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M. Jacques Brotchi (MR). - Je souhaite interroger le ministre sur la question relativement brûlante des quotas imposés en fin d'études de médecine et sur la définition des quotas et des sous-quotas. En effet, monsieur le ministre, vous n'êtes pas sans savoir que nos collègues de la Communauté française essaient de mettre en place un numerus clausus juste et équitable, en fonction des quotas fédéraux. Nous sommes à présent confrontés à une situation quelque peu inquiétante. Cette année, les universités francophones du pays comptent 1.370 étudiants en première candidature de médecine pour seulement 280 numéros d'agrément INAMI. Je sais qu'au fil de leur parcours, certains étudiants abandonneront leur études ou qu'ils échoueront - on peut se fier à la sévérité des professeurs de médecine ! Pour ma part, je me vois mal recaler mille étudiants afin de respecter les quotas.
Vous savez également qu'il faut grosso modo mille nouveaux médecins chaque année par tranche de dix millions d'habitants, alors que le fédéral a fixé le quota à 700 et ce, jusqu'en 2011. À partir de 2012, il passera à 833, ce qui constitue déjà un progrès mais n'est pas encore l'idéal.
Par ailleurs, nos hôpitaux embauchent des médecins étrangers justement pour pouvoir répondre à la demande. On se trouve donc dans une situation paradoxale : d'une part, on refuse à nos jeunes l'accès à une profession et, d'autre part, on fait appel à des médecins étrangers pour pouvoir assurer la continuité des soins, voire permettre aux patients de bénéficier des traitements qu'ils attendent.
Monsieur le ministre, prévoyez-vous de prendre des mesures correctrices en la matière et dans l'affirmative, lesquelles ? Comment envisagez-vous l'avenir concernant cette situation difficile ?
M. Rudy Demotte, ministre des Affaires sociales et de la Santé publique. - Je vais rappeler certains éléments relatifs à ce débat extrêmement complexe, que M. Brotchi a déjà quelque peu synthétisé.
La question centrale est de savoir si l'offre médicale en Belgique répond réellement aux besoins. Comment détermine-t-on si l'offre et la demande concordent en matière médicale ? D'abord, la technique du rétroviseur permet, au bout d'une certaine période, de relever un éventuel décalage. Ensuite, la méthode prospective se base sur le fait qu'il faut se référer à un organe compétent pour fixer les balises à l'intérieur desquelles on devra évoluer. C'est cette option qui a fait l'objet d'un compromis au sein du gouvernement voici quelques années. La commission de planification a donc établi un certain nombre de critères et fixé un nombre de médecins qui évolue au fil du temps.
Je vous rappelle les critères en question.
Je pense d'abord aux critères basés sur l'observation de l'évolution récente de la pratique de la médecine, d'après lesquels les besoins sont en croissance nette dans la mesure où non pas la féminisation, mais l'amélioration de la qualité de vie, de manière générale, amène les médecins à entrer dans un système de gardes alternées. Il faut donc dégager du temps de travail et pouvoir faire appel à des médecins disponibles.
Ensuite, il faut répondre au vieillissement de la population par une offre médicale supplémentaire.
Enfin, si la population vieillit, les médecins aussi. Nous avons donc fixé un nouveau chiffre pour 2012, à savoir 833. Ces 833 agréments ne sont que la pointe visible de l'iceberg. Certains médecins ne reçoivent pas leur numéro INAMI ; ils ne l'ont d'ailleurs parfois pas demandé puisqu'ils ont choisi une autre orientation professionnelle. Aujourd'hui, quelque 15% de médecins se trouvent dans cette situation. Si nous ajoutons ces 15% aux 833, nous arrivons à peu près à 96% de l'objectif premier de 1.000 médecins en termes de formation.
Cela élude-t-il pour autant l'autre question ? En ce qui concerne les chiffres, nous pourrions toujours essayer de positionner approximativement le flotteur au bon niveau. La question est de savoir si les quotas définis tiennent la route. La commission de planification doit avoir le courage non seulement de réguler, sur la base de données scientifiques, le nombre de médecins, mais aussi de définir les quotas de médecins spécialisés.
J'ai déjà assoupli un certain nombre de règles car, à force de compartimenter, il devient progressivement impossible de répondre à la demande. Demain, il faudra se demander si c'est encore nécessaire.
Dans l'hypothèse où nous serions confrontés à un déficit de médecins, pourrions-nous faire appel à des médecins originaires d'Europe centrale et d'Europe orientale ? Il ne m'appartient pas de répondre à cette question. Je dirai simplement qu'il faudra à tout le moins, le cas échéant, se pencher sur la qualité de leur formation. Quoi qu'il en soit, je préférerais que la Belgique dispose d'outils qui lui permettent de former ses médecins en toute connaissance de cause. À cet égard, je me reposerai en toute confiance sur les savants membres de la commission de planification.