5-1547/3

5-1547/3

Sénat de Belgique

SESSION DE 2011-2012

23 MARS 2012


Projet de loi portant des dispositions diverses (I)


Procédure d'évocation


Proposition de loi modifiant l'article 91 de la loi du 30 décembre 1992 portant des dispositions sociales et diverses, en ce qui concerne la cotisation annuelle forfaitaire à charge des sociétés


RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES ET DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES PAR

M. DAEMS


I. INTRODUCTION

Le projet de loi qui fait l'objet du présent rapport relève de la procédure bicamérale facultative et a été déposé le 8 mars 2012 à la Chambre des représentants par le gouvernement (doc. Chambre, nº 53-2097/1).

Il a été adopté le 22 mars 2012 en séance plénière par 80 voix contre 16 et 34 abstentions.

Il a été transmis le même jour au Sénat, qui l'a aussitôt évoqué.

Les articles 20 à 30 ont été envoyés à la commission des Finances et des Affaires économiques qui les a examinés lors de ses réunions des 21 et 23 mars 2012 en présence des ministres et secrétaires d'État compétents.

En application de l'article 27.1, alinéa 2, du règlement du Sénat, la commission des Finances et des Affaires économiques, saisie des articles 20 à 30 du projet de loi, a déjà entamé la discussion avant le vote final à la Chambre des représentants.

En application de l'article 56.3, alinéa 2, du règlement du Sénat, la proposition de loi nº 5-1041 « modifiant l'article 91 de la loi du 30 décembre 1992 portant des dispositions sociales et diverses, en ce qui concerne la cotisation annuelle forfaitaire à charge des sociétés » de M. Peter Van Rompuy et consorts a été ajoutée à la demande de M. Van Rompuy à la discussion du projet de loi portant des dispositions diverses (I).

II. EXPOSÉS INTRODUCTIFS

A. Proposition de loi modifiant l'article 91 de la loi du 30 décembre 1992 portant des dispositions sociales et diverses, en ce qui concerne la cotisation annuelle forfaitaire à charge des sociétés: exposé introductif de M. Van Rompuy, auteur principal

Voir doc. nº 5-1041/1, pp. 1 et 2.

B. Titre 3. Agriculture et titre 4. PME et Indépendants: exposé introductif par la ministre des Classes moyennes, des PME, des Indépendants et de l'Agriculture

Mme Sabine Laruelle, ministre des Classes moyennes, des PME, des Indépendants et de l'Agriculture, précise que l'article 20 du titre 3 du projet de loi concerne une modification de la loi du 10 novembre 1967 portant création du BIRB, coordonnée par l'arrêté royal du 3 février 1995. La possibilité pour le BIRB d'avoir recours à des rétributions du secteur privé pour son financement est supprimée, et donc, concrètement, de ne facturer que les certificats qu'il délivre aux opérateurs. Étant donné que l'on voulait déjà instaurer cette mesure en 2010, mais que les affaires courantes ne le permettaient pas, les rétributions ont été suspendues pour 2011.

Cette mesure fait suite à une réduction considérable des certificats émis, qui sont passés d'environ 20 000 en 2008 à 4 000 en 2012. Cette baisse est imputable à la forte réduction des activités du BIRB (réduction substantielle des surplus et des interventions) et à une simplification décidée par l'Union européenne. Ainsi, on ne doit plus, par exemple, émettre de certificat si la douane l'a déjà fait. Les rétributions auraient pu s'élever à 27 000 euros pour 2011 et se seraient élevées à moins de 15 000 euros pour 2012 si elles avaient encore dû être versées. En 2008, elles atteignaient encore 50 000 euros. Cette somme est répartie sur une multitude de petites factures, de sorte qu'il est absurde de maintenir ce système eu égard au coût lié au traitement administratif. Cette mesure est bien évidemment à l'avantage des entreprises concernées dès lors qu'elle réduit leurs charges financières et administratives.

Le titre 4 (articles 22-24) comporte des modifications d'ordre technique destinées à mettre la législation en conformité avec la jurisprudence:

— la première résulte d'un arrêt récent du Conseil d'État nº 217 388 (19 janvier 2012) et concerne la loi du 13 août 2004 relative à l'autorisation d'implantations commerciales. La loi est adaptée de manière à ce que ce soit la date de la notification de la décision communale qui soit prise en compte afin de savoir si les délais légaux sont respectés;

— la seconde a trait à la cotisation annuelle à charge des sociétés. Sans remettre le principe en cause, la Cour constitutionnelle (dans deux arrêts, l'un du 16 décembre 2010 et l'autre du 16 juin 2011) a néanmoins considéré qu'il s'agissait d'un impôt, ce qui implique que les éléments essentiels doivent figurer dans la loi. Tel est l'objet des articles 23 et 24.

