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28 MARS 2011
Cette histoire, révélée dans la presse en janvier 2011, d'un gynécologue anversois qui procédait à des inséminations pour obtenir un enfant de tel ou tel sexe, a défié la chronique et créé la stupeur.
Sa méthode consiste à placer du sperme dans une centrifugeuse spéciale afin de séparer les chromosomes X, qui sont plus lourds, des chromosomes Y. Le chromosome « Y » du spermatozoïde associé au chromosome « X » de l'ovule de la femme donne un garçon et le chromosome « X » du spermatozoïde associé au chromosome « X » de l'ovule de la femme donne une fille. Le médecin pratique alors une insémination de ces cellules souches. Le sperme souhaité inséminé donne au couple la probabilité à 80 % d'avoir un bébé avec le sexe désiré. Chaque insémination coûte 1 200 euros et il en faut en moyenne trois pour que l'ovule soit fécondée.
Certains couples défient la nature et veulent choisir le sexe de leur enfant soit pour assurer la pérennité du nom, soit pour assurer la diversité au sein de la fratrie, soit pour choisir le sexe de leur unique enfant, soit pour avoir un fils ou une fille comme ainé. Agir de la sorte par pure convenance personnelle est, pour les auteurs, inacceptable. Les techniques sont en outre loin d'être totalement fiables. Que feront les parents si leur choix n'aboutit pas ?
Michel Dupuis, philosophe et directeur de l'Unité d'éthique médicale de l'Université catholique de Louvain (UCL), estime qu'« on choisit de « faire », de concevoir quelqu'un qui ne sera jamais à nous, qui existe par lui-même, qui est autre. Cette altérité, c'est nous qui la posons, mais nous nous devons de la respecter. L'on sait aussi que l'enfant déborde les catégories que l'on avait imaginées, qu'il contredit nos attentes. Choisir le sexe d'un enfant, c'est lui attribuer des caractéristiques, réelles ou supposées. C'est donc déjà un peu influencer sa vie, mettre une mainmise inadmissible sur son existence ».
L'Association belge des obstétriciens s'est déclarée également indignée d'une telle pratique.
Cette pratique qui aboutit au bébé à la carte est-elle légale ? Que dit exactement la loi du 6 juillet 2007 relative à la procréation médicalement assistée (PMA) en ce qui concerne l'utilisation des gamètes axée sur la sélection du sexe ?
Pour sa part, la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro en son article 5, 5º, stipule qu'il est interdit d'accomplir des recherches ou des traitements axés sur la sélection du sexe, à l'exception de la sélection qui permet d'écarter les embryons atteints de maladies liées au sexe.
En ce qui concerne la loi du 6 juillet 2007, l'esprit de la loi est clair: il est interdit d'utiliser la PMA pour aboutir à un enfant de son choix, avec telles ou telles caractéristiques physiques ou de tel ou tel sexe.
Plus précisément, tout comme pour le don d'embryons, la loi du 6 juillet 2007 énonce en son article 23, 2º qu'« est interdit le don de gamètes axé sur la sélection du sexe, tel que défini par l'article 5, 5º, de la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro, c'est-à-dire axé sur la sélection du sexe, à l'exception de la sélection qui permet d'écarter les spermatozoïdes atteints de maladies liées au sexe ».
L'on parle donc d'une interdiction du « don » de gamètes quand il est axé sur la sélection du sexe. Rappelons que le donneur de gamètes est défini dans cette même loi de 2007 en l'article 2, p), comme étant la personne cédant par convention à titre gratuit, conclue avec un centre de fécondation in vitro, des gamètes pour qu'ils soient utilisées au cours d'une procréation médicalement assistée chez des receveurs de gamètes, sans qu'aucun lien de filiation ne puisse être établi entre l'enfant à naître et le donneur.
Quand les gamètes proviennent d'un donneur, toute utilisation de celles-ci pour procéder au choix du sexe est clairement interdite par la loi. Par contre, lorsqu'il s'agit des propres gamètes du couple, comme c'est le cas dans l'affaire qui nous préoccupe ici, puisque la sélection s'opère au niveau des spermatozoïdes qui peuvent être ceux de l'homme du couple, ce n'est pas clairement interdit. La loi actuelle présente une lacune sur cet aspect là.
Les auteurs ont donc l'objectif de combler cette lacune de la loi actuelle pour éviter ce genre de pratiques. La loi de 2007 fixe déjà toute une série de balises pour éviter les dérives, celle-ci doit être ajoutée. Elle a toute son importance. Même si elle est déjà induite de l'esprit de la loi, elle se doit d'être exprimée clairement dans les principes généraux applicables aux gamètes.
L'objectif de cette proposition de loi est d'insérer dans le chapitre I sur les principes généraux du titre V relatif aux gamètes un nouvel article qui interdit toute utilisation, sous toute forme que ce soit, de gamètes, axée sur le choix du sexe à l'exception de la sélection qui permet d'écarter les spermatozoïdes atteints de maladies liées au sexe, tel que stipulé dans l'article 5, 5º, de la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro.
En ce qui concerne les embryons, le problème est déjà réglé dans la mesure où le diagnostique préimplantatoire, défini comme étant la technique consistant, dans le cadre d'une fécondation in vitro, à analyser une ou des caractéristiques génétiques d'embryons in vitro afin de recueillir des informations qui vont être utilisées pour choisir les embryons qui seront implantés, est interdit s'il est axé sur la sélection du sexe à l'exception de la sélection qui permet d'écarter les embryons atteints de maladies liées au sexe, tel que stipulé dans l'article 5, 5º, de la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro.
Jacques BROTCHI Christine DEFRAIGNE. |
La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.
Dans la loi du 6 juillet 2007 relative à la procréation médicalement assistée et à la destination des embryons surnuméraires et des gamètes est inséré un article 37/1 rédigé comme suit:
« Art. 37/1. — Est interdite toute utilisation, sous toute forme que ce soit, de gamètes, axée sur le choix du sexe du futur embryon, à l'exception de la sélection qui permet d'écarter les spermatozoïdes atteints de maladies liées au sexe, tel que stipulé dans l'article 5, 5º, de la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro. »
8 février 2011.
Jacques BROTCHI Christine DEFRAIGNE. |