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Question écrite n° 5-5393

de Bert Anciaux (sp.a) du 1 février 2012

au vice-premier ministre et ministre des Finances et du Développement durable, chargé de la Fonction publique

Banques - Dispositions légales - Réputation

établissement de crédit
solvabilité financière
compagnie d'assurances
banque centrale
moralité de la vie économique
rachat d'entreprise
contrôle bancaire
qualification professionnelle

Chronologie

1/2/2012Envoi question
2/3/2012Réponse

Question n° 5-5393 du 1 février 2012 : (Question posée en néerlandais)

Le mercredi 23 novembre 2011, j'ai interrogé le ministre des Finances de l'époque sur la vente d'Ethias banque à un nouvel acteur au sein du secteur bancaire.

Dans sa réponse le ministre fit entre autres référence à la directive européenne en la matière, transposée en droit belge. On y fait référence au concept de « réputation » du candidat acquéreur d'une activité bancaire existante ainsi qu'à la « réputation » du ou des futurs dirigeants du candidat acquéreur. Donc non seulement le ou les futurs propriétaires doivent jouir d'une bonne réputation mais on se renseignera aussi quant à la réputation des dirigeants de ces futurs propriétaires

Le concept de réputation m'apparaît d'un point de vue juridique comme tout sauf clair. La réputation se fonde essentiellement sur la perception, sur toutes sortes d'informations dont des ragots, sur des assertions et des méthodes douteuses comme les « enquêtes de voisinage ».Il y a de quoi s'interroger sur la clarté, l'objectivité et les possibilités de comparaison. On peut raisonnablement se demander si la législation en vigueur et les exigences européennes et belges sont bien en mesure de donner lieu à un jugement sérieux sur des activités financières complexes.

Dans le cas qui nous occupe, il est clair que le candidat acquéreur d'Ethias a consciemment choisi pour la direction des activités bancaires une personne susceptible de répondre à la condition de réputation .Il me semble que cette réputation ne doit pas tant porter sur l'intelligence sociale et émotionnelle mais plutôt sur l'expérience des activités bancaires et le fait que l'on a par le passé fait autorité et fait preuve d'un comportement irréprochable dans le secteur financier et bancaire.

Mes questions sont les suivantes :

1) Le ministre partage-t-il cette interprétation ? Comment doit-on interpréter le concept de réputation ? Quelles analyses doivent-elles permettre d'évaluer une réputation, quels critères objectifs utilise-t-on ? Qu'exige-t-on de ces personnes ? Une expérience du secteur financier et bancaire est-elle exigée ou souhaitable ?

2) De quelle manière le ministre ou le Parlement peuvent-ils contrôler le respect des dispositions légales et la manière dont un candidat acquéreur ou des dirigeants répondent au critère de réputation ?

Réponse reçue le 2 mars 2012 :

L’évaluation du caractère dit « fit and proper » (« compétent et honorable ») de dirigeants d’établissements de crédit fait partie du contrôle prudentiel que la Banque nationale de Belgique (BNB) exerce sur le secteur des banques et assurances. 

Les dispositions légales pertinentes : 

L’article 18 de la Loi bancaire (Loi du 22 mars 1993 relative au statut et au contrôle des établissements de crédit) stipule que les dirigeants tant exécutifs que non exécutifs d’établissements de crédit doivent posséder l'honorabilité professionnelle et l’expertise nécessaires, ainsi que l'expérience adéquate pour exercer ces fonctions. 

L’article 26bis de la Loi bancaire stipule que l’établissement de crédit informe préalablement la BNB de la proposition de nomination ou de renouvellement de la nomination, ainsi que du non-renouvellement de la nomination ou de la révocation des dirigeants d’un établissement de crédit. 

L’article 26bis stipule par ailleurs qu’en cas de proposition de nomination, les établissements de crédit communiquent à la BNB les informations et documents qui lui permettront de juger si cette personne possède l'honorabilité professionnelle et l'expertise nécessaires ainsi que l'expérience adéquate, telles que visées à l'article 18. 

