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Question écrite n° 7-704

de Willem-Frederik Schiltz (Open Vld) du 9 novembre 2020

à la vice-première ministre et ministre des Affaires étrangères, des Affaires européennes et du Commerce extérieur, et des Institutions culturelles fédérales

Hong Kong - Nouvelle loi sur la sécurité nationale - Droits de l'homme - Nations unies - Rapporteur spécial - Désignation - ONG et journalistes - Exercice d'activités - Entreprises - Incidence sur les investissements - Informations aux voyageurs

Hong Kong
Chine
droits de l'homme
presse
organisation non gouvernementale
ONU
sanction économique

Chronologie

9/11/2020Envoi question (Fin du délai de réponse: 10/12/2020)
10/12/2020Réponse

Réintroduction de : question écrite 7-630

Question n° 7-704 du 9 novembre 2020 : (Question posée en néerlandais)

Je renvoie à ma question écrite n° 7-624 concernant la situation à Hong Kong. Le Congrès chinois a adopté une vaste «loi sur la sécurité nationale» qui permet de sanctionner plus facilement les manifestants et de restreindre l'autonomie de la ville.

Selon ses détracteurs, cette loi signe la fin du statut spécifique de Hong Kong.

On en sait chaque jour un peu plus sur les soixante-six articles de cette loi dont le contenu a été tenu secret jusqu'à son entrée en vigueur. Elle criminaliste tout acte de:

– sécession: division du pays ;

– subversion: déstabilisation du pouvoir ou de l'autorité du gouvernement central ;

– terrorisme: usage de la violence ou actes d'intimidation envers autrui ;

– collusion avec des forces extérieures ou étrangères.

La loi est entrée en vigueur le 30 juin 2020 à 23 heures, heure locale, soit une heure avant le jour du vingt-troisième anniversaire de la rétrocession de Hong Kong à la Chine.

Les principales dispositions de la nouvelle loi prévoient notamment ce qui suit:

– les crimes de sécession, subversion, terrorisme et entente secrète avec des troupes étrangères sont passibles de la réclusion à perpétuité;

– les entreprises peuvent se voir infliger une amende si elles ont subi une condamnation en vertu de la loi;

– la Chine met en place un bureau de défense de la sécurité nationale à Hong Kong, composé de ses propres agents qui ne relèvent pas de l'autorité du gouvernement local;

– certaines affaires pourront être portées devant la justice chinoise.

Le chef de l'exécutif de Hong Kong, proposé par la Chine, dispose, en vertu de cette nouvelle loi, du pouvoir de nommer de nouveaux juges pour examiner les questions de sécurité nationale.

Il faut noter que c'est Pékin, et non un organe judiciaire ou politique de Hong Kong, qui décide de la manière dont cette loi doit être interprétée. En cas de conflit avec une loi de Hong Kong, c'est la loi chinoise sur la sécurité nationale qui prévaut.

Il n'est plus question non plus de procédure légale régulière. Certains procès se tiendront à huis clos. Les personnes soupçonnées d'enfreindre la loi pourront être entendues et placées sous surveillance.

La surveillance des organisations non gouvernementales et des agences de presse étrangères est elle aussi renforcée. La loi s'appliquera également aux résidents non permanents, c'est-à-dire aux personnes qui ne sont pas originaires de Hong Kong et qui n'y résident pas de manière permanente.

La présente question porte sur une compétence transversale partagée avec les Régions. Les positions prises par le gouvernement flamand et défendues aux Nations unies font l'objet d'une coordination systématique avec les autorités fédérales. Dans les domaines relevant de leurs compétences internes, les entités fédérées contribuent à déterminer la position de la fédération. La politique étrangère de la Belgique est coordonnée au sein de la Conférence interministérielle de la Politique étrangère, où les différents niveaux de pouvoir sont représentés.

À cet égard, je souhaiterais poser les questions suivantes:

1) Êtes-vous favorable à la désignation d'un rapporteur spécial sur Hong Kong auprès des Nations unies, chargé de suivre l'évolution de la situation sur le terrain et d'en rendre compte? Dans l'affirmative, pouvez-vous expliquer votre réponse? Quelles démarches allez-vous entreprendre à cet égard? Dans la négative, quelle en est la raison et quelles autres initiatives estimez-vous opportun d'entreprendre auprès des Nations unies?

2) Avez-vous déjà mené des discussions avec les ONG, les agences de presse et les journalistes opérant à Hong Kong et en Chine afin d'évaluer l'incidence de la nouvelle législation en matière de sécurité sur l'accomplissement de leurs activités? Si non, pour quelle raison? Si oui, pouvez-vous expliquer votre réponse?

3) Avez-vous déjà rencontré le monde entrepreneurial afin d'évaluer l'incidence de la nouvelle loi relative à la sécurité nationale sur les investissements en cours et à venir? Si non, pour quelle raison? Si oui, pouvez-vous préciser quelle incidence cette législation pourrait avoir sur les investissements à Hong Kong et en Chine?

