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Question écrite n° 4-6505

de Paul Wille (Open Vld) du 15 janvier 2010

au vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères et des Réformes institutionnelles

Guantánamo - Absence de progrès de la fermeture programmée - Méthodes contraires à la réglementation de l'Union européenne (UE) - Mesures

Cuba
États-Unis
prisonnier de guerre
établissement pénitentiaire
terrorisme
droits de l'homme
torture
traitement cruel et dégradant

Chronologie

15/1/2010Envoi question (Fin du délai de réponse: 18/2/2010)
15/3/2010Réponse

Question n° 4-6505 du 15 janvier 2010 : (Question posée en néerlandais)

Le 22 janvier 2009, le président américain Obama a signé les ordres de fermeture du camp de prisionniers de Guantánamo Bay avant la fin de l'année, de révision des procès militaires de personnes soupçonnées de terrorisme et d'interdiction de méthodes brutales d'interrogatoire, dont le simulacre de noyade. Aujourd'hui, alors que plusieurs mois se sont écoulés, le déplacement des détenus de Guantánamo se fait à un rythme lent et le Congrès américain a refusé de financer la fermeture de Guantánamo en raison de l'absence de stratégie globale. Le gouvernement américain réexamine 229 dossiers de personnes soupçonnées de terrorisme mais continue à autoriser des procès militaires et à se déclarer favorable à la détention illimitée d'étrangers qui représentent à ses yeux une menace pour la sécurité publique et nationale ; dans le même temps, ce sont des fonctionnaires qui décident si une personne jugée et reconnue innocente peut ou non être remise en liberté selon qu'elle constitue, d'après eux, un risque pour l'avenir.

Le gouvernement a protégé les agents de la Central Intelligence Agency (CIA) contre des enquêtes pénales portant sur leur participation à des actes de torture. Les seules enquêtes actuellement en cours portent l'une sur la destruction par la CIA d'enregistrements vidéo de simulacres de noyade et autres actes cruels au cours d'interrogatoires et l'autre, dirigée par le bureau d'éthique du ministère de la Justice, sur les anciens fonctionnaires du ministère qui ont rédigé des avis juridiques justifiant les méthodes violentes d'interrogatoire.

Par ailleurs, les médias font état d'un rapport qu'aurait rédigé l'actuel directeur de la CIA au sujet des écoutes qu'a réalisées l'agence nationale américaine de sécurité et qui confirment la mise en oeuvre par de précédents gouvernements de certains programmes d'observation – qui ne nécessitaient pas d'habilitation particulière et n'ont été soumis à aucun contrôle démocratique ou juridique –, aujourd'hui terminés. Ces programmes ne concernaient pas des activités intérieures de renseignement et, dans la majorité des cas, n'avaient aucun rapport avec le terrorisme, ce qui veut dire qu'ils ont des implications potentiellement importantes pour l'Union européenne (UE) et ses États membres.

Dans ce contexte, je souhaiterais une réponse aux questions suivantes.

1. Que pense le ministre de l'absence de progrès de la fermeture programmée de Guantánamo ?

2. Que fera-t-il pour faire connaître les inquiétudes de la Belgique et de l'Union européenne quant à la non-conformité de procès militaires au droit international et aux droits de l'homme ?

3. Défendra-t-il le point de vue de l'Union européenne considérant que la torture est intolérable et que des enquêtes pénales doivent être menées ?

4. Se joindra-t-il à ses collègues européens pour réclamer aux autorités américaines que la lumière soit faite de toute urgence sur les programmes d'écoute secrètement mis en oeuvre sous le gouvernement Bush et analysera-t-il l'influence de ceux-ci sur les citoyens de l'Union européenne et leur conformité avec la législation européenne ?

5. Est-il vrai que le Congrès américain refuse de financer la fermeture de Guantánamo en raison de l'absence de stratégie globale ? Comment ce processus se déroule-il sur le plan politique ?

6. Combien de dossiers impliquant des personnes soupçonnées de terrorisme subsiste-t-il aux États-Unis ?

7. Quel régime est actuellement appliqué pour la détention d'étrangers ? Qui statue sur leur détention ?

Réponse reçue le 15 mars 2010 :

1. Je ne peux que regretter que la fermeture de Guantanamo se fasse bien moins rapidement qu’initialement annoncé.

2. La Belgique et l’Union européenne (UE) ont toujours plaidé pour une fermeture rapide de ce centre et ont condamné les violations des droits de l’homme et du droit international commis dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Je suis persuadé que le Président Obama fait tout ce qui est en son pouvoir pour lutter contre le terrorisme dans le respect des droits de l’homme. Je constate également que les mêmes efforts sont effectués concernant le système judiciaire. La Cour suprême américaine a ainsi statué en 2008 que tous les détenus de Guantanamo pouvaient contester juridiquement leur détention. Plusieurs détenus l’ont fait depuis lors et une majorité a obtenu gain de cause.

3. La pratique de la torture constitue une violation majeure des instruments internationaux pour les droits de l’homme et doit faire l’objet de poursuites pénales. L’UE accorde une grande importance à cette problématique et a, dans le cadre de sa politique extérieure, adopté des lignes directrices pour veiller à lutter contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Dans le cadre de la candidature belge pour le Conseil des droits de l’homme des Nations unies notre pays a rendu public des engagements dans le domaine des droits de l’homme. La Belgique s’est entre autres déclarée prête à continuer à œuvrer pour que la lutte contre le terrorisme sur le plan international soit en conformité avec le respect des droits de l’homme.

Le respect des droits de l’homme dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, ainsi que la situation des prisonniers de Guantanamo, sont deux questions qui sont régulièrement abordées dans le cadre du dialogue biannuel sur les droits de l’homme que l’UE entretient avec les États-Unis. Le dernier dialogue a eu lieu ce 29 janvier à Washington et le respect des droits de l’homme dans la lutte contre le terrorisme y a été abordé. Les États-Unis nous ont assuré que leur politique à cet égard est à présent totalement conforme au droit international et qu’il n’existe plus de techniques poussées d’interrogations.

4. Les messages sur les programmes d’écoute de citoyens américains sont compris dans le cadre de la lutte contre le terrorisme aux États-Unis. J’ai compris que l’on désirait, dans ce pays, soumettre ces pratiques à un contrôle démocratique plus poussé.

5. Le financement de la fermeture de Guantanamo a en effet une première fois été rejeté par le Congrès américain. Il semble que la Maison Blanche veuille utiliser des prisons aux Etats-Unis pour y transférer des détenus de Guantanamo. L'identification et l'utilisation de ces prisons nécessite toutefois une négociation avec les nombreuses parties concernées.

6-7. Le fait de savoir combien de personnes sont actuellement soupçonnées de terrorisme aux Etats-Unis, ainsi que la manière dont la détention des étrangers est réglée et jugée, ressort de la compétence exclusive de Washington. Dès lors, je ne dispose pas d’un aperçu clair.