C. Titre 5. Énergie: exposé introductif du secrétaire d'État à l'Énergie, à l'Environnement et à la Mobilité

1. Chapitres 1er et 2

Articles 25 et 26

M. Melchior Wathelet, secrétaire d'État à l'Énergie, à l'Environnement et à la Mobilité, explique que le chapitre 1er vise à habiliter le Roi à modifier l'arrêté royal du 16 juillet 2002 relatif à l'établissement de mécanismes visant la promotion de l'électricité produite à partir des sources d'énergie renouvelables, confirmé par l'article 427 de la loi-programme (I) du 24 décembre 2002.

Cette délégation de compétence est fondamentale pour pouvoir mettre le droit belge en conformité avec les normes européennes (directive 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables et modifiant puis abrogeant les directives 2001/77/CE et 2003/30/CE), mais elle répond également à l'avis du Conseil d'État (avis nº 50.489/3) qui, dans le passé, a déjà insisté sur l'importance de ces modifications. Il convient à présent de définir le système d'octroi des certificats de garantie d'origine pour les installations de production d'électricité verte par les éoliennes en mer.

2. Chapitre 3

Le secrétaire d'État commente ensuite les articles 27 à 30 du Titre 5.

Ces dispositions tendent à insérer un § 4bis dans les articles 20bis de la loi du 29 avril 1999 relative à l'organisation du marché de l'électricité — ci-après: « la loi sur l'électricité » — et 15/10bis de la loi du 12 avril 1965 relative au transport de produits gazeux et autres par canalisations — ci-après: « la loi sur le gaz » — et à modifier l'article 108 de la loi du 8 janvier 2012 modifiant la loi sur l'électricité et la loi sur le gaz.

Le but est d'adapter la réglementation concernant le filet de sécurité et de geler à la hausse les mécanismes d'indexation du 1er avril 2012 au 31 décembre 2012. Si pendant cette période, un cas de force majeure ou des conséquences fâcheuses pour le marché se produisent, le projet de loi prévoit naturellement la possibilité de lever le gel. De cette manière, la sécurité juridique est garantie. Une diminution des tarifs figure également parmi les possibilités, mais pas dans une mesure telle qu'une entreprise serait contrainte de facturer en permanence le tarif le plus bas, car cela signifierait un deuxième gel. Des augmentations de prix ne sont donc pas exclues, tant qu'elles restent inférieures à la limite du 1er avril 2012.

Personne ne prétendra que le mécanisme proposé constitue le remède optimal. Cela explique d'emblée pourquoi la mesure ne sera en vigueur que pour une durée déterminée. Mais il serait par ailleurs insensé d'instaurer un tel système sans réfléchir à une solution pour le long terme. Il ne s'agit en effet pas d'instaurer un gel — parce que le prix du gaz ou de l'électricité ne peut pas être lié au prix du pétrole — pour donner le feu vert, au 1er janvier 2013, à une nouvelle augmentation du prix. En d'autres termes, les mécanismes d'indexation à l'égard du prix du gaz et de l'électricité seront examinés dans le courant de l'année.

Dès que le gel entrera en vigueur, le gouvernement demandera à la Commission de régulation de l'électricité et du gaz (CREG) d'établir une liste de paramètres qui pourraient entrer en ligne de compte pour la détermination de l'indexation par les fournisseurs d'énergie. Sur la base de ce travail préparatoire, le gouvernement prendra un arrêté royal dans lequel figureront les critères que les fournisseurs peuvent utiliser pour fixer le prix facturé pour des formules tarifaires variables.

Si l'arrêté royal en question est pris avant le 31 décembre 2012, les fournisseurs pourront proposer de nouvelles indexations. La CREG effectue, il est vrai, des contrôles préalables (ex ante) de conformité à l'arrêté royal. À partir du 1er janvier 2013, la réglementation concernant le filet de sécurité sera de nouveau applicable et les fournisseurs devront naturellement respecter l'arrêté royal. Dans ce cas, le contrôle de la CREG aura lieu ultérieurement (ex post) et consistera à vérifier si le fournisseur s'est tenu à l'arrêté royal.

