la crise des réfugiés syriens
Syrie
réfugié
aide humanitaire
26/11/2013 | Envoi question |
14/1/2014 | Réponse |
Requalification de : demande d'explications 5-3952
On évalue à 110.000 le nombre de tués depuis le début de la guerre civile en Syrie. L'impact humanitaire de cette catastrophe se traduit également par un gigantesque flot de réfugiés, tant à l'intérieur du pays que vers les pays voisins.
Sur les 22 millions d'habitants, 7 millions auraient pris la fuite, dont 2 millions auraient quitté le pays. Chaque jour, 5000 réfugiés franchissent les frontières pour rejoindre les pays voisins où de vastes camps de réfugiés se sont déjà constitués. La Jordanie accueillerait à elle seule plus d'un demi-million de réfugiés ayant obtenu la protection du HCR.
Les pays voisins se trouvent dans une situation délicate étant donné l'énorme coût que représente ce flot de réfugiés et la pression sociale et sociétale considérable qu'il engendre.
En attendant, les combats se poursuivent invariablement en Syrie. Dans ma demande d'explications de juillet 2013, vous partagiez ma préoccupation à propos de la situation des réfugiés en Syrie et dans les pays voisins et vous indiquiez que la Belgique avait déjà apporté une contribution de 9 millions d'euros. Entre-temps, le Haut commissariat aux réfugiés des Nations Unies (HCR) a tiré la sonnette d'alarme, estimant que la crise des réfugiés ne suscite pas suffisamment d'intérêt. Les pays donateurs n'ont transféré qu'un tiers de la somme qui est nécessaire.
Voici mes questions au ministre :
1) Comment évaluez-vous les efforts des pays donateurs en faveur des réfugiés syriens, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de ce pays ?
2) Est-il exact que les pays donateurs n'ont versé qu'un tiers de la somme qui est nécessaire ?
3) Les collaborateurs du HCR et les ONG ont-ils accès à tous les camps de réfugiés, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du pays ?
1) a. De manière générale, depuis le début de la crise syrienne, l’UE et ses États membres se sont engagés à financer plus de 1,5 milliard d'euros d’aide humanitaire en Syrie. A ce montant s’ajoutent les engagements pris par le Royaume Uni, l’Allemagne, la France, l’Italie, le Danemark, le Luxembourg, les Pays-Bas et la Communauté européenne lors de la semaine ministérielle de New-York (UNGA) de septembre 2013 qui se montent à 431 millions USD supplémentaires.
Le RRP (« Regional Refugee Plan »), géré par le HCR et focalisé sur la problématique des réfugiés, a quant à lui été financé à hauteur de 1,4 milliard USD (soit près de la moitié des financements demandé dans le plan).
Si ces financements restent insuffisants au regard de l’ampleur de la crise syrienne, il est important de souligner que la Syrie n’est pas la seule crise humanitaire à laquelle la communauté internationale doive faire face (à titre d’exemple, on peut citer le Sahel, la RDC, ou encore la Corne de l’Afrique,…). Au vu de la crise économique globale et des financements importants préalablement octroyés à des fins humanitaires en 2012, la réaction de la communauté internationale en 2013 est à la hauteur des moyens financiers disponibles. Ceci étant dit, cet effort financier doit être maintenu en 2014 si l’on veut éviter l’effondrement total de la Syrie et une déstabilisation régionale importante.
b. L’action de la communauté internationale peut et doit cependant être renforcée sur le plan politique. Sur ce plan, la Belgique a d’ailleurs été à l’origine de plusieurs initiatives de plaidoyer visant à remettre le respect des principes humanitaires, le Droit International Humanitaire, la protection des civils et des missions médicales en Syrie au cœur de l’agenda international. J’ai notamment initié la publication fin septembre d’une carte blanche appelant à l’accès aux soins de santé en Syrie, qui a été signée par 27 ministres des Affaires Étrangères et par la Commissaire européenne à l’aide humanitaire, et qui a été publiée dans différents médias nationaux et internationaux.
Le 12 juillet dernier, nous avons également hébergé une des réunions des principaux donateurs pour la Syrie organisée par OCHA. Ces réunions visent à identifier les défis opérationnels et les priorités les plus urgentes rencontrées par les humanitaires sur le terrain. OCHA souhaite également que ces rencontres puissent redonner de l'énergie à l'action humanitaire tant au niveau de l'appui politique que des financements nécessaires à l’action humanitaire.
