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De voorzitter. - De heer Hervé Jamar, staatssecretaris voor Modernisering van de Financiën en de Strijd tegen de fiscale fraude, toegevoegd aan de minister van Financiën, antwoordt.
M. Josy Dubié (ECOLO). - Je regrette l'absence du ministre de l'Intérieur. Il s'agit d'un sujet dont j'aimerais m'entretenir avec lui en particulier.
Notre pays compte plusieurs dizaines voire centaines de milliers de demandeurs d'asile et de sans-papiers, qui proviennent des quatre coins du monde et qui ont vécu des situations très souvent dramatiques.
Néanmoins, dans cet océan de détresse, les demandeurs d'asile et les sans-papiers, déboutés, de nationalité iranienne, vivent une situation particulièrement pénible et totalement absurde.
En effet, non seulement ces personnes ne peuvent retourner en Iran mais en outre, les déboutés et les sans-papiers ne peuvent pas non plus rester en Belgique ! Je me suis rendu hier, avec des collègues, dans une église d'Etterbeek, où les Iraniens étaient plus d'une centaine. La question qu'ils se posent est celle-ci : « Où donc devons-nous aller ? ». Cette situation kafkaïenne plonge toutes ces personnes dans une détresse absolue.
Depuis le triomphe de la révolution islamique en 1979, la situation politique connaît effectivement, en Iran, une détérioration pratiquement continue, à l'exception de l'expérience « réformiste » - décevante, il faut bien le reconnaître - du président Mohammad Khatami, sabotée par les ultras du régime.
Cette détérioration débouche aujourd'hui sur une dictature religieuse extrémiste et fanatique, personnifiée par le nouveau président, Mahmoud Ahmadinejad, et sur un durcissement généralisé du régime, caractérisé par la relance des arrestations massives d'opposants, souvent torturés.
À présent, le régime islamiste de Téhéran s'en prend aussi aux minorités religieuses vivant en Iran, telles que les bahá'ís, les soufis, qui sont des musulmans sunnites, les juifs et les chrétiens, ainsi qu'aux homosexuels.
Un retour forcé des personnes de nationalité iranienne séjournant dans notre pays est donc impensable car il impliquerait un réel danger pour leur vie ou pour leur intégrité physique.
De plus, il n'existe pas d'accord d'extradition entre l'Iran et la Belgique, ce qui rend impossible un éventuel renvoi massif de ces personnes vers leur pays d'origine.
Considérez-vous la situation existant actuellement en Iran comme compatible avec les principes de la déclaration universelle des droits de l'homme ?
Ne convient-il pas, compte tenu de la situation particulière que vivent ces personnes et de la situation existant dans leur pays, prouvée par des rapports concordants de diverses organisations internationales, telles que les Nations unies, Amnesty International ou encore Reporters sans frontières, de leur accorder le droit de séjour dans notre pays sur la base de l'article 9.3 de la réglementation en vigueur ?
N'est-il pas temps de réévaluer la situation existant en Iran en matière de droits de l'homme dans le cadre des demandes d'asile de personnes d'origine iranienne ?
M. Hervé Jamar, secrétaire d'État à la Modernisation des finances et à la Lutte contre la fraude fiscale, adjoint au ministre des Finances. - Je vous lis la réponse du ministre Dewael, appelé pour une mission urgente.
Je souhaite tout d'abord vous informer qu'une évaluation du respect de la Déclaration universelle des droits de l'homme dans les pays tiers ne relève pas de mes compétences. Je vous renvoie donc à la ministre de la Justice et plus précisément au SPF Justice, à la Direction générale de la Législation et des Libertés et Droits fondamentaux.
L'octroi d'un séjour en application de l'article 9, alinéa 3, se fait au terme d'un examen individuel sur la base des arguments invoqués par le requérant. Il n'y a donc pas d'octroi automatique d'une autorisation de séjour sur la base de la nationalité.
Enfin, j'estime que la méthode du traitement individuel des dossiers constitue la seule approche juste. Le projet de loi approuvé lors du Conseil des ministres du 21 avril 2006 ne prévoit pas de critères pour une régularisation sur la base de la nationalité.
Par contre, le projet de loi prévoit un statut de protection subsidiaire, qui ne s'applique pas en particulier aux personnes originaires de pays qui ne respectent pas les droits de l'homme.
Il n'y aura donc pas de régularisation collective pour quelque nationalité que ce soit.
M. Josy Dubié (ECOLO). - La réponse du ministre est extrêmement décevante pour plusieurs raisons.
D'abord parce qu'il se disculpe en disant qu'il revient à la ministre de la Justice de dire si, oui ou non, les violations des droits de l'homme sont un fait en Iran. Tout un chacun qui lit la presse, qui s'informe, sait que c'est le cas. Le ministre pourrait avoir le courage de le reconnaître lui aussi.
Ensuite parce que le ministre se retranche derrière le projet de loi qu'il dépose en parlant d'une protection subsidiaire. Or, celle-ci n'aura pas d'effet rétroactif. Des centaines de personnes d'origine iranienne se trouvent aujourd'hui en Belgique. Le ministre ne répond pas à la question de leur devenir : elles ne peuvent rentrer en Iran ni rester chez nous. Sortiront-elles un jour de cette situation kafkaïenne ? Le ministre de l'Intérieur n'apporte pas de réponse. C'est extrêmement décevant.
Mme la présidente. - Je tiens à signaler que j'ai moi-même écrit à M. De Gucht après avoir rencontré les bahá'ís à leur demande. Leur situation me paraît en effet préoccupante.
M. Josy Dubié (ECOLO). - Madame la présidente, vous faites bien d'attirer l'attention sur cette question. À côté du problème rencontré par l'ensemble de la communauté iranienne vivant en Belgique se pose en effet le problème spécifique des bahá'ís.
Je connais bien la situation de l'Iran pour m'être souvent rendu dans ce pays. En Iran, les « gens du Livre » sont relativement protégés, notamment par l'interprétation littérale du Coran. Les religions juive et chrétienne sont respectées parce que le Coran le prévoit. En revanche, la religion des bahá'ís, qui est une religion syncrétique créée au milieu du XIXème siècle et reprenant des éléments des différentes religions monothéistes, ne bénéfice pas d'une telle protection.
Je rappelle que les bahá'ís sont à l'origine de tout ce qui concerne les droits de l'homme, en particulier de la constitution de la Société des Nations et de l'Organisation des Nations unies. Les bahá'ís ne sont pas protégés par cette disposition du Coran et sont soumis aujourd'hui, comme après la chute du Shah, à des persécutions violentes. Il est inacceptable que l'on ne reconnaisse pas cette situation et que l'on ne prenne pas les dispositions nécessaires pour protéger ces personnes.