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Question écrite n° 7-980

de Orry Van de Wauwer (CD&V) du 28 janvier 2021

à la ministre de l'Intérieur, des Réformes institutionnelles et du Renouveau démocratique

Agressions homophobes et transphobes - Plaintes - Police - Traitement et suivi - Procédure - Nombre de cas de violence physique et verbale non signalés - Statistiques - Importance du signalement - Sensibilisation - Actions de la police

minorité sexuelle
lutte contre la discrimination
violence
statistique officielle
répartition géographique
police
poursuite judiciaire
discrimination fondée sur l'orientation sexuelle

Chronologie

28/1/2021Envoi question (Fin du délai de réponse: 4/3/2021)
4/3/2021Réponse

Question n° 7-980 du 28 janvier 2021 : (Question posée en néerlandais)

Nous pouvons lire dans le rapport annuel 2019 du Centre interfédéral pour l'égalité des chances Unia que celui-ci a ouvert 140 dossiers relatifs à des formes de comportement interdit lié à l'orientation sexuelle. Pour le critère de l'orientation sexuelle, on a enregistré 54 dossiers pour des discours de haine, 52 pour des actes de haine et 34 pour des discriminations. Les actes de haine consistent, dans 33 cas, en de l'intimidation et du harcèlement et, dans 16 cas, en des coups et blessures. En 2018, on a enregistré 17 cas d'agression physique pour le critère de l'orientation sexuelle.

Il est important que les victimes de violence physique et verbale à caractère homophobe ou de discrimination sur la base de l'orientation sexuelle ou l'identité de genre déposent plainte non seulement auprès d'Unia mais aussi à la police. De nombreuses victimes ne le font pas, et ce pour diverses raisons, comme la honte mais aussi parce qu'elles pensent malheureusement que cela ne servirait à rien. Selon le rapport annuel 2018 d'Unia, ceux qui signalent de tels faits déplorent également «l'absence ou l'insuffisance de suivi de la part de la police». On peut donc craindre qu'il soit question d'un «chiffre noir» élevé, c'est-à-dire d'un grand nombre de cas de violence physique ou verbale ou de discrimination non enregistrés.

Or il est très important pour la police que ces cas soient enregistrés, car cela lui permet d'avoir une vision claire du problème et de mener une répression adéquate. Une meilleure connaissance du profil des auteurs est aussi essentielle à une action de prévention et de sensibilisation. C'est pourquoi une étude est actuellement réalisée, à la demande du ministre flamand de l'Égalité des chances, sur les auteurs et les victimes de violence homophobe et transphobe.

Justification du caractère transversal de la question : la répression est une compétence fédérale et la sensibilisation relève de la compétence des Communautés. Pour pouvoir mener des actions de sensibilisation efficaces, il est important de disposer d'une vue d'ensemble claire des plaintes et des profils des auteurs.

Je souhaiterais donc obtenir de la ministre les informations suivantes.

1) La ministre peut-elle me communiquer les statistiques relatives au nombre de plaintes déposées à la police dans les différentes provinces et dans la Région de Bruxelles-Capitale pour les faits suivants :

a) cas de discours de haine à caractère LGBTphobe et transphobe en 2019 et 2020 ;

b) cas d'actes de haine à caractère LGBTphobe et transphobe en 2019 et 2020 ;

c) cas de discrimination fondée sur l'orientation sexuelle, le genre (ou l'identité de genre) ou la transsexualité en 2019 et 2020 ?

2) Est-il possible d'obtenir, pour ces mêmes catégories et ces mêmes années, les statistiques concernant spécifiquement les villes de Bruxelles, Gand, Anvers, Malines, Courtrai et Louvain ?

3) La ministre dispose-t-elle d'estimations ou d'indications quant au nombre de cas non signalés de violence physique et verbale à caractère LGBTphobe ou transphobe ?

4) La police peut-elle, sur la base des données disponibles, dresser les profils des auteurs de violence physique et verbale à caractère LGBTphobe ou transphobe ?

5) Quelles actions de sensibilisation la police mène-t-elle pour souligner l'importance de dénoncer la violence à caractère LGBTphobe ou transphobe ?

6) Quelle est la procédure policière prévue pour le traitement et le suivi de ce genre de plaintes ?

Réponse reçue le 4 mars 2021 :

1) & 2) La Banque de données nationale générale (BNG) est une base de données policières dans laquelle sont enregistrés les faits sur base de procès-verbaux résultant des missions de police judiciaire et administrative. Elle permet de réaliser des comptages sur différentes variables statistiques telles que le nombre de faits enregistrés, les modus operandi, les objets liés à l’infraction, les moyens de transport utilisés, les destinations de lieu, etc.

À l’appui de la définition ci-dessus de la BNG, il est possible, sur base des procès-verbaux, de réaliser des rapports sur le nombre de faits enregistrés par la police en matière de discrimination fondée sur l’orientation sexuelle (homophobie). Concernant le nombre d’arrestations, nous devons informer l’honorable membre que celles-ci ne sont pas reprises dans la BNG. Les données sont présentées pour l’année 2019 et le premier semestre de 2020 et proviennent de la banque de données clôturée à la date du 24 octobre 2020.

Les tableaux ci-dessous reprennent le nombre de faits enregistrés par les services de police en matière de discrimination fondée sur l’orientation sexuelle (homophobie), tels qu’ils sont enregistrés dans la BNG sur base des procès-verbaux, au niveau des provinces (tableau 1) et au niveau des villes de Bruxelles, Gand, Anvers, Malines, Courtrai et Louvain (tableau 2).

