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Mme Magdeleine Willame-Boonen (PSC). - Le Gouverneur adjoint de la province du Brabant flamand a été saisi de plusieurs plaintes se rapportant à la distribution par la province du Brabant flamand de la brochure unilingue, en néerlandais, De Vlaamse Brabander.
Dans le cadre de l'exercice de sa compétence légale, le Gouverneur adjoint est chargé d'examiner la conformité de la brochure en question avec les lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière administrative et de rapprocher les positions du plaignant et de l'autorité concernée.
Quoique la brochure ait pour objectif de toucher tous les citoyens du ressort de la province du Brabant flamand et fasse d'ailleurs des efforts indéniables en ce sens, prévoyant même pour les malvoyants et aveugles la mise à disposition de la publication en braille, la province ne semble pas consentir la moindre assistance pratique aux francophones.
Normalement, tout rapport entre la province du Brabant flamand et un particulier habitant une commune périphérique dotée d'un régime linguistique spécial doit être rédigé dans la langue utilisée par la personne concernée, pour autant que cette langue soit le néerlandais ou le français.
Conformément aux avis de la Commission permanente de contrôle linguistique, il ne semble pas interdit à la province de Brabant flamand, en vertu de l'article 34, paragraphe 1er, alinéa 3, des lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière administrative, de rédiger ses informations officielles d'ordre général uniquement dans la langue administrative sous condition que ces avis et communications puissent entrer raisonnablement dans la catégorie « informations facultatives », qu'ils ne soient pas portés à la connaissance du public en vertu d'une disposition légale et que la bonne technique de distribution soit utilisée.
Dans sa décision, le gouverneur adjoint fait remarquer que « chaque avis ou communication - à caractère facultatif ou légalement obligatoire - diffusé par la province du Brabant flamand par l'intermédiaire des services locaux - y inclus les services postaux locaux - doit être rédigé tant en français qu'en néerlandais. Qu'il appartient à la province du Brabant flamand d'examiner l'opportunité d'un résumé en français des avis et communications qu'elle diffuse sous la forme d'une information facultative. Quant aux avis et communications qui doivent être portés à la connaissance du public en vertu d'une disposition légale, la province du Brabant flamand met à la disposition du public des communes périphériques dotées d'un régime linguistique spécial, soit une version française intégrale, soit un résumé significatif en français ».
Face à ces observations, le gouverneur adjoint a pourtant décidé, le 5 octobre 2000, que les futures éditions de la brochure DeVlaamse Brabander, indépendamment du caractère facultatif ou légalement obligatoire des avis et des communications qui y seront repris, qui seront diffusées dans les communes périphériques par l'intermédiaire des services locaux, doivent être rédigées tant en français qu'en néerlandais ».
Néanmoins, il me revient que, malgré cette décision, la traduction, sinon de l'ensemble de la revue, au moins de l'essentiel des communications et avis publiés n'est toujours pas disponible en français.
Dès lors qu'une copie conforme de la décision vous a été adressée, pourriez-vous m'indiquer, monsieur le ministre, quelles sont ou seront les mesures prises par vos soins afin que la décision du gouverneur adjoint soit réellement mise en oeuvre ?
M. Antoine Duquesne, ministre de l'Intérieur. - Le gouverneur du Brabant flamand s'oppose depuis 1995 déjà à la députation permanente de cette province en ce qui concerne l'emploi des langues dans les avis et communications qu'elle adresse au public. Ce conflit de nature juridique a resurgi récemment à l'occasion d'une plainte introduite les 16 mai et 26 juin 2000 auprès du gouverneur adjoint par deux habitants francophones de la périphérie bruxelloise.
En vertu de l'article 65bis des lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière administrative, le gouverneur adjoint du Brabant est spécialement chargé de veiller à l'application correcte de ces lois dans les communes de la périphérie bruxelloise. Il examine les plaintes qui sont fondées sur le non-respect desdites lois et que lui adressent les habitants de ces communes. Il tente de concilier l'autorité publique concernée et le plaignant. S'il n'y parvient pas, il peut transmettre la plainte à la Commission permanente de contrôle linguistique qui l'instruit à son tour. Celle-ci peut, dans ce cas, émettre un avis, éventuellement accompagné d'une mise en demeure, et prendre le cas échéant, en lieu et place, de l'autorité défaillante toutes les mesures nécessaires ou demander aux autorités ou juridictions compétentes de constater la nullité des actes concernés afin d'assurer le respect des lois linguistiques coordonnées ou des arrêtés royaux qui s'y rapportent.
La plainte à laquelle je viens de faire allusion concerne la distribution toutes boîtes dans toutes les communes du Brabant flamand du magazine d'informations édité par cette province et intitulé De Vlaamse Brabander.
Les plaignants protestent contre le caractère unilingue de cette brochure et invoquent qu'en vertu des lois linguistiques, les avis et communications qu'un service régional adresse au public par l'intermédiaire des services locaux - la députation permanente doit être assimilée à un tel service au sens des lois linguistiques coordonnées - doivent être rédigées en néerlandais et en français.
Le gouverneur adjoint du Brabant flamand estime, dans sa décision du 5 octobre 2000 à laquelle Mme Willame fait allusion - une telle « décision » n'a en réalité aucun caractère contraignant - que la députation permanente de cette province invoque à tort plusieurs avis émis par la CPCL pour étayer sa thèse selon laquelle de telles communications au public peuvent être rédigées exclusivement en néerlandais.