Récemment, lors du « Segment de Haut Niveau sur la solidarité et le partage de la charge avec les pays accueillant des réfugiés syriens » organisé par le HCR le 30 septembre dernier, le Haut-Commissaire Antonio Guterres est parvenu à mobiliser 87 pays membres du Comité Exécutif de l’UNHCR ainsi que de nombreuses agences de développement et humanitaires autour d’une déclaration de solidarité en faveur des réfugiés syriens, des pays et des communautés qui les accueillent. Ce résultat est positif mais doit être renforcé.
c. Enfin, il me semble important de souligner que la Belgique a accueilli 895 réfugiés syriens lors des huit premiers mois de 2013. Eu égard à ces statistiques, la Belgique est le quatrième État d’accueil de réfugiés syriens en Europe. J’invite dès lors les autres pays à prendre exemple sur nous.
2) En ce qui concerne le financement de l’action humanitaire :
Comme je viens de le souligner, les financements de la crise syrienne restent effectivement insuffisants au vu de l’ampleur des besoins et ce malgré les efforts importants de la communauté internationale.
a. En 2013 sur les 5 milliards d’engagements annoncés pour le financement de la crise syrienne (tous canaux humanitaires confondus), 3,6 milliards USD ont été effectivement payé et 1,4 doivent encore l’être.
b. En ce qui concerne les 2 plans UN en particulier :
Le « Syria Regional Response Plan » (SHARP) exige un financement à hauteur de 1,4 milliards de dollars en 2013. Les financements se chiffrent en octobre 2013 à 777 millions USD, soit 54 % des besoins annoncés. Selon le Financial Track Service d’OCHA, tous les engagements ont été tenus.
Le « Regional Refugee Plan » (RRP) est lui financé à hauteur de 49 %, soit 1,47 milliard USD (sur les 2,98 milliard USD demandés). Les besoins – sur une base géographique - ont été financés comme suit : Egypte 22 %, Iraq 36 %, Jordanie 53 %, Liban 44 % et Turquie 28 %. Selon le Financial Track Service d’OCHA, tous les engagements ont été tenus à l’exception de 100 000 USD.
Ces deux plans sont actuellement mis à jour et leur version actualisée sera publiée en décembre 2013.
c. En outre, la Jordanie a reçu une aide de l’UE via son Mécanisme de Protection Civile (l’Italie a offert une structure médicale préfabriquée et le Luxembourg 2 ambulances équipées). La DG ECHO s’est engagée à couvrir les coûts de cette structure médicale pendant un an.
3) En ce qui concerne la problématique de l’accès (aux camps mais également aux personnes déplacées et aux communautés locales) :
Le HCR a un accès total à tous les camps de réfugiés en provenance de Syrie dans les pays avoisinants la Syrie. Il faut cependant noter que la très grande majorité de ces réfugiés ne sont pas hébergés dans des camps mais logent dans les villes, les villages ou encore, dans des localités rurales.
En Syrie, les restrictions d’accès importantes, imposées aux humanitaires par les différentes parties au conflit, limitent fortement les capacités des organisations humanitaires de délivrer leur aide aux personnes dans le besoin. Les déplacements continus des populations au sein du pays ainsi que le nombre important de civils dans les zones assiégées complexifient encore la problématique. En septembre, les agences des NU et les ONG ont réitéré l’urgence de délivrer l’aide humanitaire à plus d’un demi-million de personnes dans les environs ruraux de Damas, inaccessibles depuis plusieurs mois. De même, on estime que près de 385 000 personnes vivant dans le Nord d’Alep, dans les zones rurales du gouvernorat de Homs et dans certaines parties de la ville de Homs sont assiégées et inaccessibles depuis plusieurs semaines.
Au Liban, il n’y a pas de camps de réfugiés « officiels » gérés par le HCR. Les syriens ont soit été accueillis dans des communautés locales ou ont dû se débrouiller seuls et se sont regroupés en camps informels.
En Jordanie, le HCR est en charge de la gestion des camps. Il doit encore y faire face à des retards d’enregistrement ou de renouvellement des certificats d’enregistrement même si la situation s’est améliorée au cours de ces dernières semaines. Cette situation résulte en un manque d’accès aux services de base (santé, eau…) pour de nombreuses familles.
En Turquie, le HCR travaille de manière rapprochée avec les autorités nationales afin de les soutenir dans les activités qui y sont exécutées (ex : l’enregistrement). Par ailleurs, le gouvernement est en train de construire 2 camps additionnels dans les provinces du Sud, ce qui aboutira à 23 camps accueillant des réfugiés syriens dans le pays.