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18 JUILLET 2013
I. INTRODUCTION
Le projet de loi portant le Code ferroviaire, qui relève de la procédure bicamérale facultative, a été déposé le 4 juin 2013 à la Chambre des représentants (doc. Chambre, nº 53-2855/01).
Il a été adopté le 16 juillet 2013 par l'assemblée plénière de la Chambre des représentants
et a été évoqué le même jour par le Sénat.
Le projet de loi insérant un titre 7/1 dans la loi du (...) portant le Code ferroviaire, en ce qui concerne les matières visées à l'article 77 de la Constitution, dont le contenu est intrinsèquement lié à celui du projet de loi à l'examen et qui relève de la procédure bicamérale obligatoire, a été adopté le même jour par la Chambre des représentants (doc. Chambre, nº 53-2856/01).
La commission des Finances et des Affaires économiques a examiné les deux projets de loi les 17 et 18 juillet 2013.
II. EXPOSÉ INTRODUCTIF DE M. MELCHIOR WATHELET, SECRÉTAIRE D'ÉTAT À L'ENVIRONNEMENT, À L'ÉNERGIE ET À LA MOBILITÉ, ADJOINT À LA MINISTRE DE L'INTÉRIEUR, ET SECRÉTAIRE D'ÉTAT AUX RÉFORMES INSTITUTIONNELLES, ADJOINT AU PREMIER MINISTRE
Depuis l'entrée en vigueur de la directive 91/440/CEE du 29 juillet 1991 relative au développement de chemins de fer communautaires, modifiée par les directives 2001/12/CE, 2004/51/CE et 2007/58/CE, l'État belge a été amené à transposer la directive européenne 95/18/CE modifiée par la directive 2001/13/CE et par la directive 2004/49/CE, la directive 2001/14/CE, modifiée par la directive 2004/49/CE et par la directive 2007/58/CE, la directive 2007/59/CE, la directive 2008/57/CE, modifiée par la directive 2011/18/CE.
De nombreuses directives émanant de l'Europe, regroupées en paquets ferroviaires successifs, s'inscrivent dans le cadre de la création d'un espace ferroviaire unique européen.
Pour exécuter la transposition de ces directives, la Belgique a adopté diverses législations et réglementations (à savoir principalement la loi du 4 décembre 2006, modifiée par l'arrêté royal du 5 mai 2009, par la loi du 26 janvier 2010 et par la loi du 14 avril 2011; la loi du 19 décembre 2006, modifiée par la loi du 22 décembre 2008, par la loi du 6 mai 2009, par la loi du 23 décembre 2009, par la loi du 26 janvier 2010, par la loi du 29 décembre 2010, par la loi du 14 avril 2011, par la loi du 26 octobre 2011 et par la loi du 28 décembre 2012; la loi du 26 janvier 2010 modifiée par l'arrêté royal du 13 novembre 2011).
Ces multiples transpositions en droit belge des directives européennes en matière de sécurité ferroviaire, d'interopérabilité et d'utilisation de l'infrastructure ferroviaire ont eu pour conséquence que le cadre réglementaire actuel peut parfois manquer de clarté.
Les présents projets visent dès lors à codifier les lois suivantes:
— la loi du 4 décembre 2006 relative à l'utilisation de l'infrastructure ferroviaire;
— la loi du 19 décembre 2006 relative à la sécurité d'exploitation ferroviaire;
— la loi du 26 janvier 2010 relative à l'interopérabilité du système ferroviaire au sein de la Communauté européenne.
L'objectif général consiste à créer un ensemble législatif cohérent caractérisé par une lisibilité accrue. En effet, les trois lois concernées contiennent notamment bon nombre de références croisées qui peuvent rendre fastidieuse la compréhension de la législation ferroviaire.
Par ailleurs, étant donné que les dispositions législatives en question s'intègrent dans un cadre commun d'ouverture progressive à la concurrence du secteur ferroviaire, il convient d'assurer l'harmonisation de la terminologie usitée et des champs d'application.
