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Belgische Senaat

Handelingen

DONDERDAG 14 FEBRUARI 2008 - NAMIDDAGVERGADERING

(Vervolg)

Vraag om uitleg van mevrouw Christiane Vienne aan de vice-eersteminister en minister van Financiën en Institutionele Hervormingen over «de fiscale status van de grensarbeiders en de eventuele wijziging van het bilaterale belastingverdrag» (nr. 4-89)

De voorzitter. - Mevrouw Inge Vervotte, minister van Ambtenarenzaken en Overheidsbedrijven, antwoordt.

Mme Christiane Vienne (PS). - Comme on le sait, en matière de travailleurs transfrontaliers, la France et la Belgique sont liées par une convention fiscale bilatérale du 10 mars 1964, modifiée par un avenant du 8 février 1999. Cette convention prévoit un régime spécifique pour les travailleurs frontaliers qui sont imposés dans l'État de leur résidence, contrairement au modèle de convention de l'OCDE qui prévoit, en principe, une imposition au lieu d'exercice de l'activité.

Lors de la dernière législature, nous n'avons pas remis en cause le statut de frontalier. Néanmoins, tant les organisations syndicales que le pouvoir politique ont souhaité en finir avec ce régime afin de nous aligner sur le modèle OCDE et ainsi mettre un terme à cette situation de concurrence entre travailleurs belges et français auprès des employeurs belges.

Si mes informations sont exactes, le vice-premier ministre a signé avec le ministre français compétent un nouveau protocole d'accord qui doit encore être ratifié par les parlements des pays concernés. Dans le nouveau projet élaboré avec le ministre français, les travailleurs frontaliers français travaillant actuellement en Belgique pourront conserver un statut particulier et bénéficier d'une période transitoire de 25 ans, avec la mise en place d'une tolérance de 30 jours ouvrables pour ceux qui s'éloigneraient de la zone frontalière belge.

J'estime tout d'abord que ce statut spécial est déplacé, eu égard aux pourcentages de chômage dont souffrent les régions frontalières du sud du pays. En effet, le taux de chômage dans la région de Tournai-Mouscron avoisine les 20%.

On pourrait penser que les demandeurs d'emploi wallons manquent de motivation, mais cette analyse est totalement fausse. À partir du moment où les travailleurs français ont un salaire poche qui, à qualification égale, est approximativement supérieur de 20% à celui des résidents belges à cause du statut fiscal transfrontalier dont ils bénéficient, vous comprenez aisément que la motivation des travailleurs français à venir travailler en Belgique est importante et que des travailleurs français plus qualifiés acceptent des emplois moins qualifiés, ce qui est tout bénéfice pour les entrepreneurs.

Je tiens à préciser que ce sont tous les entrepreneurs belges, tant flamands que wallons, qui bénéficient de la situation et qu'il n'y a donc là aucun fantasme communautaire. J'invite les personnes intéressées à aller constater, dans les zonings de Mouscron, que dans certaines entreprises 80% de la main-d'oeuvre sont constitués de travailleurs français.

Ainsi, un entrepreneur peut engager un travailleur français disposant, par exemple, d'un master et le payer comme un bachelier. Le travailleur y trouvera encore largement son compte.

Par ailleurs, nous sommes bien dans une situation de concurrence totalement déloyale puisque nous avons, à côté de cette partie de la Wallonie picarde, un marché de l'emploi qui est considérable. La Communauté urbaine de Lille et ses environs comptent deux millions d'habitants. Pour un entrepreneur mouscronnois qui doit recruter un travailleur et qui a vingt candidats français, un Wallon et un Flamand, la probabilité qu'il engage un Français est très importante.

Aujourd'hui, 25.000 travailleurs français viennent chaque matin sur le territoire belge, contre seulement 6.000 Belges qui vont en France.

Contrairement aux réactions assez superficielles de l'UNIZO et de certains entrepreneurs wallons, je suis convaincue que le statut spécial que le vice-premier ministre propose d'octroyer aux travailleurs transfrontaliers français travaillant en Belgique devrait être de maximum cinq ans, c'est-à-dire le temps nécessaire pour permettre aux entreprises de s'adapter.

