5-2201/1

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Sénat de Belgique

SESSION DE 2012-2013

11 JUILLET 2013


Proposition de résolution relative à la prise en charge de personnes handicapées souffrant en plus d'un trouble psychique ou d'un trouble grave du comportement, et en particulier de celles qui requièrent une hospitalisation

(Déposée par M. André du Bus de Warnaffe et consorts)


DÉVELOPPEMENTS


1) DOUBLE DIAGNOSTIC

A. Introduction

1) Aujourd'hui, la place des personnes handicapées dans nos sociétés occidentales fait l'objet d'une attention considérable de la part de la population et du politique, mais cette attention est trop souvent en décalage par rapport à la perception et au vécu au quotidien des personnes handicapées.

En ce qui concerne les personnes affectées d'une déficience mentale, des progrès significatifs ont été réalisés ces dernières années; leur espérance de vie s'est allongée de vingt ans, passant de quarante à soixante ans en moyenne. La qualité des institutions belges — centres de jour et centres d'hébergement — est reconnue dans l'Europe entière et ce, même si l'on doit encore constater un manque cruel de places, bien que des efforts considérables pour changer la situation soient en cours.

Par contre, il subsiste une problématique spécifique aux personnes affectées d'une déficience mentale encore trop mal comprise en Belgique et donc, trop régulièrement, incomplètement prise en charge: le « Double Diagnostic ».

2) Dans le cadre de la présentation du bilan 2009-2012 du projet-pilote « Double Diagnostic », une journée d'étude intitulée « Le secteur du handicap rencontre le secteur de la santé mentale » (1) s'est tenue le 20 novembre 2012 à l'initiative du service public fédéral (SPF) Santé publique, service Soins de santé psychosociaux.

Cette journée d'étude avait pour objectifs:

— de dresser et de présenter un bilan du projet-pilote Double Diagnostic après 3,5 ans de fonctionnement;

— de sensibiliser les professionnels des secteurs de la santé mentale et du handicap mental au Double Diagnostic;

— de favoriser la rencontre et l'échange d'expériences entre les participants;

— de relever les besoins des secteurs.

B. Double Diagnostic

De nombreuses études montrent que les personnes atteintes d'un retard mental présentent une vulnérabilité accrue aux problèmes de santé mentale et ont une plus grande propension à être confrontées à de tels problèmes.

Sur la base d'une moyenne de prévalence, on estime que la Belgique compte environ 150 000 personnes présentant un handicap mental, parmi lesquelles, suivant les données disponibles, environ 50 000 souffriraient en outre de troubles psychiatriques et/ou comportementaux, d'où l'appellation de patients « Double Diagnostic », c'est-à-dire des personnes qui cumulent un handicap mental et une maladie mentale avec troubles du comportement.

Ce qui est propre à ce groupe, c'est qu'en raison de leurs aptitudes cognitives et communicationnelles réduites, ces personnes éprouvent des difficultés à exprimer leurs problèmes, n'ayant pas l'usage de la parole ou seulement un usage partiel de celle-ci.

En plus des personnes directement concernées par ces troubles, les familles sont également touchées. Elles subissent les crises de leur proche comme un véritable cauchemar en perpétuel recommencement.

Les caractéristiques principales de ces crises sont leur violence, relativement élevée, et leur durée, relativement courte. Une prise en charge adéquate doit donc absolument être envisagée pour mettre un terme à ces crises le plus rapidement possible et stabiliser l'état de ces personnes.

C. Hébergement

C'est une réalité: les patients « Double Diagnostic » sont souvent rejetés à cause des troubles du comportement qu'ils présentent, ils ne trouvent que rarement un lieu d'hébergement correspondant à leurs besoins.

Les structures du secteur du handicap mental accueillant ce type de population se trouvent bien souvent démunies en l'absence de prise en charge individualisée et adéquate en matière de soins psychiatriques. Cette situation entraîne des hospitalisations fréquentes de longue durée de ce type de population, voire parfois une exclusion quasi définitive des milieux de vie. De leur côté, les structures psychiatriques sont certes performantes en matière de soins psychiatriques, mais n'envisagent pas ou pas beaucoup (ce n'est pas leur métier) le projet de vie de la personne, la mise en place d'activités, etc., qui relèvent du domaine de compétence des institutions du secteur du handicap mental.

