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Question écrite n° 5-8657

de Jean-Jacques De Gucht (Open Vld) du 28 mars 2013

au ministre des Finances, chargé de la Fonction publique

Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud (Brics) - Création d'une banque internationale de développement propre - Banque mondiale

notation de crédit
Brésil
Russie
Inde
Chine
Afrique du Sud
solvabilité financière
banque de développement
banque d'investissement
Banque mondiale
nouveau pays industrialisé
pays BRICS

Chronologie

28/3/2013Envoi question
3/6/2013Réponse

Question n° 5-8657 du 28 mars 2013 : (Question posée en néerlandais)

Les ministres des Finances des pays Brics sont convenus de créer leur propre banque internationale de développement. Celle-ci peut constituer une menace pour la Banque mondiale puisqu'elle vise elle aussi à financer de grands projets d'infrastructure.

La création de cette banque semble s'inscrire dans l'aspiration plus large à une plus grande indépendance vis-à-vis de l'Occident. Les Brics souhaitent également constituer leur propre fonds anticrise et leur propre agence de notation.

Mes questions sont les suivantes.

1) Que pensez-vous de la création de cette nouvelle banque internationale d'investissement ?

2) Quelle est votre opinion sur ce signal donné par les économies émergentes pour indiquer leur volonté de se libérer de l'influence de l'Occident ?

3) Cette décision a-t-elle des conséquences géopolitiques ? Les pays Brics verront-ils croître leur influence non seulement économique mais aussi géopolitique ?

4) Serait-il peut-être intéressant que l'Europe crée elle aussi sa propre agence indépendante de notation ? Ce sont en effet d'autres agences de notation qui aujourd'hui se prononcent sur la crédibilité des pays européens.

Réponse reçue le 3 juin 2013 :

1) Les pays BRICS ont annoncé la création d’une banque de développement complémentaire depuis une année déjà. 

Cela peut, d’une part, être considéré comme une évolution positive pour les motifs suivants : 

Pour l’instant, cette évolution ne doit donc pas être considérée comme une menace, mais plutôt comme un complément bienvenu aux moyens financiers destinés à des fins de développement.  

D’autre part, une banque de développement supplémentaire pourrait rendre la structure actuelle du développement encore plus complexe et peut-être même plus opaque. Dès lors, il est important que cette nouvelle banque collabore étroitement avec les partenaires donateurs traditionnels. 

Afin de connaître la taille, nous devons donc encore attendre la structure et les modalités d’exécution de la nouvelle banque de développement BRICS. En la matière, aucun consensus n’a encore été atteint, et cela prendra encore du temps. Les détails relatifs à la structure et aux modalités d’exécution du « currency pool » annoncé et d’une valeur de 100 milliards US dollars (devant s’apparenter à une forme de fonds de crise) font encore défaut. 

Les conditions auxquelles la nouvelle banque de développement accordera ses prêts n’ont pas encore été définies. De même, il n’a pas encore été précisé si elle s’immiscera dans la politique nationale de réforme des pays emprunteurs par le biais de conditions politiques. On peut donc craindre que cette banque ne tienne pas compte des mesures de protection sociale et environnementale applicables dans le cadre de la mise en œuvre des projets d’investissement de la Banque Mondiale et des banques régionales de développement. Ces conditions ou « safeguards », telles qu’elles sont appelées dans le jargon professionnel, englobent des mesures spécifiques qui ont notamment trait au respect des peuples indigènes, à la préservation de l’identité culturelle, à la limitation de la relocalisation arbitraire. 

2) Depuis plusieurs années, les pays émergents souhaitent peser davantage au sein du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque Mondiale. L’augmentation de l’intervention de ces pays est un processus progressif. L’adaptation des formules de répartition et la révision des quotas du FMI sont dès à présent dans une phase avancée, et bientôt débutera le deuxième processus important de négociations afférentes à l’adaptation de la formule de répartition des actions de la Banque Mondiale (BIRD).  Les pays émergents sont maintenant déjà relativement bien représentés au sein du G20 d’où ils exercent leur influence sur les négociations relatives à la nouvelle répartition de la représentation à la Banque Mondiale et au FMI. 

3) À défaut de détails sur les modalités, la structure et la taille, les conséquences géopolitiques sont actuellement difficiles à évaluer. L’impact économique de plusieurs pays BRICS a considérablement augmenté au cours de ces dernières années, ce qui a incontestablement des conséquences géopolitiques. Ainsi, la Chine et l’Inde, par exemple, sont les principaux investisseurs en Afrique subsaharienne, et les dirigeants africains espèrent en tout cas que leur région pourra bénéficier de moyens financiers complémentaires.

4) La Belgique soutient la création d’un bureau de notation européen indépendant. L’accord du Gouvernement dispose en effet que : « Le Gouvernement plaidera au niveau européen pour, notamment :  

Au cours des négociations sur la nouvelle réglementation relative aux bureaux de notation des crédits, la Belgique a plaidé pour la création d’un tel bureau de notation. Bien qu’un consensus ait pu être dégagé au sein du Parlement européen, une opposition plus farouche s’est opposée à cette proposition au sein du Conseil. Les opposants expriment notamment leurs préoccupations sur : 

L’année dernière, le bureau de consultants Roland Berger a tenté de créer un tel bureau de notation avec des fonds privés. Il n’y est toutefois pas parvenu. 

La législation européenne récente relative aux bureaux de notation, plus connue sous le libellé CRA3, dispose que la Commission européenne transmettra, le 31 décembre 2014 au plus tard, au Parlement européen et au Conseil un rapport sur le bien-fondé du développement d’un système européen d’évaluation de la dette souveraine. Sur la base des constats énoncés dans ce rapport, la Commission transmettra au Parlement européen et au Conseil, pour le 31 décembre 2016 au plus tard, un rapport sur le bien-fondé et la faisabilité d’un bureau européen de notation qui évaluera la solvabilité de la dette souverains des États membres et/ou d’une fondation européenne de notation des crédits pour toutes les autres évaluations des crédits.