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Question écrite n° 5-9125

de Hassan Bousetta (PS) du 24 mai 2013

au vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et des Affaires européennes

L'avenir de l'Europe

stratégie de l'UE
approfondissement de l'Union européenne
intégration européenne
vision de l'Europe

Chronologie

24/5/2013Envoi question
10/10/2013Réponse

Requalification de : demande d'explications 5-3173

Question n° 5-9125 du 24 mai 2013 : (Question posée en français)

Nous en sommes tous conscients que l'année 2014 sera une année électorale importante pour la Belgique.

Cette même année 2014 sera aussi celle où l'Ecosse a prévu d'organiser un référendum portant la question de l'autodétermination (comme le rappelle la Vice-Premier ministre écossaise le 4 février 2013) .

Les Ecossais ont même établi un calendrier précis en cas de victoire du " oui ", sans toutefois connaître avec précision la date fixée pour la tenue de ce référendum.

Certes, en Belgique, nos préoccupations en 2014 seront celles des élections et non d'un référendum mais, on ne pourra pas s'empêcher d'être attentif à ce qui se passera en Ecosse…

En effet, l'enjeu du référendum écossais est un enjeu qui concerne, non seulement la Belgique, mais, plus largement encore, l'Union européenne et la place dans cette dernière des mouvements nationaux indépendantistes.

Une question fondamentale en découle et elle a été posée récemment avec une grande justesse :

" (l)a crise ranime les vieilles querelles économiques et historiques qui opposent les régions riches, à l'identité forte, aux gouvernements centraux. Mais comme l'illustre l'exemple récent de la Catalogne, la question est de savoir si l'UE encourage la stabilité ou les aspirations sécessionnistes " .

Devant les députés européens à Strasbourg ce 6 février 2013, le Président de la République française, François Hollande a déclaré que :

"L'intérêt national est en train de prendre le pas sur l'intérêt européen. (...) S'il est vrai que la crise de la zone euro est désormais largement derrière nous, nous sommes loin d'en avoir tiré toutes les conséquences. Ce qui nous menace n'est plus la défiance des marchés mais c'est celle des peuples."

Le Président de la République française a également plaidé pour "une Europe différenciée qui ne serait pas une Europe à deux vitesses, ni une Europe à la carte."

Selon lui, les Etats doivent décider à deux ou à plusieurs "d'engager des projets" ou "d'harmoniser des politiques", sans forcément attendre le quitus des 27 .

Le débat sur l'avenir de l'Europe est une question centrale ; 2014 est également une année d'échéance électorale au niveau européen.

Comme l'a indiqué Monsieur le Vice-Premier Ministre et Ministre des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et des Affaires européennes à l'occasion des journées diplomatiques :

" (d)epuis le 23 janvier, le débat sur l'avenir de l'Europe a pris un nouveau tournant, eu égard au " speech " du Premier Ministre britannique. Ce dernier veut une Union européenne qui se concentre plus, pour ne pas dire quasi exclusivement, sur le libre-échange et la compétitivité ".

La Belgique n'est pas contre une politique différenciée : les traités y font référence à plusieurs reprises et nous l'appliquons dans certains domaines importants, comme par exemple l'euro. Cependant, une nuance importante doit immédiatement être apportée : avancer ensemble à des rythmes différents dans de nouveaux domaines de compétences est une chose (et c'est autorisé par les traités) mais s'extraire d'une manière sélective de domaines de compétences établis et qui ont fait leur preuve, est tout autre chose et c'est, à nos yeux, contestable.

La Belgique fait résolument le choix du programme " full options ".

Dans ce contexte, Monsieur le Vice-Premier Ministre et Ministre des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et des Affaires européennes , pourrait-il ici mieux exprimer la position du Gouvernement par rapport aux visions françaises et britannique au sujet de l'avenir de l'Europe et comment, le cas échéant, exprimer la contestation contre celui qui tenterait de s'extraire de manière sélective de domaines de compétences établis et qui ont fait leur preuve ; quelles sont les moyens qui pourraient être mis en œuvre à cet égard ?

Réponse reçue le 10 octobre 2013 :

La crise économique et financière favorise les réflexes identitaires. Elle suscite chez les citoyens européens un sentiment de défiance vis-à-vis d’un projet européen qui ne semble pas en mesure de les protéger. L’Union européenne apparaît même, dans l’opinion publique, plus souvent comme une partie du problème que comme une partie de la solution.

Le repli sur soi ne constitue toutefois pas une option. Dans un monde de plus en plus globalisé les États membres de l’Union européenne, même les plus grands, ne font désormais plus le poids. La solution n’est dès lors pas à chercher dans un repli sur soi mais bien au contraire dans un nouvel approfondissement de l’intégration européenne. Un saut qualificatif, j’oserais même dire fédéral, est nécessaire.

Les États membres de la zone euro ont une monnaie unique mais leurs politiques budgétaires et leurs politiques économiques divergent. Ce déséquilibre, que le Conseil européen essaie de corriger, explique largement les difficultés que rencontre actuellement la zone euro. Pour y remédier, nous devons être disposés à approfondir l’intégration, en particulier au sein de l’Union économique et monétaire. Cette évolution ne peut toutefois avoir lieu sans un renforcement parallèle de la légitimité démocratique du processus de décision.

Évidemment, tous ne sont pas disposés à s’engager dans cette voie. L’approfondissement de l’intégration passera nécessairement par la différentiation. Aucun État membre ne peut être obligé de s’engager dans une intégration renforcée mais aucun État membre ne peut non plus entraver la volonté de ses partenaires d’aller de l’avant. Des formes de coopération renforcées existent déjà. On peut penser à l’euro ou à Schengen. L’important est qu’elles ne soient pas exclusives. Tous les États membres qui le souhaitent et qui en en ont la capacité doivent pouvoir s’y rallier, quitte à ce que cela soit à un stade ultérieur.

Cette Europe différenciée n’est évidemment pas une Europe à la carte. Poursuivre l’intégration selon un rythme différencié est autre chose que de se retirer de politiques déjà établies comme paraissait l’envisager le premier ministre Cameron dans son discours du 23 janvier. Ce discours ne constitue toutefois à ce stade qu’une promesse électorale assez vague. Elle n’est assortie d’aucune proposition concrète et ne fait dès lors pas l’objet d’un débat au sein du Conseil de l’Union européenne.

Si cette promesse devait ultérieurement se traduire en propositions concrètes, celles -ci ne pourraient être mises en œuvre que par une révision des traités européens laquelle devrait être préparée par une Convention européenne et être approuvée et ratifiée par l’ensemble des États membres.