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Sénat de Belgique

Annales

JEUDI 17 JANVIER 2002 - SÉANCE DE L'APRÈS-MIDI

(Suite)

Demande d'explications de Mme Clotilde Nyssens au ministre de la Justice sur «les organisations sectaires nuisibles» (nº 2-652)

Mme Clotilde Nyssens (PSC). - J'ai lu avec intérêt le premier rapport 1999-2000 rédigé par le centre d'information et d'avis sur les organisations sectaires nuisibles. Ce centre a été créé par une loi récente. On constate aujourd'hui qu'il prend ses marques.

Ce rapport n'émet qu'une seule recommandation, celle d'insérer, dans le Code pénal, une infraction visant à sanctionner l'abus de faiblesse et il interroge le ministre de la Justice quant à son intention de déposer un projet de loi visant à prendre une telle initiative. On n'interroge généralement pas un ministre sur ses intentions mais comme c'est ce que recommande le rapport, je me permets, monsieur le ministre, de vous interroger à ce sujet.

Je me souviens que ce sujet avait été abordé par la commission d'enquête relative aux sectes nuisibles et que l'on avait pu constater que cette infraction existait bel et bien en droit pénal français. Certains magistrats qui avaient comparu devant cette commission avaient d'ailleurs fait des propositions mais jusqu'à présent, notre droit pénal ne prévoit pas d'infraction sur l'abus de faiblesse.

Je me permets dès lors de vous demander comment vous comptez vous positionner par rapport à cette unique recommandation du rapport du centre d'information.

Par ailleurs, le rapport fait état, de manière assez détaillée, de ses travaux et de quelques difficultés de fonctionnement. Certaines considérations portent sur les locaux. Est-il exact, comme je l'ai entendu dire, que ce problème serait résolu et que le centre serait installé définitivement rue Haute, dans des locaux adéquats ? Il ressort également du rapport que pour assurer la continuité de son travail, le centre préférerait disposer d'un cadre permanent plutôt que de travailler avec des contractuels. Envisagez-vous de faire droit à cette demande ?

Je constate aussi que des membres suppléants assistent aux réunions même en présence des membres effectifs. Est-il permis de leur accorder un jeton de présence ?

Plus important peut-être, je constate que certains membres ont déjà démissionné pour des raisons personnelles. A-t-on lancé des procédures pour que de nouveaux membres soient désignés, tant par le gouvernement que par le Parlement ? Le gouvernement a-t-il pris les mesures nécessaires en vue du remplacement du ou des membres qu'il avait désignés à l'origine et qui auraient éventuellement démissionné ?

En ce qui concerne le Parlement, sans doute est-il préférable que j'interroge moi-même le président de la Chambre ou celui du Sénat pour savoir si les procédures sont en route. Je constate cependant certains manquements.

Enfin, le centre fait état d'une excellente collaboration avec la cellule administrative chargée de la lutte contre les sectes, cellule installée près de votre département. La loi qui avait créé ce centre comportait deux volets, à savoir la création d'un centre d'information, d'une part, et la création d'une cellule administrative auprès de votre département, d'autre part. Qu'en est-il des activités de cette cellule administrative ?

Enfin, la presse a fait récemment écho du mouvement « sectaire » Krishna, installé à Septon près de Durbuy. Il n'appartient sans doute pas au ministre de la Justice de se prononcer sur le caractère sectaire nuisible d'une organisation. Quelle attitude adoptez-vous vis-à-vis de ce mouvement qui était repris dans la liste annexée à l'époque au rapport de la commission d'enquête parlementaire ? Cette liste reprenait le nom des mouvements cités lors des travaux de la commission et ne constituait pas en soi un relevé des sectes nuisibles. L'existence même de cette liste avait froissé certains mouvements qui s'y étaient retrouvés, peut-être malencontreusement.

Lorsqu'une organisation ou un centre rédige un rapport à l'intention des autorités, et du Parlement en particulier, j'estime important d'en faire état afin d'y donner suite le cas échéant.

M. Marc Verwilghen, ministre de la Justice. - La recommandation du centre d'intégrer dans le Code pénal l'incrimination d'abus de faiblesse fait l'objet d'une étude. Étant donné que cette incrimination doit être praticable, j'ai toutefois l'intention, avant de déposer le projet de loi, de solliciter l'avis des procureurs généraux afin de connaître leur opinion.

Actuellement, le centre est logé dans des bureaux modernes de la rue Haute. Une bibliothèque accessible au public est déjà fonctionnelle. Le centre a émis le souhait d'obtenir un cadre permanent. Je vais donc proposer le transfert des emplois contractuels dans des fonctions statutaires. Cette proposition sera soumise au contrôle budgétaire et administratif habituel.

L'article 2 de l'arrêté royal du 13 juin 1999 fixant les modalités de l'indemnisation du président et des membres du centre d'information et d'avis sur les organisations sectaires nuisibles prévoit des jetons de présence pour les membres et leurs suppléants. Il va de soi qu'un membre suppléant n'a droit à des jetons de présence qu'au cas où il remplace le membre effectif. Toutefois, il a été convenu à l'époque qu'il serait souhaitable que les membres suppléants puissent assister à tous les travaux, afin d'assurer une continuité en cas de remplacement. Les procédures de remplacement des membres démissionnaires sont en cours. Toutefois, il a fallu lancer trois appels aux candidats pour que le minimum de candidats proposés par le conseil des ministres soit atteint.

La cellule administrative de coordination de la lutte contre les organisations sectaires nuisibles collabore de manière étroite avec le centre. L'échange des informations est régulier. La cellule plénière se réunit selon la fréquence prévue dans la loi du 2 juin 1998. Elle a toutefois constitué, en son sein, un sous-groupe opérationnel composé des délégués des services de police et de renseignements ainsi que du représentant du Collège des procureurs généraux. Ce groupe peut ainsi se réunir à brève échéance si le besoin se manifeste. Cette organisation du travail a été testée au mois d'octobre.

Enfin, je ne peux répondre à votre dernière question. La loi du 2 juin 1998 prévoit qu'il n'est pas permis au centre de dresser des listes systématiques des organisations sectaires nuisibles. Le sous-groupe de la cellule, qui se réunira le 24 janvier prochain, se penchera sur la question.

Mme Clotilde Nyssens (PSC). - Je remercie le ministre pour sa réponse complète et précise. Je constate que le rapport a été utile et que le ministre a déjà donné suite à de nombreux souhaits et recommandations formulés par le centre d'information. J'espère que celui-ci poursuivra ses travaux à une vitesse de croisière.

-L'incident est clos.