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Mme la présidente. - Mme Els Van Weert, secrétaire d'État au Développement durable et à l'Économie sociale, adjointe à la ministre du Budget et de la Protection de la consommation, répondra.
Mme Clotilde Nyssens (CDH). - Nombre d'universitaires et de professionnels de terrain s'accordent à dire que, dans sa forme actuelle, le travail pénitentiaire, loin de contribuer à la rééducation des détenus et à leur formation professionnelle en vue de leur réinsertion sociale, sert davantage de palliatif au « mal de prison ».
De manière générale, la question du travail pénitentiaire ne semble pas être une priorité politique.
Une réflexion est-elle menée actuellement pour répondre aux questions soulevées par l'insuffisance de l'offre de travail aux détenus qui en font la demande et par la dégradation générale de la formation professionnelle en prison ?
Le problème de l'encadrement professionnel des ateliers serait une des causes de cette situation. Ce problème semble d'ailleurs se généraliser à l'ensemble des prisons du Royaume, provoquant de fait une diminution de l'offre de travail et accentuant l'aspect occupationnel et peu valorisant de la plupart des tâches proposées.
Il me revient, par exemple, que l'imprimerie de la prison centrale de Louvain fermera bientôt ses portes, faute de personnel d'encadrement en suffisance.
Pourquoi, dans ce cas précis, la relève de ce personnel spécialisé n'a-t-elle pas été assurée et, de manière générale, comment peut-on expliquer cette désaffectation progressive ?
D'autres réalités accentuent le problème de l'insuffisance de l'offre de travail : la surpopulation carcérale, la concurrence de la main-d'oeuvre - bon marché - originaire des pays de l'Est et les contraintes sécuritaires.
Je souhaiterais obtenir une réponse à quelques questions.
Quel est le taux d'emploi annuel - général et par établissement - de la population pénitentiaire ? Le taux d'occupation tend-il à diminuer d'année en année ? À combien la rémunération ou la gratification des détenus qui travaillent s'élève-t-elle ? Ont-ils droit aux mêmes avantages sociaux et bénéficient-ils de la même protection sociale que les travailleurs, par exemple en matière de chômage technique ou d'indemnisation des jours non prestés en cas d'accident de travail ou de maladie ?
Mme Els Van Weert, secrétaire d'État au Développement durable et à l'Économie sociale, adjointe au ministre du Budget et des Entreprises publiques. - L'importance du travail pénitentiaire ne manque pas d'être prise en compte par mes services et moi-même. Il est clair que le travail ne doit pas seulement procurer une occupation et des ressources au détenu mais doit aussi le préparer à assurer sa subsistance après sa libération.
L'affirmation selon laquelle la formation professionnelle en prison connaît une dégradation générale ne correspond pas à la réalité, notamment en regard des chiffres disponibles qui démontrent, au contraire, un expansion de l'effort en la matière.
L'un des indicateurs à ce propos est le total des primes d'encouragement à suivre les formations proposées aux détenus par la Régie du travail pénitentiaire. En 2004, les montants alloués pour ces formations se sont montés à 115.353 euros, contre 108.905 en 2003, 84.396 en 2002 et 77.360 en 2001, les données de 2005 étant encore incomplètes.
Le contexte économique de nature à retirer des prisons une partie du travail apporté par les entreprises privées vers les pays où le coût de la main-d'oeuvre est particulièrement bas, comme vous l'évoquez, est une variable importante dans l'offre de travail aux détenus.
À titre d'exemple, il a fallu se résoudre à la fermeture de l'imprimerie de la prison centrale de Louvain en 2005. Le secteur des imprimeries, pas seulement dans les prisons, connaît des difficultés structurelles, dues, notamment, aux progrès de l'informatique qui font que les imprimantes locales exécutent à présent nombre de travaux auparavant demandés aux imprimeries.
Depuis plusieurs années déjà, la Régie du travail pénitentiaire recevait de moins en moins de commandes pour les imprimeries situées dans les établissements pénitentiaires de Merksplas, Hoogstraten et Louvain-central. Faute de commandes suffisantes pour l'ensemble de ces ateliers d'imprimerie, il fallut fermer l'un des trois.
En outre, il faut également préciser qu'il est difficile de concurrencer les entreprises privées dans le domaine de l'impression.
Une autre matière à réflexion, qui ne concerne pas seulement les imprimeries, est l'observation d'une tendance à préférer s'adresser uniquement au secteur privé pour ce que les détenus pourraient produire - imprimés, mobiliers, etc. -, de manière satisfaisante dans les ateliers de la Régie.
Le taux d'emploi, général et par établissement, a fait l'objet d'un recensement exhaustif en 2000. Il montre que 4.391 détenus sur 8.499 ont reçu un travail ou une formation professionnelle, soit près de 51,7%, contre 4.025 sur 7.811 en 1999, soit 51,5%. Des relevés plus anciens indiquent des taux d'occupation du même ordre.
Voici aussi l'évolution de la masse totale des rémunérations, indemnités, ou gratifications, allouées aux détenus, en millions d'euros : en 2004, 7,61 ; en 2003, 7,27 ; en 2002, 7,01 ; en 2001, 7,03 ; en 2000, 7,19 ; en 1999, 6,72 ; en 1998, 6,20, soit un accroissement de 22% entre 1998 et 2004.
La population pénitentiaire moyenne est passée de 8.223 à 9.238 entre 1998 et 2004, soit une augmentation de 12%. Vu l'évolution du pouvoir d'achat durant cette période, on peut conclure que le volume de travail et sa rémunération sont demeurés assez stables dans les prisons, malgré les difficultés que vous évoquez à juste titre.
Les taux de la rémunération ou gratifications revenant aux détenus sont fixés par l'arrêté ministériel du 1er octobre 2004, paru au Moniteur belge du 3 novembre 2004.
Cet arrêté fixe aussi l'indemnisation du chômage technique prévue en cas de grève du personnel.
Un système d'indemnisation des accidents du travail en détention est prévu pour l'incapacité temporaire, à raison de 90% des gratifications que percevait le détenu au moment de l'accident.
À sa libération, en cas d'invalidité, une rente trimestrielle de l'ordre de 33 euros par pour-cent d'invalidité est versée.
Les soins de santé en prison, consécutifs, ou non, à un accident du travail sont assurés à tous les détenus.
I1 n'est pas prévu d'indemnisation en cas de maladie mais il ne faut pas perdre de vue que l'entretien des détenus est assuré à tous, sans distinction, qu'ils reçoivent, ou non, du travail.
Mme Clotilde Nyssens (CDH). - J'analyserai sérieusement tous les chiffres qui m'ont été communiqués.