Si certaines dispositions doivent également faire l'objet de clarification, voire être corrigées vu la présence d'erreurs de pure forme détectées au fil du temps, d'autres modifications substantielles doivent être mises en place au sein de ces législations ferroviaires suite notamment à des questions et remarques soulevées par la Commission européenne. Il est en effet nécessaire de veiller à ce que l'État belge soit parfaitement en conformité avec ses obligations européennes. Quelques modifications de fond ont également été rendues indispensables suite à l'apparition de problèmes concrets rencontrés dans le cadre de l'application des principes législatifs en matière ferroviaire. Il était dès lors opportun d'y remédier compte tenu de l'expérience acquise depuis l'adoption des lois visées par le présent projet.
Il a été décidé aussi de revoir l'articulation entre les différentes dispositions afin de mieux assurer la lisibilité et la compréhension des textes. Cet exercice de codification permet également de préparer l'avenir en facilitant la transposition de la directive 2012/34/UE établissant un espace ferroviaire unique européen visant à refondre le premier paquet ferroviaire (publiée au JOCE en décembre 2012), et que les États membres doivent transposer d'ici le mois de juin 2015.
Les principales modifications
1. Séparation comptable
Un article est inséré dans la réglementation ferroviaire belge pour mettre celle-ci en conformité avec le prescrit de la directive 91/440/CEE et, notamment, l'obligation de tenir des comptabilités séparées pour les activités relatives à l'exploitation de services de transport et pour les activités relatives à la gestion de l'infrastructure ferroviaire, ainsi que l'obligation de tenir des comptabilités séparées pour les redevances versées pour la prestation de services au titre des missions de service public.
2. Utilisation de l'infrastructure ferroviaire
Le Code ferroviaire consacre le droit d'accès à l'infrastructure ferroviaire pour les associations touristiques effectuant des circuits touristiques avec du matériel historique et reconnues à cette fin.
Le pouvoir du Roi est étendu à la fixation des montants minimum pour la couverture de la responsabilité civile dans le cadre de l'octroi de la licence d'entreprise ferroviaire.
Le principe de confidentialité des informations transmises par les candidats au gestionnaire de l'infrastructure est confirmé.
Si un candidat qui n'est pas une entreprise ferroviaire demande une capacité d'infrastructure, il se peut qu'il soit contraint de faire appel à une entreprise ferroviaire pour utiliser la capacité demandée, ce qui ne peut alors pas être considéré comme un transfert.
Les missions de l'organe de contrôle, généralement appelé « régulateur ferroviaire », sont étendues: il appartient au régulateur ferroviaire de vérifier si les entreprises ferroviaires et le gestionnaire de l'infrastructure respectent l'obligation de tenir des comptes séparés pour les activités relatives à la prestation de services de transport et pour les activités relatives à la gestion de l'infrastructure ferroviaire, ainsi que l'obligation de tenir des comptes séparés pour les redevances versées pour les services fournis dans le cadre des missions de service public.
3. Sécurité d'exploitation de l'infrastructure ferroviaire
En cas de risques pour la sécurité ferroviaire, le gestionnaire de l'infrastructure doit prendre de nouvelles mesures s'il constate que le matériel utilisé ou le personnel de sécurité comportent un risque pour la sécurité de la circulation ferroviaire. Ces mesures sont notamment la suspension préventive de fonctions de sécurité, par exemple celles d'un conducteur de train, ou l'interdiction de mise en circulation du matériel concerné.
Les missions de l'autorité de sécurité ont été étendues au domaine du transport ferroviaire de marchandises dangereuses et à la táche de veiller à la bonne application de la réglementation de certains aspects des conditions de travail des travailleurs mobiles effectuant des services d'interopérabilité transfrontalière dans le secteur ferroviaire; en l'occurrence, il s'agit essentiellement du respect du temps de conduite maximum pour les conducteurs de train.
Dans le cadre de l'exercice de ses nombreuses missions, l'autorité de contrôle peut mener les inspections et les investigations nécessaires pour l'accomplissement de ses táches.
L'autorité de sécurité dispose généralement d'un délai de quatre mois pour valider ses décisions. Dans certains cas particuliers, le Roi est habilité à réduire ces délais. Il est également prévu explicitement que les missions de l'autorité de sécurité ne peuvent être transférées ou confiées à un gestionnaire de l'infrastructure ou à une entreprise ferroviaire. Cela étant, l'autorité de sécurité peut faire appel à l'expertise de n'importe quelle instance dont l'assistance technique lui paraît utile.