Tableau 1: nombre de faits enregistrés en matière de discrimination fondée sur l’orientation sexuelle (homophobie), par province


2019

SEM1 2020

Anvers

28

11

Brabant wallon

8

2

Bruxelles-Capitale

38

15

Hainaut

23

10

Liège

28

6

Limbourg

5

1

Luxembourg

4

 

Namur

9

4

Flandre orientale

16

7

Brabant flamand

1

4

Flandre occidentale

5

5

Total:

165

65

(Source: police fédérale)

Tableau 2: nombre de faits enregistrés en matière de discrimination fondée sur l’orientation sexuelle (homophobie), par ville


2019

SEM1 2020

Anvers

20

6

Bruxelles

18

5

Gand

6

5

Courtrai

1

1

Louvain

1

2

Malines

1

1

(Source: police fédérale)

Il s’agit ici d’infractions enregistrées par la police à la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination. Dans le cas présent, il s’agit de discrimination fondée sur l’orientation sexuelle. Exemple: un propriétaire refuse de louer un appartement à un couple d’homosexuels en raison de leur orientation sexuelle. Il s’agit là d’une infraction à la loi anti-discrimination, infraction qui apparaîtra dès lors dans les statistiques en la matière. Les délits de droit commun (par exemple coups et blessures volontaires) commis avec un motif homophobe ne sont ainsi pas repris dans le cas présent.

Pour certaines infractions de droit commun (par exemple coups et blessures), si le fait est commis (entre autres) en raison d’une aversion envers l’appartenance ethnique, la religion, le sexe, la nature sexuelle, etc. d’une personne (ce qui est appelé une «motivation discriminatoire»), c’est considéré comme une circonstance aggravante. Ces infractions sont aussi appelées «crimes de haine (hate crimes)».

Les codes-faits présents dans la nomenclature policière ne sont toutefois pas assez détaillés pour identifier ces «crimes de haine».

D’autres champs disponibles n’apportent non plus aucune alternative.

En conséquence, cela signifie que, à l’heure actuelle, il n’est pas possible d’extraire ces crimes de haine sur base des informations présentes dans la BNG et de fournir une réponse plus détaillée et plus précise à la question en matière de violence à caractère homophobe. Les services de la police fédérale œuvrent à pourvoir fournir également ces données.

3) Sur base de la BNG, seules les données récoltées sur base des procès-verbaux peuvent être fournies. Les faits qui ne sont pas connus des services de police (chiffre noir – dark number) ne sont, par définition, pas comptabilisés. À ce sujet, le Moniteur de sécurité peut fournir une indication [1]. Le Moniteur de sécurité ne reprend aucune donnée concernant la propension à porter plainte en matière de violence homophobe.

4) La police ne dispose pas de profils d’auteurs liés à ces faits de violence physique et verbale LGBT et transphobe.

5) Les actions de sensibilisation visant à accroître la volonté de signaler la violence holebi et transphobe s’inscrivent dans un cadre plus large de discrimination et de crimes de haine. La police fédérale se conforme aux dispositions légales de la circulaire COL13/2013 relative à la discrimination et aux crimes de haine. Sur base de cette circulaire, des fonctionnaires de référence sont désignés au sein des services de première ligne de la police fédérale et de la police locale et formés afin d’accueillir dans les meilleures conditions les victimes de ces crimes et de donner suite à leurs plaintes. Au cours de cette formation, les fonctionnaires de référence reçoivent des outils pour développer un réseau d’associations LGBTQI représentatives.

À la suite de cette circulaire, certaines zones de police locales ont développé des initiatives vis-à-vis de la population sur l’importance de signaler les discriminations et les crimes de haine. Citons par exemple les campagnes «Proud to be your friend» de la zone de police (ZP) de Gand et de la ZP Anvers, ainsi que le plan d’action et la campagne de sensibilisation connexe de la ZP La Louvière.

La police fédérale soutient également l’action de l’association sans but lucratif (ASBL) Rainbow Cops Belgium. En 2017, cette ABSL a élaboré une brochure «Victime de discrimination ou d’un délit en raison de ton orientation sexuelle ou de ton identité de genre?».

Avec cette brochure, l’ASBL entend informer les victimes et toutes les parties prenantes sur l’importance de déposer plainte, les droits des victimes, les possibilités d’action et les principes de la COL13/2013.

Depuis 2020, les crimes de haine peuvent être signalés en ligne sur Police On Web – une plate-forme permettant aux citoyens de faire des signalements en ligne – via le formulaire général «Appel à l’aide en général».

6) Le traitement et le suivi des plaintes pour violence holebi et transphobe sont régis par la circulaire COL13/2013. Comme répondu à la question 5), des fonctionnaires de référence sont désignés à cette fin au sein des services de première ligne de la police fédérale et de la police locale. Ces personnes agissent comme des interlocuteurs privilégiés au sein de leur unité avec le magistrat de référence.

En outre, il leur appartient de soutenir leurs collègues d’unité en la matière et de leur fournir les informations nécessaires. Plus concrètement, lors de l’établissement d’un procès-verbal, le phénomène «discrimination et crimes de haine» doit être indiqué dans le champ du contexte afin que le procès-verbal suive la bonne direction vers le parquet. Des informations détaillées concernant le traitement et le suivi de ces plaintes figurent dans la circulaire susmentionnée.

[1] La version la plus récente de cette enquête auprès de la population date de 2018.