5-1707/2

5-1707/2

Sénat de Belgique

SESSION DE 2012-2013

23 OCTOBRE 2012


Projet de loi portant assentiment à l'Accord de transport aérien entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et les États-Unis d'Amérique, d'autre part, faits à Bruxelles le 25 avril 2007 et à Washington le 30 avril 2007

Projet de loi portant assentiment au Protocole, fait à Luxembourg le 24 juin 2010, modifiant l'Accord de transport aérien entre les États-Unis d'Amérique, d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, signé les 25 et 30 avril 2007


RAPPORT FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES RELATIONS EXTÉRIEURES ET DE LA DÉFENSE PAR MM. DAEMS ET TORFS


I. INTRODUCTION

La commission a examiné les présents projets de loi lors de sa réunion du 23 octobre 2012.

II. EXPOSÉ INTRODUCTIF DU REPRÉSENTANT DU VICE-PREMIER MINISTRE ET MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES, DU COMMERCE EXTÉRIEUR ET DES AFFAIRES EUROPÉENNES

L'Union européenne (UE) et ses États membres, d'une part, et les États-Unis d'Amérique, d'autre part, ont signé le 30 avril 2007 un accord sur le transport aérien, dit « accord de ciel ouvert ».

Le 5 juin 2003, la Commission européenne avait reçu mandat du Conseil (Transports) de négocier un accord communautaire avec les États-Unis, en vue d'établir « un espace aérien sans frontières ». Il s'agissait du premier mandat de négociation obtenu par la Commission européenne en vue de la négociation d'un accord dit « global » avec un pays tiers.

Les négociations entre les deux parties ont été officiellement lancées le 25 juin 2003 et se sont terminées le 2 mars 2007 à l'issue de onze réunions de travail et de deux sessions de négociation. L'Accord a été signé le 30 avril 2007 lors du sommet Union européenne/États-Unis.

L'Accord conclu vise à se substituer aux accords aériens bilatéraux conclus entre les États membres et les États-Unis. Il peut être considéré comme un premier pas important dans la voie d'un marché transatlantique intégré du transport aérien. Il étend substantiellement les possibilités pour les compagnies aériennes des deux parties d'exploiter des liaisons transatlantiques. Pour les compagnies européennes, il offrira la possibilité nouvelle de permettre des exploitations depuis n'importe quel point européen et plus uniquement depuis leur propre territoire. Le nombre de vols, de routes et de destinations devient totalement libre de même que la fixation des tarifs.

Les compagnies aériennes, tant européennes qu'américaines, pourront en outre emporter du trafic entre les territoires respectifs de l'autre partie et des destinations au-delà. Elles ne seront toutefois pas autorisées à effectuer des vols intérieurs aux États-Unis pour les compagnies européennes et entre deux points situés à l'intérieur d'un même État européen pour les compagnies américaines. Rien n'interdit cependant à ces dernières d'assurer des liaisons entre deux pays européens.

L'Accord prévoit également des mesures de coopération au niveau de la sûreté, sécurité, concurrence, environnement et aides d'États.

Le 24 juin 2010, l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et les États-Unis d'Amérique, d'autre part, ont signé un protocole d'accord modifiant l'accord de transport aérien en question.

Ce protocole est l'aboutissement de la deuxième étape des négociations entre l'Union européenne et les États-Unis d'Amérique sur le transport aérien, qui avaient été ouvertes en 2003 et avaient débouché sur un accord de « ciel ouvert ». Ce premier accord, signé le 30 avril 2007, se substituait aux accords bilatéraux passés entre les États-Unis et la plupart des États membres, qui visaient principalement à établir un marché unique des services aériens, notamment en autorisant des liaisons aériennes en partance de n'importe quelle ville d'Europe vers n'importe quelle ville des États-Unis (et vice-versa). La conclusion de ce protocole était d'autant plus nécessaire que, si aucun accord n'était trouvé avant le 30 novembre 2010, chaque partie était alors en droit de suspendre l'application de l'accord initial de 2007.

Par ce protocole, les deux parties s'engagent à poursuivre la convergence réglementaire en matière de sécurité et de sûreté. Des nouvelles règles limiteront les formalités administratives et permettront d'éviter le gaspillage des ressources. L'accord élargit en outre les compétences du comité mixte UE/États-Unis, l'organe chargé du suivi de la mise en œuvre de l'accord. Il renforce la coopération dans le domaine de l'environnement (en particulier les systèmes d'échange de droits d'émission), pour laquelle une déclaration commune est d'ailleurs annexée.

