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Question écrite n° 5-11151

de Nele Lijnen (Open Vld) du 19 février 2014

au vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et des Affaires européennes

Corée du Nord - Violation des droits de l'homme - Nations Unies - Rapport - Relations commerciales - Contacts avec la diplomatie belge - Réfugiés - Capacité nucléaire

Corée du Nord
droits de l'homme
crime contre l'humanité
relation commerciale
sanction internationale

Chronologie

19/2/2014Envoi question
15/4/2014Réponse

Question n° 5-11151 du 19 février 2014 : (Question posée en néerlandais)

Cette semaine, les Nations Unies ont présenté un rapport relatif aux violations des droits de l'homme en Corée du Nord (A/HRC/25/63).Ce rapport dresse un tableau épouvantable de la réalité des camps disciplinaires où des personnes sont affamées et torturées. Dans votre réponse à quelques-unes de mes questions (question écrite n° 5-6685) à ce sujet, vous déclarez entre autres : « Il peut probablement être question ici de crimes contre l'humanité. (…) À l'occasion de réunions bilatérales occasionnelles avec des diplomates et fonctionnaires nord-coréens, le Service public fédéral (SPF) Affaires étrangères ne manque pas de mentionner sa préoccupation au sujet de la situation des droits de l'homme. (…) Je prends bonne note de la recommandation de l'honorable sénateur de soulever également directement la politique chinoise de refoulement des réfugiés nord-coréens emprisonnés en Chine ».

Dans votre réponse à la question écrite n° 5-9123, vous condamnez sévèrement le dernier exercice nucléaire. Les sanctions et les relations commerciales sont des méthodes permettant de toucher le régime mais il est une nouvelle fois apparu que ces instruments frappaient surtout les simples citoyens : « Je suis néanmoins, comme vous, d’avis que même des flux commerciaux limités peuvent représenter un moyen d’exercer une pression à l’égard du régime. » (extrait de votre réponse à la question écrite n° 5-9916). Dans votre réponse à la question écrite n° 5-9133, vous écrivez au sujet de ces sanctions : « Parallèlement, notre pays a avec ses partenaires de l’Union européenne (UE) élargi lors du Conseil Affaires étrangères du 18 février 2013 le paquet de mesures restrictives adopté par l’UE. Il est encore trop tôt pour déterminer si ces mesures auront des effets favorables. En tout état de cause, j’estime essentiel le renforcement du régime de sanctions, en ce compris des mécanismes plus stricts pour l’inspection des navires nord-coréens ainsi qu’un meilleur suivi des transactions financières liées aux activités illégales du régime ».

Comme toujours, le régime nord-coréen a réagi en exprimant sa colère, démolissant le rapport qui, selon lui, n'est qu'un tissu de mensonges organisés par le rival de toujours, l'Amérique, et ses alliés.

Mes questions sont les suivantes.

1) Comment évaluez-vous le récent rapport des Nations Unies ? Selon vous, peut-on maintenant parler avec certitude de violations des droits de l'homme ou bien n'en est-il toujours que « probablement » question ? Pensez-vous que le terme de « génocide » soit approprié ? Pour quelle raison ?

2) Pouvez-vous déjà évaluer les effets des sanctions ? Comment évaluez-vous les répercussions sur le régime et sur les simples citoyens ?

3) Pouvez-vous me donner une actualisation des relations commerciales en la Corée du Nord et la Belgique pour l'année 2013 ? À combien d'euros les importations et les exportations se montent-elles ? De quels produits s'agit-il ?

4) La Belgique a-t-elle déjà eu des contacts avec des diplomates nord-coréens ? Quelle est la fréquences de ces rencontres ? Si contacts il y a eu, quelle a été la réaction de la Corée du Nord à vos préoccupations ?

5) Notre pays a-t-il déjà évoqué le problème des réfugiés et de la politique de refoulement ? Comment la Chine a-t-elle réagi ?

6) Percevez-vous des évolutions dans les relations entre la Corée du Nord et la Chine, la Russie et les États-Unis ?

7) Percevez-vous des évolutions dans le dossier des capacités nucléaires (militaires) du pays ? Pouvez-vous développer votre réponse ?