À partir du 1er janvier 2013, les fournisseurs s'exposeront à des sanctions s'ils ne respectent pas les nouveaux paramètres d'indexation de l'arrêté royal. Ils devront ainsi rembourser des sommes aux clients qui paient trop et effectuer un versement d'un montant identique en faveur du fonds de la CREG afin de diminuer la cotisation fédérale.

En résumé, la réglementation proposée est une mesure transitoire qui prend en considération deux situations particulières d'exception: la force majeure et les conséquences fâcheuses. La période de transition est mise à profit pour élaborer une réforme approfondie de l'indexation et va en outre de pair avec d'autres mesures. De la sorte, la cotisation fédérale est diminuée, les tarifs de distribution sont gelés et les possibilités de changer de distributeur sont assouplies.

Le secrétaire d'État considère qu'il est important de faire entrer le gel en vigueur pour le 1er avril 2012. Si la date prévue n'est pas atteinte, les pouvoirs publics auront échoué dans leur objectif d'instaurer des tarifs acceptables pour le consommateur. La pratique montre en effet que de nombreux consommateurs ne recherchent pas d'eux-mêmes les fournisseurs d'énergie les plus intéressants.

III. DISCUSSION

A. Titre 3. Chapitre 2. Agriculture: Bureau d'intervention et de restitution belge: articles 20 et 21 et titre 4, Indépendants et PME: articles 22 à 24

À propos des nouvelles dispositions concernant le BIRB, Mme Maes aimerait savoir si certaines démarches sont supprimées et si les modifications entraîneront aussi une réelle économie. Cela aura-t-il également des conséquences pour le personnel du BIRB ?

La ministre des Classes moyennes, des PME, des Indépendants et de l'Agriculture répond que les nouvelles dispositions impliquent une économie pour les opérateurs de l'industrie agro-alimentaire. Autrement dit, ces derniers ne paieront plus de rétributions. Le nombre de certificats baissera également. Alors que les rétributions atteignaient encore 50 000 euros pour 2008, ce montant ne sera plus que de 15 000 euros pour 2012. Cela peut s'expliquer par la baisse radicale des frais de recouvrement liée à la diminution du nombre de certificats.

Elle poursuit en indiquant que les effectifs du BIRB a diminué ces dernières années à la suite de ces nouvelles mesures et rappelle enfin que l'objectif est de transférer le BIRB aux Régions conformément à l'accord de gouvernement fédéral de décembre 2011.

En ce qui concerne les articles 23 et 24 du projet de loi portant des dispositions diverses (I), la ministre souligne encore que ces dispositions poursuivent le même objectif que les dispositions inscrites dans la proposition de loi nº 5-1041/1 de M. Van Rompuy et consorts modifiant l'article 91 de la loi du 30 décembre 1992 portant des dispositions sociales et diverses, en ce qui concerne la cotisation annuelle forfaitaire à charge des sociétés.

M. Van Rompuy reconnaît que les articles 23 et 24 du projet de loi résolvent de la même manière le problème qu'il souhaitait régler par le biais de la proposition de loi nº 5-1041/1. D'après la Cour constitutionnelle (arrêts nos 142/2012 et 103/2011), le terme « notamment » qui figure à l'article 91, alinéa 2, deuxième phrase, de la loi précitée du 30 décembre 1992, indique que le Roi a la possibilité de se baser sur d'autres critères que la taille de la société pour différencier le montant de la cotisation à charge des sociétés. Cette compétence de fixer un critère d'imposition n'appartient pas au Roi et viole ainsi le principe de légalité inscrit à l'article 170 de la Constitution. C'est la raison pour laquelle il est nécessaire de supprimer le mot « notamment » de l'article 91, alinéa 2, afin que plus aucune contestation ne soit possible en ce qui concerne la compétence déléguée au Roi.

