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Belgische Senaat

Handelingen

DONDERDAG 17 NOVEMBER 2005 - NAMIDDAGVERGADERING

(Vervolg)

Mondelinge vraag van de heer Josy Dubié aan de minister van Buitenlandse Zaken over «de agressie tegen een televisieploeg van de RTBF en andere journalisten in Tunesië» (nr. 3-854)

M. Josy Dubié (ECOLO). - L'agression récente par des policiers tunisiens en civil d'une équipe de télévision de la RTBF à Tunis, ainsi que celles dont ont été victimes d'autres journalistes, notamment l'envoyé de « Libération », battu et poignardé, démontrent une nouvelle fois les méthodes policières violentes dont sont victimes en Tunisie tous les opposants au régime dictatorial du président Ben Ali. Comment qualifier autrement en effet un régime interdisant toute liberté de presse, pourchassant et emprisonnant tous les opposants après des procès truqués ?

Il faut aussi rappeler que le président Ben Ali est régulièrement « élu » (sic) avec des scores staliniens de 95%, si ce n'est 99%. La population de ce pays n'a pas d'autre choix, toute opposition véritable au régime en place étant interdite ou bâillonnée.

Le paradoxe de ces violences récentes, mais qui ne sont en rien exceptionnelles, sauf que cette fois elles impliquent des non tunisiens, est qu'elles se passent à la veille de l'officiel « Sommet mondial sur la société de l'information » organisé par les Nations unies, sommet qui a commencé officiellement hier dans un pays où des personnes croupissent en prison pour avoir utilisé internet pour dénoncer l'absence de liberté et la répression dont sont victimes les défenseurs des droits de l'homme en Tunisie. Un comble !

Le régime dictatorial et liberticide du président Ben Ali jouit pourtant, depuis des années, d'une sorte d'impunité vraisemblablement liée à son alignement total sur les positions de la diplomatie américaine.

Dès lors, le ministre peut-il nous dire si une délégation belge participe aux travaux de ce sommet ? Dans l'affirmative, ne serait-il pas opportun d'annuler cette participation pour protester contre cette agression et toutes celles dont sont victimes en Tunisie les opposants pacifiques au régime en place ?

La Belgique a-t-elle signé des accords de coopération avec la Tunisie ? Dans l'affirmative, ne serait-il pas opportun d'envisager de les suspendre, comme c'est d'ailleurs possible en vertu de l'article 2 de l'accord signé dans le cadre européen ?

Pour le surplus, le ministre peut-il nous dire quelles mesures ont été ou seront prises pour signifier aux autorités tunisiennes l'indignation de notre pays au regard de ces faits inacceptables ?

M. Karel De Gucht, ministre des Affaires étrangères. - Je ne puis que condamner les faits que vous mentionnez et, en particulier, l'incident survenu à une équipe de la RTBF télévision composée de la journaliste Marianne Klaric et du cameraman Jean-Jacques Mathy qui tournaient un reportage sur la liberté d'expression et d'association en Tunisie en compagnie de la militante de la défense des droits de l'homme, Radhia Nasraoui.

Selon la RTBF, le cameraman a été agressé par plusieurs personnes en civil. Il a été extrait de force de sa voiture, sa caméra et la cassette de tournage ont été confisquées. La journaliste et l'avocate auraient été menacées et auraient quitté l'endroit de peur d'être agressées physiquement.

Comme c'était prévisible, de très nombreux journalistes et militants d'organisations de défense des droits de l'homme se sont rendus à Tunis, à l'occasion du Sommet mondial de la société de l'information, pour manifester leur solidarité avec les grévistes de la faim et avec des responsables de partis et de groupes de l'opposition. Cette attitude de défi a été perçue, par la police locale, comme une provocation. C'est sans doute dans ce cadre qu'il faut replacer l'incident dont Mme Klaric et son collègue ont été les protagonistes.

Notre ambassadeur en Tunisie, M. Michel Carlier, a apporté toute l'assistance nécessaire à nos compatriotes. En outre, il a effectué hier une démarche auprès des autorités tunisiennes pour leur demander des explications sur cet incident et faire part de son étonnement.

Le secrétaire d'État tunisien aux Affaires étrangères a officiellement présenté ses excuses pour cet incident. Il maintient cependant que les forces de l'ordre avaient reçu des instructions très strictes en vue d'interdire que l'on filme les ambassades et ce, pour des raisons de sécurité. Or, l'équipe de la RTBF se trouvait précisément à proximité de tels bâtiments au moment où l'incident s'est produit.

Les Tunisiens ont donc présenté officiellement leurs excuses, ce qui démontre une volonté d'ouverture. Dès lors, au lieu de suspendre les accords bilatéraux et de couper des ponts, il convient plutôt de renforcer le dialogue avec la Tunisie sur le plan des droits de l'homme et de la liberté de la presse. Les incidents dont il est question ne peuvent qu'augmenter l'attention que porte l'Union européenne à cette question capitale.

Pour ma part, je tiens à répéter l'importance que j'attache au respect de la liberté d'expression. La Belgique saisit d'ailleurs toutes les occasions pour dénoncer le non-respect des droits de l'homme.

En ce qui concerne notre participation à ce sommet, le ministre de l'Emploi, M. Peter Vanvelthoven, devait initialement représenter la Belgique. Pour des raisons d'agenda que vous comprendrez aisément, ce dernier s'est fait remplacer par son directeur de cabinet, M. Boogaerts, qui sera accompagné de Mme De Bonte, également membre de son cabinet. Comme vous le savez, ce sommet est organisé dans le cadre des Nations unies et non à l'initiative de la seule Tunisie. Plusieurs pays y sont représentés soit par leur chef d'État ou de gouvernement, soit par leurs ministres.

M. Josy Dubié (ECOLO). - J'ai indiqué, dans mon intervention, que la Tunisie jouit d'une sorte d'impunité alors que l'on sait que les violations des droits de l'homme ne sont pas récentes et même qu'elles s'aggravent.

J'ai sous les yeux un rapport d'Amnesty International publié dans le cadre de ce sommet sur la société de l'information. Ce rapport dit clairement, je cite : « Des cyber-dissidents sont emprisonnés, des sites Internet sont censurés, des organisations de défense des droits humains sont harcelées et des agences de presse indépendantes sont fermées. Les autorités s'en prennent précisément aux droits et libertés que le Sommet mondial est sensé promouvoir. »

Très sincèrement, monsieur le ministre, je pense qu'il faudrait arriver à ce que les protestations contre de tels incidents ne soient pas purement platoniques et à ce que des mesures soient prises pour enfin contraindre ce régime à respecter les droits de l'homme.