Les personnes handicapées, souvent rejetées à cause des troubles du comportement qu'elles présentent, ne trouvent que rarement un lieu d'hébergement correspondant à leurs besoins. Certaines restent au domicile de leurs parents dans des conditions de vie parfois dramatiques. D'autres séjournent dans les hôpitaux psychiatriques, avec une offre de soins ne leur correspondant pas (mélange avec d'autres pathologies, personnel peu formé pour gérer le handicap, etc.) et souvent avec des durées de séjours extrêmement longues. De leur côté, les structures d'hébergement du secteur du handicap sont confrontées également à des situations très difficiles, les équipes éducatives se trouvant souvent face à l'épuisement et à l'échec.

D. Le système de soins belge

La caractéristique du système de soins belge n'est pas tellement le manque de structures de soins pour prendre en charge, soigner et traiter les patients « Double Diagnostic », mais plutôt l'absence d'un modèle d'organisation global. Cette absence de modèle d'organisation intégré se manifeste entre autres par le manque ou l'insuffisance de contacts, de concertation et de continuité entre les différentes formes de soins existantes. Pour ce groupe cible, la solution n'est pas unique, mais plutôt complexe et intégrée.

Si l'on veut mieux répondre aux besoins de ce groupe cible, il est nécessaire de développer une politique qui puisse offrir des soins davantage « taillés » sur mesure. La santé mentale des personnes atteintes d'un handicap mental nécessite que l'on établisse des synergies entre les institutions dépendant des différents niveaux de décision, chacun détenant une partie de la réponse à apporter.

Les secteurs de la santé mentale et du handicap sont les deux battants d'une même porte. La prise en charge globale des difficultés rencontrées par une personne « Double Diagnostic » implique l'ouverture complète des deux battants de la porte. L'ouverture d'un seul battant ne répond que partiellement aux besoins du patient.

À plusieurs reprises (2009-2010), la question du Double Diagnostic a été discutée au sein de la Conférence Interministérielle Santé publique. Des décisions importantes ont été prises.

À titre d'exemple, voici trois extraits de la Conférence interministérielle Santé publique du 2 mars 2009:

Extrait 1

« L'autorité fédérale s'engage, pour autant qu'elle en ait les moyens budgétaires, à réaliser un certain nombre de projets pilotes pour le groupe cible des personnes avec un handicap mental associé à des troubles du comportement. Pour cela les communautés/régions assureront l'offre et la participation effective à ces projets pilotes des services qui relèvent de leur compétence (services du secteur des personnes handicapées agréés par l'AWIPH, la « Vlaams Agentschap voor personen met een handicap », la COCOF ou la Cocom, le Centre de santé mentale, etc.) ». »

Extrait 2

« Ce projet n'est qu'un premier pas dans la réalisation d'un circuit et réseau de soins complet. Pour que le réseau de soins et l'apport d'expertise puissent être garantis, un accord de collaboration a été conclu entre, au moins, un hôpital psychiatrique (HP), un Centre de soins de santé mentale (CSSM) et l'Agence flamande pour les personnes avec un Handicap (VAPH) ou l'Agence wallonne pour l'intégration des personnes handicapées (AWIPH), ou la COCOF ou la COCOM. »

Extrait 3

« Comme dit plus haut, on a constaté que le secteur des soins de santé mentale et le secteur pour personnes souffrant d'un handicap ne se connaissent pas suffisamment et qu'ils n'échangent pas suffisamment leur expertise. Afin de pouvoir faire la connaissance de l'autre et apprendre mutuellement, il a été proposé de stimuler les programmes d'échange entre les différents secteurs. »

E. Projet-pilote « Cellule mobile d'intervention (CMI) »

1) Pour différentes catégories de personnes, le système actuel, essentiellement basé sur une prise en charge à l'hôpital, n'atteint ni les objectifs de soins, ni les visées de réhabilitation. C'est le cas, par exemple, des personnes qui séjournent en permanence dans un hôpital psychiatrique, ou de celles qui y sont admises de temps en temps, sans qu'elles y trouvent les ancrages nécessaires à la vie quotidienne. Le système ne parvient pas à prendre en compte ce qui se joue d'essentiel dans les situations: les déterminants sociaux de la santé mentale. Rencontrer la personne dans son milieu de vie amène l'équipe à s'intéresser à l'univers matériel et relationnel du patient, à ce qui tisse son existence, à tout ce qui peut être facteur de santé et de lien entre lui et les autres.

