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Question écrite n° 5-10040

de Bert Anciaux (sp.a) du 8 octobre 2013

à la ministre de la Justice

Sites web - Accès - Blocage de noms de domaine - Commission des jeux de hasard - Fournisseurs

jeu de hasard
site internet
censure
adresse internet
fournisseur d'accès

Chronologie

8/10/2013Envoi question
19/12/2013Requalification
6/1/2014Réponse

Requalifiée en : demande d'explications 5-4615

Question n° 5-10040 du 8 octobre 2013 : (Question posée en néerlandais)

En réponse à une question (5-9486) concernant le blocage de certains sites internet, la ministre indique que 83 noms de domaine sont bloqués, dont 67 pour la Commission des jeux de hasard.

J'ai entre-temps reçu des e-mails de personnes qui jugent ces chiffres erronés. Le site web de la Commission des jeux de hasard indique 80 sites web qui étaient bloqués avant le 26 juillet 2013 (date à laquelle la ministre a répondu à ma question). Je présume qu'il faut y ajouter quelques dizaines de sites de pornographie infantile et de chargements illégaux. Les services de la ministre ne semblent donc pas connaître le nombre exact de sites web qu'ils bloquent. Bizarre.

Un test a en outre révélé que certains sites web figurant sur la liste noire de la Commission des jeux de hasard étaient toujours accessibles. Il existe en outre des différences selon le fournisseur d'internet. Il semblerait enfin qu'il soit assez facile de contourner un blocage DNS. Il suffit d'installer un autre serveur DNS (ces serveurs assurent la traduction d'adresses IP en nom de site web). Les autorités semblent donc à nouveau totalement dépassées en matière de technologies de l'information et de sécurisation numérique.

D'où les questions suivantes :

1) Comment la ministre explique-t-elle qu'elle fournisse au parlement des chiffres inexacts quant au nombre de sites web bloqués ? Existe-t-il une liste centrale systématiquement tenue à jour ? Peut-elle garantir la précision de ses services ?

2) Comment explique-t-elle que certains sites web figurant sur la liste noire de la Commission des jeux de hasard soient toujours accessibles ? Comment se fait-il que certains sites web soient-accessibles en fonction du fournisseur d'internet choisi ?

3) Des spécialistes m'informent qu'il est assez facile de contourner les blocages DNS. La ministre en est-elle consciente ? Connaît-elle d'autres méthodes de blocage plus efficaces et pourquoi ne sont-elles pas utilisées ?

4) Selon la ministre, la publication d'une liste noire de sites web n'est pas jugée opportune en raison d'un éventuel effet pervers, à savoir la publication d'un catalogue de sites illégaux. Cela pose effectivement problème, surtout s'ils peuvent être contournés aussi facilement. Cette argumentation me semble acceptable, mais pourquoi la Commission des jeux de hasard choisit-elle alors expressément de publier une liste de sites web ? Qui a accès à la liste noire ? Ne faut-il pas prévoir un contrôle pour éviter d'éventuels risques de censure ou d'arbitraire ?

5) La ministre comprend-elle que je ressente une absence de politique dans le chef des autorités ? La ministre et ses services prennent-elles ces matières suffisamment au sérieux ? Plus précisément, d'une part, prennent-ils assez de mesures pour protéger le public contre les sites réellement nuisibles (sites illégaux de paris en ligne et pornographie infantile) et, d'autre part, garantissent-ils une transparence et un contrôle suffisants pour éviter la censure et/ou l'arbitraire ?

Réponse reçue le 6 janvier 2014 :

1. Les chiffres que je vous ai transmis dans la question 5-9486 sont ceux qui m’ont été donnés par le Secrétariat de la Commission des jeux de hasard, qui est responsable de la gestion de la liste noire des sites illégaux de jeux de hasard.

Au 13 décembre 2013, 84 sites de jeux figurent sur cette liste noire. Le nombre de site illégaux repris dans la liste évolue et la Commission des jeux de hasard évalue l’opportunité d’y inclure un site illégal lors de ses réunions mensuelles.

