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Sénat de Belgique

Annales

JEUDI 24 OCTOBRE 2002 - SÉANCE DE L'APRÈS-MIDI

(Suite)

Demande d'explications de Mme Clotilde Nyssens au ministre de la Protection de la consommation, de la Santé publique et de l'Environnement sur «la reconnaissance de lits K pour les délinquants juvéniles» (nº 2-869)

Mme Clotilde Nyssens (CDH). - Ma demande d'explications a trait aux rapports - toujours assez difficiles - entre la justice et la médecine.

Le conseil des ministres du 25 mars 2002 a approuvé la réalisation et la reconnaissance de cinq fois huit lits spécifiques pour les délinquants juvéniles.

Le financement et la mise à disposition de ces lits de psychiatrie pour délinquants s'effectueront à partir du 1er novembre 2002. L'opération sera supportée dans le cadre du financement des hôpitaux. Il s'agit donc bien de la politique fédérale de santé publique.

Les conditions d'accès à ces lits K doivent être déterminées par arrêté royal, mais selon nos informations, les services organisant la mise à disposition de ces lits K devront, entre autres, respecter les conditions suivantes : il s'agit de la tranche d'âge dix/dix-huit ans, l'admission du jeune doit être liée à un diagnostic pédopsychiatrique, etc.

Il est également prévu que l'admission des jeunes soit liée à une mesure d'enfermement ordonnée par le juge de la jeunesse à la suite d'un délit ou d'une infraction relevant des mesures prévues dans le cadre de la loi du 8 avril 1965 relative à la protection de la jeunesse.

Cette dernière condition pose évidemment problème, puisqu'elle implique à la fois les compétences du ministre de la Santé publique et des décisions émanant de juges.

Une telle mesure, qui donne pouvoir au juge de décider de l'admission d'une personne dans une unité de soins psychiatriques - ou de sa sortie - n'est-elle pas en contradiction avec le principe médical de prise en charge d'un patient psychiatrique ? Que devient le rôle du médecin dans cette hypothèse où les décisions essentielles relatives au traitement du patient psychiatrique ne lui incombent plus ?

Le problème du pouvoir de décision est ainsi posé entre, d'une part, le juge de la jeunesse, qui confie un délinquant juvénile à un hôpital où il est pris en charge par un psychiatre dans un encadrement particulier, et vos propres compétences. Avez-vous eu des contacts à ce sujet avec les Communautés et les Régions ?

M. Jef Tavernier, ministre de la Protection de la consommation, de la Santé publique et de l'Environnement. - Le conseil des ministres du 25 mars 2002 a bien approuvé la réalisation et la reconnaissance de cinq fois huit lits K spécifiques pour des délinquants juvéniles.

Cette décision a été prise non pas uniquement pour donner une réponse en termes répressifs, mais également pour mettre l'accent sur l'aspect « santé » dans le domaine de la délinquance.

Il s'agit de lits K déterminés par arrêté royal, mais on y ajoute quelques conditions au moyen d'un arrêté de financement ; on ne crée donc pas de nouvel arrêté royal.

Il est prévu que l'admission des jeunes dans ces services soit liée à un délit ou à une infraction actuelle ; il s'agit d'une admission ordonnée par le juge de la jeunesse. Cette condition juridique, nécessaire mais pas suffisante, doit être assortie d'une seconde condition, à savoir un diagnostic pédopsychiatrique selon le DSM IV.

Lorsque ces deux conditions sont réunies, une décision d'enfermement peut être prise.

Afin de pouvoir travailler dans un cadre structuré, le département de la Santé publique a organisé une réunion de concertation avec des représentants de la justice - les juges de la jeunesse -, pour aboutir à un accord sur les différents aspects de cet arrêté de financement.

Mme Clotilde Nyssens (CDH). - Si je comprends bien, les médecins psychiatres qui relèvent de votre compétence et surtout de votre financement, monsieur le ministre, s'occuperont de la prise en charge de ces jeunes. Ils seront en quelque sorte des experts auprès des tribunaux. Ils suivront le jeune et feront rapport au juge de la jeunesse qui, lui, décidera de l'entrée et de la sortie de l'hôpital psychiatrique.

Je suppose qu'il existe des protocoles d'accord entre les hôpitaux et le service médical, pour régler la manière dont doivent s'opérer les relations entre le juge et le médecin. J'imagine qu'il existe une procédure bien particulière ; c'est peut-être à cela que vous faites allusion quand vous dites qu'il y a des concertations entre les deux ministères pour savoir comment s'établissent les liens entre les différents acteurs qui ont des rôles bien différents.

M. Jef Tavernier, ministre de la Protection de la consommation, de la Santé publique et de l'Environnement. - Effectivement, les acteurs ont des rôles différents. Je le répète, une réunion a déjà été organisée afin d'aboutir à un accord. Celui-ci n'existe pas encore de manière détaillée, mais il est certain que les deux conditions doivent être remplies. Le médecin doit donner un diagnostic pédopsychiatrique. Je ne dis pas que les deux aspects sont égaux, mais l'un et l'autre sont indispensables.

-L'incident est clos.