Afin d'atteindre ces personnes et leur entourage, tant au niveau de leur vécu que de leur situation problématique, il est important de les rencontrer dans leur milieu de vie. Pour ce faire, la mobilité d'une équipe d'intervention est un atout indispensable.

La notion de réseaux s'est développée et concrétisée, dans un premier temps, avec le projet thérapeutique « Concerto ». Ce projet-pilote de santé a été mis sur pied en 2005.

Il avait pour finalité de contribuer au décloisonnement des soins et à l'amélioration de la qualité de prise en charge des patients psychiatriques vivant à domicile. Cela impliquait:

— de soutenir les soins à domicile réguliers pour ce groupe cible;

— de coordonner les soins pour ces patients psychiatriques;

— d'assurer une fonction de coaching pour les soins à domicile réguliers;

— d'apporter un soutien ponctuel aux patients que les soins à domicile réguliers ne peuvent ou ne souhaitent pas prendre en charge et ce, dans le cadre d'un réseau actif.

Les objectifs de ce projet étaient les suivants:

— aider la personne nécessitant des soins psychiatriques à se maintenir dans son milieu de vie et à améliorer sa qualité de vie, et ce, en associant son entourage si la personne marque son accord;

— apporter une offre d'aides spécialisées aux intervenants des soins à domicile réguliers;

— apporter des réponses aux demandes d'informations et aux besoins de formation des équipes de travailleurs des soins à domicile réguliers et des médecins généralistes;

— établir les relations de collaboration et de coopération que requiert l'organisation de soins psychiatriques pour personnes séjournant à domicile, ainsi que leur coordination sur le territoire d'un arrondissement;

— assurer un rôle de liaison entre les usagers, les soins à domicile réguliers, l'ensemble du réseau de soins en santé mentale et les intervenants des milieux social, judiciaire et culturel;

— favoriser la continuité des soins par la mise en place d'une méthodologie commune adaptée aux patients qui ne peuvent s'appuyer sur un environnement familial et social suffisant et qui nécessitent une aide spécialisée pour poursuivre leur traitement psychiatrique en ambulatoire;

— rendre l'usager acteur de son processus de soins;

— éviter les hospitalisations, ou réduire le nombre et la durée de celles qui ne peuvent être évitées.

2) En 2009, la ministre des Affaires sociales et de la Santé publique, Mme Onkelinx, s'est inscrite dans la continuité de cette approche en apportant son soutien au projet-pilote « Double Diagnostic » mené dans quatre unités hospitalières du pays (Manage, Bertrix, Gand et Bierbeek).

Lors de la réunion du 18 juin 2012 (Convention Interaction INAMI de Mons), la Conférence interministérielle Santé publique a approuvé la somme de 500 000 euros que le SPF consacrera au lancement de trois projets pilotes (d'équipes mobiles d'intervention) pour enfants et jeunes présentant un double diagnostic (un pour la Wallonie — un pour Bruxelles — un pour la Flandre). Cette enveloppe permettra également la création d'une équipe mobile d'intervention pour adultes à Bruxelles.

Concrètement, cela représente 500 000 euros pour quatre cellules mobiles d'intervention (CMI) (trois pour enfants et jeunes et une pour adultes à Bruxelles). Chaque CMI recevra 117 500 euros, soit un total de 470 000 euros. Le solde de 30 000 euros sera affecté au traitement de ce groupe cible en Communauté germanophone.

Le projet-pilote « Double Diagnostic » a pour objectif de porter les soins de santé mentale le plus près possible de la situation de vie normale de la personne handicapée, dans la communauté où elle vit.

Il vise la mise en place d'une équipe mobile pour le groupe cible des adultes porteurs d'un handicap mental et d'une maladie mentale avec trouble du comportement.

L'équipe mobile a pour objectif général de supprimer (ou d'atténuer) le trouble du comportement présent.

Pour plus de clarté, citons quelques exemples de troubles du comportement: automutilations, violences physiques envers les autres, destructions fréquentes de matériel, cris intempestifs, comportements sexuels inappropriés, absorption d'objets.

