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Sénat de Belgique

Annales

JEUDI 6 NOVEMBRE 2003 - SÉANCE DE L'APRÈS-MIDI

(Suite)

Question orale de Mme Clotilde Nyssens au vice-premier ministre et ministre de l'Intérieur sur «l'action des demandeurs d'asile politique iraniens à l'ULB et à l'UCL, ne pouvant ni rester en Belgique, ni retourner en Iran» (nº 3-47)

M. le président. - Mme Fientje Moerman, ministre de l'Économie, de l'Énergie, du Commerce extérieur et de la Politique scientifique, répondra au nom de M. Patrick Dewael, vice-premier ministre et ministre de l'Intérieur.

Mme Clotilde Nyssens (CDH). - Le ministre Dewael est pourtant dans le maison, car je viens d'apprendre que la même question a été posée il y a quelques minutes à la Chambre et que c'est M. Dewael en personne qui y a répondu.

M. le président. - Madame Nyssens, c'est la deuxième fois que je fais la remarque que l'on pose des questions au Sénat posées une heure avant à la Chambre !

Le Bureau a décidé de vous permettre de poser votre question mais vous devez comprendre que cette façon d'agir porte préjudice à l'image du Sénat. Cette fois, il n'y a pas eu de consensus mais, dorénavant, je ferai le tri à chaque réunion du Bureau et je rayerai de l'ordre du jour les questions qui auront déjà été posées à la Chambre.

Je vous donne la parole mais ne vous plaignez pas du fait que c'est Mme Moerman qui vous répondra puisque M. Dewael a répondu à la Chambre.

Mme Clotilde Nyssens (CDH). - Je ne comprends pas votre remarque, monsieur le Président. Au Sénat, les questions doivent être rentrées pour 10 heures, alors qu'à la Chambre, elles doivent l'être pour 10 heures 30. Il faudrait que le Sénat trouve un moyen de nous faire savoir quelles sont les questions posées à la Chambre.

M. le président. - Le Bureau a examiné l'opportunité de votre question. J'ai proposé qu'elle soit retirée mais il en a été décidé autrement, pour diverses raisons. Toutefois, ne vous étonnez pas si nous retirons d'autorité des questions qui ont déjà été posées à la Chambre.

Vous avez la parole.

Mme Clotilde Nyssens (CDH). - Je reviens de Louvain-la-Neuve où j'ai assisté à une manifestation en faveur d'un règlement rapide du sort des Iraniens qui, pour partie, sont en grève de la faim dans les locaux de l'ULB et de l'UCL.

Je serai brève sur les antécédents, bien connus et auxquels la presse a donné un large écho. Le département de M. Dewael a-t-il eu des contacts avec les intéressés, avec les ONG et avec les autorités académiques qui accueillent les Iraniens en attente d'une solution concrète ? Des cas analogues - je songe aux Afghans - ont pu être résolus grâce à une médiation. Quelle démarche concrète le ministre a-t-il l'intention d'entreprendre pour résoudre le problème de ces réfugiés qui ne sont pas reconnus en tant que tels ?

La multiplication de ces incidents devrait inciter le gouvernement à envisager des solutions structurelles. Il est évident que la loi est lacunaire. Des propositions sont sur la table en vue de créer dans notre législation une protection complémentaire pour les personnes déboutées d'un statut de réfugié politique.

La déclaration gouvernementale parle de cette protection temporaire. Le gouvernement va-t-il entamer le débat au parlement, éventuellement par le biais des initiatives parlementaires déjà déposées, sur cette protection complémentaire qui pourrait être une solution dans le cas qui nous occupe ?

J'ai assisté hier à une réunion du comité d'émancipation sociale et j'ai entendu les déclarations de la ministre Arena. Nous avons évoqué la problématique des femmes demandeuses d'asile. J'ai appris que la ministre avait l'intention de mettre un groupe de travail sur pied afin d'étudier la manière de rencontrer la problématique des femmes désireuses d'obtenir le statut de réfugiées étant donné que ce n'est pas seulement la situation de réfugiées politiques qui est en cause mais aussi les persécutions desquelles elles font l'objet dans leurs pays d'origine. Le ministre va-t-il prendre cette problématique en compte, en collaboration avec Mme Arena ?

Enfin, j'attire l'attention du ministre sur le fait que la situation médicale de certains Iraniens qui se trouvent actuellement à l'ULB est extrêmement délicate. Le médecin qui s'en occupe estime que de graves accidents pourraient se produire si une solution n'est pas trouvée dans les trois jours.

Mme Fientje Moerman, ministre de l'Économie, de l'Énergie, du Commerce extérieur et de la Politique scientifique. - M. Dewael n'a pas rencontré personnellement les Iraniens qui mènent une action sur le campus de l'ULB, ni ceux de l'UCL, car il ne veut pas céder au chantage, acte inacceptable dans un État de droit démocratique.

Par contre, des contacts écrits et oraux ont eu lieu entre ces personnes et son administration.

Le statut complémentaire dont il est question dans l'accord gouvernemental de juillet 2003 n'est pas d'application en Belgique à l'heure actuelle. Toutefois, pour les cas où la décision du Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides recommande une clause de non-reconduite, si cette décision précise que la personne ne peut être reconduite aux frontières du pays qu'elle a fui, l'administration de M. Dewael ne procède pas au rapatriement et cela, jusqu'à ce que le commissaire général rende un nouvel avis.

Par ailleurs, une directive européenne est effectivement à l'examen auprès des États membres quant au statut complémentaire. Dès que cette directive aura été adoptée, il sera procédé à sa mise en oeuvre en Belgique.

Quant au danger que peut présenter, du fait de leur condition féminine, le retour de demandeuses d'asile, M. Dewael tient à rappeler que diverses instances - auxquelles une totale confiance peut être accordée - examinent les demandes d'asile, notamment, le Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides, instance indépendante qui, comme cela vient d'être dit, a la possibilité d'introduire une clause de non reconduite dans sa décision si elle estime qu'une personne pourrait courir un danger susceptible de mettre sa vie en danger lors du retour dans son pays d'origine. Dans ce cas, la Belgique ne procède pas à son éloignement.

Mme Clotilde Nyssens (CDH). - Je remercie le ministre de sa réponse. Il serait extrêmement utile que ce dernier - ou son représentant - se mette en contact avec ces Iraniens. Lorsqu'un conflit surgit et qu'une solution concrète doit être trouvée, se rendre sur place pour rencontrer les personnes constitue la moindre des choses. Dans un État démocratique, l'usage de la parole est important. Quand on voit les personnes en question, on ne pense pas à un quelconque chantage ! J'admets difficilement ce type de jugement.