5-2253/1

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Sénat de Belgique

SESSION DE 2012-2013

13 SEPTEMBRE 2013


Proposition de loi modifiant le Code pénal en vue de protéger les enfants contre les cyberprédateurs

(Déposée par M. Gérard Deprez et consorts)


DÉVELOPPEMENTS


La pénétration d'Internet et l'utilisation de technologies de communication continuent de connaître une croissance considérable dans le monde et offrent à chaque citoyen des possibilités appréciables et innombrables. Cependant, les risques pour les enfants et l'abus de ces technologies continuent à exister et, en raison de l'évolution des technologies et des comportements sociétaux, de nouveaux risques et types d'abus apparaissent. Le défi pour ceux qui assument la responsabilité de la sécurité des mineurs consiste à comprendre ces changements à temps et à élaborer des stratégies de lutte à mesure que les nouveaux risques apparaissent. Protéger les enfants des contenus et des comportements illicites et préjudiciables en ligne doit donc être une préoccupation constante, car en perpétuelle évolution.

L'utilisation, par les mineurs, des technologies de l'information et de la communication

En 2010, le réseau scientifique européen a réalisé l'enquête EU Kids Online (1) , financée par le programme de la Commission européenne Safer Internet. Plus de 25 000 enfants de neuf à seize ans, utilisateurs d'Internet, ainsi que leurs parents, ont été interrogé dans vingt-cinq pays européens. Les résultats révèlent que l'usage d'internet fait désormais bel et bien partie de la vie quotidienne des enfants: 93 % des 9-16 ans vont en ligne au moins une fois par semaine et 60 % tous les jours ou presque tous les jours; 59 % des 9-16 ans ont un profil sur un réseau social dont 26 % ont un profil public accessible à tout le monde. Les enfants vont également en ligne de plus en plus jeunes: l'áge moyen au premier accès est de sept ans au Danemark et en Suède, et de huit ans dans plusieurs autres pays d'Europe du Nord. Il ressort également de cette enquête que les accès à Internet se diversifient: si 87 % l'utilise à la maison (87 %), 49 % le font dans leur chambre à coucher et 33 % via un téléphone mobile ou un autre appareil portable.

Les enfants sont donc des utilisateurs actifs des technologies en ligne. Bien souvent, ils sont les premiers à les assimiler et les utiliser, et ce phénomène s'amplifie. Néanmoins, comme le soulignent le Parlement européen et le Conseil de l'Union européenne: « Bien que les enfants et les adolescents soient des utilisateurs habiles des technologies en ligne et soient conscients aussi bien des risques que des moyens d'y faire face, ils n'ont pas tous la maturité qui leur permettrait d'évaluer les situations dans lesquelles ils peuvent se trouver ni les conséquences possibles de leurs décisions. D'autre part, il est rare qu'ils partagent leurs expériences d'activité en ligne avec leurs parents ou éducateurs, et ce n'est qu'en dernier ressort qu'ils se tournent vers eux pour obtenir de l'aide. » (2)

L'environnement en ligne offre aux enfants de nombreuses possibilités d'interactivité et de participation. Cela signifie aussi qu'ils doivent poser des choix qui ne s'offriraient pas à eux normalement et qui, dans bien des cas, concernent leur propre sécurité. De plus, les risques dans l'environnement en ligne et hors ligne convergent, et même si la plupart des enfants et des adolescents sont conscients des risques et des précautions à prendre, ils ne les prennent pas nécessairement ou n'agissent pas nécessairement de la manière la plus sûre lorsqu'ils communiquent dans l'environnement en ligne. Or, force est de constater que certaines personnes utilisent Internet dans le seul but d'exploiter, de manipuler ou d'agresser des enfants.