Les finalités du projet-pilote sont les suivantes:

— améliorer la qualité de vie des personnes handicapées mentales;

— lutter contre la stigmatisation des personnes handicapées mentales;

— éviter ou limiter les hospitalisations de personnes handicapées mentales, et éviter aussi la perte d'acquis pédagogiques et les ruptures affectives;

— éviter la fragilisation des liens sociaux qui, pour beaucoup, est synonyme de stress, de souffrance, de vulnérabilité et d'insécurité psychologique;

— soutenir les professionnels et les familles dans leur accompagnement des personnes handicapées mentales.

Le but n'est pas de se substituer aux proches de la personne handicapée mentale, mais de leur donner les ressources nécessaires pour améliorer la santé mentale de cette personne et contribuer ainsi à une prise en charge de qualité et autonome. Les anglo-saxons nomment cette approche « empowerment ».

La cellule se compose d'un ETP psychologue et d'un ETP infirmier psychiatrique, aidés par un psychiatre à raison de quatre heures par semaine.

3) Trois ans et demi se sont écoulés depuis le lancement de ce projet-pilote.

Selon le Dr. Paul De Bock, chef du service de soins de santé psychosociaux, un important travail a été fourni par les quatre équipes. Environ quatre cents patients ont été suivis. Par ailleurs, les analyses concernant l'évolution des troubles du comportement, le follow-up et les enquêtes de satisfaction, montrent clairement l'impact positif du projet-pilote.

C'est une des raisons pour lesquelles il a été décidé (comme élément d'un programme de soins global pour enfants et adolescents) que trois projets pilotes (Manage, Bruxelles et Bilzen) seraient lancés prochainement dans le cadre du « double diagnostic soins de santé mentale et handicap mental » pour le groupe cible des mineurs.

F. Travail en réseau

Une partie de l'expertise nécessaire pour parvenir à dispenser des soins de qualité au groupe cible adulte existe déjà, mais elle est répartie çà et là dans le paysage des soins. C'est pourquoi le travail en réseau est fondamental afin de garantir la continuité des soins.

L'équipe mobile vise une organisation de soins en réseaux. Elle travaille en réseau, c'est-à-dire non seulement avec la personne handicapée, son milieu de vie et sa famille, mais également avec tous les acteurs professionnels de l'entourage de la personne, intervenant ou susceptibles d'intervenir auprès de la personne.

Le choix des membres du réseau vise à aboutir à la création d'un réseau cohérent et doté en suffisance d'une expertise de qualité. Ces membres sont donc des personnes ressources qui peuvent intervenir de façon significative dans le traitement du patient.

2) RÉFORME 107/RÉSEAUX DE SOINS MULTIDISCIPLINAIRES

A. La réforme SSM par les projets pilotes article 107 (Réforme 107) concerne tous les patients (toutes les maladies mentales) et tous les professionnels de la santé mentale de toutes les régions couvertes. L'objectif est d'améliorer le fonctionnement de l'ensemble du secteur des soins en santé mentale. Dans chaque région, un réseau de soins sera créé à moyen et à long terme. La finalité est qu'en cas de problème de santé mentale, le patient soit pris en charge par l'ensemble du réseau et orienté directement vers le service qui correspond le mieux à son besoin. Un réseau de soins en santé mentale doit être généraliste, c'est-à-dire qu'il doit pouvoir répondre aux besoins de santé mentale de toute la population d'une région donnée. Comme les autres partenaires, la CMI s'inscrit dans ces réseaux de soins correspondant à une zone d'action déterminée. La CMI focalise ainsi l'attention sur la prise en charge des personnes dites à double diagnostic. En effet, ce type de prise en charge nécessite un suivi spécifique et adapté, qui se doit d'exister séparément afin de garantir une offre de soins adaptée à l'ensemble de la population. Pour les personnes présentant un retard mental et des problèmes de santé mentale, d'aucuns reconnaissent qu'il s'agit d'une problématique complexe et que ces personnes ne peuvent pas être prises en charge dans le cadre de la psychiatrie classique. De plus, le secteur responsable de l'accompagnement de jour de ces personnes (les structures pour personnes handicapées) est organisé selon un tout autre mode que les SSM, ce qui complique encore la collaboration. En ce sens, les CMI devraient pouvoir évoluer dans le cadre légal de l'article 107 vers une équipe spécialisée pour personnes présentant un retard mental et des problèmes de santé mentale, à côté des équipes plus généralistes existantes et d'autres équipes plus spécialisées.