2. Les sites repris sur la liste noire sont ceux qui ne respectent pas la législation sur les jeux de hasard. Comme précisé à la première question, la Commission des jeux de hasard décide chaque mois des sites qui doivent figurer ou non sur cette liste. La liste est ensuite publiée au Moniteur belge et sur le site internet de la Commission des jeux de hasard. La Commission avertit également les opérateurs par courrier. Une lettre recommandée est également envoyée aux hébergeurs pour qu’ils fassent le nécessaire et bloquent les sites en cause. De ce fait, entre le moment où le site est placé sur la liste noire par la Commission des jeux de hasard et le blocage effectif du site, un certain délai peut s’écouler.

Outre les quatre grands hébergeurs internet, il existe une série de petits hébergeurs dont les sites ne sont pas spécifiquement ciblés sur les jeux de hasard. L’activité de jeux est accessoire. Ce type d’hébergeurs n’est pas la cible de la Commission des jeux de hasard.

3. Certaines questions se posent sur l’application de l’article 39bis CIC, principalement dans le cadre du blocage de sites internet hébergés à l’étranger. D’autres pistes d’actions pourraient être envisagées mais elles posent certains problèmes.

Par exemple, un partenariat avec les sociétés de gestion des noms de domaines (eurid.eu / dns.be) pourrait être envisagé lorsque le nom de domaine incriminé est en .eu ou en .be.

Cette action sort cependant du cadre légal et des règles que ces sociétés établissent dans leurs relations qui les lient à leurs clients. Cette option pourrait constituer une alternative techniquement plus simple que de passer par le système mis en place auprès des opérateurs.

Néanmoins, cette technique ne limiterait donc pas le champ d’application de la mesure au seul territoire de la Belgique ce qui pourrait éventuellement soulever des problèmes si les faits incriminés ne le sont pas à l’étranger.

Un autre exemple serait d’utiliser la loi du 11 mars 2003 sur certains aspects juridiques des services de la société de l’information visés à l’article 77 de la Constitution et l’arrêté royal du 7 mai 2003 fixant les modalités selon lesquelles la libre circulation des services de la société de l’information peut être restreinte. Cette loi et son arrêté d’exécution transpose une partie de la directive « Commerce électronique » 2000/31/CE et prévoit la procédure administrative à suivre, sans préjudice de la procédure judiciaire, lorsque les intérêts suivants sont mis en péril : l’ordre public, la protection de la santé publique, la sécurité publique, la protection des consommateurs.

Selon cette loi, « les autorités désignées peuvent prendre des mesures spécifiques restreignant la libre circulation d’un service de la société de l’information fourni par un prestataire établi dans un autre État membre de l’Union européenne. ». Mais la procédure mise en place est lourde et de ce fait peu – voire quasiment jamais – utilisée.

4. La publication de la liste noire sur le site de la Commission des jeux de hasard vise notamment à informer les joueurs quant aux sites illégaux. Les hébergeurs internet sont informés de l’illégalité d’un site via une lettre recommandée comme déjà précisé. Mais il n’est pas possible d’informer individuellement chaque joueur. Il fallait dès lors trouver un moyen de les informer.

En outre, par l’instauration de l’incrimination du participant, il est essentiel que ce dernier sache que le site auquel il accède est interdit. Il est dès lors important que celui qui se rend sur un site de jeux de hasard en ligne soit informé clairement de la légalité ou non du site qu’il visite. L’information du joueur doit être garantie.

Pour satisfaire à cette exigence, la Commission des jeux de hasard utilise d’une part, un système de liste noire en publiant chaque mois sur son site Internet une liste de sites de jeux illégaux et d’autre part, une liste de sites de jeux légaux c’est-à-dire proposés par des opérateurs titulaires d’une licence.

5. Dans le plan national de sécurité, le gouvernement a fixé les phénomènes de sécurité qui doivent être abordés en priorité. Bien que la criminalité informatique y figure en soi comme un phénomène prioritaire, le blocage de sites internet résulte d'une réquisition du procureur du Roi.

Plus particulièrement en matière de jeux de hasard, les futurs arrêtés royaux relatifs aux jeux offerts par internet devraient permettre de clarifier les choses.

Il faudra déterminer les modalités de surveillance et de contrôle des jeux de hasard exploités sur des sites web autorisés. La liste des jeux pouvant être exploités par les titulaires d’une licence supplémentaire sera également établie. Les conditions auxquelles les jeux peuvent être offerts sur Internet seront aussi déterminées. Comme prévu par la loi, ces conditions porteront notamment sur l'enregistrement et l'identification du joueur, le contrôle de l'âge, les jeux offerts, les règles de jeu, le mode de paiement et le mode de distribution des prix.