D'après les observations du Parlement européen et le Conseil de l'Union européenne: « Les risques les plus graves auxquels sont exposés les enfants en rapport avec les technologies en ligne sont les situations où un dommage direct leur est causé en tant que victimes d'abus sexuels, dont attestent des photographies, des films ou des fichiers audio qui sont ensuite transmis en ligne (matériel pédopornographique), ou celles où des personnes les contactent et cherchent à obtenir leur amitié (par un processus de manipulation psychologique, dénommé « grooming » en anglais) en vue d'en abuser sexuellement, ou encore celles où ils sont victimes de harcèlement en ligne (harcèlementélectronique ou « cyberbullying »). » (3)

D'après les chiffres fournis par la Commission européenne, quatre enfants sur dix signalent avoir été exposés à des risques en ligne, tels que le harcèlement en ligne, des contenus personnels promouvant l'anorexie ou l'automutilation, ou encore, le détournement de leurs données personnelles (4) .

L'enquête EU Kids Online fournit également des données intéressantes sur les risques encourus par les enfants en ligne. D'après cette enquête, la communication en ligne avec des inconnus serait le risque le plus répandu. Ce serait le cas de 30 % des internautes de 9-16 ans qui disent avoir déjà communiqué sur Internet avec quelqu'un qu'il ne connaissait pas dans la vie réelle. Il est néanmoins beaucoup plus rare que les enfants rencontrent ces contacts. 9 % des enfants disent avoir rencontré en face à face une personne connue en ligne l'année précédant l'enquête. Bien que les 9-10 ans soient les moins nombreux à avoir pratiqué ce genre de rencontre, ils seraient les plus nombreux à avoir été perturbés par la rencontre (31 % de ceux qui ont pratiqué ce type de rencontre hors ligne). Le second risque le plus répandu, d'après EU Kids Online, serait l'exposition à des messages dangereux mis en ligne par des internautes. Il concerne 21 % des 11-16 ans: messages de haine (12 %), proanorexiques (10 %), appels à l'automutilation (7 %), à la prise de drogues (7 %) ou au suicide (5 %). Enfin, 15 % des 11-16 ans disent avoir reçu des images ou des messages sexuels dans des échanges « peer to peer » et presque un quart de ceux qui ont reçu ce type de message se disent avoir été perturbés, dont la moitié « assez » ou « beaucoup ».

L'enquête d'EU Kids Online révèle également que plus de la moitié des parents ignore que leurs enfants sont exposés à un contenu dangereux, échangent des messages sexuels ou rencontrent dans la vie réelle des personnes rencontrées en ligne. Bien que la plupart des parents pensent qu'il est important de parler à leurs enfants de leurs activités en ligne (70 %) et tentent de nouer un dialogue, l'usage par les parents de dispositifs techniques de contrôle est relativement faible. Peu connaissent l'existence d'outils destinés à réduire les risques: à peine un peu plus du quart (28 %) des parents bloquent ou filtrent certains sites ou regardent l'historique des sites consultés par leurs enfants (24 %).

Les institutions européennes et les projets financés par l'UE cherchent de plus en plus à prévenir ces risques et à protéger la sécurité des enfants en ligne. Dans la décision instituant un programme communautaire visant à protéger les enfants lors de l'utilisation de l'Internet et d'autres technologies de communication, le Parlement européen et le Conseil de l'Union européenne insistent sur la nécessité d'agir dans le domaine des contenus préjudiciables pour les enfants et des contenus illicites, mais également sur les comportements en ligne. En effet, « ce même besoin d'agir existe à l'égard des enfants victimes de comportements préjudiciables et illicites conduisant à des dommages corporels et psychologiques, et à l'égard des enfants entraînés à imiter ces comportements et qui occasionnent ainsi des dommages à eux-mêmes et à d'autres. Il convient de déployer des efforts particuliers pour étudier les solutions permettant d'éviter les propositions délibérées d'adultes, via les technologies de l'information et des communications, en vue de rencontrer des enfants pour se livrer à des abus sexuels ou à d'autres infractions sexuelles » (5) .

Cyberprédation ou leurre d'un enfant par un moyen de télécommunication

La cyberprédation est l'utilisation d'Internet afin de communiquer en ligne avec des jeunes d'áge mineur et de les manipuler dans un but criminel.