4) Comment réagissez-vous à l'initiative prise récemment par le gouvernement britannique visant à instaurer un régime de sanctions spécifique pour les violations des droits de l'homme, notamment au vu de l'évolution de la situation à Hong Kong?

5) Comment l'Union européenne pourrait-elle contribuer à l'instauration d'un mécanisme global de sanctions en matière de violations des droits de l'homme? Pouvez-vous nous dire avec précision quelle est la position de notre pays à cet égard?

6) Quelles informations les Affaires étrangères fournissent-elles aujourd'hui, eu égard à cette nouvelle loi sur la sécurité, à nos compatriotes qui sont actifs à Hong Kong en tant qu'expatriés et/ou qui voyagent à Hong Kong et en Chine? Pouvez-vous expliquer votre réponse?

Réponse reçue le 10 décembre 2020 :

L’Organisation des Nations Unies (ONU) dispose de rapporteurs spéciaux par pays et thématiques. La création d’un nouveau mandat est basée sur une résolution du Conseil des droits de l’homme de l’ONU. Une telle résolution n’est pas actuellement en discussion, il appartient aux procédures spéciales – thématiques – déjà existantes de suivre cette situation. Et c’est déjà le cas. En juin 2020, une cinquantaine d’experts se sont exprimés sur la situation des droits humains en Chine, y compris sur la situation à Hong Kong. La Belgique n’est actuellement pas membre du Conseil des droits de l’homme. Néanmoins, notre pays aborde régulièrement la situation des droits humains en Chine, y compris la situation à Hong Kong, dans les forums droits humains de l’ONU, tant au niveau national, en coopération avec des pays like minded, qu’au niveau UE. Récemment, dans le cadre de l’Assemblée générale de l’ONU en octobre, une référence explicite aux préoccupations des procédures spéciales de l’ONU a été faite.

En coopération avec la délégation de l’UE et les partenaires européens, notre Consulat général à Hong Kong entretient des contacts réguliers avec les journalistes, l’opposition démocratique et la société civile hongkongaise.

Notre Consulat général à Hong Kong entretient également des contacts réguliers avec la communauté d’affaires belge, la Chambre de commerce belgo-luxembourgeoise et la Chambre de commerce européenne à Hong Kong afin d’effectuer une évaluation de la situation et de l’impact de la nouvelle loi de sécurité nationale. En coopération avec l’Union européenne (UE), une analyse approfondie de la loi est effectuée.

Le monde des affaires (y compris, les entreprises belges) adopte jusqu’à présent une approche prudente. Il va de soi toutefois qu’une remise en cause de l’indépendance de la justice, une des bases du modèle de Hong Kong, pourrait avoir des conséquences sur l’attractivité du territoire pour les entreprises étrangères.

En décembre 2019, les ministres des affaires étrangères de l’UE se sont accordés sur le principe selon lequel l’UE doit s’attaquer aux violations graves des droits humains dans le monde entier en établissant un nouveau régime de sanctions. Ce nouveau régime mondial de sanctions de l’UE en matière de droits humains offrira une plus grande souplesse d’action pour cibler les responsables de graves violations des droits humains partout dans le monde, quel que soit le lieu où elles sont commises et quelle que soit l’identité de ces personnes. Cette initiative est illustrative de l’engagement de l’UE et de ses États membres pour promouvoir et protéger les droits humains dans le monde entier. La Belgique a soutenu la création de cet outil dès le départ.

Les mesures envisagées par le régime de sanctions sont le gel des avoirs et l’interdiction de pénétrer sur le territoire de l’UE. Ce sont des mesures ciblées qui s’inscrivent dans la pratique habituelle des sanctions européennes. Le régime existera à côté des régimes de sanctions géographiques, dont certains ciblent déjà les violations des droits humains.

Après des discussions en profondeur au sein du Conseil de l’UE, ce régime de sanctions a été établi lors du Conseil Affaires étrangères de ce 7 décembre 2020. La Belgique a soutenu l’établissement de ce régime de sanctions et a activement participé aux discussions, afin de créer un régime effectif et fonctionnel.

Les États membres peuvent désormais proposer des personnes ou des entités à sanctionner, étatiques ou non-étatiques. Le régime est a priori ouvert au niveau des catégories de violations des droits humains, pourvu qu’il s’agisse de violations d’une certaine gravité. Les décisions en ce qui concerne les sanctions sont prises à l’unanimité. Ce sont ensuite les États membres qui sont en premier lieu responsables de la mise en œuvre de ces sanctions.

Début juillet, le Service public fédéral (SPF) Affaires étrangères a adapté l’avis de voyage pour Hong Kong en mentionnant une référence à la loi de sécurité nationale. Il est clairement signalé que, depuis le 1er juillet, une loi de sécurité nationale est entrée en vigueur à Hong Kong et qu’il n’est pas exclu que des déclarations dans les forums publics et les médias sociaux, qui violeraient cette loi, entraînent des poursuites. Notre Consulat général à Hong Kong a également des contacts réguliers avec la communauté belge sur place.