B. Titre 5. Énergie

1. Questions et observations des membres

M. Laaouej se félicite des mesures proposées par le secrétaire d'État. Il est heureux de constater que le secrétaire d'État adopte une attitude cohérente à l'égard des problèmes actuels en matière d'énergie. Le 15 décembre 2011, l'intervenant avait déjà eu l'occasion de poser au secrétaire d'État une question concernant la tarification du gaz (voir Question orale de M. Ahmed Laaouej au secrétaire d'État à l'Environnement, à l'Énergie et à la Mobilité, et aux Réformes institutionnelles sur « la tarification du gaz » (nº 5-335)), à laquelle celui-ci avait déjà apporté la réponse suivante: « ... Pour réduire le prix en Belgique, il n'y a pas trente-six mille solutions. Il faut avant tout diversifier l'offre et accroître la concurrence, ce qui ne sera sans doute pas suffisant. Il faut également assurer une transparence beaucoup plus grande des prix mais, comme je viens de le rappeler, la composante « fournisseur » n'est pas le seul élément qui constitue le prix. Il y a d'autres composantes sur lesquelles nous avons une capacité régulatrice. Enfin, en fonction du succès ou non des autres paramètres, la déclaration gouvernementale prévoit la possibilité d'imposer des prix maxima et de réinvestir une partie de la rente nucléaire dans une réduction de la facture des ménages et des entreprises.

Comme vous le voyez, c'est une politique intégrée, tenant compte de tous ces éléments, qui nous permettrait d'avoir des prix qui n'augmentent pas plus vite que ceux des pays voisins. ... »

L'intervenant déclare dès lors que son groupe souscrit pleinement à la proposition de geler temporairement les indexations des contrats variables de gaz et d'électricité, mais il encourage le secrétaire d'État à rechercher encore d'autres solutions concrètes pour diminuer les factures énergétiques des consommateurs. M. Laaouej restera attentif à l'évolution de ce dossier.

M. Daems déclare que, sur le principe, on pourrait se demander quel est l'intérêt de procéder à des blocages de prix pour le gaz et l'électricité. Mais dès lors qu'on ne peut pas parler d'un fonctionnement normal de libre marché pour le secteur de l'énergie, l'intervenant peut comprendre les gels de prix proposés. Il ne faut toutefois pas perdre de vue que ces blocages de prix seront peut-être répercutés ultérieurement sur les consommateurs. La mesure proposée n'aura donc de sens que si l'on peut garantir que cette répercussion n'aura pas lieu. Mais alors, on grignotera les marges bénéficiaires des acteurs, que ce soient les producteurs, les distributeurs, les consommateurs finaux, ... Ce blocage des prix devra de toute façon être payé par quelqu'un. Lorsqu'il a élaboré le mécanisme de gel des prix, le secrétaire d'État a-t-il prévu que la différence entre les prix d'aujourd'hui et de demain ne sera pas répercutée sur le client ?

Pour montrer toute l'importance de sa question, l'intervenant cite un exemple. Au cours d'une présentation réalisée récemment par Eandis, l'un des distributeurs d'énergie, la possibilité d'une répercussion sur le consommateur final a précisément été retenue, à un certain moment, comme l'un des scénarios possibles.

M. Daems aimerait également obtenir des explications sur le lien, finalement non pertinent, entre le prix de l'électricité et le prix et du pétrole. En effet, toute la production d'électricité ne repose pas sur le pétrole. L'intervenant a également observé que lorsque le prix du pétrole a explosé, le prix de l'électricité a aussi augmenté. En revanche, lorsque le prix du pétrole a diminué, le prix de l'électricité n'a pas suivi ce mouvement. Cette situation étrange mérite d'être analysée plus en détail.

Ensuite, l'intervenant voudrait avoir des précisions sur les éléments concrets des paramètres d'indexation qui seront établis par la CREG, et sur la base desquels le gouvernement promulguera un arrêté royal définissant les critères que les fournisseurs peuvent utiliser pour fixer le prix facturé.

Enfin, M. Daems indique que le coût des politiques mises en œuvre est très souvent répercuté sur le prix de l'énergie. La politique de subvention du gouvernement flamand concernant les panneaux solaires en est l'exemple le plus frappant. Comme le distributeur d'énergie a été obligé d'acheter des certificats verts à un prix fixe, il a répercuté la perte ainsi générée sur le prix. C'est ainsi qu'une politique de subvention spécifique a été financée par toute la collectivité. C'est l'une des raisons pour lesquelles l'État fédéral est maintenant obligé de prendre des mesures telles que le gel des prix. L'intervenant estime que si une autorité régionale décide de subventionner certains achats en matière d'énergie verte, elle doit aussi financer sa mesure elle-même et l'inscrire au budget ad hoc. Il faudrait conclure des conventions à ce sujet entre les différents niveaux de pouvoir.