Les cyberprédateurs utilisent plusieurs ruses pour entrer en contact avec les mineurs sur Internet. Ils se créent de fausses identités pour participer aux discussions sur les forums et les réseaux sociaux. Ces prédateurs considèrent le fait de chercher et traquer un enfant comme une chasse et un jeu. Ils consacrent beaucoup de temps, voire plusieurs mois, à briser les barrières d'un enfant pour qu'il se sente suffisamment à l'aise pour partager des renseignements personnels. Ce processus de manipulation prépare l'enfant à devenir une victime. Les cyberprédateurs développent une relation avec l'enfant en comblant ses besoins émotifs ou l'attirent tout simplement en lui offrant des cadeaux. Plusieurs enfants tristes, seuls ou qui s'ennuient se tourneront vers Internet pour remplir ce vide émotionnel. Ces enfants sont donc tout particulièrement vulnérables à la « manipulation ». Les renseignements personnels ne se limitent pas uniquement à l'essentiel comme le nom, l'adresse et le numéro de téléphone. Ils comprennent tout renseignement qui permet au cyberprédateur de connaître l'enfant plus spécifiquement: le nom de son école, de ses amis ou ses loisirs particuliers. Les cyberprédateurs sont également habiles pour reproduire émotionnellement ce qu'ils voient dans l'enfant. Cet « effet miroir » crée une illusion de camaraderie qui participe à briser les barrières du danger de l'étranger. Par exemple, si un enfant se sent seul, le cyberprédateur reflétera cette émotion et essayera de combler ce vide en mentionnant à l'enfant qu'il le comprend et sait ce que c'est de se sentir seul, puis aimerait devenir son ami. Il imitera le langage émotif de l'enfant et se fera l'écho des émotions qu'il perçoit dans l'espoir de vaincre ses inhibitions. Plusieurs adultes ne comprennent pas le vocabulaire Internet et, par conséquent, ne savent pas ce que disent leurs enfants en ligne. Le cyberprédateur lui utilise le langage en ligne des enfants et des adolescents. L'utilisation de ce langage crée un lien entre les personnes et engendre une familiarité désinhibitrice. Les cyberprédateurs travaillent donc méthodiquement en prenant leur temps pour gagner la confiance de leur victime. Ils séduisent peu à peu l'enfant en lui témoignant beaucoup d'affection. Confiant et sous emprise, l'enfant se laissera plus facilement convaincre par celui avec qui il discute depuis des mois, celui qu'il considère comme son confident et ami (6) .

D'après Sylvia Breger, criminologue française spécialiste de la cybercriminalité et de la protection des enfants sur internet: « Ces cyberagresseurs sont beaucoup trop malins pour s'attaquer à l'enfant immédiatement. Ils prennent leur temps, six mois, un an, pour tenter de toucher leur cible. ». Leur stratégie consiste à « s'introduire dans le psychisme de l'enfant. Ils connaissent sur le bout des doigts la culture ado, les clips, la musique qu'ils écoutent ... Ils conversent en SMS, n'ont donc aucun de mal à se faire passer pour un pair. » (7)

L'exemple du Code criminel canadien et les investigations menées aux États-Unis et au Canada

En 2002, le Code criminel du Canada a été modifié de façon à inclure de nouvelles infractions qui contribueraient à lutter contre le leurre de personnes de moins de dix-huit ans.

Au sens du Code criminel du Canada, se rend donc coupable de leurre une personne qui communique par un moyen de télécommunication avec une personne qu'elle croit être un enfant dans le but de commettre une infraction contre cet enfant (agression sexuelle, contacts sexuels, incitation à des contacts sexuels, exhibitionnisme, inceste, pornographie juvénile, bestialité, proxénétisme, enlèvement, ...).