La description du contenu du rapport annuel de l'autorité de sécurité est complétée par le rapport sur l'application des méthodes de sécurité communes à l'analyse et l'évaluation des risques.
De nouvelles dispositions sont proposées pour préciser et poursuivre l'élaboration des règles de transmission d'informations en cas d'accident grave. Ces dispositions imposent au gestionnaire de l'infrastructure, aux entreprises ferroviaires et, le cas échéant, à l'autorité de sécurité, de transmettre immédiatement les informations à l'organisme d'enquête lorsqu'un de leurs employés constate un événement défini dans une annexe. Le contenu de cette annexe est nécessaire pour permettre à l'organisme d'enquête d'exercer correctement ses missions. Ce dernier peut d'ailleurs aussi choisir, sur la base de ce contenu, d'enquêter sur des accidents autres que des accidents graves. Il est donc indispensable que l'organisme dispose de plus d'informations.
La condition qui consiste à obliger l'entreprise ferroviaire concernée à disposer d'une couverture suffisante en matière de responsabilité civile pour obtenir un certificat de sécurité partie B n'est en effet pas conforme au droit européen. Instaurer une exigence en matière d'assurance en ce qui concerne une certification qui doit être obtenue dans chaque État membre au sein duquel l'entreprise ferroviaire veut exercer des activités revient à contourner le principe de la licence européenne et du marché unique. C'est la raison pour laquelle l'exigence d'une couverture suffisante en matière de responsabilité civile dans le cadre de la procédure d'obtention du certificat partie B a été supprimée.
L'organisme d'enquête conserve toutefois la possibilité d'infliger des amendes administratives aux entreprises ferroviaires et au gestionnaire de l'infrastructure en cas d'obstruction dans la réalisation de ses táches. Cette disposition reprend les mêmes principes que ceux qui s'appliquent lorsque l'autorité de sécurité inflige des amendes administratives.
Désormais, les recommandations relatives à la sécurité devront, le cas échéant, être transmises aux autorités belges ou aux autres États membres.
III. DISCUSSION GÉNÉRALE
Mme Maes explique que l'on parle d'instaurer une carte de légitimation sans définir concrètement la manière dont cette carte sera établie, ce pouvoir étant manifestement attribué au Roi. A-t-on pensé à s'inspirer d'exemples de cartes existantes dans d'autres services tels que la police ?
L'article 111 du projet de loi portant le Code ferroviaire concerne la banque de données à établir par l'organisme d'enquête, qui contiendra les informations sur les incidents et accidents, mais l'intervenante a compris qu'aucun rapport d'enquête ne sera répertorié dans cette banque de données. Pourquoi ?
Le projet de loi contient une modification qui prévoit que les agents du gestionnaire de l'infrastructure n'auront plus la qualité d'officier de police judiciaire. Quelle en est la raison ?
Les règles et exigences relatives à l'examen de conducteur de train et au registre des licences de conducteur de train ont été annoncées comme étant des nouveautés. L'intervenante pensait que tel était déjà le cas avec une loi antérieure.
Le projet de loi prévoit une série de démarches en vue de la libéralisation du marché, mais celle-ci ne concerne pas le transport des personnes. Ne serait-il pas utile d'entreprendre déjà des démarches à ce niveau-là ?
L'article 226 du même projet de loi habilite le Roi à modifier l'ordre, la numérotation et la forme du Code ferroviaire, ainsi que les références qui y figurent. L'intervenante se demande pourquoi les pouvoirs du Roi sont définis de manière aussi large.
En termes d'homologation, on tient manifestement compte des homologations dans d'autres pays. Le FYRA avait apparemment été homologué en Italie. Cela signifie-t-il qu'on pourrait à nouveau être confronté aux mêmes problèmes à l'avenir ?
M. Schouppe souligne que la rédaction de ce Code a nécessité un travail colossal. Il souhaite donc féliciter les différents acteurs pour la qualité de ce travail et du texte. L'objectif d'un code comme celui à l'examen est de clarifier l'ensemble des dispositions législatives qui existent dans le secteur ferroviaire et qui étaient devenues incompréhensibles pour les non-spécialistes, en raison, notamment de directives européennes.