M. Bellot souhaite rappeler en premier lieu que, même si l'autorité fédérale n'est pas compétente en l'espèce, des parallèles existent entre la problématique des prix élevés de l'énergie et la problématique du prix de l'eau de distribution. Un nombre croissant de ménages éprouvent également des difficultés à payer leurs factures de consommation d'eau.

Il faut, en outre, garder à l'esprit que les prix de l'énergie comprennent trois composantes: le coût de l'énergie, les taxes supplémentaires découlant de la politique menée (certificats verts, tarifs sociaux, compteurs à budget, ...) et les coûts de distribution.

Lorsque l'on compare l'évolution des prix du mazout de chauffage à celle des prix du gaz, l'on constate qu'elles ne sont pas identiques: chaque secteur a ses propres mécanismes d'approvisionnement, de stockage et de fixation des prix. Il ne faut donc pas considérer comme un fait établi que les prix du gaz soient liés ou influencés par les prix du mazout de chauffage.

Lors d'une visite de travail au Qatar, il y a quelques années, M. Bellot a appris que les Pays-Bas pouvaient acheter du gaz à l'époque à un prix qui était de 7 % inférieur à celui que payait la Belgique. Qui plus est, les Pays-Bas ont pu conclure un contrat à ces conditions pour une durée de cinquante ans alors que la Belgique n'a pu le faire que pour une durée de trente ans. L'intervenant s'étonne qu'il existe des différences si marquées entre les marges de négociations. Est-il possible d'avoir une idée du prix moyen de l'énergie qui est facturé au consommateur aux Pays-Bas et en Belgique, hors coûts de distribution ?

En Belgique, les coûts de distribution de l'énergie sont une compétence régionale. À la lumière de simulations des prix de l'énergie que l'intervenant suit depuis trois ans, il a constaté que la flambée des prix se situe surtout au niveau des coûts de distribution, ceux-ci ayant augmenté deux fois plus vite que les coûts de l'énergie. Cela explique dès lors en grande partie l'augmentation significative de la facture énergétique pour le consommateur final. Force est donc de reconnaître, par honnêteté intellectuelle, que celui qui envoie les factures au consommateur final ne peut être tenu pour seul responsable des prix élevés de l'énergie. En outre, les différents coûts sont clairement ventilés sur la facture.

Enfin, M. Bellot ne peut pas expliquer de façon rationnelle pourquoi les prix de l'énergie en Belgique peuvent être à ce point différents par rapport à ceux qui sont pratiqués chez nos voisins (Pays-Bas, Allemagne et France). L'Allemagne et la France, par exemple, ne disposent toutefois pas de réserves de matières premières d'une importance telle qu'elle pourrait expliquer les prix énergétiques peu élevés pratiqués sur leur territoire.

L'intervenant peut donc comprendre des blocages temporaires des prix, mais il estime qu'une analyse approfondie des causes éventuelles des prix élevés dans notre pays doit être réalisée au cours de cette période. Sont-ils dus aux choix industriels, aux coûts élevés des investissements, aux obligations découlant de certaines décisions politiques, aux obligations juridiques, aux exigences administratives, ... qui sont imposées aux fournisseurs d'énergie ? M. Bellot compte bien que l'on fournisse des précisions sur ces différents éléments pour expliquer les différences de prix de l'énergie par rapport aux pays qui nous entourent. L'intervenant réitère que c'est aux Régions qu'il incombe d'assumer leurs responsabilités en ce qui concerne le coût de la distribution de l'énergie.

Mme Maes a une question technique au sujet du système du blocage provisoire des prix. L'Espagne a récemment eu recours à un tel système. Comme le cours des matières premières a continué d'augmenter, les fournisseurs d'énergie ont été contraints de vendre à perte à un moment donné, ce qui est interdit par la loi en Belgique. Le secrétaire d'État a-t-il tenu compte de ces éventuelles conséquences négatives et a-t-il prévu des solutions ?

M. Sannen, le président, déclare pouvoir adhérer à la mesure d'urgence du blocage des prix du gaz et de l'électricité, mais à condition que les causes des écarts de prix avec les pays voisins soient analysées en profondeur au cours de cette période et que des initiatives soient prises en vue d'un changement de cap politique, comme prévu dans l'accord de gouvernement fédéral de décembre 2011.