Pour la première fois dans l'histoire de l'aviation, l'accord comprend aussi un article consacré à la dimension sociale des relations entre l'UE et les États-Unis dans le domaine du transport aérien.

Dans le domaine commercial, l'accord permet des avancées notables. L'élargissement de l'accès des compagnies aériennes de l'UE au programme « Fly America », réservé aux compagnies américaines, est tout d'abord assuré. Des droits commerciaux supplémentaires seront également échangés à l'avenir, à condition que la législation soit modifiée sur les deux aspects suivants: les règles en matière de propriété et de contrôle des compagnies aériennes et la lutte contre le bruit à proximité des aéroports.

III. DISCUSSION GÉNÉRALE

Mme Arena estime que la Communauté européenne n'a pas été bonne négociatrice. Les entreprises européennes ne peuvent pas effectuer des vols intérieurs aux États-Unis tandis que les compagnies aériennes américaines auront la possibilité d'assurer la liaison entre tous les États européens. De cette manière, on introduit une concurrence déloyale, par rapport aux compagnies aériennes européennes actives aux États-Unis.

Mme Piryns estime, elle aussi, que l'Accord crée une concurrence déloyale entre les compagnies aériennes américaines et les compagnies européennes. Elle constate que le personnel navigant américain peut travailler jusqu'à cinq ans en Belgique sans payer d'impôts, ce qui engendre, selon elle, un sérieux déséquilibre entre le statut du personnel européen et celui du personnel américain. Les normes environnementales et les dispositions sociales restent également très vagues.

M. Anciaux renvoie à l'exposé des motifs du projet de loi, qui souligne que « l'Accord met fin à toute entrave d'accès au marché pour les compagnies aériennes des deux parties désireuses d'exploiter des vols transatlantiques, ce qui dopera la concurrence et la création d'emplois et contribuera à faire baisser les tarifs aériens. D'après les services de la Commission européenne, cet accord serait de nature à permettre la création de 80 000 emplois des deux côtés de l'Atlantique ainsi qu'à générer 12 milliards d'euros de bénéfices » (doc. Sénat, nº 5-1707/1, p. 3). Dans quelle mesure cela fait-il l'objet d'un mesurage et d'un suivi ? Quand l'Accord entrera-t-il en vigueur ?

L'intervenant se réfère également à l'article 21 de l'Accord, qui prévoit que les deux parties s'engagent à entamer des négociations en vue de poursuivre l'ouverture de l'accès aux marchés dans le cadre d'un accord de seconde étape. Ce dernier devrait notamment porter en priorité sur la poursuite de la libéralisation des droits de trafic et les opportunités supplémentaires d'investissements étrangers (doc. Sénat, nº 5-1707/1, p. 6). Où en est-on à ce sujet ?

Les compagnies aériennes étant des acteurs économiques très bien protégés, le commissaire estime qu'il faut très fort relativiser les dispositions de l'Accord relatives à des tarifs réduits. Elles jouent essentiellement en faveur des compagnies aériennes américaines. En outre, il reste très difficile d'obtenir des droits de trafic dans un aéroport déterminé des États-Unis.

Mme Matz renvoie à l'article 3.7 de l'Accord qui prévoit que: « L'accès des transporteurs communautaires aux services de transport achetés par les pouvoirs publics des États-Unis est régi par l'annexe 3 » (doc. Sénat, nº 5-1707/1, p. 15). Cette annexe stipule que: « Les transporteurs aériens de la Communauté ont le droit de transporter des passagers et du fret sur des vols réguliers ou affrétés pour lesquels un service, une agence ou un organe civil officiel des États-Unis obtient le service de transport pour lui-même ou dans le cadre d'un accord prévoyant que le paiement est effectué par les pouvoirs publics ou à partir de fonds mis à disposition des pouvoirs publics » (doc. Sénat, nº 5-1707, p. 39). Le terme « l'agence » pourrait-il se référer aux vols secrets de la CIA ?

M. Torfs constate que l'Accord est en vigueur depuis 2008. Seuls les parlements de l'Union européenne même, de l'Allemagne et de notre pays ne lui ont pas encore donné leur assentiment. Quelle en est la raison ? Où en est la procédure d'assentiment au sein des parlements des entités fédérées ?

M. Vanlouwe souligne que le Conseil d'État a effectivement formulé une observation dans laquelle il souligne qu' « en vertu de l'article 167, § 3, de la Constitution, les traités n'ont d'effet qu'après avoir reçu l'assentiment du parlement concerné » (traduction) (doc. Sénat, nº 5-1707/1, p. 47). Un suivi a-t-il été effectué à cet égard ?

