ces consultations.

Ces consultations se font au sein du conseil d'entreprise, ou à son défaut avec la délégation syndicale. Elles ont lieu avec le personnel à défaut de conseil d'entreprise et de délégation syndicale.

Le rapport des consultations sera transmis aux commissions paritaires compétentes. Le Roi en précise les modalités.

§ 5. Le remplacement d'un travailleur pendant la période d'essai visée au § 3 est considéré comme un travail temporaire au sens de l'article 1er de la loi du 24 juillet 1987 sur le travail temporaire, le travail intérimaire et la mise de travailleurs à la disposition d'utilisateurs.

Art. 10

Une discussion sur la mise en oeuvre de la présente loi et plus particulièrement de l'article 37 nouveau de la loi du 16 mars 1971 sur le travail doit être tenue au sein des commissions et sous-commissions paritaires.

La réunion au cours de laquelle se tiendra cette discussion doit avoir lieu avant l'entrée en vigueur des autres dispositions de la présente loi.

Art. 11

Le Conseil national du Travail mettra, chaque année, un rapport sur le travail de nuit et son évolution à la disposition du gouvernement fédéral et des Chambres législatives fédérales.

Art. 12

§ 1er . La présente loi entre en vigueur un an après le jour de sa publication au Moniteur belge .

L'article 10 entre toutefois en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge .

§ 2. Les dispositions de la loi du 16 mars 1971 sur le travail et ses arrêtés d'exécution tels qu'ils sont d'application avant l'entrée en vigueur de la présente loi restent applicables aux travailleurs visés à l'article 3, § 1er , 1º, de la même loi du 16 mars 1971 jusqu'à une date à fixer par le Roi.