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Sénat de Belgique

Annales parlementaires

JEUDI 6 JUILLET 2000 - SÉANCE DE L'APRÈS-MIDI

(Suite)

Question orale de Mme Clotilde Nyssens au ministre de la Justice sur «les premières conclusions après l'utilisation de la procédure de comparution immédiate lors de l'Euro 2000» (n° 2-312)

M. le président. - M. Rik Daems ministre des Télécommunications et des Entreprises et Participations publiques répondra au nom de M. Marc Verwilghen, ministre de la Justice.

Mme Clotilde Nyssens (PSC). - Voici peu, nous avons voté dans la précipitation la loi sur la comparution immédiate. L'Euro 2000 a pris fin le week-end dernier et je m'interroge sur l'efficacité de cette nouvelle procédure qui aurait été utilisée.

La presse a relaté quelques cas d'arrestation d'hooligans. Je voudrais savoir combien d'arrestations ont été opérées au départ de l'Euro 2000 dans le cadre de cette procédure. Cette dernière a-t-elle bien été utilisée ? Certains dossiers sont-ils en fin de procédure en première instance et en appel ? Des condamnations ont-elles été prononcées dans ce cadre ?

Le travail parlementaire a été mené rapidement et tous les parlementaires avaient émis des objections d'ordre technique sur le projet de texte, devenu loi depuis lors. Le ministre envisage-t-il de déposer un projet de loi pour réparer les erreurs techniques de cette législation ?

J'ai entendu dire que certains députés de la Chambre avaient déposé une proposition de loi en ce sens mais celle-ci n'aurait pas suivi son cours. Où en est-on dans l'aménagement de cette législation ?

M. Rik Daems, ministre des Télécommunications et des Entreprises et Participations publiques. - Je vous communique les quelques éléments de réponse qui m'ont été communiqués par le ministre de la Justice.

En fonction du bilan provisoire qui a été dressé, il ressort qu'environ 185 dossiers ont été ouverts par les autorités judiciaires au cours de la compétition Euro 2000.

Il faut également préciser que 63 dossiers concernent des ventes de tickets non autorisées et 23 dossiers, des faits de faux en écritures, notamment dans le domaine de la billetterie.

On constate également que 29 dossiers ont été ouverts pour des faits de dégradations, 9 dossiers pour coups et blessures volontaires, 5 dossiers pour coups et blessures à agents et 8 dossiers pour rébellion. Vous constaterez que le bilan est réduit, ce dont l'on peut se réjouir. L'Euro 2000 a été un succès à cet égard.

Cela n'a pas empêché les autorités judiciaires d'appliquer la procédure de comparution immédiate. Le parquet de Charleroi a engagé trois procédures de comparution immédiate. Dans deux cas, le juge d'instruction a rendu une ordonnance contraire. Le premier dossier concernait des faits de vol d'un ticket avec violence, le second, des faits de rébellion envers les forces de l'ordre.

Dans un troisième dossier relatif à des faits de rébellion envers les forces de l'ordre, la procédure a été engagée dans son intégralité, mais le juge du fond a prononcé l'acquittement estimant que l'infraction n'était établie pas à suffisance. Le parquet a interjeté appel.

Le parquet de Bruxelles a également requis cinq mandats d'arrêt en vue de comparution immédiate dans trois dossiers distincts.

Dans une procédure à l'égard d'un ressortissant anglais pour des faits de coups et blessures à agent, le tribunal a condamné l'intéressé à une peine d'emprisonnement de douze mois assortie d'un sursis partiel. L'intéressé a interjeté appel.

Dans un autre dossier relatif à deux hooligans, le juge d'instruction s'est estimé incompétent au motif qu'il n'y avait pas de charges suffisantes contre les auteurs et les a libérés.

Dans le troisième dossier, le juge d'instruction a estimé que l'enquête n'était pas complète. Le parquet de Bruxelles a requis un mandat d'arrêt classique et les deux inculpés ont été placés sous mandat d'arrêt selon la procédure habituelle.

Il convient d'ajouter que sept procédures de comparution immédiate, version 1994, ont été engagées pour des faits commis à l'occasion de l'Euro 2000. Il faut attendre les décisions définitives des tribunaux.

Le parquet de Louvain a engagé une procédure de comparution immédiate pour port d'arme illégal. Le jugement, condamnant le coupable à six mois d'emprisonnement, est intervenu le 28 juin 2000. Il s'agit de faits commis pendant la période de l'Euro 2000 mais la relation avec la compétition apparaît incertaine.

Enfin, dans le ressort de la Cour d'appel de Gand, quatre procédures de comparution immédiate ont été engagées dans deux dossiers concernant des vols avec violence et des vols simples. Dans le premier dossier, les auteurs ont été condamnés à six mois d'emprisonnement avec sursis pour ce qui dépasse la détention provisoire de sept jours. Dans le deuxième dossier, le premier auteur a été condamné à trois mois d'emprisonnement avec sursis pour ce qui excède la détention provisoire et le second auteur a été condamné à trois mois d'emprisonnement effectif, compte tenu d'antécédents spécifiques. Ces dossiers sont en relation avec l'organisation des matches à Bruges lors de l'Euro 2000.

Le ministre de la Justice tire de ce bilan la conclusion que la procédure de comparution immédiate a été utilisée au cours de l'Euro 2000 et qu'il n'y a donc pas de difficultés insurmontables à cet égard. La procédure de comparution immédiate n'aboutit pas nécessairement à une répression plus lourde. Le ministère public effectue le choix de la voie répressive la plus appropriée en tenant compte des faits et de la personnalité de l'auteur.

Il faut enfin noter que la procédure de comparution immédiate a aussi été utilisée pour des faits qui ne sont pas en relation avec l'Euro 2000. Ainsi, le tribunal correctionnel de Bruges a condamné un supporter français à six mois de prison et une amende de 100 000 francs pour tentative d'escroquerie au préjudice de l'asbl Marc et Corinne.

La loi « réparatrice » sera élaborée dès lors que nous disposerons des informations nécessaires, compte tenu de l'évaluation de l'application de la loi. Cette évaluation interviendra à la fin de cette année. Le ministre de la Justice a d'ailleurs demandé au service de politique criminelle, dès le 26 avril 2000, de prendre toutes les mesures pour effectuer une évaluation digne de ce nom en collaboration avec le collège des procureurs généraux.

Mme Clotilde Nyssens (PSC). - Je remercie le ministre de sa réponse. Je ne porterai pas de jugement à propos de l'application de la loi car je préfère me réserver pour les discussions parlementaires qui auront lieu à la fin de l'année. Je noterai simplement, sans états d'âme, que cette procédure a été appliquée trois fois à Charleroi, cinq fois à Bruxelles, une fois à Louvain et quatre fois à Gand. Je ne finis donc pas de m'étonner du fait que le parlement ait été amené à voter cette loi au pas de charge.