La province du Brabant flamand invoque à l'appui de cette thèse l'article 34, paragraphe 1er, alinéa 3, première phrase, des lois linguistiques selon lequel le service régional rédige les avis et communications qu'il adresse et les formulaires qu'il délivre directement au public dans la ou les langues imposées en la matière aux services locaux de la commune de son siège. Le siège de la province du Brabant flamand étant fixé à Leuven, soit une ville unilingue flamande, cette langue est en l'occurrence le néerlandais.
Le gouverneur adjoint du Brabant flamand critique la jurisprudence prétorienne développée par la commission permanente de contrôle linguistique dans plusieurs de ses avis. Celle-ci fait une distinction entre les avis et communications que l'autorité adresse obligatoirement au public en vertu de la loi, et ceux qu'elle adresse simplement à titre d'information, de manière facultative.
Les seconds pourraient être rédigés exclusivement dans la commune du siège, c'est-à-dire en néerlandais, tandis que les premiers devraient nécessairement être accompagnés dans les communes de la circonscription dotées d'un régime linguistique spécial - sont en l'occurrence visées les communes de la périphérie bruxelloise - d'une traduction en langue française ou, à tout le moins, d'un résumé significatif établi dans cette langue.
Le gouverneur adjoint relève à juste titre que cette distinction ne repose sur aucun fondement légal.
Il invoque quant à lui, à l'appui de son argumentation, la troisième phrase de l'article 34, paragraphe 1er, alinéa 3, précité des lois linguistiques coordonnées : « Les avis, communications et formulaires qui parviennent au public par l'intermédiaire des services locaux sont rédigés dans la ou les langues imposées à ceux-ci pour les documents de même nature ».
Les services postaux étant des services locaux au sens des lois coordonnées, ainsi que cela ressort des travaux préparatoires de ces lois, la disposition précitée renvoie, selon le gouverneur adjoint, à l'article 24 des lois coordonnées qui prescrit le bilinguisme intégral néerlandais-français pour les avis, communications et formulaires destinés au public des communes de la périphérie bruxelloise.
Le magazine incriminé devrait donc nécessairement être accompagné dans lesdites communes, selon cette thèse à laquelle pour ma part je me rallie, soit d'une traduction en langue française, soit à tout le moins d'un résumé significatif établi dans cette langue.
Dans sa décision du 5 octobre 2000 qui, je le répète, n'a aucun caractère contraignant, le gouverneur adjoint exprime par ailleurs l'avis qu'il appartient à la province du Brabant flamand d'examiner l'opportunité de joindre un résumé en langue française, pour les habitants des communes dotées d'un régime linguistique spécial, des avis et communications qu'elle diffuse sous la forme d'une information facultative ; qu'en ce qui concerne les avis et communications qu'elle adresse obligatoirement au public en vertu d'une disposition légale, la province du Brabant flamand doit impérativement mettre à la disposition des habitants des communes dotées d'un régime linguistique spécial, soit une version française intégrale, soit un résumé significatif établi dans cette langue.
En adoptant une telle position, le gouverneur adjoint a en quelque sorte tenté de concilier les positions des plaignants et de la députation permanente du Brabant flamand. Cette tentative de conciliation a malheureusement échoué, puisque la brochure incriminée n'est toujours pas disponible en langue française pour les habitants des communes périphériques.
Cela étant, il est loisible au gouverneur adjoint, comme je l'ai déjà indiqué tout à l'heure, de saisir la commission permanente de contrôle linguistique qui, dans ce cas, instruira elle-même la plainte, conformément à l'article 61, paragraphes 4 et 7 des lois linguistiques coordonnées.
L'exécution des « décisions » du gouverneur adjoint ne relève pas de la compétence du ministre fédéral de l'Intérieur. Si une telle « décision » n'est pas suivie d'effet, le gouverneur adjoint peut seulement inviter la CPCL à émettre un avis en lui transmettant la plainte dont il a été saisi. Il ressort des informations que j'ai recueillies auprès des services du gouverneur adjoint que celui-ci n'a pas jugé opportun de faire usage de cette faculté.
Je n'ai par ailleurs pas le pouvoir de contraindre la députation permanente du Brabant flamand à se conformer à la position adoptée par le gouverneur adjoint dans sa « décision » du 5 octobre 2000. Il ressort en effet de la jurisprudence du Conseil d'État que la tutelle en matière d'emploi des langues est une tutelle administrative ordinaire. Or, en vertu de l'article 7 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, c'est la Région flamande qui dispose du pouvoir de tutelle sur la province du Brabant flamand, tant en ce qui concerne l'organisation de cette tutelle que son exercice.
Mme Magdeleine Willame-Boonen (PSC). - La réponse du ministre est circonstanciée. Il a expliqué qu'il n'avait pas de pouvoir contraignant. La tutelle administrative est actuellement exercée par la Région flamande. En outre, à l'issue du prochain transfert de compétences, elle pourra légiférer au niveau provincial et au niveau communal, ce qui n'arrangera évidemment pas les choses. J'ai pris note que le ministre se rallie, à titre personnel je présume, aux thèses du gouverneur adjoint. J'ai été intéressée d'apprendre que la tentative de conciliation avait échoué. La loi relative à la modification de la législation à Bruxelles concernant la présence d'un échevin supplémentaire était alarmante. La réponse du ministre attise mes craintes : nous serons de plus en plus muselés pour une série de raisons, linguistiques ou autres.
-Het incident is gesloten.