L'existence du Code ferroviaire est donc en soi une chose très positive et, à l'avenir, toute nouvelle transposition d'une directive européenne donnera lieu à une adaptation automatique, afin que l'on dispose toujours d'un texte complet clair et logique.
Monsieur Bellot se demande si un tableau de concordance des transpositions de directives européennes a été prévu. Cela permettrait de travailler de manière très efficace lorsque de nouvelles modifications devront être apportées.
L'intervenant salue l'élaboration de ce Code ferroviaire car la matière est extrêmement complexe.
Mme Talhaoui demande comment le Code ferroviaire cadre avec la législation d'autres pays, par exemple dans le domaine des responsabilités lors de transports internationaux.
M. Wathelet, secrétaire d'État, explique qu'un « Accord Beneflux » (Belgique, Pays-Bas, Grand-Duché de Luxembourg, France et Suisse) existe déjà dans le domaine de l'interopérabilité. Le Code ferroviaire ne constitue nullement une obligation européenne, mais il y avait un réel souhait en Belgique d'en rédiger un, notamment parce qu'un grand nombre de trains transportant des marchandises transitent par notre pays, et qu'il est tout à fait essentiel, pour des impératifs de sécurité, de proposer un texte clair et lisible.
En ce qui concerne le tableau de concordance pour les transpositions de directives européennes, il est vrai que c'était une des remarques du Conseil d'État. L'élaboration de ce tableau est prévue en même temps que le quatrième paquet ferroviaire pour éviter de faire le travail deux fois. Mais ce tableau sera en effet important car l'on sait qu'il y aura de plus en plus de législation européenne et qu'il faudra donc régulièrement adapter le Code ferroviaire.
Voilà pourquoi cet article 226 est si important. Il est essentiel de confier l'habilitation qui y est prévue au Roi pour que le Code ferroviaire puisse toujours être adapté en temps utile et que sa clarté et sa lisibilité puissent être garanties, étant donné qu'un grand nombre de nouvelles dispositions européennes sont sur les rails.
En ce qui concerne la carte de légitimation, plusieurs arrêtés royaux seront élaborés et il est tout à fait normal de confier ce type de compétences au pouvoir exécutif.
La banque de données ne contiendra que des informations sur les accidents et incidents constatés.
En ce qui concerne la libéralisation du transport ferroviaire de voyageurs, aucune décision n'a encore été prise au niveau européen et il serait donc prématuré d'inscrire des dispositions à ce sujet dans le Code ferroviaire. Le secrétaire d'État pense que la libéralisation du transport ferroviaire de voyageurs n'est possible que si elle représente une plus-value pour les passagers. Pour le moment, il est trop tôt pour émettre un jugement en la matière.
Les trains doivent être homologués dans chaque État, mais cette procédure se déroule dans le respect des règles européennes imposées. Les informations à communiquer, les modalités à suivre pour une homologation et les différentes règles à respecter sont surtout définies au niveau européen. La Belgique ne peut pas contester l'homologation accordée dans un autre pays, même si la procédure en la matière diffère quelque peu de la nôtre.
En ce qui concerne la qualité d'officier de police judiciaire, celle-ci n'a bien entendu pas été retirée de manière générale. Le personnel de Securail qui a besoin de compétences judiciaires dispose toujours de cette qualité.
IV. VOTES
L'ensemble du projet de loi portant le Code ferroviaire a été adopté par 8 voix et 1 abstention.
Les articles 1er à 8 ainsi que l'ensemble du projet de loi insérant un titre 7/1 dans la loi du ... portant le Code ferroviaire, en ce qui concerne les matières visées à l'article 77 de la Constitution,ont été adoptés par 8 voix et 1 abstention.
Confiance a été faite aux rapporteurs pour un rapport oral.
Les rapporteurs, | Le président, |
Rik DAEMS. François BELLOT. | Ludo SANNEN. |
Les textes adoptés par la commission sont identiques aux textes adoptés par la Chambre des représentants (voir les docs. Chambre, nos 53-2855/5 et 53-2856/3).