Réponse reçue le 15 avril 2014 :

1. Le rapport de la commission d’enquête sur les droits de l’Homme en Corée du Nord est consternant. Même si la commission d’enquête n’a pas eu accès au territoire nord-coréen, elle a pu faire usage de techniques innovatrices pour rassembler suffisamment de preuves de violations sans nom ont lieu chaque jour dans ce pays, en ce compris des crimes contre l’humanité.

Vous me demandez si le terme « génocide » est ici à sa place. La commission d'enquête considère que, dans bien des cas, les violations des droits de l’Homme qu'elle a pu constater constituent des crimes contre l’humanité. En revanche elle ne mentionne pas l'existence de crimes de génocide. En tout état de cause, c'est exclusivement à une juridiction (nationale ou internationale) qu'il reviendrait de déterminer les éventuelles responsabilités pénales des membres du régime.

2. Nous disposons de trop peu d’éléments pour pouvoir évaluer l’effet des sanctions à l’égard de la Corée du Nord de manière objective. Il est à remarquer que la Chine a mis en œuvre les sanctions qui ont été prises en 2013. La Chine demeure toutefois le principal partenaire commercial de la Corée du Nord.

3. S’agissant de nos échanges commerciaux avec la Corée du Nord, je peux vous informer que les derniers chiffres de notre Agence pour le Commerce extérieur ont trait aux onze premiers mois de l’année 2013. Durant cette période, les échanges de biens entre la Belgique et la Corée du Nord sont demeurés négligeables. Nos exportations vers la Corée du Nord ont représenté seulement 186 000 euros, dont 179.000 relatifs à des produits alimentaires. Les importations en provenance de la Corée du Nord se sont limitées à un niveau équivalent : 186 000 euros, dont plus de 90 % en produits minéraux.

4. Les services du Service public fédéral (SPF) AE à Bruxelles ont une à deux entrevues par an avec des diplomates nord-coréens. La dernière réunion s’est tenue début 2014. Il s’agit le plus souvent de discussions assez constructives, en dépit du fait que les deux parties campent sur leurs positions respectives.

5. Bien que la Belgique ait évoqué ses préoccupations quant à la situation en matière de droits de l’homme en Corée du Nord lors d’entretiens bilatéraux, la problématique spécifique du refoulement de réfugiés nord-coréens par la Chine n’a pas été abordée à l’occasion de contacts avec les autorités chinoises.

6. Avec la récente condamnation du numéro deux du régime nord-coréen Jang Song Thaek, la plupart des experts estiment que Kim Jong Un a maintenant consolidé son emprise sur le pouvoir. Des développements récents suggèrent que la rhétorique agressive du régime nord-coréen a atteint un plafond vers avril 2013. Cependant, l’atmosphère dans la péninsule coréenne demeurera plus que probablement très tendue durant les années à venir car le contexte général demeure inchangé. La Corée du Nord continue à considérer les États-Unis comme son principal ennemi, ainsi que la plus grande menace à l’encontre de la sécurité du pays. En ce qui concerne les relations avec la Chine, on peut en revanche parler d’évolution. La Chine est le principal partenaire de la Corée du Nord. Il est donc significatif que la Chine ait voté en faveur de la Résolution 2094. Ceci peut être considéré comme un signal fort de la part du leadership chinois à l’égard de la posture agressive de la Corée du Nord.

7. Il n’y a pas d’évolution positive à signaler dans le dossier nucléaire. Le 12 février 2013, la Corée du Nord a effectué son troisième test nucléaire, contrevenant en cela à ses obligations internationales. En avril de cette même année, la Corée du Nord a annoncé son intention de redémarrer le réacteur nucléaire de Yongbyon. Le réacteur avait été arrêté en 2007 et partiellement démantelé à la suite d’un accord dans le cadre des « pourparlers à six » (auxquels participent la Corée du Nord, les États-Unis, le Japon, la Chine, la Russie et la Corée du Nord). L’Agence Internationale pour l'Énergie Atomique (AIEA) a entretemps confirmé que des images satellites démontrent que l’on travaille à un redémarrage de Yongbyon. Ce dernier ne peut être confirmé in situ, vu que la Corée du Nord continue à refuser l’accès aux inspecteurs de l’AIEA. Les États-Unis ne sont disposés à accepter une reprise des pourparlers à six, qui ont été suspendus depuis 2009, qu’en cas d’un engagement concret en faveur d’une dénucléarisation de la Corée du Nord.