B. L'hospitalisation dans une unité « Double Diagnostic » en dernier recours.

L'expérience acquise au cours des dernières années montre que l'intervention d'un réseau et d'une équipe mobile pour contenir des crises au plus vite et stabiliser l'état des personnes qui les traversent, suffit pour régler le problème dans environ 50 % des cas sans devoir recourir à une hospitalisation.

Il existe toutefois des situations, notamment lors de troubles extrêmes du comportement, pour lesquelles la Cellule Mobile d'Intervention atteint ses limites en termes de prise en charge et/ou de prise de décision thérapeutique.

Dans ce type de situations et pour parer à un nouvel échec, une hospitalisation temporaire dans une unité spécialisée dans le Double Diagnostic ne peut être évitée. Elle restera indispensable et bénéfique dans environ 50 % des cas, c'est-à-dire lorsque toutes les autres ressources de réseau ont été épuisées.

Concrètement, l'hospitalisation dans une unité « Double Diagnostic » disposant d'un personnel spécialisé permet de stabiliser la majorité des patients dans les deux mois et de les réinsérer dans leur vie normale ainsi que dans leurs lieux d'accueil, tout en améliorant leur qualité de vie et en leur évitant un séjour de longue durée en unité de psychiatrie générale.

D'ailleurs, cette approche spécialisée et individuelle aurait un impact bénéfique et non négligeable sur le budget de l'INAMI, puisqu'on estime qu'une économie de quelque 40 000 euros pourrait ainsi être réalisée par patient et par an par rapport à une prise en charge classique de longue durée.

C. Actuellement, notre pays dispose de deux unités « Double Diagnostic », une en Wallonie, à Manage, et une autre en Flandre, à Bierbeek, près de Louvain.

Il faut noter que Bierbeek et Manage ont développé une collaboration très étroite. Ces deux hôpitaux ont vraiment avancé sur leur capacité à travailler en réseau et se sont fixé pour objectif de réinsérer systématiquement les patients dans la vie courante. D'ailleurs, Manage est en train de développer et de sophistiquer le système des ateliers qui permet aux patients de réintégrer la vie courante plus rapidement, en coopération avec les institutions. — voir ci-dessous.

Dans d'autres régions, il n'existe aucune unité « Double Diagnostic ». Ces unités seraient pourtant nécessaires pour couvrir les besoins de l'ensemble du pays.

Elles sont le soutien indispensable du réseau, le dernier recours en cas d'échec de la Cellule Mobile d'Intervention.

Ainsi, les institutions (MSP, AWIPH, etc.) qui pratiquent activement les techniques de réseau, et qui sont prêtes à accueillir ces personnes fragiles et à leur éviter des hospitalisations de longue durée — mais qui se verraient obligées de quand même les refuser ou de s'en séparer parce qu'elles n'ont pas « la sécurité » d'un accueil garanti dans un hôpital spécialisé, en cas d'échec des autres techniques, et, principalement, en cas de crise — peuvent à nouveau jouer pleinement leur rôle, au bénéfice des patients, et ceci tout en diminuant le coût global de leur traitement.

D. En ce qui concerne le Centre Psychiatrique Saint-Bernard de Manage, hôpital de référence pour la Région du Centre, son Unité « Double Diagnostic » présente les caractéristiques suivantes:

— il s'agit de la seule unité couvrant la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale;

— il dispose d'un personnel spécialisé;

— il offre un accueil sur mesure et des soins adaptés.

Mais le maintien de cette unité est incertain. En cause, un réaménagement des services dans le cadre de la « Réforme 107 ».

Supprimer un tel outil au service des patients « Double Diagnostic », perdre une telle expérience, un tel engagement, serait une pure aberration, en flagrante contradiction avec la raison et le bon sens de la « Réforme 107 » et, essentiellement, au détriment des patients.

Car Manage défend également un projet-pilote totalement innovant pour son unité « Double Diagnostic »: « L'atelier au cœur d'un dispositif thérapeutique personnalisé dans le réseau ».