En vertu de cette nouvelle modification législative, les services de police canadiens ont commencé à recueillir et à déclarer les affaires de leurre d'enfants. En 2009, afin de mesurer l'ampleur du phénomène, une étude a été réalisée par l'Organisme national de statistique du Canada, sur base des premières données de leurre dont disposait la police. Celle-ci révèle qu'entre 2006 et 2007, la police a reçu, au total, 464 signalements sur des affaires de leurre d'enfants. Les hommes de moins de trente-cinq ans représentaient 58 % des auteurs présumés de leurre d'enfants (8) .

En août 2007, la centrale canadienne de signalement des cas d'exploitation sexuelle d'enfants sur Internet (Cyberaide.ca) a dévoilé un premier rapport sur le leurre faisant état de l'étendue du problème, notamment le profil des enfants victimes et du suspect, ainsi que des techniques utilisées par les abuseurs pour manipuler les enfants et les soumettre. En septembre 2012, la centrale canadienne dévoila un deuxième rapport (9) . Cette seconde étude porte sur 264 signalements de leurre par internet venant du public et transmis à Cyberaide.ca, de septembre 2007 à juin 2011. Ces signalements venaient parfois des victimes elles-mêmes ou de membres de leur famille. Une bonne part de ces signalements (63 %) était accompagnée d'historiques de conversation qui ont permis aux chercheurs d'analyser les interactions des cyberprédateurs et les techniques qu'ils utilisent pour leurrer des enfants sur Internet.

Les premiers résultats révèlent ce qui suit: 85,9 % des victimes identifiées étaient des filles. L'áge médian des victimes était de 13 ans. L'áge médian des suspects était de 25 ans. Le signalement a été fait par un membre de la famille dans 50 % des cas et par la victime elle-même dans 31 % de ces cas. Dans 24 % des cas, la jeune personne avait reçu des menaces venant du suspect, qui la menaçait le plus souvent de distribuer des images d'elle en sa possession. Dans 93,4 % des cas, le suspect a demandé expressément des images ou des propos ont été relevés concernant des images préalablement transmises. Dans 30 % de ces derniers cas, il est fait mention que la jeune personne avait transmis des images au suspect. Dans 38,6 % des cas, la messagerie instantanée était indiquée comme étant la technologie utilisée par le suspect pour leurrer la victime. Dans 35,5 % des cas, soit le suspect avait transmis des images à caractère sexuel de lui-même à la victime, soit il lui avait demandé d'allumer sa webcam pour ensuite lui montrer une image sexualisée de lui-même.

Enfin, parmi les 166 historiques de conversation analysés, beaucoup commençaient par des invitations répétées (parfois jusqu'à 30 fois) de la part du suspect demandant à la jeune personne d'allumer sa webcam et se poursuivaient avec des messages demandant une rencontre en personne.

Cette précieuse récolte de données a permis de mieux comprendre la vulnérabilité des jeunes, leur résilience et les risques auxquels ils sont confrontés ainsi que le comportement des abuseurs qui cherchent à les exploiter.

En 2009, Le « Crime Against Children Research Center » de l'Université du New Hampshire aux USA a publié les résultats de son étude (10) sur le profil des cyberprédateurs sexuels arrêtés par la police aux États-Unis en 2006 (la première étude avait été menée en 2001). L'étude révèle que la plupart des prédateurs sont des hommes (99 %) blancs (84 %) qui n'ont jamais été arrêtés auparavant pour des crimes contre des mineurs (90 % pour ceux impliquant des victimes mineures et 97 % pour ceux arrêtés par des policiers prétendant être des mineurs). Un changement notable, souligné par cette étude, concerne le rajeunissement des suspects, dont 40 % sont ágés de 18 à 25 ans contre 23 % en 2001. Cette étude révèle également qu'entre 2000 et 2006, le nombre de prédateurs arrêtés qui avaient sollicité des mineurs en ligne afin de les convaincre d'avoir des rapports sexuels a augmenté de 21 %, alors que le nombre de prédateurs arrêtés après avoir contacté des policiers se faisant passer pour des mineurs a augmenté de 381 %.

Ces exemples démontrent combien l'adoption, aux États-Unis comme au Canada, d'une législation répressive en la matière a permis aux organisations policières nord-américaines d'êtres très actives, et mêmes proactives, dans ce domaine.