L’article 26bis stipule enfin que la BNB rend, dans un délai raisonnable, un avis sur toute proposition de nomination ou de renouvellement d'une nomination. Lorsque la proposition de nomination ou de renouvellement d'une nomination concerne un dirigeant exécutif, la nomination ou le renouvellement de la nomination ne peut intervenir que si la BNB a rendu un avis conforme.  

Dans la législation pertinente sur les sociétés d'investissement, les compagnies d’assurance, les holdings financiers et autres établissements soumis à contrôle, il existe chaque fois des dispositions similaires. 

Le contrôle concret de la BNB : 

La responsabilité quant à l’évaluation de l'honorabilité professionnelle et l’expertise nécessaires, ainsi que de l'expérience adéquate relève avant tout de l’établissement de crédit. Avec la personne en question, l’établissement de crédit est responsable de la présentation à la BNB d’un dossier complet et correct. À cet effet, l’établissement doit utiliser les formulaires disponibles sur le site web de la BNB (http://www.nbb.be/doc/cp/fr/ki/circ/pdf/cbfa_2009_20.pdf). 

·         En ce qui concerne le volet « expertise et expérience adéquate », le formulaire pose des questions quant aux études, à l’expérience professionnelle dans le secteur financier, à l’expérience comme dirigeant et autre expérience professionnelle, aux raisons pour lesquelles les expériences antérieures ont pris fin et quelles sont les nouvelles tâches et fonctions recherchées. 

·         En ce qui concerne le volet « honorabilité », le formulaire pose des questions quant à certaines condamnations, faits qui ont été portés à charge, mesure(s) administrative(s) ou disciplinaire(s), licenciement pour fautes professionnelles, sanctions, dettes, arrangements et compromis, faillites, refus de certification de comptes annuels, tous pertinents pour le contrôle financier,  etc., et ce, où cela s’avère justifié, tant au niveau de la personne même qu'au niveau des sociétés dans lesquelles il/elle a été actif. 

·         Dans le cas où il s’agit d’un candidat pour un mandat indépendant, des critères d’évaluation complémentaires sont en vigueur (article 526ter du Code des Sociétés). 

Les documents suivants doivent constituer les annexes du formulaire :

-     un extrait de casier judiciaire récent du candidat dirigeant effectif (ou un document similaire délivré par une autorité étrangère),

-     son curriculum vitae et

-     tout document exigé pour l'intelligibilité des réponses apportées. 

Tant la personne même que les établissements doivent confirmer explicitement l’exactitude et l’exhaustivité des informations fournies. 

La BNB peut également recueillir des informations complémentaires auprès des autorités judiciaires sur toute condamnation ou enquête préliminaire consécutive à une infraction aux lois de contrôle financier. 

La BNB applique aussi régulièrement la technique de l’interview, ce, tant pour les candidats que pour les dirigeants qui quittent (doivent quitter) l’établissement. 

Les personnes qui ne sont pas considérées comme « fit and proper » par la BNB ne peuvent pas exercer de mandat de direction au sein de l’établissement de crédit. 

Les formulaires sont rédigés de manière tellement détaillée que l’évaluation de l’expertise, de l'expérience adéquate et de l’honorabilité peut se faire de manière objective. En outre, au fil des ans, la BNB a développé une casuistique autour de ces évaluations, qui est documentée et actualisée de manière interne et qui permet d’éviter des inconsistances. Il est encore important de mentionner que la BNB agit en étroite concertation dans ce domaine avec la Financial Services and Markets Authority (FSMA), vu les compétences de cette dernière en matière de contrôle de comportement sur les banques et assureurs. 

Par le biais de son rapport annuel, la BNB (comme la CBFA dans le passé) communique sur les développements stratégiques en matière d’évaluations relatives à la notion « fit and proper ». 

Le cadre international : 

Au niveau de la European Banking Authority, des directives détaillées concernant cette notion de « compétent et honorable » sont actuellement élaborées. Les critères relatifs à l’expertise, l’expérience et l’honorabilité y sont élaborés plus en détails. Dès qu’ils seront finalisés, la BNB les mettra en œuvre.