Par ailleurs, une association « Double Diagnostic » verra le jour d'ici peu; elle aura pour objet de donner une identité, une visibilité accrue, un visage à cette double pathologie encore insuffisamment connue dans notre pays.

Au niveau national, l'on réfléchit également à un plan national intitulé « L'Unité Double Diagnostic, un dispositif thérapeutique personnalisé ».

3. CONCLUSIONS:

A. La collaboration intersectorielle est complexe et difficile;

B. Sur le plan du contenu, les CMI ont prouvé qu'elles apportent une plus-value. Les CMI ont ajouté, à relativement court terme, des contacts dans le circuit de soins et le réseau pour ce groupe cible. Elles sont les intermédiaires chargées de la collaboration intersectorielle, principalement entre les soins aux handicapés et les soins en santé mentale.

C. La spécificité du groupe cible, sa relation de dépendance à son entourage et le fait que plusieurs secteurs sont concernés, légitiment non seulement la poursuite du travail mis en place, mais requièrent par ailleurs une expertise particulière. La place que les CMI doivent occuper dans le réseau généraliste des soins de santé mentale reste à définir.

D. Pour pouvoir répondre aux nombreuses questions et parce qu'il faut généralement intervenir non seulement à l'égard du client mais aussi à l'égard de sa famille et de son entourage professionnel, l'affectation du personnel semble s'apparenter davantage à des modules d'outreaching. Il faut vérifier que l'encadrement en personnel actuel est suffisant pour pouvoir réaliser ce travail correctement. Actuellement, les délais d'attente pour démarrer la prise en charge atteignent facilement quatre mois.

E. Ce n'est qu'au sein d'un réseau suffisamment différencié qu'il sera possible d'effectuer avec ce groupe cible un travail justifié sur le plan médical, pédagogique et éthique.

F. Cela suppose l'intégration d'une fonction hospitalière spécifique, qui n'est en fait rien d'autre qu'une version adaptée des soins auxquels a droit tout patient psychiatrique, qu'il s'agisse d'un adulte ou d'un enfant souffrant de troubles de l'apprentissage ou du développement.

André du BUS de WARNAFFE.
Cindy FRANSSEN.
Jacques BROTCHI.
Leona DETIÈGE.
Nele LIJNEN.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION


Le Sénat,

Demande au gouvernement:

1. de saisir le Centre fédéral d'expertise des soins de santé (KCE) afin qu'une étude soit réalisée sur la problématique du « Double Diagnostic », portant notamment sur les points suivants:

a) évaluer la prise en charge des personnes qui nécessitent, en dernier recours, une offre de soins spécialisée en milieu hospitalier;

b) fixer un indice adéquat pour les services « Double Diagnostic » (les indices actuels A et T ne couvrent ni les besoins des patients, ni ceux du personnel);

c) estimer les coûts pour le budget des soins de santé;

d) évaluer la nécessité de créer de nouvelles unités « Double Diagnostic » en fonction des besoins de la population;

e) soutenir l'élargissement de la compétence des cellules mobiles d'intervention en appui aux services des hôpitaux psychiatriques;

f) examiner l'opportunité de former des médecins psychiatres généralistes, qui aient une réelle vision globale et non fractionnée de la santé mentale de leurs patients, comme cela existe déjà pour les médecins internistes généralistes;

g) examiner l'opportunité d'élaborer un plan national au sujet du « Double Diagnostic »;

2. de maintenir les projets pilotes en cours cellules mobiles d'intervention « Double Diagnostic » jusqu'au rapport définitif du KCE énonçant ses recommandations;

3. de maintenir les projets en cours unités « Double Diagnostic » jusqu'au rapport final du KCE énonçant ses recommandations;

4. d'envisager la possibilité de créer des projets pilotes pour des unités « Double Diagnostic » dans des régions qui n'en disposent pas actuellement.

7 mai 2013.

André du BUS de WARNAFFE.
Cindy FRANSSEN.
Jacques BROTCHI.
Leona DETIÈGE.
Nele LIJNEN.

(1) http://www.health.belgium.be/eportal/Healthcare/Specialisedcare/Mentalhealth/StudydayDD.20.11.12/index.htm — www.psy107.be.