L'intervenant partage le point de vue de M. Daems selon lequel il faut parvenir à une dissociation complète des prix pétroliers et des prix des autres énergies: chaque produit énergétique doit avoir un mode de fixation des prix qui lui est propre. Les intervenants précédents ont évoqué à juste titre que le prix de l'énergie se compose non seulement du prix du produit, mais aussi du prix que le distributeur facture pour distribuer l'énergie. Bien que les certificats verts ou d'autres coûts imposés par la politique n'influencent pas la formation du prix du gaz, ce dernier reste élevé en Belgique. Sans doute est-ce dû à la politique menée par le distributeur. Certains distributeurs envisagent par exemple de généraliser l'utilisation de compteurs intelligents. Il est toutefois permis de s'interroger sur l'opportunité d'une telle décision, vu le coût qu'elle représente.

En réponse aux remarques de M. Daems à propos de la politique menée par le gouvernement flamand en matière de certificats verts, M. Sannen indique que l'instauration des certificats verts a été décidée par les autorités flamandes et non par les distributeurs d'énergie. Les autorités flamandes ont pris cette décision pour pouvoir se conformer à des obligations européennes et internationales les contraignant à générer une certaine quantité d'énergie renouvelable à un prix abordable et à rendre intéressants les investissements dans ce type d'énergie. Il arrive que ce genre d'investissements soit également répercuté par les fournisseurs d'énergie: c'est, par exemple, le cas de l'énergie éolienne produite en mer. L'intervenant reconnaît toutefois que la fixation des prix des certificats verts a entraîné des effets indésirables auquels on a remédié dans l'intervalle, en tout cas pour les panneaux solaires. M. Sannen partage le point de vue de M. Daems selon lequel ce n'est pas aux autres utilisateurs de supporter la charge de cette politique de subventionnement. Reste que ce type de politique visant à stimuler les énergies alternatives aura toujours un prix et devra toujours être financée soit par les deniers publics, soit au travers de la fixation du prix de l'énergie.

Enfin, M. Sannen souligne également que les problèmes des certificats verts ne viennent pas vraiment des ménages de la classe moyenne qui ont installé des panneaux solaires sur leur toit, mais qu'ils ont plutôt été causés par l'industrie qui a investi massivement dans des parcs de panneaux solaires et ainsi empoché une part considérable des certificats en question.

2. Réponse du secrétaire d'État à l'Énergie, à l'Environnement et à la Mobilité

Le secrétaire d'État précise que le gouvernement fédéral mettra tout en œuvre, dans les limites des compétences qui lui ont été attribuées, pour maîtriser à l'avenir les prix de l'énergie. Il veillera notamment à maintenir aussi basse que possible, pour les consommateurs finals, la compensation du coût des certificats verts pour les éoliennes off-shore, en recourant à des certificats verts dynamiques.

Le gouvernement fédéral surveillera également de près les effets de décisions politiques telles que le fonds Kyoto, les tarifs sociaux, etc., pour éviter qu'elles ne provoquent des augmentations des prix de l'énergie pour le consommateur.

En ce qui concerne les frais de distribution, le secrétaire d'État prévoit à très court terme une concertation avec les Régions. Les gouvernements régionaux sont également soucieux de maintenir aussi bas que possible les prix de l'énergie pour les citoyens. Le secrétaire d'État s'engage à inciter les gouvernements régionaux à prendre des mesures similaires à celles prises par le gouvernement fédéral, par exemple en introduisant des certificats verts dynamiques.

Comme M. Bellot, le secrétaire d'État attire l'attention sur le fait que la compression des frais de distribution aura en tout cas une incidence sur les recettes des intercommunales et des villes et communes. Dans ce domaine, l'autorité fédérale a décidé de jouer un rôle de précurseur pour amorcer en même temps le débat délicat avec les villes et communes et leur prouver qu'il est possible de prendre des mesures pour comprimer les prix de l'énergie au bénéfice des utilisateurs finals. C'est important aussi bien pour les citoyens consommateurs que pour la compétitivité des entreprises, et ce à double titre, tant pour la facturation que pour l'évolution de l'index.

Comme les précédents intervenants, le secrétaire d'État est convaincu qu'il n'est plus acceptable que la facture de gaz ou d'électricité augmente à la moindre hausse des prix du pétrole. Mais certains fournisseurs d'énergie sont encore liés par des contrats d'approvisionnement en pétrole. Cela peut effectivement avoir des conséquences financières, qu'ils répercutent de manière limitée sur les consommateurs.

