1-456/1

1-456/1

Sénat de Belgique

SESSION DE 1996-1997

25 OCTOBRE 1996


Proposition de loi modifiant le Code judiciaire et le Code d'instruction criminelle en ce qui concerne la procédure en dessaisissement

(Déposée par MM. Lallemand, Erdman et consorts)


DÉVELOPPEMENTS


La décision rendue par la Cour de cassation suite à une requête en dessaisissement peut aujourd'hui être prise sur-le-champ, sans débat contradictoire. Et lorsque la décision est différée, toutes les parties intéressées ne doivent pas être appelées à la cause.

La possibilité laissée aux parties non-requérantes de rouvrir un débat en formant opposition à l'arrêt de dessaisissement peut également être source d'incertitude et d'insécurité. C'est particulièrement vrai lorsque le juge mis en cause est en charge d'une instruction judiciaire.

L'arrêt ayant un effet immédiat, le président du tribunal peut désigner, pour la bonne marche de l'enquête, un autre juge d'instruction dès le dessaisissement prononcé. Si, par hypothèse, la Cour de cassation reçoit une opposition, et la déclare fondée, cette nouvelle décision n'aura pas nécessairement d'impact sur la réorganisation interne décidée par le président du tribunal.

La présente proposition tend à modifier la procédure en dessaisissement. Elle oblige à un débat contradictoire avant toute décision de la Cour de cassation, et impose la même procédure pour les dessaisissements demandés dans le cadre d'affaires pénales ou d'affaires civiles.

Le débat contradictoire permet de prendre une juste mesure de la portée des faits et attitudes invoqués à l'appui de la demande, notamment au regard des principes de proportionnalité et de finalité, mais aussi au regard de l'impartialité et de l'apparence d'impartialité dont doivent faire preuve les magistrats.

La présente proposition permet aux parties non-requérantes de répondre à la requête en dessaisissement, dans un délai de huit jours. Si la requête invoque l'urgence, et que la Cour la reconnaît, ce délai peut être réduit à deux jours. L'avis des juges dont le dessaisissement est demandé et, le cas échéant, celui du ministère public concerné par le dossier, devra en tous les cas être demandé.

Dès lors que toutes les parties seront d'office appelées à participer aux débats, la possibilité de former opposition à la décision de la Cour ne se justifie plus.

La Cour de cassation gardera, si nécessaire, la possibilité de suspendre les juges dont le dessaisissement est demandé. La Cour pourra également annuler un acte accompli avant le dessaisissement, si celui-ci est manifestement orienté et partial.

Par ailleurs, la requête, y compris en matière civile, pourra être introduite directement par une partie ou son avocat.

En tout état de cause, la compréhension du procès, et particulièrement du procès pénal, se modifie, et évolue dans le sens d'une meilleure prise en compte des intérêts de toutes les parties. Cette approche nouvelle doit être intégrée à toutes les procédures. C'est le sens de la présente proposition.

Roger LALLEMAND.

PROPOSITION DE LOI


Article premier

La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.

Art. 2

L'article 653 du Code judiciaire est remplacé comme suit :

« Art. 653. ­ La demande de dessaisissement est formée par requête motivée et signée par une partie ou son avocat, déposée au greffe de la Cour de cassation, en autant d'exemplaires qu'il y a de parties en cause.

Dans les ving-quatre heures du dépôt de la requête, celle-ci est notifiée aux parties non-requérantes, sous pli judiciaire, par le greffier de la Cour. La notification mentionne le texte des articles 648 à 659.

Chacune des parties peut déposer au greffe de la Cour un mémoire en réponse dans les huit jours de la notification. Si elle reconnaît l'urgence, la Cour peut réduire ce délai à deux jours.

Les mémoires en réponse sont immédiatement notifiés au requérant, sous pli judiciaire, par le greffier de la Cour. Les autres parties peuvent en prendre connaissance au greffe de la Cour. »

Art. 3

Les articles 654 et 655 du même Code sont abrogés.

Art. 4

L'article 656 du même Code est remplacé comme suit :

« Art. 656. ­ Dans les vingt-quatre heures du dépôt de la requête, la Cour fixe le jour de l'audience et ordonne :

1º la communication immédiate de la requête et des pièces y annexées aux juges dont le dessaisissement est demandé, pour faire, dans un délai fixe, leur déclaration au bas de l'expédition de l'arrêt;

2º la communication immédiate au ministère public saisi du dossier, pour rendre, dans le même délai, son avis motivé;

3º la convocation des parties à comparaître devant elle, pour être entendues sur la demande de dessaisissement;

4º le rapport, à jour indiqué, par l'un des conseillers nommé par l'arrêt.

La Cour peut ordonner que l'ensemble du dossier lui soit communiqué ou prononcer toute disposition préparatoire à sa décision qu'elle jugera nécessaire.

La Cour peut ordonner qu'il soit sursis au jugement du procès, aux procédures conservatoires et d'instruction, et, en matière criminelle, à la mise en accusation ou à la formation du jury.

L'arrêt est notifié immédiatement aux parties, sous pli judiciaire, par le greffier de la Cour. »

Art. 5

L'article 657 du même code est abrogé.

Art. 6

L'article 658 du même Code est complété par un quatrième alinéa libellé comme suit :

« La Cour peut en outre annuler les actes faits avant la prononciation de la décision, par les juges dessaisis. »

Art. 7

L'article 545 du Code d'instruction criminelle est remplacé comme suit :

« Art. 545. ­ La chambre de la Cour de cassation, qui connaît des pourvois en matière criminelle, correctionnelle ou de police, statue conformément aux articles 648 à 659 du Code judiciaire. »

Art. 8

Les articles 543, 544, 546, 547, 548, 549, 550 et 551 du même Code sont abrogés.

Roger LALLEMAND.
Frederik ERDMAN.
Hugo VANDENBERGHE.
Guy VERHOFSTADT.
Joëlle MILQUET.
Claude DESMEDT.