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M. Josy Dubié (Ecolo). - Les ministres des Affaires étrangères des dix-neuf pays de l'OTAN se réuniront les 6 et 7 décembre prochains - à Bruxelles je crois - pour examiner les questions débattues actuellement par l'Alliance. Parmi celles-ci, les demandes d'adhésion à l'Alliance de la Géorgie et de l'Ukraine.
La demande de la Géorgie pose problème. En effet, des experts de l'OSCE ont récemment rendu un rapport qui va dans le même sens que celui que nous avions établi ma collègue Christine Defraigne et moi, à savoir que c'est bien la Géorgie du président Saakashvili qui a lancé, dans la nuit du 7 au 8 août dernier, une violente offensive contre sa province sécessionniste d'Ossétie du Sud. Cette attaque a fait de nombreuses victimes civiles et a causé la mort de militaires russes des forces de maintien de la paix. Elle a aussi entraîné une violente contre-offensive russe, le potentiel militaire géorgien a été détruit, il y a de nouveau eu de nombreuses victimes et une partie du territoire géorgien a été temporairement occupée par l'armée russe.
À la suite à cette guerre, la Russie a reconnu l'indépendance des deux petits territoires géorgiens séparatistes d'Ossétie du Sud et d'Abkhazie, ce qui plonge la région dans une grande incertitude juridique.
Les conséquences de cette guerre déclenchée par la Géorgie sont donc lourdement négatives pour la stabilité internationale et les relations avec la Russie.
Dès lors se pose la question de l'adhésion de la Géorgie à l'OTAN, exigée par le vice-président américain Dirk Cheney. En cas de réponse positive, l'Alliance pourrait être impliquée, donc aussi la Belgique, dans les conséquences d'une nouvelle action militaire aventuriste des dirigeants géorgiens.
Mardi dernier j'ai posé la question à M. Javier Solana, haut représentant pour la politique étrangère de l'Union Européenne, présent en commission au Sénat, sur l'opportunité de l'adhésion éventuelle de la Géorgie à l'OTAN. Sa réponse a été sans ambiguïté : la Géorgie, mais aussi l'Ukraine, ne sont pas « mûres » pour une adhésion à l'OTAN ni même pour entrer dans un MAP préparatoire.
Quelle sera la position du gouvernement belge le mois prochain sur ces demandes d'adhésion ?
Le gouvernement belge est-il prêt à activer si nécessaire l'article 10 du Traité de l'Atlantique Nord qui prévoit l'accord unanime des membres de l'Alliance pour toute nouvelle adhésion d'un pays européen et donne donc de facto un droit de veto à tout pays membre de l'OTAN ?
M. Karel De Gucht, ministre des Affaires étrangères. - Il est exact que la question du « Membership Action Plan » concernant la Géorgie mais aussi l'Ukraine sera au nombre des questions importantes discutées par les ministres des Affaires étrangères de l'OTAN lors de leur réunion à Bruxelles les 2 et 3 décembre prochains.
M. Dubié se souviendra que la déclaration du Sommet de l'OTAN de Bucarest du 3 avril dernier précisait déjà la position de l'OTAN sur cette question : la Géorgie et l'Ukraine deviendraient membres de l'Alliance atlantique, la prochaine étape vers cette adhésion étant l'octroi d'un MAP. Il était dit également que l'OTAN et les deux États concernés entameraient une coopération politique à haut niveau pour examiner les questions en suspens concernant leur candidature à un MAP. Les ministres des Affaires étrangères des Alliés devaient aussi procéder à une première évaluation de l'évolution de la situation lors de leur réunion de décembre 2008.
C'est ce que nous ferons précisément la semaine prochaine puisque nous procéderons à une première évaluation des progrès enregistrés.
La Belgique n'entend pas aller au-delà, si ce n'est concernant la prise d'éventuelles mesures de coopération supplémentaires entre ces deux États et l'OTAN. Je ne suis en tout cas pas d'avis qu'il faille leur octroyer un MAP dès maintenant.
S'agissant de la Géorgie, puisque votre question porte sur ce pays en particulier, je considère que l'octroi d'un MAP n'améliorerait en rien la sécurité dans cette région. Un MAP est une étape technique qui, notamment du fait de la récente crise en Géorgie, s'est vu attribuer une valeur symbolique inhabituelle. Je répète que le MAP ne veut pas dire adhésion et ne signifie pas que la Géorgie pourrait, par exemple, se prévaloir de l'article 5 du Traité de l'OTAN relatif à la garantie de sécurité collective.
Force est de constater que la déclaration de Bucarest reste pleinement valable et que nous devons continuer à oeuvrer, avec la Géorgie et l'Ukraine, en vue de leur adhésion. Lors d'une prochaine évaluation, nous verrons s'il y a lieu ou non de considérer que le MAP est un point de passage obligé vers cette adhésion.
M. Josy Dubié (Ecolo). - Je remercie le ministre de sa réponse. J'en conclus que ce point ne figure pas à l'ordre du jour de la réunion de décembre.
Je rappelle toutefois un des points de la résolution votée en novembre 2006 par le Sénat : « Les limites à l'élargissement de l'Alliance doivent être réservées aux seuls pays européens qui n'ont pas de contentieux avec leurs voisins ». On ne peut pas dire que ce soit le cas de la Géorgie pour l'instant.
Je suis satisfait en ce qui concerne la réunion de décembre mais, dans le futur, il faudra quand même respecter la résolution votée par le Sénat.