Mais il est inacceptable d'appliquer encore aujourd'hui des paramètres totalement indépendants du produit vendu. Voilà pourquoi le blocage des prix coïncide avec l'élaboration de paramètres qui seront fixés dans un arrêté royal, et qui seront les seuls à pouvoir encore être utilisés pour déterminer le prix à facturer.

Le secrétaire d'État déclare partager l'opinion de MM. Daems, Sannen et Bellot: un simple blocage des prix ne suffira pas. Mais l'intervenant pense que ce blocage des prix est nécessaire pour pouvoir prendre d'autres mesures indispensables. Ces mesures seront élaborées et négociées durant les mois à venir. Le délai court à partir du 1er avril 2012.

Le secrétaire d'État répond à la question de Mme Maes que l'article 29 du projet de loi prévoit que le Roi peut, par arrêté délibéré en Conseil des ministres, mettre en vigueur le mécanisme d'indexation, avant le 1er janvier 2013, lors de la survenance d'un cas de force majeure résultant d'une cause imprévisible, extérieure et irrésistible, ou lors de la manifestation d'un effet pervers indésirable résultant de la mesure d'interdiction d'indexation à la hausse. Cette entrée en vigueur anticipée annule le mécanisme de gel de l'indexation des prix variables de l'électricité et du gaz.

Pour ce qui concerne l'observation de M. Bellot au sujet des achats de gaz au Qatar, le secrétaire d'État précise que les autorités belges n'achètent plus de gaz naturel au Qatar. En outre, un consensus commence à se former au niveau de l'Union européenne pour limiter la durée admise des contrats d'achat de gaz naturel et de pétrole. À l'avenir, il deviendrait impossible de conclure de tels contrats par exemple pour une durée de trente ans.

3. Répliques

En réponse à l'intervention de M. Sannen, M. Daems déclare qu'il reste d'avis que, quand une autorité politique prend une décision politique, elle doit en supporter elle-même les conséquences. Dans le secteur de l'énergie, plusieurs mesures ont évolué vers une forme de fiscalité déguisée.

L'intervenant se déclare explicitement favorable aux sources d'énergie alternatives, mais est opposé à l'énergie nucléaire: par le passé, l'énergie nucléaire a étouffé dans l'oeuf le développement des sources d'énergie alternatives et c'est encore le cas aujourd'hui.

En ce qui concerne la politique relative au Fonds Kyoto et aux tarifs sociaux, M. Daems estime, ici aussi, que le coût des mesures prises doit être clairement inscrit au budget du gouvernement concerné et qu'il ne peut pas être répercuté, par toutes sortes de stratagèmes, dans les prix énergétiques facturés à l'ensemble des consommateurs. Lorsqu'une politique fixée à un échelon individuel est collectivisée de la sorte, elle perd toute transparence.

Enfin, l'intervenant indique que le mot « indexation » figurant dans le projet de loi n'a pas été bien choisi pour qualifier l'objectif visé. Il s'agit de fixer les prix en tenant compte de l'évolution d'un certain nombre de paramètres. Il renvoie aussi à la régulation du secteur des télécommunications, dont on pourrait s'inspirer pour fixer les contours de la politique énergétique future.

M. Sannen, président, reconnaît que la politique mise en œuvre pour promouvoir l'utilisation de sources d'énergie alternatives manque de transparence et qu'il existe des formes d'impôts larvés dans différents secteurs. Il n'en reste pas moins que le principe du pollueur-payeur est un principe noble dont il faut aussi pouvoir tenir compte dans le secteur énergétique. Il faut évidemment être vigilant face aux éventuels effets indésirables d'un tel système et effectuer les corrections qui s'imposent. C'est d'ailleurs ce qui a été fait dans le cadre de la politique de subventionnement des panneaux solaires. Partant du principe que l'énergie est également un bien de première nécessité, l'intervenant considère lui aussi que le financement de cette politique de subventionnement doit être inscrit au budget général.

IV. VOTES

L'ensemble des articles envoyés à la commission des Finances et des Affaires économiques est adopté par 9 voix et 2 abstentions.

La proposition de loi nº 5-1041/1 modifiant l'article 91 de la loi du 30 décembre 1992 portant des dispositions sociales et diverses, en ce qui concerne la cotisation annuelle forfaitaire à charge des sociétés, jointe au projet, devient dès lors sans objet.

Le rapporteur, Le président,
Rik DAEMS. Ludo SANNEN.