Objectif de la présente proposition de loi

L'objectif de la présente proposition de loi est de protéger les enfants des risques liés à l'utilisation des technologies en ligne. Le dispositif proposé vise particulièrement la lutte contre la cyberprédation ou le leurre d'enfant sur internet par l'introduction au Code pénal d'une incrimination spécifique.

L'article 23 de la Convention (11) du Conseil de l'Europe sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels, adoptée le 25 octobre 2007, impose aux États membres d'ériger en infraction pénale la sollicitation en ligne d'enfants à des fins sexuelles (online grooming). L'article 24 de la même convention impose aux États membres d'ériger en infraction la tentative ou la complicité de grooming.

L'article 6 de la directive (12) 2011/93/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 demande, elle aussi, aux États membres de prendre des mesures nécessaires pour que soit punissable la sollicitation en ligne d'enfants à des fins sexuelles. L'article 7 de la même directive demande aux États membres de prendre des mesures nécessaires pour que soit punissable l'incitation, la participation et la tentative de grooming.

Cependant, l'incrimination prévue dans les textes européens concerne spécifiquement le fait de proposer une rencontre à un mineur, lorsque cette proposition a été suivie d'actes matériels conduisant à la dite rencontre. Ce qui est donc visé par les textes européens, ce sont les faits qui établissent clairement que le prédateur va passer à l'acte.

Pour les auteurs de la présente proposition, l'adulte qui communique en ligne avec un mineur ou une personne qu'il croit être mineur (13) dans le but de commettre ultérieurement un acte criminel ou délictuel à son égard doit pouvoir être punissable, que ces contacts débouchent sur une proposition de rencontre ou non. C'est le comportement de prédateur durant la phase de leurre et de manipulation et l'abus de la vulnérabilité des enfants que ce nouveau dispositif vise à incriminer. De plus, de nombreux crimes et délits (14) peuvent être commis sans qu'aucune rencontre concrète n'ait jamais lieu entre l'enfant et l'adulte qui le manipule.

En outre, bien que les textes européens insistent plus particulièrement sur la sollicitation d'enfant à des fins d'abus sexuels et que dans la pratique, l'intention criminelle du cyberprédateur soit souvent de commettre un abus sexuel à l'égard du mineur, la cyberprédation peut, comme nous le montre l'exemple canadien, avoir différentes finalités. En effet, le cyberprédateur peut manipuler sa proie en vue d'une agression sexuelle, d'exhibitionnisme, de pornographie juvénile, de proxénétisme mais également en vue d'un enlèvement, d'agression physique, d'incitation à la haine, de recrutement terroriste, de recrutement sectaire, de détournement de données personnelles, ... C'est pourquoi, les auteurs de la présente proposition de loi souhaitent l'adoption d'une disposition plus large qui recouvre toutes ces possibilités. Le contenu des conversations en ligne, des messages et de tous les échanges effectués par le biais des technologies de la communication permettront généralement d'établir l'intention délictueuse ou criminelle du cyprédateur.

Gérard DEPREZ.
Christine DEFRAIGNE.
Jacques BROTCHI.

PROPOSITION DE LOI


Article 1er

La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.

Art. 2

Danse le Titre VIII, chapitre III, du Code pénal, il est insérée une section VIII intitulée « Du leurre de mineurs sur internet ou cyberprédation à des fins criminelles ou délictuelles ».

Art. 3

Dans la section VIII insérée par l'article 2, il est inséré un article 433bis/1 rédigé comme suit:

« Art. 433bis/1. L'adulte qui communique par le biais des technologies de l'information et de la communication avec un mineur avéré ou supposé, en dissimulant ou en mentant sur son identité, son áge, sa qualité, en insistant sur la discrétion à observer, en offrant ou en faisant miroiter un cadeau ou un avantage quelconque ou par tout autre stratagème, en vue de faciliter la perpétration à son égard d'un crime ou délit, sera puni d'un emprisonnement de trois mois à cinq ans.

