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Question écrite n° 4-2365

de Louis Ide (Indépendant) du 12 janvier 2009

à la vice-première ministre et ministre des Affaires sociales et de la Santé publique

Résumé clinique minimum (RCM) - Données relatives à la mortalité - Répartition régionale - Répartition entre les hôpitaux

données médicales
établissement hospitalier
mortalité
statistique officielle
répartition géographique

Chronologie

12/1/2009Envoi question (Fin du délai de réponse: 12/2/2009)
11/2/2009Réponse

Réintroduction de : question écrite 4-2155

Question n° 4-2365 du 12 janvier 2009 : (Question posée en néerlandais)

Le Résumé clinique minimum (RCM) est un système d'enregistrement dans les hôpitaux, obligatoire depuis 1990. Il s'agit d'un résumé standardisé sur la base du dossier médical du patient. Diverses données y sont reprises. C'est très utile pour améliorer la qualité des soins de santé dans les hôpitaux.

Grâce au système du RCM, on peut également contrôler la mortalité qui constitue aussi un indicateur, d'ailleurs très important, en matière de qualité.

Dans ce contexte, je souhaiterais que la ministre réponde aux questions suivantes.

1. Peut-elle me communiquer les chiffres de mortalité, par le biais des RCM dans les hôpitaux en Belgique, pour les années 2005, 2006 et 2007 ?

2. Peut-elle ventiler ces chiffres par région (Flandre,Wallonie, Bruxelles)?

3. Peut-elle ventiler ces chiffres par hôpital?

Réponse reçue le 11 février 2009 :

La mortalité intrahospitalière ou taux de létalité est, un indicateur de qualité important et le RCM permet en effet, de fournir des taux de mortalité pour les années 2005 et 2006.

La question qui se pose est de savoir quels taux calculer et ce qu’ils signifient. Des chiffres bruts, qui ne tiennent pas compte d’une série de déterminants de mortalité, ne renferment aucune information utile concernant la qualité des soins. En effet, la mortalité résulte non seulement de la qualité des soins, mais dans une large mesure aussi de la gravité de la maladie, de la comorbidité existante, de l’âge et du sexe, ainsi que de l’observance thérapeutique. Le statut socio-économique (SSE) joue à cet égard un rôle très important.

Le RCM contient un certain nombre de données portant sur le diagnostic, le traitement, la comorbidité et la gravité de la maladie, mais pas sur le SSE.

Pour déterminer la gravité de la maladie, des systèmes ont été développés, parmi lesquels le Severity of Illness (SOI) et le Risk of Mortality (ROM) dont dispose notre RCM. Des études montrent toutefois que ces systèmes ne sont pas parfaits et que les estimations du risque de mortalité diffèrent fortement en fonction du système utilisé (1). De plus, les SOI et ROM ne font pour l’heure aucune distinction entre les complications qui se manifestent avant et durant l’hospitalisation. Une étude récente a par ailleurs démontré que cette distinction n’était pas sans importance (2). Si l’on ne fait pas cette distinction, on court le risque d’une surcorrection et les cas de complications post-hospitalisation dues à des manquements qualitatifs au niveau des soins seront, à tort, considérés comme des cas de gravité élevée. Une étude sur l’infarctus aigu du myocarde en atteste à suffisance (3). Pour déterminer correctement la gravité d’une maladie, nous avons toutefois besoin impérativement de données cliniques que l’on ne retrouve pas dans le RCM, comme par exemple la fraction d’éjection du patient avant la réalisation d’un pontage (4). Les SOI et ROM ne donnent que des valeurs approximatives (« proxies »). Si l’on sait (1) que le RCM peut aussi servir au financement et qu’une SOI élevée donne également lieu à un remboursement plus important, et (2) qu’un certain nombre d’hôpitaux tentent, avec plus ou moins d’ingéniosité, d’augmenter le SOI de certains cas (5), il devient alors évident que la comparaison d’hôpitaux basée sur le RCM ne peut pas se faire sans étude approfondie.

À ma connaissance, un taux global de létalité n’est pas d’usage. On calcule en revanche un « Hospital Standardised Mortality Ratio » (HSMR), qui se base sur ces affections à l’origine de 80 % des cas de mortalité intrahospitalière, dans le but de comparer les hôpitaux. Cet indicateur fait cependant l’objet de vives discussions en ce sens qu’il ne présente qu’une faible corrélation avec d’autres mesures de qualité des soins, ce surtout s’il se base exclusivement sur des données administratives comme notre RCM (4).

Au niveau international, un certain nombre de taux de létalité intrahospitalière par cause spécifique sont présentés comme des indicateurs de qualité.

Ce type de données chiffrées pose un problème diagnostique : l’ICD-9-CM ne donne que rarement une définition précise, ce qui prête à manipulation si l’on sait que le RCM est utilisé à des fins de comparaison (6).

Permettez-moi dès lors de me limiter à l’exemple de l’infarctus aigu du myocarde (IAM) pour indiquer à quel point il est difficile de procéder à une comparaison correcte entre hôpitaux, pays ou régions. J’ai déjà fait part ci-dessus des dangers liés à l’utilisation des SOI et ROM pour corriger la mortalité en termes de gravité de la maladie. Or, d’autres facteurs jouent également un rôle important. La mortalité IAM se manifeste pour l’essentiel au cours des premières heures qui suivent l’infarctus. En cas de comparaison, il est alors important de savoir combien de temps s’est écoulé entre l’apparition des symptômes, l’appel des secours et l’arrivée à l’hôpital, des données qui ne sont liées que de manière très limitée à la qualité des soins dispensés par l’hôpital. Le type d’infarctus (STEMI ou NON-STEMI) - également un problème diagnostique (7) - joue lui aussi un rôle, en plus des possibilités thérapeutiques de l’hôpital (possibilité ou non d’une intervention percutanée au niveau des artères coronaires). Cette liste non exhaustive de codéterminants de la mortalité montre à quel point il est difficile de comparer correctement des hôpitaux, des pays et des régions.