Le FOREm est de plus en plus actif dans le domaine de la formation dans les régions concernées, notamment en collaboration de plus en plus étroite avec le VDAB afin de développer des synergies et de former des travailleurs des deux côtés de la frontière linguistique. Par ailleurs, si des entreprises tiennent absolument à disposer de travailleurs français, ce qui est leur droit le plus strict, elles doivent les payer au même tarif que les travailleurs belges. Dès lors, la proposition d'octroi d'avantages fiscaux jusqu'en 2034 me semble excessive.

La tournure communautaire que prend ce dossier est totalement déplacée. Je crains sa mise au frigo, ce qui serait synonyme de report aux calendes grecques du respect des conventions de l'OCDE.

Voici quelques jours, le premier ministre a déclaré que la nouvelle convention serait finalement retardée d'un an, voire de trois, si aucune garantie n'était fournie aux entreprises du nord du pays. C'est quelque peu ridicule. Quelle est la position actuelle du ministre ? Le parlement français a-t-il déjà marqué son accord sur le projet ? Vers quelles solutions nous dirigeons-nous ?

(Voorzitter: de heer Hugo Vandenberghe, eerste ondervoorzitter.)

Mme Inge Vervotte, ministre de la Fonction publique et des Entreprises publiques. - Je vous lis la réponse du vice-premier ministre et ministre des Finances et des Réformes institutionnelles.

À ma connaissance, l'avenant à la Convention belgo-française du 10 mars 1964 qui a été signé le 13 décembre dernier n'a pas encore été approuvé par le parlement français. La période transitoire de 25 ans qui est prévue en faveur des frontaliers résidents de France est en effet très longue. Elle vise avant tout à tenir compte de la situation des frontaliers engagés dans ce régime et à éviter, compte tenu de l'importante différence de niveau entre les impôts belges et français, que ces personnes se trouvent confrontées brutalement à d'importantes pertes de revenus, ce qui n'aurait pas manqué de provoquer des drames sociaux.

D'ailleurs, comme je l'ai déjà indiqué en réponse à la question écrite nº 4-46 du 30 octobre 2007, l'instauration d'une période transitoire aussi longue constituait une condition sine qua non pour les autorités françaises. Sans une telle période transitoire, la conclusion de l'avenant n'aurait donc pas été possible et le régime frontalier tel qu'il est prévu par l'actuelle convention aurait alors perduré indéfiniment. Je rappelle qu'une période transitoire de 15 ans avait en son temps été jugée insuffisante par la partie française.

Par ailleurs, les entreprises qui exercent leur activité dans la zone frontalière belge, en particulier dans le sud de la Flandre occidentale, affirment qu'elles ne trouvent pas en Belgique la main d'oeuvre dont elles ont besoin et craignent que la suppression du régime frontalier les prive d'une main d'oeuvre nécessaire à la bonne conduite de leurs activités. Il a donc été convenu avec ces entreprises d'envisager un éventuel report, d'un an au minimum et de trois ans au maximum, du début de la période transitoire.

L'avenant étant un instrument bilatéral, il ne peut être modifié sans l'assentiment de la France. Je ne peux donc encore dire de quelle manière cette modification serait réalisée. J'envisage de conclure un nouvel avenant modifiant l'avenant du 13 décembre. Ceci permettrait de poursuivre les travaux en vue de l'approbation des dispositions contenues dans l'avenant signé le 13 décembre et de ne pas retarder l'entrée en vigueur des dispositions relatives aux travailleurs frontaliers belges et à la perception par les communes belges des additionnels communaux.

Mme Christiane Vienne (PS). - Je maintiens qu'il s'agit d'une concurrence totalement déloyale pour les travailleurs belges. Je suis étonnée quand j'entends des entrepreneurs dire qu'ils ne trouvent pas de main d'oeuvre qualifiée alors qu'existe quand même à Courtrai une université au moins aussi connue et renommée que celle de Lille. Je comprends dès lors les réticences du gouvernement français mais je ne vois pas pourquoi les travailleurs belges devraient en subir le préjudice.