Le fait pour l'adulte concerné de croire que son interlocuteur était majeur n'est élusif de l'infraction que si l'intéressé prouve qu'il a pris les mesures raisonnables pour s'assurer de la majorité effective de son interlocuteur.

La peine sera doublée si les faits visés à l'alinéa premier constituent une activité habituelle. »

25 juin 2013.

Gérard DEPREZ.
Christine DEFRAIGNE.
Jacques BROTCHI.

(1) Haddon, Leslie et Livingstone, Sonia, EU Kids Online: national perspectives. EU Kids Online, The London School of Economics and Political Science, London, UK.

(2) Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil instituant un programme communautaire pluriannuel visant à protéger les enfants lors de l'utilisation de l'Internet et d'autres technologies de communication, 27 février 2008, page 2.

(3) Ibidem.

(4) Communiqué de presse de la Commission européenne: « Stratégie numérique: vers un internet plus sûr et plus intéressant pour les enfants et les ados », 2 mai 2012, IP/12/445.

(5) Décision n° 1351/2008/CE du Parlement européen et du Conseil instituant un programme communautaire pluriannuel visant à protéger les enfants lors de l'utilisation de l'Internet et d'autres technologies de communication, 16 décembre 2008.

(6) Conférence sur les nouvelles technologies de l'Internet et de ses dangers: « Les impacts du Web 2.0 et des médias sociaux pour les adolescents en 2011 », Club Optimiste de Farnham en collaboration avec la Sûreté du Québec, avril 2011.

(7) Actualité Juridique Pénale, « Cybercriminalité: la protection des mineurs sur internet », Editions Dalloz, mars 2009, page 112.

(8) Jennifer Loughlin et Andrea Taylor-Butts, « Leurre d'enfants par Internet », Statistique Canada Juristat, mars 2009, vol. 29, n° 1.

(9) Cyberaide.ca, « Statistiques sur le leurre et le processus de conditionnement en ligne », septembre 2012.

(10) Janis Wolak, David Finkelhor, Kimberly Mitchell, Trends in arrests of « online predators », Crime Against Children Research Center, University of New Hampshire.

(11) Article 23 de la Convention du Conseil de l'Europe sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels, 2007 (Convention de Lanzarote, CETS n° 201): « Chaque Partie prend les mesures législatives ou autres nécessaires pour ériger en infraction pénale le fait pour un adulte de proposer intentionnellement, par le biais des technologies de communication et d'information, une rencontre à un enfant n'ayant pas atteint l'áge fixé en application de l'article 18, paragraphe 2, dans le but de commettre à son encontre une infraction établie conformément aux articles 18, paragraphe 1.a, ou 20, paragraphe 1.a, lorsque cette proposition a été suivie d'actes matériels conduisant à ladite rencontre. »

(12) L'article 6 de la directive 2011/93/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 relative à la lutte contre les abus sexuels et l'exploitation sexuelle des enfants, ainsi que la pédopornographie et remplaçant la décision-cadre 2004/68/JAI du Conseil: « Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les comportements intentionnels suivants soient punissables: le fait pour un adulte de proposer, au moyen des technologies de l'information et de la communication, une rencontre à un enfant qui n'a pas atteint la majorité sexuelle, dans le but decommettre l'une des infractions visées à l'article 3, paragraphe 4, et à l'article 5, paragraphe 6, lorsque cette proposition a été suivie d'actes matériels conduisant à ladite rencontre, est passible d'une peine maximale d'au moins un an d'emprisonnement. 2. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que soit punissable toute tentative de commettre, au moyen des technologies de l'information et de la communication, les infractions visées à l'article 5, paragraphes 2 et 3, de la part d'un adulte sollicitant un enfant qui n'a pas atteint la majorité sexuelle afin qu'il lui fournisse de la pédopornographie le représentant. »

(13) Ceci afin de permettre le recours aux techniques spéciales d'enquête.

(14) Prenons par exemple le détournement de données personnelles, ou encore la transmission d'images pédopornographiques.