Les données administratives telles que le RCM permettent en revanche de réaliser un premier examen (8) à partir duquel une recherche plus approfondie peut être entamée en vue d’une amélioration de la qualité des soins (9;10). Précisément parce qu’il s’agit de résultats d’examen, il serait inconvenant (les hôpitaux offrant des soins de qualité seraient qualifiés de moins bons) et dangereux de rendre ces données provisoires publiques. Si l’on venait à le faire, cela conduirait, en effet, à ce que les hôpitaux modifient leur politique en matière d’admission, en ne traitant pas les patients les plus malades, lesquels ayant besoin d’un plus grand nombre de soins (11;12) ou en manipulant leur enregistrement (13).

C’est pourquoi l’administration a développé un plan concernant les indicateurs. Ce plan comporte les éléments suivants :

- calcul d’indicateurs (cliniques et non cliniques) à partir de banques de données administratives fédérales (RCM – FINHOSTA – Bilan Social – Statistiques Hospitalières annuelles) ;

- rédaction d’un rapport avec, pour chaque indicateur, les définitions, la méthodologie suivie et les résultats ;

- élaboration d’une fiche globale pour chaque hôpital (selon le principe du Balanced Score Card); cette fiche comprend, pour chaque indicateur, la valeur propre à l’institution de soins.

En avril 2006, un rapport (version pilote) sur 11 indicateurs (dont 5 indicateurs cliniques) et leurs résultats individuels ont été envoyés aux hôpitaux. Ensuite, en juin 2006, une première journée sur la performance dans les hôpitaux belges était organisée, journée à laquelle tous les hôpitaux ont participé.

Une commission d’accompagnement pour la performance dans les hôpitaux a été mise en place cette même année. Sa mission consiste à formuler des propositions pour sensibiliser les médecins et les directions des hôpitaux à la qualité des soins en rétrocédant des résultats d’indicateurs. A cette fin, des groupes de travail ont été mis en place pour proposer quels indicateurs doivent être repris dans le set d’indicateurs.

En avril 2008, un deuxième rapport avec 33 indicateurs (dont 7 indicateurs cliniques) a été finalisé. Ce « Feedback Multidimensionnel pour les Hôpitaux » a été envoyé aux hôpitaux ainsi que leurs résultats individuels.

En 2009, un nouveau “Feedback Multidimensionnel pour les Hôpitaux » sera rédigé avec les mêmes indicateurs mais actualisé avec les données 2005-2007. En fin d’année, un symposium sera organisé sur la manière dont les indicateurs peuvent être utilisés afin d’améliorer la performance et son suivi dans le temps.

Bibliographie

  1. Iezzoni LI, Ash AS, Shwartz M, Daley J, Hughes JS, Mackiernan YD. Predicting who dies depends on how severity is measured: implications for evaluating patient outcomes. Ann Intern Med 1995;123(10):763-70.

  2. Zhan C, Elixhauser A, Friedman B, Houchens R, Chiang YP. Modifying DRG-PPS to include only diagnoses present on admission: financial implications and challenges. Med Care 2007 Apr;45(4):288-91.

  3. Romano PS, Chan BK. Risk-adjusting acute myocardial infarction mortality: are APR- DRGs the right tool? Health Serv Res 2000;34(7):1469-89.

  4. Shojania KG, Forster AJ. Hospital mortality: when failure is not a good measure of success. CMAJ 2008 Jul 15;179(2):153-7.

  5. Aelvoet W. Ambtelijke registraties voor een evaluatief gezondheidsbeleid. Aspecten van beleidsonderbouwing op landelijk, intermediair en lokaal niveau Universiteit Antwerpen, Faculteit Geneeskunde, ESOC; 2008.

  6. Jones RH. In Search of the Optimal Surgical Mortality. Circulation 1989;79(Suppl I):I-132-I-136.

  7. Salomaa V, Koukkunen H, Ketonen M, Immonen-Raiha P, Karja-Koskenkari P, Mustonen J, et al. A new definition for myocardial infarction: what difference does it make? Eur Heart J 2005 Sep;26(17):1719-25.

  8. Zhan C, Miller MR. Administrative data based patient safety research: a critical review. Qual Saf Health Care 2003 Dec;12 Suppl 2:ii58-ii63.

  9. Reason J. Human error: models and management. BMJ 2000 Mar 18;320(7237):768-70.

  10. Liang BA. A system of medical error disclosure. Qual Saf Health Care 2002 Mar;11(1):64-8.

  11. Rosenberg AL, Hofer TP, Strachan C, Watts CM, Hayward RA. Accepting critically ill transfer patients: adverse effect on a referral center's outcome and benchmark measures. Ann Intern Med 2003;138(11):882-90.

  12. Califf RM, Jollis JG, Peterson ED. Operator-Specific Outcomes A Call to Professional Responsibility. Circulation 1996;93:403-6.

  13. Hofer TP, Hayward RA, Greenfield S, Wagner EH, Kaplan SH, Manning WG. The unreliability of individual physician "report cards" for assessing the costs and quality of care of a chronic disease. JAMA 1999;281(22):2098-105.