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De voorzitter. - De heer Bernard Clerfayt, staatssecretaris voor de Modernisering van de Federale Overheidsdienst Financiën, de Milieufiscaliteit en de Bestrijding van de fiscale fraude, toegevoegd aan de minister van Financiën, antwoordt.
M. Alain Destexhe (MR). - Le paysage religieux belge a considérablement évolué depuis quelques dizaines d'années, en raison notamment des flux migratoires, des nouvelles conversions de citoyens belges et de l'apparition de nouveaux mouvements philosophiques et religieux.
Le 19 octobre dernier, la police a procédé à une perquisition dans le Gurdwârâ de Vilvorde, le principal temple sikh de Belgique. Elle a eu lieu au beau milieu d'une cérémonie très importante pour les Sikhs puisqu'elle correspond en quelque sorte à la messe de Noël ou de Pâques pour les catholiques. Il s'agit de 48 heures de lectures ininterrompues qui devaient commémorer le 300e anniversaire des textes sacrés du sikhisme. Cette perquisition a donc suscité une vive émotion au sein de cette communauté. La police, qui ne semblait d'ailleurs que peu préparée, a investi ce temple dans le cadre du démantèlement d'un réseau indien de trafic d'êtres humains.
À la suite de cet incident, je me suis interrogé sur la liberté religieuse en Belgique et en particulier sur les rapports entre religions et sectes. Le droit belge reconnaît le principe constitutionnel de la liberté religieuse, protégée par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme. La reconnaissance d'un culte est en revanche une décision politique, principalement dans un but de financement, mais elle est indépendante de cette liberté constitutionnelle de protection des cultes.
La récente perquisition au temple de Vilvorde pousse la communauté sikhe à demander la reconnaissance de sa religion, pensant, probablement à tort, que seuls les cultes reconnus bénéficient de la protection constitutionnelle et de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et peuvent éviter ce genre d'intervention de la police.
Afin de rassurer cette communauté, pouvez-vous préciser s'il est nécessaire pour un culte d'être reconnu pour bénéficier du respect des lieux religieux ? Existerait-il à cet égard une différence entre cultes « reconnus » et « non reconnus » ?
Selon le rapport d'enquête parlementaire de mars 1997 sur les sectes, la Belgique se trouve dans une situation très particulière. D'une part, elle compte des religions dites « reconnues » et, d'autre part, les autres qui sont pour la plupart considérées comme « sectes ». Or, force est de constater qu'il n'existe aucune définition juridique ni du terme « religion » ni du terme « secte ». Il n'existe à ma connaissance dans la loi que les notions de « culte reconnu » et de « secte nuisible », ce qui n'aide pas à la compréhension de la distinction à établir entre une « religion » et une « secte ». La confusion à ce sujet semble grande et de nature à créer des situations tout à fait inéquitables.
Ce n'est pas la première fois qu'en Belgique, à tort ou à raison, on associe une minorité religieuse ou de conviction à des activités criminelles, réelles ou supposées, et que des perquisitions ont lieu dans des lieux de culte. Une tendance semble se dessiner selon laquelle une « secte » ne serait pas une « religion » et ces « sectes » abuseraient de la liberté de religion, affirmation qui semble avoir été condamnée par la cour d'appel de Bruxelles. Celle-ci a souligné que même un groupe susceptible d'être qualifié de secte bénéficie des dispositions relatives à la liberté religieuse et à la liberté d'association, prévues par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.
La Belgique a d'ailleurs été pointée du doigt en matière de liberté religieuse par certaines instances internationales (OSCE, ONU) ainsi que chaque année dans l'Annual Report on International Religious Freedom du Département d'État américain.
Pourriez-vous m'indiquer, monsieur le ministre, comment lutter contre les mouvements religieux liberticides et contre les sectes nuisibles tout en respectant le principe de non-discrimination ?
La perquisition récente au Gurdwârâ de Vilvorde inquiète les membres de minorités religieuses non reconnues. D'aucun parmi nos concitoyens ressentent cette manière de procéder envers des lieux religieux comme très inquiétante et constituant une menace sérieuse à l'encontre de la liberté de culte. Perquisitionner dans des lieux de culte nécessite des mesures tout à fait particulières. Il y a aujourd'hui des craintes que cette perquisition constitue un précédent dangereux.
Quelle est, monsieur le ministre, votre position ? Quelles garanties l'État peut-il donner pour éviter que de telles situations ne se représentent ?
M. Bernard Clerfayt, secrétaire d'État à la Modernisation du Service public fédéral Finances, à la Fiscalité environnementale et à la Lutte contre la fraude fiscale, adjoint au ministre des Finances. - Je vous lis la réponse du ministre de la Justice.
Je tiens d'abord à souligner qu'une instruction judiciaire est en cours dans ce dossier. Je m'abstiendrai dès lors d'apporter des commentaires.
La reconnaissance des cultes en Belgique a comme but principal le financement de ces cultes. Au niveau fédéral cela implique le payement des traitements et des pensions des ministres des cultes reconnus, alors qu'au niveau régional, le financement porte sur le déficit des entités locales - paroisses, communautés - et des interventions diverses concernant l'entretien et la construction des édifices consacrés aux cultes.
La définition d'un lieu de culte relève de la compétence interne d'un culte, qu'il soit reconnu ou non. Il n'appartient donc pas aux autorités de s'immiscer dans cette matière. Toutefois il est à noter qu'au niveau pénal, il n'y a aucune différence entre des lieux de culte, que celui-ci soit reconnu ou non. Si une intervention doit avoir lieu dans le cadre d'une instruction, elle relève des autorités compétentes.
La loi du 2 juin 1998 portant création d'un Centre d'information et d'avis sur les organisations sectaires nuisibles et d'une Cellule administrative de coordination en matière de lutte contre les organisations sectaires nuisibles vise uniquement ces dernières, lesquelles sont définies à l'article 2.
Hormis cette définition, la reconnaissance d'un culte ne porte aucune connotation d'appréciation sur les cultes non reconnus ; les cultes ont la possibilité de demander cette reconnaissance mais ce n'est pas une obligation.
M. Alain Destexhe (MR). - Je comprends que le ministre ne souhaite pas commenter une affaire en cours, mais il me semble quasi inacceptable que la police procède à une perquisition lors d'une grande cérémonie d'une religion reconnue en Belgique, qu'elle soit musulmane, juive ou chrétienne.
Nous soutenons tous la lutte contre la criminalité, mais les autres cultes que les religions reconnues ont aussi droit au respect. En l'occurrence, la police ou les autorités judiciaires ignoraient sans doute l'importance de la cérémonie, n'étant peut-être pas assez familiarisés avec ce type de religion moins courant, donc moins connu.