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Mme Clotilde Nyssens (PSC). - Je me permets d'interroger le ministre sur l'organisation et le financement des soins palliatifs pédiatriques à la suite d'un contact privilégié avec une infirmière de liaison qui développe de par sa pratique au sein d'un hôpital universitaire une approche conceptuelle un peu pionnière en matière d'accompagnement d'enfants en fin de vie. Beaucoup a été fait, ces dernières décennies, dans la recherche de traitements pour guérir les petits patients atteints de maladies malignes et de maladies à issue fatale. À l'heure actuelle, 75% des petits patients cancéreux ont la chance de guérir. Il semble par contre de plus en plus difficile d'admettre qu'un quart de ceux-ci vont tôt ou tard nous quitter et mourir.
Un décalage énorme existe entre les moyens déployés pour assurer le suivi curatif de l'enfant et les moyens déployés pour assurer le suivi palliatif de l'enfant gravement malade. Beaucoup reste à faire dans notre pays pour tout ce qui touche à la mort et à l'accompagnement global de l'enfant en fin de vie. Pour beaucoup, l'idée même de la mort d'un jeune enfant demeure un tabou - même en milieu hospitalier - ou une source d'angoisse, d'anxiété incontrôlable. En Belgique, la majorité des enfants en situation critique et en fin de vie décèdent en milieu hospitalier isolés de la fratrie, des amis, des copains de classes et de leurs animaux et, parfois, très éloignés de leur pays d'origine.
Les débats que nous avons eus jusqu'à présent au sujet des soins palliatifs, que ce soit à propos de la proposition de loi « soins palliatifs » ou au sujet du budget affecté au secteur des soins palliatifs, n'ont guère abordé la pratique des soins palliatifs pédiatriques. Je pense cependant qu'il convient d'être prudent en la matière et qu'il ne faut pas improviser. Les soins palliatifs pédiatriques nécessitent une approche particulière, qui doit être préparée de manière spécifique. Il y a dans notre pays très peu de pratiques en la matière et les équipes médicales, même lorsqu'elles assurent les soins palliatifs, sont souvent très dépourvues face à la fin de vie d'un enfant.
À cet égard, j'ai été particulièrement frappée par les pratiques développées sur le terrain par certaines infirmières chargées d'assurer la liaison entre l'hôpital et le domicile. Quand l'enfant malade entre dans la phase palliative de son affection, le pédiatre responsable de l'enfant propose à l'enfant et aux parents une prise en charge à domicile par l'intermédiaire des soignants de terrain, en collaboration avec une infirmière de liaison, pour autant, bien sûr, qu'un retour à domicile soit envisageable et souhaité. Le but est d'offrir une continuité de soins.
La transition vers un maintien définitif à la maison est ainsi plus douce quand la fin de vie s'approche. Les parents de l'enfant malade peuvent demander une intervention de l'infirmière de liaison dès que le suivi palliatif débute ou plus tard, en cas de problème, par exemple quand le traitement antidouleur est insuffisant et qu'une adaptation et une évaluation régulière s'imposent.
L'infirmière de liaison peut être contactée 24 heures sur 24, sept jours sur sept. Elle peut à tout moment contacter un ou plusieurs membres de l'équipe multidisciplinaire intra ou extrahospitalière en fonction du problème posé au domicile de l'enfant. Au moment du décès, l'infirmière de liaison aide les parents et la fratrie à verbaliser leurs sentiments et à « dire au revoir » à leur enfant, frère ou soeur. Il existe sans doute en Belgique d'autres expériences qu'il serait également intéressant d'analyser afin de définir les contours d'une pratique de soins palliatifs pédiatriques généralisée.
Le ministre peut-il faire un état des lieux quant aux pratiques actuelles de soins palliatifs pédiatriques et la prise en charge de la fin de vie d'enfants ? Est-il envisageable, dans le cadre de la politique des soins palliatifs en général, de spécifier des moyens pour l'accompagnement de la fin de vie d'enfants malades ? Dans cette éventualité, comment le cadre de référence pour une approche globale des soins palliatifs pédiatriques pourrait-il être défini ?
M. Frank Vandenbroucke, ministre des Affaires sociales et des Pensions. - Il existe effectivement en Belgique d'autres expériences qui visent à soutenir et à aider au maximum les enfants pour qui la guérison n'est malheureusement plus possible, ainsi que leurs familles. Ces expériences peuvent prendre la forme décrite par Mme Nyssens, à savoir celle d'une infirmière de liaison ou être de nature différente, comme le projet KOESTER - Kinder-Oncologische Eenheid voor Specifieke Thuiszorg en Rehabilitatie qui signifie « unité de soins oncologiques pédiatriques pour les soins spécifiques à domicile et la réhabilitation » - de l'Hôpital universitaire de Gand.
Je ne puis dresser ici l'état des lieux détaillé de tous les projets et/ou initiatives de prise en charge des enfants cancéreux, mais je suis sûr que les différents centres d'oncologie pédiatrique pourront vous fournir cette information, sous forme de rapport d'activité ou autre.
Personnellement, je trouve que les enfants cancéreux - même en phase terminale - sont d'abord des enfants. On doit, dès lors, d'abord les approcher en tant que tels, tenant compte de leurs besoins et problèmes tout à fait particuliers, et ensuite seulement, en tant que personnes atteintes d'une terrible maladie.
L'honorable membre n'est pas sans savoir que, pour le moment, je finalise une importante réforme des soins oncologiques. Avec la mise sur pied de tels programmes de soins oncologiques, un pas important sera accompli pour obtenir une prise en charge oncologique plus adaptée encore, de meilleure qualité et tenant compte des aspects humains.
Cette réforme lancée, je compte la compléter par des programmes spécifiques : programmes de soins oncologiques pour les tumeurs rares et complexes, d'une part, et programmes de soins d'oncologie pédiatrique, d'autre part. Une attention toute particulière pour les soins à domicile, le soutien à la famille, et le cas échéant, les soins dans la phase terminale fera évidemment partie de cette approche. Ces questions ne sont pas encore à l'ordre du jour pour l'instant, mais elles le seront prochainement.
Mme Clotilde Nyssens (PSC). - Je remercie le ministre de son ouverture. J'entends, monsieur le ministre, que cette matière retient l'attention de votre cabinet et de votre administration : des programmes spécifiques sont prévus et dans l'avenir, la dimension pédiatrique sera prise en charge de manière particulière.
-L'incident est clos.