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Mme Clotilde Nyssens (PSC). - Un courrier a été récemment envoyé aux parlementaires par les auditeurs du travail qui s'inquiètent de l'avenir des compétences civiles des auditorats du travail. Il est vrai qu'on a beaucoup parlé de ce problème durant les négociations de l'accord Octopus, avant que ne commence cette législature. Depuis, je n'ai pas connaissance des travaux des groupes de travail qui s'occuperaient encore de la réforme des auditorats.
Les compétences civiles des auditorats du travail sont importantes puisqu'elles aident le justiciable à préparer son dossier au niveau de l'instruction. Une justice accessible et peu coûteuse est le propre des juridictions du travail, où il n'y a d'ailleurs pas d'arriérés. Cette justice rapide et de proximité rend de grands services aux justiciables.
Les auditeurs du travail s'inquiètent, à raison, d'une éventuelle réforme. J'ignore où en sont vos travaux sur l'avenir des auditorats mais je voudrais vous demander si vous avez répondu aux courriers de ces derniers et si, dans le cadre des réformes attendues, on envisage toujours de leur supprimer ces compétences civiles.
Je crois qu'il faut maintenir les garanties de cette justice qui fonctionne bien. Il est rare en effet que des juridictions n'aient pas d'arriéré. Mon souci est simplement de relayer ici la pertinence du courrier des auditeurs du travail et de m'inquiéter, comme eux, de leur avenir, dans la mesure où je crois qu'il convient de leur garder des compétences en matière civile.
M. Philippe Mahoux (PS). - Lors de la discussion de la réforme du parquet en séance publique, nous avions eu l'occasion d'insister sur l'intérêt que nous portions au maintien de la spécificité de l'auditorat du travail. Les raisons sont nombreuses. D'abord et avant tout, de par leurs connaissances et leur sensibilité spécifique, les auditeurs du travail élaborent des dossiers et sont souvent d'une aide particulièrement précieuse à l'égard de ceux qui se retrouvent devant ces juridictions. Je crois qu'il serait particulièrement déplorable de priver ces dernières de cette aide, de ce travail d'élaboration, ainsi que du rôle social parallèle au rôle de magistrat tout à fait classique de l'auditorat du travail.
La deuxième raison est qu'un des objectifs des modifications, ou ce que certains imaginaient, c'est-à-dire une grande fusion de l'auditorat du travail dans le parquet, était de tenter de résoudre l'arriéré judiciaire. Mais nous avons eu l'occasion de dire à cette époque combien il paraissait curieux de tenter de soustraire des magistrats à une juridiction dont l'arriéré était beaucoup moindre pour essayer de résoudre l'arriéré d'une autre juridiction.
Il me semble qu'à l'époque, nous étions arrivés à une solution qui maintenait une spécificité de l'auditorat du travail avec une identification claire au sein du parquet. Les missions qui étaient dévolues à l'auditorat du travail étaient maintenues de manière tout à fait spécifique et une procédure avait été établie pour tenter de résoudre la problématique générale du parquet en maintenant ces spécificités. Par exemple, on obligeait le chef de corps à consulter l'auditeur du travail avant de soustraire les membres de l'auditorat à leurs fonctions spécifiques et de leur confier des missions relevant du parquet en général.
Je crois que la discussion que nous avions eue était très importante. L'esprit qui avait prévalu et qui avait abouti à cette solution, même si elle ne nous apportait pas une entière satisfaction dans la mesure où on avait enlevé une partie de l'autonomie de l'auditorat, permettait quand même de maintenir ces spécificités et l'action positive des auditeurs du travail.
Je me joins volontiers à la question que vous est posée, monsieur le ministre, d'autant plus que je fais référence à une loi récente, que nous avions votée parce qu'elle apportait une solution qui ne nous satisfaisait pas entièrement mais qui avait obtenu à l'époque l'adhésion d'une large majorité de notre parlement.
Je réitère donc la question : pouvez-vous nous rassurer sur votre volonté de maintenir la spécificité de l'auditorat du travail ?
M. Marc Verwilghen, ministre de la Justice. - Je ne sais pas ce qui a engendré l'inquiétude qui s'est installée au sein des auditorats.
Je suppose que nous n'avions pas, à l'époque, donné assez d'éclaircissements sur notre volonté de faire deux mouvements : une verticalisation et une horizontalisation du service public.
Il est évident que la spécificité de l'auditorat est reconnue et que celle-ci doit être maintenue.
En réponse aux questions qui m'ont été posées, je vous informe qu'un groupe de travail s'est réuni à plusieurs reprises, sans pour autant aboutir à un accord. Deux choix sont possibles.
Première possibilité, une verticalisation dans laquelle il y a une certaine unité pour l'action publique menée par le ministère public et dans laquelle l'auditeur peut intervenir pour les aspects de type social et pénal, hormis les tâches civiles.
Deuxième possibilité, demander aux auditorats de se transformer en véritables ministères publics pour tout ce qui concerne la vie de société où les intérêts de chacun - employeurs et employés - doivent être rencontrés.
Un accord n'est pas encore intervenu en la matière. Lors de la réunion intercabinet du 17 avril dernier, les points de vues des différents participants n'ont pas pu être rapprochés. Le dossier est donc momentanément bloqué.
Étant donné l'état d'avancement actuel de ce dossier, il m'est impossible de vous renseigner plus avant sur son contenu. Ce dossier sera soumis dans les prochaines semaines au Cabinet restreint en vue de trouver une solution qui se situera obligatoirement dans une des deux pistes auxquelles j'ai fait allusion.
Ce qui est exclu, et c'est ce qu'ils craignaient, c'est que les auditorats soient englobés dans un ministère public, perdant ainsi leurs fonctions et leur spécificité. Je peux vous assurer qu'il n'entre nullement dans mes intentions ou dans celles du gouvernement de changer quoi que ce soit dans ce domaine.
Mme Clotilde Nyssens (PSC). - La mise au point était importante.
J'apprends qu'un groupe de travail se penche sur ce problème. Je suppose donc que les auditeurs avaient eu vent de ces travaux, d'où, probablement, leurs inquiétudes.
La voie n'est pas encore tracée mais, en tout état de cause, les compétences civiles des auditorats seront maintenues, ce dont je me réjouis.
-L'incident est clos.