Réponses du représentant de la direction générale transport aérien

Il faut tenir compte de tout l'historique de la période de l'après-guerre lors de laquelle les États-Unis avaient presque tous les droits de trafic entre les divers pays européens. C'est donc aussi sur la base de cet acquis, que les États-Unis ont renégocié les accords de transport aérien.

Les transporteurs aériens américains peuvent emporter du trafic entre deux États membres au sein de la Communauté européenne mais pas à l'intérieur de ces États (cabotage). Il n'existe pas de frontières entre les États des États-Unis et, dès lors, les transporteurs aériens européens ne peuvent pas pratiquer le cabotage à l'intérieur des États-Unis. Cependant, les droits relatifs au trafic « au-delà » sont réciproques pour les parties à l'Accord. Lorsqu'un transporteur aérien communautaire assure par exemple un vol Bruxelles-New York, il peut prolonger ce vol vers une destination au-delà des États-Unis en emportant du trafic. À la lumière de l'historique du dossier, il n'y a donc pas de déséquilibre fondamental concernant les opportunités de la Communauté européenne d'une part et des États-Unis, d'autre part.

Pendant les années nonante, la Belgique n'avait droit à exploiter que cinq destinations aux États-Unis, déterminées dans l'accord aérien bilatéral. Les tarifs devaient être convenus entre les administrations aéronautiques. Il y avait donc de nombreuses restrictions. Par après, la Belgique a négocié un accord bilatéral de type « Open Sky » avec les États-Unis à la fin des années nonante. Cet accord a été contesté par l'Union européenne et notre pays s'est vu condamner devant la Cour européenne de Luxembourg en 2002, comme d'autres pays européens qui avaient conclu de tels accords. Les accords étaient jugés contraire au principe de la liberté d'établissement en droit communautaire. Ces accords bilatéraux ne permettaient pas à un autre transporteur européen de s'établir en Belgique pour exploiter des vols vers les États-Unis.

Cet accord de 2007 au niveau de la Communauté européenne y remédie, permettant à tous les transporteurs communautaires d'exploiter des droits de trafic au départ de n'importe quel État membre vers un pays tiers.

La notion « d'agence » qui figure à l'annexe 3 de l'Accord porte sur les fonctionnaires américains qui bénéficient de tarifs privilégiés sur certains services et sur certains liaisons. Les transporteurs européens communautaires ne peuvent pas s'adresser directement à ces fonctionnaires.

Il s'agit effectivement d'un traité mixte. L'Accord doit donc également obtenir l'assentiment des parlements des régions. Le parlement flamand a déjà donné son assentiment au premier accord de 2007. L'Accord de deuxième étape, dit « Protocole » établi en 2010, qui ajoute notamment une dimension sociale et environnementale au premier accord, n'a encore reçu l'assentiment d'aucun des parlements belges.

IV. VOTES

Projet de loi portant assentiment à l'Accord de transport aérien entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et les États-Unis d'Amérique, d'autre part, faits à Bruxelles le 25 avril 2007 et à Washington le 30 avril 2007 (doc. Sénat, nº 5-1707/2).

Les articles 1er et 2, ainsi que l'ensemble du projet de loi, sont adoptés à l'unanimité des 10 membres présents.

Projet de loi portant assentiment au Protocole, fait à Luxembourg le 24 juin 2010, modifiant l'Accord de transport aérien entre les États-Unis d'Amérique, d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, signé les 25 et 30 avril 2007 (doc. Sénat, nº 5-1708/2).

Les articles 1er et 2, ainsi que l'ensemble du projet de loi, sont adoptés à l'unanimité des 10 membres présents.


Confiance a été faite aux rapporteurs pour la rédaction du présent rapport.

Les rapporteurs, Le président,
Rik DAEMS. Rik TORFS. Karl VANLOUWE.

Textes adoptés par la commission

Projet de loi portant assentiment à l'Accord de transport aérien entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et les États-Unis d'Amérique, d'autre part, faits à Bruxelles le 25 avril 2007 et à Washington le 30 avril 2007:

Le texte adopté par la commission est identique au texte du projet de loi (voir le doc. Sénat, nº 5-1707/1 — 2011/2012).


Projet de loi portant assentiment au Protocole, fait à Luxembourg le 24 juin 2010, modifiant l'Accord de transport aérien entre les États-Unis d'Amérique, d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, signé les 25 et 30 avril 2007 (doc. Sénat, nº 5-1708/2):

Le texte adopté par la commission est identique au texte du projet de loi (voir le doc. Sénat, nº 5-1708/1 — 2011/2012).