Version à imprimer bilingue Version à imprimer unilingue

Question écrite n° 7-870

de Julien Uyttendaele (PS) du 24 novembre 2020

au vice-premier ministre et ministre de la Justice, chargé de la Mer du Nord

Crise du coronavirus - Justice - Mesures sanitaires élémentaires - Directives - Non-reconduction durant la deuxième vague - Système «Justscan» - Accès (Covid-19)

épidémie
bâtiment public
procédure judiciaire
personnel
magistrat
travail à distance
système judiciaire

Chronologie

24/11/2020Envoi question (Fin du délai de réponse: 24/12/2020)
24/12/2020Réponse

Question n° 7-870 du 24 novembre 2020 : (Question posée en français)

Alors que, lors de la première vague de propagation de la Covid-19, la plupart des procédures judiciaires avaient été suspendues afin de limiter la circulation du virus, et que seules les affaires urgentes avaient été poursuivies, lors de la deuxième vague d'octobre-novembre 2020, il apparait que les directives en cours s'éloignent largement des premières mesures adoptées.

A l'exception du personnel confiné – c'est notamment le cas de plusieurs chambres du tribunal francophone de l'entreprise de Bruxelles –, rien ne semble actuellement perturber les procédures.

Si le caractère essentiel du secteur de la Justice est évident, il y a toutefois lieu de s'interroger sur les décisions qui sont adoptées par les autorités judiciaires en ces temps de pandémie.

Faisant écho à de nombreux témoignages d'avocats et de justiciables bruxellois, il apparait que les règles de distanciation physique, ainsi que le nombre maximal de personnes admises dans une même salle d'audience, sont très peu respectés.

Au cours d'une audience tenue le 4 novembre 2020 dans la salle solennelle de la cour d'appel de Bruxelles, entre cent et deux cents personnes (principalement des avocats, des agents de police, les magistrats du siège et de nombreux greffiers) se sont réunies. L'aération de la pièce était insuffisante et les distances physiques totalement inexistantes.

Une première audience liée à ce dossier s'était déjà tenue dans cette même salle le 23 septembre 2020, avec un nombre de personnes présentes encore plus important puisque près de septante prévenus et des dizaines de parties civiles s'y trouvaient également.

Il apparait en outre que, dans les greffes correctionnels francophones du tribunal correctionnel et de la chambre du conseil de Bruxelles, la consultation des dossiers est soumise à de longues files d'attente, en raison d'un manque criant d'ordinateurs.

Les avocats, n'ayant pas accès à ces dossiers depuis leur cabinet, en sont réduits à devoir photographier l'écran de l'ordinateur consulté. La congestion considérable qui en résulte ralentit l'accès aux dossiers par les justiciables et par les avocats bruxellois, ce qui ne fait que permettre une très probable augmentation de la circulation du virus dans ces lieux où les distances physiques sont, une nouvelle fois, rarement respectées.

Alors que nos hôpitaux sont au bord de la saturation, il est stupéfiant de voir que la Justice ne participe pas autant que les autres secteurs publics et privés à l'effort sanitaire indispensable actuellement.

Les mesures durant la crise du coronavirus ayant été prises en Comité de concertation au sein duquel sont représentés tant le niveau fédéral que les entités fédérées, ces mesures prises au niveau fédéral ont un impact sanitaire sur le territoire de la Région Bruxelles-Capitale et, partant, affectent les politiques prises au niveau régional et de la Commission communautaire commune (COCOM). Cela justifie la transversalité de cette question écrite.

Je souhaiterais vous poser les questions suivantes:

1) Pour quelle(s) raison(s) les directives prises lors de cette deuxième vague sont-elles différentes de celles prises lors de la première, notamment au niveau du maintien des audiences?

2) Des directives ont-elles été données afin de limiter le nombre de personnes présentes dans les salles d'audience?

3) Pour quelles raisons le système «Justscan», permettant d'accéder à distance aux dossiers répressifs, n'est-il pas mis à la disposition des avocats, en leur fournissant les codes d'accès pour le(s) dossier(s) (à tout le moins dans ceux ne concernant pas des personnes en détention provisoire) pour lesquels ils ont fait une demande d'accès?

Réponse reçue le 24 décembre 2020 :

1) Tant durant le premier confinement que durant le second, la continuité du service a toujours été garantie moyennant le respect de la santé et la sécurité des collaborateurs (magistrats et personnel judiciaire) et des visiteurs. Néanmoins, il existe en effet quelques différences.

Durant la première vague, il était question d’un confinement total et le Collège des cours et tribunaux a donc défini un cadre plus strict: l’accent a été mis sur la poursuite des «affaires urgentes», des affaires relatives à la jeunesse et à la famille, des affaires pénales et la comparution de détenus, avec recours à la procédure écrite et à la vidéoconférence dans la mesure du possible, et le report des affaires (civiles) non urgentes, etc. Le cadre qui prévaut lors de la deuxième vague (confinement partiel) part toutefois du principe que toutes les affaires sont en principe traitées, pour autant que les chefs de corps décident localement comment et dans quelle mesure les audiences peuvent se poursuivre, en fonction de la santé et de la sécurité des collaborateurs et des visiteurs ainsi que de la disponibilité des magistrats et du personnel judiciaire.

2) Pour cela, nous vous renvoyons tout d’abord au communiqué de presse du Collège des cours et tribunaux du 15 mai 2020: https://www.rechtbanken-tribunaux.be/sites/default/files/nieuwsartikels/persbericht-chr-exit-covid19-2020-05-15-nlfr.pdf.

En résumé, les mesures les plus importantes – qui peuvent cependant encore évoluer en fonction des mesures du gouvernement – sont les suivantes: distanciation sociale, matériel de protection (gels pour les mains, masques buccaux, plexiglas), signalisation dans les bâtiments judiciaires, télétravail quand c’est possible, dépôt électronique de pièces et, enfin, l’optimisation des audiences (audiences vidéo, éviter les transferts de détenus, uniquement des audiences urgentes pendant le confinement, limitation du nombre de personnes présentes pendant les audiences, notamment en travaillant avec des plages horaires, procédure écrite, etc.).

En ce qui concerne ces mesures, le Collège ne fournit qu’un cadre général. L’organisation pratique des audiences et des visites des bâtiments judiciaires (accès aux salles d’audience et au greffe, circulation, masques buccaux, etc.) est néanmoins spécifiquement déterminée par les comités de direction locaux puisque la situation est très différente d’un bâtiment à l’autre.

3) Pour tous les dossiers ajoutés à la plateforme JustScan sur une base mensuelle, il est clair qu’une consultation à distance peut apporter une valeur ajoutée importante aux avocats impliqués tant pendant qu’après la crise sanitaire actuelle de Covid-19. Cependant, la solution actuelle de cette consultation électronique, Consult Online, n’est pas techniquement adaptée pour permettre cette consultation de manière contrôlée et sécurisée. Le département ICT du service public fédéral (SPF) Justice a défini le projet Consult Online 2.0 afin de pouvoir procéder aux adaptations nécessaires et prévoir une telle consultation externe. Cependant, une enquête menée de ce côté-là montre que, bien que les ateliers nécessaires soient organisés avec tous les acteurs concernés, il y a actuellement un manque de capacité de gestion de projet pour la réalisation effective du projet. Le recrutement d’un consultant externe pour fournir cette capacité est actuellement bloqué en raison de pénuries budgétaires. Pour ces raisons, il n’est actuellement pas possible de fournir une projection sur le calendrier du projet prévu.